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| Pascal Ruffenach | |
| | Auteur | Message |
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Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Pascal Ruffenach Mar 14 Aoû 2012 - 19:39 | |
| Pascal Ruffenach - Citation :
- Pascal Ruffenach, Directeur délégué des publics jeunesse du groupe Bayard, vient d’être nommé président du Syndicat de la presse des jeunes. Il succède à Georges Sanerot, président du Directoire de Bayard, qui assurait cette fonction depuis 2006. Pascal Ruffenach débute sa carrière en 1982 en tant que professeur de philosophie, avant de devenir planner stratégique chez Publicis en 1988. Il entre à Bayard en 1992 au poste de Directeur de la rédaction Enfance, puis directeur du pôle Enfance et Petite enfance. En 1997, il est nommé directeur du département Culture et religion, puis Directeur Amérique de Bayard en 2002. En 2005, il devient directeur du département Enfance-Jeunesse- Famille, puis Directeur délégué des publics jeunesse du groupe Bayard, fonction qu’il occupe à ce jour. Le Syndicat de la presse des jeunes, constitué en 1954, a pour mission l’étude et la défense des intérêts professionnels, économiques, industriels, commerciaux et moraux des éditeurs adhérents, et les représente auprès des pouvoirs publics. Il est membre associé du Syndicat professionnel de la presse magazine et d’opinion SPPMO. Les éditeurs regroupés au sein du Syndicat de la presse des jeunes diffusent plus de 60 millions d’exemplaires par an.
L'hôpital maritimeL'hôpital maritime est un premier roman prometteur qui aborde le sujet de la fin de vie de façon délicate et lumineuse à travers une prose qui n'est pas sans évoquer l'atmosphère des "Vagues" de Virginia Woolf. Comparaison qui pourrait être écrasante mais lorsque je suis sorti de ce livre j'étais dans un état étrange et flottant, à la fois apaisé et rêveur. Il exerce une sorte d'emprise mystérieuse et magique grâce à une écriture sensorielle et presque onirique très raffinée. Le texte est relativement court et constitué de brèves séquences qui peuvent prendre pratiquement la forme d'un Haïku ou au contraire développer le flux plus important de quelques bribes de réminiscences. Un homme est alité dans un hôpital maritime comme il en existe sur le littoral du Nord de la France. Sa fenêtre donne sur la mer et sa conscience s'éveille et s'éteint sous l'influence à la fois du mouvement des vagues et de la marée puis de la morphine qu'il reçoit pour l'aider à supporter la douleur. Il prend conscience des sensations corporelles et du contact de la main de l'infirmière qui lui prodigue des soins patients. Il s'évade par instants à travers quelques souvenirs. On a le sentiment peu à peu d'une sorte de dévidement de la pensée et des émotions. Les souvenirs, les douleurs se dissolvent peu à peu pour générer un bain amniotique apaisant. Comme si la mer pénétrait peu à peu sa conscience et fusionnait avec elle. Il y a un côté Oncle Boonmee dans ce détachement du monde qui est en même temps une communion avec les éléments et les scintillements de la lumière comme autant de traces fantomatiques des vies antérieures et des souvenirs. Comme une forme de renaissance aussi finalement. C'est très beau et je ne m'attendais pas à un texte aussi subtil. Ma chambre ressemble à celle de mon enfance lorsque, de ma fenêtre, je voyais les autres enfants jouer. Le temps passait hors de moi, dans un lieu où je n'étais pas invité. J'assistais à cette vie qui avançait, sur le bord de laquelle je restais. Je n'étais pas en exil mais nulle part. Habitant suspendu du temps. La mer va tout rendre mouvant et agité. Ma chambre, le temps de la marée montante, deviendra un lieu hors du monde, hors de tout, et moi un spectateur déchiré. Le temps me manque. A chaque instant. Je voudrais pouvoir me raconter ma vie dans un seul souffle. Sans m'arrêter jamais. En oubliant ce corps qu'il faut nourrir, soigner, laver, entourer de soins comme celui d'un enfant qui vient de naître.
