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| Roland Giguère | |
| | Auteur | Message |
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jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Roland Giguère Lun 25 Fév 2013 - 9:54 | |
| Poète québécois, Roland Giguère (1929-2003) avait la particularité de dessiner et peinturer dans l'assemblage de son oeuvre somme toute modeste. Il appartenait en outre à la mouvance surréaliste. Son recueil le plus connu est L'âge de la parole. Un de mes professeurs insistait sur Forêt vierge folle et La main au feu complète le portrait. Nous pouvons avoir une bibliographie sélective ici : 2004, Cœur par cœur 1997, Les mines de plomb : poèmes et dessins 1997, Illuminures 1988, Temps et Lieux : poésie et sérigraphie 1981, À l'orée de l'oeil : 50 dessins 1981, 10 cartes postales 1978, Forêt Vierge Folle : poésie 1976, J'imagine 1975, Abcédaire 1973, La main au feu : 1949-1968 1969, La main du bourreau finit toujours par pourrir 1968, Naturellement 1965, L'Âge de la Parole : poèmes 1949-1960 1963, Adorable femme des neiges suivi de l'immobile et l'éphémère 1957, Lieux exemplaires 1957, Le défaut des ruines est d'avoir des habitants 1954, Les armes blanches 1953, Images apprivoisées 1951, Midi perdu 1951, Yeux fixes 1950, Les nuits abat-jour 1950, 3 pas 1949, Faire naître Je vous fais don du poème qui lui est le plus souvent attribué, «La main du bourreau finit toujours par pourrir» : - Citation :
- Grande main qui pèse sur nous
grande main qui nous aplatit contre terre grande main qui nous brise les ailes grande main de plomb chaud grande main de fer rouge
grands ongles qui nous scient les os grands ongles qui nous ouvrent les yeux comme des huîtres grands ongles qui nous cousent les lèvres grands ongles d'étain rouillé grands ongles d'émail brûlé
mais viendront les panaris panaris panaris
la grande main qui nous cloue au sol finira par pourrir les jointures éclateront comme des verres de cristal les ongles tomberont
la grande main pourrira et nous pourrons nous lever pour aller ailleurs. Lors du Printemps érable, le plus grand arbre humain jamais réalisé révélait une main. Cette main faisait signe au gouvernement Charest tombé en décrépitude. Nous pouvons croire qu'elle faisait référence au poème de Roland Giguère. Ainsi, le 22 avril 2012, Jour de la Terre, nous avons eu la preuve qu'il était désormais possible de se référer à un passé porteur de ses oeuvres pionnières.
Dernière édition par jack-hubert bukowski le Dim 10 Mar 2013 - 15:41, édité 1 fois | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Jeu 28 Fév 2013 - 11:19 | |
| Au risque de tourner au ridicule, après tout il le faut à la lecture de certaines oeuvres subversives, Forêt vierge folle est un terrain bien défriché pour lire une poésie assez ample. J'ai arrêté mon choix sur «Viendra le jour». Je vous présente ce poème en version intégrale : - Citation :
- «Viendra le jour»
Il y aura un jour (je vous l'ai dit hier) il y aura un jour qui n'aura pas de matin car il n'aura pas eu non plus de nuit et ceux qui voudront alors dormir n'auront plus leur place parmi les debout on se promènera bras dessus dessous les femmes sans même de dessous et les hommes dessus seront tout à fait nus on oubliera les us les coutumes et les us la terre tournera ou ne tournera plus mais si elle tourne c'est qu'elle tournera rond sans fusils et sans baïonnettes aux canons et l'homme n'aura plus jamais plus à chercher du doigt la couture de son pantalon le temps le beau temps de l'hirondelle reviendra frôler la terre de son aile et on criera dans les rues et les ruelles le nom le nom le nom d'elle la liberté la liberté si belle et près des eaux dans les prés près des bois fleuriront des fleurs que nous ne connaissons pas les bras de mer la mer aux larges bras viendra caresser nos traces de pas sur le sable des plages où se dérouleront d'affreux combats la fleur d'oranger dans la main de l'homme la paix dans les foyers les plus autonomes
//p. 45
et tous les matins un verre de jus de pomme le midi des pommes de terre le soir des coeurs de pomme la main sur le coeur du coeur plein la tête on vivra de jour en jour et de fête en fête dans les maisons de milliers d'alouettes dans les armoires sur toutes les tablettes la plus petite cachée dans la boîte d'allumettes et plus jamais de cet atroce silence qui nous entre dans la peau son brûlant fer de lance il n'y aura plus de lourdes et longues heures d'absence on aura fini de vivre dans les transes les hommes ne mourront plus dans les tranchées on ne pensera plus à assassiner l'humanité ne travaillera plus contre l'humanité et disparaîtra du globe la race des condamnés-nés l'électricien électrocuté le soudeur soudé le mineur miné on mettra le feu à l'eau contaminée on versera de l'eau sur le feu animé où nous avons meurtri nos mains où l'on essayait mais en vain mais en vain de cultiver le raisin pour boire un peu de vin de faire croître l'indispensable arbre à pain ces jardins pour lesquels nous luttions jusqu'à la fin jusqu'à la fin de notre sang et de notre sueur souvenez-vous des noires années de peur où nous passions des nuits à guetter une lueur ah! quel métier que celui de guetteur toutes ces mornes et molles heures qui préparaient en silence nos années de malheur
