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| Russell Banks | |
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Auteur | Message |
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Invité Invité
| Sujet: Re: Russell Banks Dim 9 Mar 2008 - 13:22 | |
| Perdu au fond de ma PAL (et complètement oublié ) j'ai retrouvé Rule of the Bone (Sous le règne de Bone). Vu votre enthousiasme pour cet auteur ,que je ne connais pas encore, je le fais donc avancer dans la file d'attente...
Dernière édition par Nezumi le Dim 9 Mar 2008 - 15:21, édité 1 fois |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Russell Banks Dim 9 Mar 2008 - 15:20 | |
| Très bonne idée Nezumi ! Russell Banks était un des invités d'honneur de la foire du livre de Bruxelles. Je vais également vous recopier certains articles que le journal Le Soir lui a consacré ce we (je ne donne pas le lien dans la mesure où celui-ci disparaitra dans quelques semaines). Il s'exprime notamment sur la journée de la femme et la situation du Libéria, pays qui le touche beaucoup et que nous connaissons bien suite à la lecture de son excellent roman American Darling. - Citation :
- Petit diamant à l'oreille gauche, regard attentif, toison blanche coupée court : Russell Banks est un homme tranquille, avec une petite touche rock and roll. Il était, vendredi matin, très attendu à la Foire du Livre de Bruxelles, dont il est l'un des invités d'honneur, et particulièrement sur le stand du Soir où l'écrivain américain a accepté de participer, en public, à notre réunion de rédaction du matin.
Simplicité, humour et grande humanité non dépourvue d'une certaine férocité : l'homme séduit, sans esbroufe et nous écoute dérouler avec intérêt le menu de notre journal pour ce samedi.
Le Temps Fort, consacré, Journée de la femme oblige, à la campagne « Women are heroes » lancée par Médecins sans frontières, avec la complicité de JR, ce jeune photographe français qui a ramené d'Afrique et notamment du Liberia de superbes photos, joyeuses et positives, de ces héroïnes du quotidien, le touche particulièrement, alors que vient de sortir en poche un de ses tout grands romans, American Darling, qui se passe durant les années les plus noires de la guerre au Liberia.
« Oui, les femmes sont des héros dans des pays comme le Liberia, le Darfour, le Congo ou le Kenya, si l'on suit l'actualité de ces dernières semaines, approuve-t-il. On peut d'ailleurs inclure dans cette liste les femmes d'Amérique du Sud, des Caraïbes, de Haïti. Car il y a une image, sorte de parallèle continu, qui associe les femmes et la guerre. C'est l'image d'une femme qui marche lentement dans des gravats, une fois la guerre terminée, à la recherche du corps de son mari, de ses enfants perdus, de son père. J'ai cette image gravée en tête et elle me revient dès qu'on parle d'une guerre. »
Cette image, Russell Banks l'a admirablement exprimée dans American Darling ». Extrait : « Si, à l'époque, j'avais perçu les vraies raisons qui me poussaient à m'en aller, je ne me serais pas retrouvée à me conduire comme le font les femmes depuis des temps immémoriaux : je ne serais pas devenue une de ces épouses et mères qui, endeuillées, marchent parmi les décombres et la désolation laissés par des hommes et de jeunes garçons qui n'ont cessé de s'entre-tuer. Je ne serais pas devenue une de ces veuves qui, telle une femme de l'Antiquité grecque, cherche en hurlant de douleur le corps de son mari tué pour l'enterrer selon les rites. Je ne serais pas devenue une mère noyée de chagrin demandant partout où sont passés ses fils perdus pour que leurs fureurs puissent être calmées, leurs peurs apaisées, leurs blessures nettoyées et pansées ».
Russell Banks a en main plusieurs petites photos prises par JR. « Vous m'avez donné ces photos de regards qui sont partout dans votre journal de samedi. Il s'agit pour moi des photos les plus fortes que j'ai vues à ce jour. Pas seulement parce que je vois les yeux de ces femmes mais parce que je m'imagine ce que leurs yeux à elles ont vu… »
Nous publions aussi un reportage sur le Liberia, enfin apaisé, dirigé par une présidente, Ellen Johnson Sirleaf, mais où les citoyens attendent avec impatience les « dividendes de la paix », des améliorations dans leur vie quotidienne. Y aurait-il, c'est horrible à imaginer, une fatalité liée à l'Afrique ?
