La métamorphose du Japon après la guerre. Photographies 1945 - 1965Cet après-midi j'ai visité une exposition de photographies du quotidien japonais entre 1945 et 1964 qui complète parfaitement ma dernière lecture (La Marée noire de Yasushi Inoue, écrit en 1950).
Au lendemain de la guerre la photographie a joué un grand rôle pour faire prendre au Japon une nouvelle identité nationale. Des photographes ont accompagné cette renaissance depuis le choc des deux bombardements atomiques aux jeux olympiques de Tokio en 1964.
L'exposition est précédée par un livre
Japan: A Self-Portrait. Photographs 1945-1964.
L'exposition commence par une courte rétrospetive de photographies d'explosions atomiques expérimentales prises par les services de l'armée américaine.
Ce n'est qu'ensuite que les photographies d'auteurs japonais montrent la société japonaise qui s'est relevé de ces cendres. Les premières prises montrent des ruines, des enfants orphelins vivant dans la rue, un prisonnier de guerre qui ne retrouve que des champs de pierres à la place de sa maison de famille.
Une photo qui montre les Japonais fasant la queue pour leur ravitaillement m'a impressionné par, au premier plan, la figure d'un homme habillé en Charlot qui essaie d'égayer quelques passants. Ce réalisme de l'immédiat après-guerre est aussi connu en Europe mais prend ici une tournure pittoyable, misérable.
La modernisation de la société japonaise, c'est son américanisation, e.g. les liaisons entre des marines américains et des jeunes japonaises, la police militaire qui fait office d'agent de la circulation et bientôt l'arrivée des produits de consommation, the American Way of Life, du business, du cinéma. Habillée d'un kimono ou portant une large jupe occidentale, le rouge à lèvres est bien porté par la jeune Japonaise des années 1950.
Pendant ce temps les photographes recherchent en province les survivances d'archaismes, de la vieille culture milénaire comme le travail dans les rizières ou le bain commun de trois douzaines d'hommes et de femmes dans un baquet qui n'en prendrait pas une personne de plus.
Au lendemain de la guerre le photographe japonais utilisait sa caméra pour un travail objectif, pour juste représenter la société autour de lui. Au milieu des années 1960 la photographie exprime bien des nuances subjectives de la civilisation japonaise.
Jusqu'alors la subjectivité fut inhabituelle au Japon ; traditionellement le Japonais faisait partie d'un collectif, d'un clan, d'une entreprise. Ce changement mental de la société japonaise se retrouve parfaitement dans cette exposition et dans le livre.