Percival Everett

Effacement :

Un roman qui parle de préjugés et d’a priori. Le piège, dans ce cas, est de ne pas tomber soi-même dans ce travers. Everett ne l’évite pas totalement mais s’en tire honorablement.

Un écrivain noir, qui vend peu et enseigne par obligation financière, écoeuré par un roman, best-seller de médiocre qualité et rempli de clichés, narrant la vie des noirs dans le « ghetto », décide d’écrire une parodie de ce type de roman en quelques heures et le présente, en gardant l’anonymat, à des éditeurs ; ceci sans aucun commentaire, ni précision.
Le livre obtient un succès foudroyant et lui rapporte beaucoup d’argent…
Pendant ce temps, sa mère, atteint d’Alzheimer, se meurt et il se découvre une famille parallèle…
Effacement montre la déambulation de notre héros de son point de vue, entre colère, résignation, pensées, vie familiale ou sentimentale…le succès efface l’être semble nous dire l’auteur…qui, publiant, recherche lui-même la célébrité…paradoxe, quand tu nous tiens…

Contrairement à Marie, je n’ai pas souvent ri, c’est un roman triste et pessimiste sur la nature humaine. Les personnages, y compris notre héros, ressemblent à des fétus de paille un soir de tempête.
La narration est intéressante, un enchevêtrement entre pensées, événements et cheminement des décisions…nous suivons le personnage Ellison, perdu dans les méandres de sa vie au jour le jour.
Un bon livre qui n’évite pas ce qu’il condamne…à moins qu’il ne soit lui-même une parodie…

Blessés aura ma faveur pour la lecture de Novembre.

Un petit extrait de Effacement.

Mon journal est une affaire privée, mais dans l'ignorance du moment où je mourrai, et n'étant pas disposé, même si c'est regrettable, à considérer sérieusement l'autodestruction, ces pages tomberont sous d'autres yeux, j'en ai peur. Cependant, puisque je serai mort, je ne devrai pas me soucier de savoir si elles seront lues, par qui ou quand. Je m'appelle Thelonious Elison. Et je suis romancier. Cet aveu ne m'afflige qu'à l'idée que l'on vienne à lire cette histoire, ayant toujours été moi-même rebuté par tout récit dont le personnage principal est écrivain. J'ai donc résolu de revendiquer une autre identité, du moins de m'ajouter le titre de fils, frère, pêcheur, amateur d'art, menuisier. Choisissons la dernière activité, bien manuelle, ne serait-ce que pour la honte qu'elle causa à ma mère, qui des années durant s'entêta à appeler ma camionnette une familiale.
Je suis Thelonious Ellison. Appelez-moi Monk.

Effacement de Percival Everett

La dernière fois j'ai vraiment hésité à en prendre un autre, j'ai vraiment aimé Désert Américain, mais vos commentaires me donnent l'impression que ses autres livres sont très loin de cet univers ironique, un peu décalé et presque naïf parfois qui m'avait plu...

Peut-être... Effacement ?? Marie a rit déjà en le lisant...

Oui, j'ai ri!

Citation :

Contrairement à Marie, je n’ai pas souvent ri, c’est un roman triste et pessimiste sur la nature humaine.

sousmarin
Ben oui! Mais si on ne peut plus rire de la nature humaine, où va-t-on...

Désert américain

J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman, le premier que je lis de cet auteur.
L'histoire de ce décapité qui revient à la vie est vraiment désopilante. Mais au delà du coté humoristique de cette résurrection, la critique de la société américaine est bien présente et certains de ces aspects font froid dans le dos. Une très belle découverte grâce aux auteurs du mois

Jade a écrit:

Une très belle découverte grâce aux auteurs du mois

voilà ce qui me réconforte pour nos auteurs du mois..

Je viens d'acquérir son nouveau roman Glyphe. D'ici quelques temps (assez court je pense), je m'y plongerai. Mais en avant, j'ai promis une lecture à Aériale (voir le café littéraire)...