« Il n'y a pas nécessairement de fatalité africaine, réplique Russell Banks. Prenons le Liberia comme exemple. Après la conclusion des hostilités, une femme a été élue – très éduquée, honnête. En termes de leadership, c'est un signe très positif. Cette élection a d'ailleurs fait naître un grand espoir dans ce pays et dans de nombreux pays d'Afrique. Le problème, c'est que cette nouvelle présidente arrive au pouvoir après que le Liberia a été ravagé par des siècles de corruption et de pillage, et des décennies de guerre civile, d'atrocités. Elle est devenue la présidente d'une ruine. De plus, elle doit gouverner avec des hommes, à différents niveaux de pouvoir et notamment au parlement, qui ont eux-mêmes détruit leur pays. Elle a donc besoin d'un énorme soutien politique, financier, technique des pays extérieurs – et notamment des Etats-Unis, qui furent au Liberia la puissance colonisatrice. Il y a en effet aux USA un mythe qui veut que ce pays n'ait jamais eu de colonies. C'est faux. Le Liberia a été créé pour des raisons raciales et économiques par les Etats-Unis au XIXe siècle. Des entreprises comme Firestone ont exploité le Liberia et ses travailleurs pendant des siècles. Il y a deux semaines, le président Bush, en tournée africaine, s'est arrêté quelques heures à peine au Liberia, juste le temps de poser pour quelques photos. Le grand problème du Liberia, c'est qu'il y a un énorme fossé entre les responsabilités qu'ont les Etats-Unis vis-à-vis du Liberia et ce que les USA lui fournissent comme aide. »
On le sent passionné par les questions politiques, la justice. Écrit-il pour changer le monde ?
« Quand je commence un roman, j'écris pour percer un mystère. Mais après la phase de l'écriture, quand le livre est publié, je suis content lorsqu'il suscite une réponse publique politique. Mais ce n'est pas mon but. Je crois cependant que la littérature peut changer une personne à la fois. J'ai moi-même changé en lisant certains livres. Je suppose que ça vous arrive aussi. Mais quand j'écris, mon but, c'est d'abord de me changer moi… »
Dernière édition par sentinelle le Dim 9 Mar 2008 - 15:27, édité 1 fois |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Russell Banks Dim 9 Mar 2008 - 15:25 | |
| Concernant les adaptations cinématographiques de ses romans : - Citation :
- Banks-Scorsese, le duo gagnant
samedi 08 mars 2008, 09:26
Certes, la prochaine adaptation d’American Darling par Martin Scorsese n’est pas une première en soi puisque deux romans de Russel Banks ont déjà été portés à l’écran et quelques autres sont actuellement en chantier.
En 1997, le réalisateur canadien Atom Egoyan remportait le Grand Prix du festival de Cannes avec l’adaptation pudique et toute en retenue de De beaux lendemains, poignante histoire d’une petite communauté unie dans la douleur face à l’accident d’un bus scolaire et la mort de plusieurs enfants.
En 1998, Affliction, un film basé sur un des romans les plus noirs de Banks, réalisé par le scénariste de Taxi driver, Paul Schrader et sorti l’année précédente aux Etats-Unis, permet à James Coburn de remporter l’Oscar du meilleur acteur en père alcoolique, acariâtre et violent.
Si Russell Banks a également scénarisé, comme d’autres avant lui, le Sur la route de Kerouac à la demande de Francis Ford Coppola, propriétaire des droits du livre, l’écrivain émet des doutes quant à l’aboutissement du projet. « Récemment, j’ai pourtant appris, nous dit Banks, que Walter Salles pourrait le réaliser ».