//p. 46
on avait en ce temps-là le sang à fleur de peau le sang à fleur de terre colorait les roseaux et le rouge peu à peu envahissait le bleu de l'eau on torturait pour le faire parler de pauvres animaux le chien le boeuf la souris l'âne le chameau la gazelle le lièvre l'écureuil l'ours et l'agneau on ne s'entendait plus sur rien et l'homme cherchait ses mots nulle part ailleurs se trouvaient les mots qu'il faut pour apaiser la plaie qui nous rongeait le cerveau on avait depuis longtemps perdu l'habitude de sourire on ne demandait plus qu'à en finir avec ces histoires qui nous faisaient mourir lentement à petit feu sans coup férir car tout finit un jour par finir comme le serpent qui a décidé de ne plus obéir et mord en plein bras de son bourreau de fakir comme aussi nous aurons notre tour le temps de vivre et de faire l'amour avec la récolte des fruits d'un dur labour qui nous attend là-bas dans le détour comme un lit bordé d'un blanc velours ce sera je vous dis le temps des amants et on aura le temps de tuer l'enfance chez l'enfant comme on aura fini de briser les os des innocents avec les chaînes forgées par leurs parents dans la plaine tourneront les moulins à vent au premier jour du premier printemps tandis qu'on aura la joie plein les dents.
24/7/1952
//p. 47 | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Ven 1 Mar 2013 - 9:40 | |
| - Citation :
- «Les mots-flots»
Les mots-flots viennent battre la page blanche où j'écris que l'eau n'est plus l'eau sans les lèvres qui la boivent
les mots-flots couronnant le plus désertique îlot le lit où je te vois nager la nuit et la paupière qui te couvre comme un drap au versant abrupt du matin quand tout vient se fracasser sur la vitre
les mots-flots qui donnent aux ruisseaux cette voix mi-ouatée qu'on leur connaît voix miroitée vois comme moi je te vois moi qui ferme pourtant les yeux sur le plus fragile de tes cheveux moi qui ferme les yeux sur tout pour voir tout en équilibre sur la pointe microscopique du coeur pointe diamantée des dimanches hantés dis à m'enchanter et jusqu'à m'en noyer de ces longs rubans de mots-flots que tu déroules le soir entre tes seins comme si tout un fleuve rampait à tes pieds comme si les feuilles n'avaient pour les bercer d'autre vent que celui de tes cils de soie lactée
les mots-flots toujours les mots-flots sur le sable la mariée toute nue attend la grande main salée de la marée et un seul grain de sable déplacé démasque soudain la montagne de la vie avec ses pics neigeux ses arêtes lancinantes ses monts inconquis ses cimes décimées
un seul grain de sable et ce sont aussitôt des milliers de dunes qui apparaissent puis des déserts sans mirages un sphinx d'ébène et trois cent pyramides humaines mortes de soif
un seul grain de sable et la mariée n'est plus à elle ne s'appartient plus devient mère et se couche en souriant comme un verre renversé perd son eau et les mots-flots envahissent la table la maison le champ le verre se multiplie par sa brisure et le malheur devient transparent semblable au matin qui entre par le coin le plus mince d'un miroir sans tain.
Roland Giguère, L'âge de la parole, 1991, Typo, p. 106-107 | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Sam 2 Mar 2013 - 22:08 | |
| - Citation :
- «Nos yeux s'ouvrent»
Nos yeux s'ouvrent aujourd'hui sur ce qui est nécessaire à l'éclair pour traverser la nuit
nous nous sommes trop longtemps attardés à l'éclair même
l'arbre qui dort rêve à ses racines
la mémoire chante sur la plage noircie.
tiré de Forêt vierge folle | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Dim 3 Mar 2013 - 10:18 | |
| Je ne crois pas que tous un-e et chacun-e par ici ne soit pas déjà passé par cette épreuve de vie. - Citation :
- «Une ligne accuse»
Une lune épineuse se lève sur un monde barbelé. À lueur de terre, il nous est maintenant donné de contempler nos propres fossiles, l'intérieur veineux des labyrinthes humains en totale transparence.
Sur le ruban de nuit s'agite le sismographe des tremblements d'être. Une ligne droite accuse une ligne brisée; une ligne brisée ne se relève plus, courbe dans le malheur; apparaissent alors sur la vitre bleue des couronnes de spectres magnétiques, signes avant-coureurs d'éruptions. Le paratonnerre veille.
Une première secousse plonge dans l'oubli des années mouvementées mais sans crevasse. De mouvement en mouvement, il ne reste bientôt plus qu'une veine de marbre froid cristallisant l'attitude dernière.
Sur le ruban de nuit, une ligne saigne.