Dernière édition par Marko le Mar 14 Aoû 2012 - 19:56, édité 1 fois | |
| | | mimi54 Zen littéraire
Messages : 6043 Inscription le : 02/05/2010
| Sujet: Re: Pascal Ruffenach Mar 14 Aoû 2012 - 19:55 | |
| - Citation :
- « J’ai oublié qu’une main peut être encore plus large qu’un paysage. Elle extrait la solitude de mon corps. La main de la soignante est la main de tous. »
- Citation :
- « Je ne me souviens plus des visages ni des paroles mais des mains qui ont soulevé mon corps. »
Il est situé en bord de mer, il n’est en rien un hôtel (et pourtant, j’ai à de nombreuses reprises fait le lapsus en voulant parler du livre), il s’agit d’un hôpital, où l’on vient pour mourir ; mais il se dégage de cet endroit une impression de grande sérénité, un climat d’accomplissement, comme une idée de dernière étape avant le grand paradis. L’homme qui s’exprime va mourir, il le sait, et, s’est dépouillé de tout le superflu pour ne retenir que l’essentiel et en profiter pleinement. Tous ses sens sont en éveil, et, au moyen de ses derniers, se livre au lecteur avec à la fois la pudeur de l’homme blessé dans sa chair, et la totale confiance de celui qui n’a plus rien à perdre. Comme notre personnage, l’auteur, s’est aussi délesté de l’essentiel. Nous n’avons aucun repère temporel ni spatial ; nous ne savons rien du personnage, de sa maladie, du personnel qui l’accompagne nuit et jour dans son voyage. Tout au plus savons- nous que c’est la soignante ; soignante dont on mesure la place prépondérante pour lui. Le langage est ici prépondérant, très imagé. Les phrases se font courtes ; parfois sans verbe. Tous les sens sont exploités, et en particulier celui du toucher. Les sens ne sont-ils pas ce qui reste à l’humain quand le physique s’en est allé ? Par de courts textes, notre homme laisse aller ses pensées, ses impressions, sa perception des choses, et des lieux avec une certaine lumière, un détachement qui ne laisse pas indifférent. Pascal Ruffenach aura évité toute dramatisation, et surtout tout jugement, et pousse sans aucun doute à repenser la prise en charge de la fin de vie. Une question que je me suis posé : est-ce une utopie de l’auteur, ou bien l’expression d’un vécu ? Merci Marko de m'avoir tentée avec ce livre | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Pascal Ruffenach Mar 14 Aoû 2012 - 20:01 | |
| Je viens de voir qu'il s'agirait d'un 3e roman en fait... Je ne sais pas si on peut trouver les précédents. | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Pascal Ruffenach Mar 14 Aoû 2012 - 20:21 | |
| Autre extrait:
Le soleil commence à grimper dans le ciel. Mon corps, si froid, se réchauffe. La mer se remplit d'étincelles. Sur la plage, la marée recouvre les flaques. Le bruit sourd des vaguelettes arrive jusqu'à nous. Des baigneurs étendent leurs serviettes sur le sable. Ils courent en criant et se jettent à l'eau. Après quelques mouvements, on les entend rire entre eux. J'ai déjà vu. J'ai déjà entendu ces cris de baigneurs. J'ai déjà contemplé cette mer scintillante. J'en suis certain, j'ai marché à l'aube sur cette plage de début du monde. J'étais, je m'en souviens, vivant parmi les choses vivantes. Cette vie d'avant, posée en moi avec la légèreté d'une mouette, rien n'arrive à la faire remonter à la surface. Je m'efforce de ne pas y penser, de laisser agir lentement le cours profond qui traverse mon corps. Rien n'y fait. L'eau de la mer, le sable de la plage, le soleil qui irradie l'horizon assemblent les digues qui retiennent ma mémoire. Soudain, les retenues cèdent laissant place à un torrent. Je ne suis rien. Rien qu'un lit raviné et traversé par la crue. | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Pascal Ruffenach Mar 14 Aoû 2012 - 21:08 | |
| J'ai oublié de préciser que je l'ai découvert grâce au critique Jean-Claude Raspiengeas du Masque et la plume. Il a aussi une excellente presse. Et ça me semble très mérité. Une critique du magazine La Croix qui me semble bien lui rendre justice: - Citation :
- Un homme va mourir, il le sait. Nous aussi, dès la première page. Le scénario est écrit, pas de surprise à attendre. Pas de rebondissements romanesques à escompter. C’est une question de temps. De combien de temps ? Nul ne le sait, nul ne le calcule. Ce n’est pas un problème d’arithmétique que la vie lorsqu’elle va vers sa fin ! Car il n’y a plus de temps. Ni long, ni court. Un temps suspendu, vague, posé sur le terme d’une vie comme la mer est posée sur et contre la terre humaine, avec les allées et venues des marées, les falaises fouaillées, le sable qui se recouvre puis se découvre, les algues qui apparaissent puis disparaissent. Un paysage aléatoire, toujours recommencé. Le sable qui coule entre les doigts. La plage où les corps s’enfouissent. Et le soleil, parfois, qui réchauffe sans illusion.