« Les autres projets sont à des stades de développement différents. Raoul Peck va réaliser pour la chaîne américaine HBO une série autour de Pourfendeur de nuages. Sous le règne de Bone et Continents à la dérive sont aussi en développement. J’ai rencontré Alain Berliner, dont j’avais adoré Ma vie en rose parce qu’il est intéressé par Sous le règne de Bone.
Par contre, c’est bel et bien Martin Scorsese qui s’attaquera à American Darling, avec Cate Blanchett dans le rôle principal. « Je suis en cours d’écriture du deuxième jet du scénario. Quand le livre est sorti aux Etats-Unis, j’ai envoyé un exemplaire du livre à Cate Blanchett, parce que j’étais convaincu qu’elle serait parfaite pour le rôle. Elle était au Maroc en plein tournage de Babel. Deux semaines plus tard, elle m’envoyait un e-mail pour me dire qu’elle avait lu les trente premières pages et qu’elle adorait. » Autant vous dire que je serai au rdv à la sortie ciné
Dernière édition par sentinelle le Dim 9 Mar 2008 - 16:55, édité 1 fois |
| | | Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| | | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Russell Banks Mar 11 Mar 2008 - 18:09 | |
| The Reserve / La Réserve Je ne trouve pas les livres – ce sont les livres qui me trouvent.Et quand un livre avec une telle couverture croise mon chemin, il a la plus grande chance d’attraper mon attention. Pour la décision de lire, une jolie couverture ne suffit naturellement pas – mais la 4e de couverture m’a plus que séduit (je ne vais pas la recopier – je l’ai fait quelque messages plus haut). On entre donc avec Russel Banks cette fois-ci dans un univers qui contient multiples facettes. Il nous présente un lieu recluse des années 30 – un endroit dans les Adirondacks – avec la société américaine de ces années-là : ceux qui en avaient de l’argent, et ceux qui n’en avaient pas. Mais dans ce livre il ne pose pas son objectif exclusivement sur ce fait. Pour moi c’est plutôt les sentiments, entre hommes et femmes, entre maris et femmes, entre infidèles – mais aussi entre parents et enfants. Et je ne sais pas si vous avez des expériences similaires – en tout cas pour moi une lecture (ou disons la direction qu’une lecture peut prendre), dépend parfois d’un mot.. d’une phrase… Concernant ce livre, cette phrase est à la page 34 (version anglaise) They know exactly what they want, and it’s the same as what they need. (Ils savent exactement ce qu’ils veulent et c’est la même chose de ce qu’ils ont besoin) Je me suis demandé si Russel Banks aimait écouter les Rolling Stones – ils ont une chanson avec les lignes : You can’t always get what you want, But if you try sometimes, You just might find, You get what you need.(Tu ne peux pas toujours avoir ce que tu veux, Mais si tu essayes de temps en temps, Tu pourras trouver Que tu reçois ce que t’as besoin) Et donc cette phrase m’a donné la direction de ma lecture de ce livre. Parce que les personnages qu’il nous présentent ont vraiment tous ce qu’ils ont besoin.. en général.. mais le gazon chez le voisin est toujours plus vert, n’est-ce pas ? En plus de cette idée, j’ai aussi bien aimé qu’il a glissé les noms d’auteurs américains de cette époque : John Dos Passos et Ernest Hemmingway – la génération perdu ! Et c’est en fait ce sentiment que la critique dans PAGE des Libraires me confirme. Mais en plus de tout cela (et oui.. c’est un livre avec beaucoup d’aspects) il s’agit aussi de faire le bon choix dans sa vie. Ce n’est pas toujours facile – mais Russel Banks montre assez net où des choix qu’on ne prend pas soi-même ou pas à tout cœur mènent souvent nulle part. Une lecture qui m’a enchantée – et que je conseillerais aussi à tous ceux qui aiment lire en Anglais – il est ‘easy read’. Et puisqu’on est dans les Adirondacks – la région qui est fameux pour ceci : Je vous souhaite une bonne lecture en vous asseyant là dedans | |
| | | Queenie ...