Malorie a écrit:

Je viens d'acquérir son nouveau roman Glyphe. D'ici quelques temps (assez court je pense), je m'y plongerai. Mais en avant, j'ai promis une lecture à Aériale (voir le café littéraire)...

Glyphe m'a fait de l'oeil, j'ai hate d'avoir ton commentaire Malorie.

Malorie a écrit:

Je viens d'acquérir son nouveau roman Glyphe. D'ici quelques temps (assez court je pense), je m'y plongerai. Mais en avant, j'ai promis une lecture à Aériale (voir le café littéraire)...

Ca c'est sympa Malorie
J'attends donc (un peu inquiète quant à ton avis final, comme toujours lorsque l'on parle trop de quelqu'un!) ta première lecture, mais Glyphe m'intéresse aussi...

Donc je vais suiivre ta trace ces jours -ci...

Effacement

C'est un livre très riche, en fait. Plusieurs thèmes. La famille et l'histoire familiale de chacun, la cellule familiale, l'éloignement, le constat de la distance qui s'est établie et la difficulté et l'impossibilité de revenir en arrière. Histoire qui se dissout au rythme de l'évolution de la maladie de la mère. Avec ses allers et ses retours, les souvenirs qui ressurgissent et la mémoire qui s'efface. C'est à la fois triste et lucide, très tendre aussi. Et parfois drôle et plus léger. Mais c'est inéluctable et sans appel comme un chèque que l'on tend à une inconnue pour solde de tout compte.

Et puis la satire. L'écrivain qui dépeint son milieu. Drôle, cruel. Critique !
Everett en profite pour égratigner le racisme établi, le racisme qui s'ignore et les effets pervers du racisme. C'est carricatural mais assez génial. Le personnage principal flirte dangereusement avec la schizophrènie en s'inventant un pseudo pour un roman à fric. Et cela devient très complexe car les clichés sociaux traditionnellement bien établis homme blanc riche et accessoirement cultivé/ homme noir pauvre et forcément inculte sont bouleversés. J'espère ne pas faire du racisme primaire en écrivant ces lignes. Je ne sais plus où j'en suis

Et l'homme. Eh bien, il est seul. Et il perd toutes ses illusions. Illusions familiales, illusions artistiques sans doute et illusions tout court. Mais ça semble se terminer sur un grand éclat de rire. Du moins, m'a-t-il semblé.

Blessés :

Le résumé du livre existant dans les posts précédents, je passe directement à la critique.
L’auteur nous confirme sa vision pessimiste de l’humanité où chaque « communauté » se replie sur elle-même face à l’intolérance ; humanité où règne encore la loi du fusil et de la légitime violence.

Son personnage principal est un peu trop « honnête » pour être vrai mais il n’en reste pas moins attachant. Le style est fluide et sans temps mort, l’environnement hostile mais très beau rajoute à la tension de l’histoire.
Par contre, la fiancée du héros reste dans l’ombre et la relation est à peine esquissée.


Un bon livre, peut être un peu trop caricatural mais efficace dans sa démonstration et agréable à lire.

En fait, j'ai surtout retenu le côté

Citation :

Vie banale comme on doit en connaître 40

.

Mais j'ai bien aimé qu'il parte n'importe où et n'importe comment, avec des trucs archi caricaturaux mais qui rehaussent la banalité du tout (c'est très très clair dans ma tête). Et puis, finalement j'en lis peu des livres où ça part vraiment dans du n'importe quoi, et je trouvais que le côté quête mystique improbable passait bien.
Et je pense que ça m'a bien plu, pour une fois, de ne pas me faire embarquer dans une histoire de vie de tous les jours, tout simplement. Mais c'est hyper vrai que c'est dans cette partie du quotidien qu'Everett a été le plus accrocheur (ça aurait commencé avec des délires comme la secte ou le truc d'armée, j'aurais pas franchit les 50 pages).

Faudrait que j'en lise un autre quand même, pour voir (surtout que ça a l'air bien différent d'un livre à l'autre)