Nous sommes, le titre du livre de Pascal Ruffenach le dit clairement, dans un hôpital du bout de la terre, au bord de la Manche, là où les phases terminales correspondent, dans une lutte inévitable, à cette lisière de l’eau et de la terre ferme, frontière de l’existence et de l’oubli. Mais quelle existence ? L’homme qui soliloque (on n’ose dire le «héros» de cette histoire qui n’en est pas une) ne se souvient que de très peu de choses. Ni âge, ni statut, ni ancien métier, ni famille (qui sont ces gens qui viennent le voir dans sa chambre ?), pas même un nom ou un prénom à quoi nous raccrocher. C’est un être qui s’évapore et se parle avant de partir. Sans confusion, avec une sorte de sérénité sans justification ni théorie.
Pas un pur esprit. Pas du tout. Un corps très matériel, très présent, mais qui a perdu toute forme d’autonomie, de quant à soi et d’orgueil. On le prend, le saisit, le tourne et le retourne comme on fait des bébés sur la table à langer. Jusqu’au plus intime de ce corps défait et souffrant (la pompe à morphine est là qui aide à supporter la foudre), on le traite avec cette humanité sobre et ferme que chacun peut constater quand il séjourne à l’hôpital.
Plus de pudeur, pas de vanité non plus, rares paroles, gentilles, caresses d’une soignante (second «personnage» de cette histoire), qui va un peu plus loin que l’imposerait la seule rigueur professionnelle. Mais ses caresses sans conséquences ou celles qu’elle autorise sont des menus cadeaux. Pour elle, pour lui.
Le livre de Pascal Ruffenach est une petite merveille de sensibilité, de netteté d’écriture, de profondeur et de progression. Le ressenti des agonisants, nul ne peut le décrire : il faudrait en être revenu pour cela. Mais Pascal Ruffenach nous donne, grâce à son écriture sans pathos, sans proférations excessives (à quoi pourtant un monologue de fin de vie pourrait tendre), une sorte de méditation anonyme sur un fait universel : la mortalité du corps et la lutte de l’âme pour en sortir dans les meilleures conditions. Car au bout de cette lutte perdante, on devine que la mémoire vacillante des vivants, le gouffre de l’oubli qui tout engloutit, n’empêcheront pas des retrouvailles. Nul ne sait quand, ni où, ni comment. Peut-être au sein d’une mer-mère, avec ses vagues caressantes comme les mains d’une femme et douces comme le sein d’une fille.
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| | | mimi54 Zen littéraire
Messages : 6043 Inscription le : 02/05/2010
| Sujet: Re: Pascal Ruffenach Mar 14 Aoû 2012 - 21:12 | |
| Je n'ai pas vu passer d'avis à propos de ce livre, il y eût été dommage de passer à côté | |
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| Sujet: Re: Pascal Ruffenach | |
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| | | | Pascal Ruffenach | |
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