Messages : 22891 Inscription le : 02/02/2007 Age : 44 Localisation : Un peu plus loin.
| Sujet: Re: Russell Banks Mar 11 Mar 2008 - 18:28 | |
| - kenavo a écrit:
- The Reserve / La Réserve
Je ne trouve pas les livres – ce sont les livres qui me trouvent. Et quand un livre avec une telle couverture croise mon chemin, il a la plus grande chance d’attraper mon attention. ben tu nous la montres cette belle ouverture?? bon, si je comprends bien c'est un auteur à rajouter dans ma lal.... j'en peux plus.. moi aussi je vais faire une dépression colinienne ! | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Russell Banks Mar 11 Mar 2008 - 18:38 | |
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| | | Queenie ...
Messages : 22891 Inscription le : 02/02/2007 Age : 44 Localisation : Un peu plus loin.
| Sujet: Re: Russell Banks Mar 11 Mar 2008 - 18:57 | |
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| | | Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| Sujet: Re: Russell Banks Mar 11 Mar 2008 - 19:04 | |
| Evidemment Kenavo l'a déjà fini ...moi je poursuis (milieu du livre a.p.p) mais j'ai du mal à le quitter! C'est aussi la couverture qui m'a aimantée , mais c'est souvent ainsi avec Russell Banks. On sait qu'on ne va pas être déçu, un style que j'aime vraiment beaucoup! Je ne savais pas pour les fauteuils qu'ils venaient de cette région! | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| | | | Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| Sujet: Re: Russell Banks Mer 19 Mar 2008 - 10:35 | |
| La Réserve-Un livre de Russell Banks est toujours pour moi un moment agréable Il nous emporte dans son monde, ici pour une fois celui des nantis, ces riches new-yorkais pris dans la bourrasque de l'histoire, et dont les vies vont aussi basculer... Banks nous décrit le cadre idyllique et encore préservé des grands espaces, juste avant que la guerre n'éclate, l'aspect insouciant des sentiments et des choses, alors que se profilent insidieusement des tragédies familiales dans lesquelles les protagonistes vont être pris au piège, tout comme celles dévastatrices de la grande Histoire et que l'on nomme destin. On y retrouve comme le précise Kenavo, Hemingway et Dos Passos, amis dans le roman du héros principal, et qui ont déjà rejoint les rangs des républicains espagnols. Lui, Jordan Grove est un artiste volontiers aventurier qui se retrouve pris au piège d'une irrésistible attirance face à la personnalité un peu déjantée mais troublante de Vanessa Cole. Un malaise sourd, un peu angoissant s'immisce peu à peu, une tension propre aux moments précédant les déflagrations, mais la chute m'a un peu laissée sur ma faim. J'avoue avoir été moins émue que dans ses précédents romans par ces deux personnages gâtés et égoïstes que représentent Vanessa et Jordan, et je préfère nettement Russell Banks lorsqu'il nous décrit un univers plus âpre et rude. Mais je ne bouderai pas non plus le plaisir que j'ai eue à le lire! Disons que je ne conseillerai pas ce roman à un non habitué de cet auteur, qui reste toutefois un de mes favoris! | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Russell Banks Jeu 20 Mar 2008 - 13:44 | |
| - aériale a écrit:
- J'avoue avoir été moins émue que dans ses précédents romans par ces deux personnages gâtés et égoïstes que représentent Vanessa et Jordan, et je préfère nettement Russell Banks lorsqu'il nous décrit un univers plus âpre et rude.
Mais je ne bouderai pas non plus le plaisir que j'ai eue à le lire! Disons que je ne conseillerai pas ce roman à un non habitué de cet auteur, qui reste toutefois un de mes favoris! Je peux comprendre que ce livre est en fait un 'autre' Russel Banks pour ceux qui le connaissent avec ses romans plus 'âpre et rude' comme tu l'as si bien dit. Je dois dire que je recherche plutôt l'opposé dans des romans. Pas toujours la vie à l'eau de rose - mais un peu le monde qu'il décrit ici. J'ai adoré ses descriptions des relations entre les personnages différents et bien que cela donne parfois un air superficiel - un moment de lecture qui ait produit des images en moi qui sont encore très fortes.. | |
| | | soliman Envolée postale
Messages : 124 Inscription le : 17/02/2008 Age : 56
| Sujet: Russels banks à grande vitesse! Dim 23 Mar 2008 - 20:39 | |
| sousmarin a écrit: Tout le monde connaît « De beaux lendemains » et « Affliction »...
Week end tgv , je suis parti avec en main "De beaux lendemains".Tout le monde me parlait de ce livre INCONTOURNABLE.Arrivée à Marseille,impressions contrastées. Point positif le format du livre est adapté à un trajet Marseille Paris AR( et à mon tempo de lecture!) . Point négatif ; j'ai trouvé le sujet moins fort qu'Affliction. Bon ce n'était qu'une impression personnelle. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Russell Banks Lun 7 Juil 2008 - 19:21 | |
| Pourfendeur de nuages
Lorsqu’une étudiante de Columbia University demande à Owen Brown des informations sur son père, le célèbre abolitionniste américain John Brown, elle ignore encore qu’il mettra plusieurs mois à lui répondre sous forme de lettres-confessions, en débordant largement du cadre biographique à proprement dit. Il aura fallu à Owen Brown que s’écoulent plusieurs décennies avant d’atteindre un âge suffisamment avancé pour oser enfin affronter ses souvenirs.
Pour ce faire, Owen remontera à sa petite enfance où il grandit à l’ombre du patriarche John Brown, puritain et père de famille nombreuse au caractère autoritaire et ombrageux, défenseur de la communauté noire qui passera petit à petit du simple agitateur au fanatique religieux en passant par le terrorisme afin de défendre une noble cause : l’abolition de l’esclavage. Ou comment un père décide de sacrifier sa vie et la vie de ses fils en empruntant la voie sanglante de l’action armée au nom de Dieu et devenir un des martyrs de la cause abolitionniste de l’histoire américaine.
Russel Banks nous plonge dans un récit romancé basé sur des faits réels couvrant la période historique des années 1830-1850 des Etats-Unis, à savoir les années qui précèdent la guerre de Sécession, par l’intermédiaire de la figure charismatique de John Brown, un homme pieux qui recoure au terrorisme pour essayer de venir à bout du fléau de l’Amérique, un homme qui pensait avoir été choisi par Dieu pour recevoir ses consignes afin de combattre l’esclavage de la population noire américaine, un homme qui fut un des précurseurs de la guerre de Sécession.
Le premier tiers du livre reprend le parcours initiatique du troisième fils de John Brown, Owen Brown, enfant issu d’une famille nombreuse, agriculteurs et éleveurs chrétiens, une famille de pionniers comme tant d’autres qui ont dû lutter très jeunes contre les éléments pour survivre dans une nature sauvage et hostile. Cette vie rurale et la dureté du quotidien sont d’ailleurs très bien rendues. Là où j’ai eu beaucoup plus de difficultés se situe dans les introspections du fils Owen lorsque celui-ci, enfant et jeune homme, a du mal à se différencier de la puissante figure paternelle. Il y a pas mal de redites et de longueurs dans cette première partie, suffisamment pour m’avoir donné envie d’abandonner ma lecture en cours de route. Mais heureusement, je n’en ai rien fait ! L’Owen adulte, qui choisit d’épouser la cause de son père, au point de devenir le détonateur des actions armées de ce dernier, se pose moins de questions pour mieux se laisser embarquer dans la violence et l’action terroriste. Bien que non croyant, il perçoit son père à l’image du vieux prophète Abraham, que Dieu mettra à l’épreuve en lui demandant de lui sacrifier son fils. Owen ne comprendra qu’au dernier moment la folie dans laquelle l’a entraîné son père et se sauvera in extremis, non sans éprouver pour le restant de sa vie des remords et de la culpabilité, d’autant plus que plusieurs de ses frères et son père n’y survivront pas, tués et condamnés à mort après leur dernière action d’éclat. Ces lettres-confessions constituent, après sa fuite et les nombreuses années de réclusion qu’il vécut en vivant isolé comme simple berger, un ultime devoir de mémoire pour enfin tourner définitivement la page et mourir l’esprit en paix.
John Brown était-il un saint homme ? Un homme éclairé ? Un précurseur ? Un idéaliste ? Un prophète ? Ou tout simplement un halluciné ? Un terroriste ? Un suicidaire ? Un fou doublé d’un fanatique religieux ? La fin justifie-t-elle les moyens ? L’action terroriste est-elle défendable ? Est-il excusable de tuer et de se sacrifier pour défendre une cause, aussi juste et noble soit-elle ? Difficile de répondre à ces questions, aussi actuelles soient-elles.
Ce qui est certain, c’est qu’il était à la fois un père à la personnalité écrasante à l’ombre duquel son troisième fils, Owen Brown, aura bien du mal à se démarquer et qu’il fut un des premiers blancs abolitionnistes de l’histoire des Etats-Unis. Il sera pendu en 1859 suite à l’insurrection ratée lors de la prise de l’arsenal fédéral de Harpers Ferry en Virginie. Devenu martyr, il demeure jusqu’à nos jours l’un des symboles – toujours controversé à l’heure actuelle - de la lutte pour l’abolition de l’esclavage. Ce long mais grand récit, qui n’évite pas toujours les répétitions et les longueurs, est un roman historique et biographique mais surtout et avant tout la confession d’un homme solitaire qui vécu longtemps pour la cause de son père mais qui refusa l’ultime sacrifice qu’aurait impliquer son exécution finale.
Ce roman pose véritablement question et m’a laissée longtemps songeuse après avoir tourné la dernière page… |
| | | Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| Sujet: Re: Russell Banks Lun 21 Juil 2008 - 18:45 | |
| Affliction -C' est un récit qui trouble, qui nous pénètre peu à peu. L'histoire simple et tragique d'un homme ordinaire dans une ville qui pourrait se situer n'importe où, dans un un coin paumé de l'Amérique profonde, aussi bien qu'ailleurs. Il y a cet univers que Banks connait bien: le froid qui paralyse et rend maussade, le désoeuvrement et les bars...Rien de nouveau, tout se répète à l'infini, et des générations de fils qui reproduisent ce cercle infernal . Affliction est l'histoire de ce combat pour tâcher d'en sortir, et celle de sa défaite. Comment un homme bascule dans une folie ordinaire. C'est sombre mais pas glauque, désespéré mais pas sordide, réaliste mais poétique pourtant... Ce roman m'a fascinée jusqu'à la dernière ligne. On sait que cela finit mal mais on ne sait pas comment et tout l'art de Russell Banks est de nous amener à suivre point par point et jour après jour cette déchéance sans que l'on en soit choqué ou même surpris. Parce que l'auteur est un magicien qui parvient à nous expliquer, nous démontrer l'inexplicable. La descente aux enfers de son personage principal Wade, est l'histoire de tout homme qui ne se supporte plus, parce que les autres lui renvoient une image négative et peu glorifiante de lui-même. Et qui se laisse rattraper par l'échec. - Citation :
- En ce temps là , alors qu'ils étaient tous les deux au lycée, il avait regardé dans les yeux de Lillian et il avait vu sa perspicacité, la merveilleuse complexité de sa perception. Ce qu'il y avait vu aussi c'était le reflet intelligent de ses propres yeux, et pendant un certain temps, il s'était senti lui aussi brillant. Puis au bout de quelques années, ne percevant plus dans les yeux de Lillian le reflet des siens, il avait perdu foi en sa propre intelligence
Bref, j'ai été époustouflée encore une fois par la maîtrise, la finesse d'analyse et la capacité de l'auteur à nous rendre perméable à cette histoire tragique. Je n'ai pas pensé à juger Wade. Parce qu'il est victime aussi, de cette violence et de cette solitude qui pèsent comme une fatalité sur le clan des Whitehouse. Profondément triste mais surtout plein d'empathie, c'est aussi un roman qui nous rend plus humain. J'ai adoré !!! | |
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