Roland Giguère, L'âge de la parole, 1991, Typo, p. 133. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Mar 5 Mar 2013 - 10:19 | |
| Roland Giguère a écrit de belles choses. Dans Forêt vierge folle, il a écrit deux textes qui se renvoient l'un à l'autre : - Citation :
- «J'ai pour mon dire»
J'ai pour mon dire que tout va pour le bleu quand arrive le geai
que le ciel se couvre de plumes au sommet de la nuit
que ta main est leste à l'entrée du fourreau
que l'épée dort au fil du temps rare
que l'arbre se couche avant le vent mauvais
que le muguet n'attend pas le premier mai
que tout ce que je dis est vrai
que ta bouche s'étoile dans ma voix lactée
que tes yeux sont plus beaux qu'onyx obsidienne et agate
que tes seins s'irisent à l'éclair de l'aube
que ton sexe rêve endormi sur sa plage de nacre
que je te regarde comme la perche pêchée
que je te bois entre les roses des sables
que je te froisse par mes mains tremblantes
que je ne te dis pas tout quand je te hante
j'ai pour mon dire que je t'aime au long de nos saisons étales. - Citation :
- «On a beau dire»
On a beau dire la vie c'est le temps qui passe avec son poids de plumes qui volent dans nos oreillers
on a beau dire un instant mais voyez ces lignes qui restent gravées au fronton des champs et le blé qui bat dans les tempes
tous les mots que nous avons lâchés nous reviennent comme des cerfs-volants avec des lettres muettes qui tombent au moindre vent. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Dim 10 Mar 2013 - 15:04 | |
| Roland Giguère était un peintre en plus d'être poète. Nous pouvons ainsi mieux comprendre l'importance des mains dans sa quête et son affiliation aux mouvements surréalistes. Je reprends un motif concernant la main qui peut être intéressant à étudier dans son prolongement et ses diverses perspectives : - Citation :
- Comme la main creuse sa ligne de vie
sur le cuir verni comme la main cherche dans les fibres du poirier le fruit du hasard comme la main trace sur la pierre calcaire un moment de pur désir comme la main glisse sur la soie et laisse l'empreinte infinie du destin
la main sait toujours où elle va dans l'âme blanche du papier
tiré de Coeur par coeur et cité dans Antoine Boisclair, L'école du regard. Poésie et peinture chez Saint-Denys Garneau, Roland Giguère et Robert Melançon, 2009, Fides, p. 251. En outre, il est intéressant de constater que Roland Giguère fut inspiré par Hector de Saint-Denys Garneau au moment d'entreprendre ses premières poésies. Ce fait fut occulté par la suite dans la mesure où les poètes autour de la génération de L'Hexagone animée par Gaston Miron furent tentés de rejeter en bloc ce qui renvoyait à la période de la grande noirceur. Ainsi, Garneau fut l'objet d'un certain reniement chez les poètes de cette génération. Il n'inspirait pas assez à leur image de l'idéal poétique à atteindre mais n'a pas moins eu ses émules comme on l'a vu par la suite. Giguère, donc, a écrit Faire naître en 1949, un recueil de poésie assez méconnu. Nous pouvons lire des extraits du poème «Le jeu pour l'enfant» comme suit : - Citation :
- un enfant en souliers de sommeil
imagine d'inlassables murmures pour couvrir le monde de leurs ailes il a étalé sa mémoire au grand air sur un papier buvard et ses jouets sont autant de mantes religieuses qui prient pour une guérison prochaine
[...]
ses rêves insectes démesurés roulent dans chaque paume un peu de leur vol la chaleur d'un instrument suffisant pour réveiller le ruisseau endormi au fond de son eau on ne lui a jamais rien dit pourtant il connaît par coeur les animaux que l'homme cache sous le revers de ses pas on ne lui a jamais rien écrit pourtant il a laissé sa soif sécher sur le roc pour mieux voir le soleil descendre de son échelle bleu-ciel on ne lui a jamais rien appris
tiré de Faire naître et cité dans Antoine Boisclair, L'école du regard. Poésie et peinture chez Saint-Denys Garneau, Roland Giguère et Robert Melançon, 2009, Fides, p. 206 Le thème de l'enfance reparaît assez souvent dans les thèmes évoqués par Garneau. Il faut aussi insister sur cette impression des pas qui apparaissent à revers des pas en joie dans le poème écrit par Giguère. Garneau est-il l'enfant terrible de la littérature québécoise? Pas vraiment... parlons plus de l'étoile qui a constellé les publications subséquentes. Nelligan faisait plus terrible. Entre Nelligan, Miron et Garneau, vous devinez mon choix naturel... | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Mer 13 Mar 2013 - 7:55 | |
| Je vous écris au sujet de l'anthologie de Fermaille, la revue du mouvement de grève du Printemps érable 2012 qui s'est passé au Québec. Nous pouvons lire des citations d'auteurs divers. Il y a deux citations de Roland Giguère qui furent retenues dans l'anthologie de la grève étudiante. Je vous les écris ici : Introduction de Patrick Tillard et Jasmin Miville-Allard : Un seul reflet multiplie les mirages Que l'on croyait abolis Et tout s'éclaircitRoland Giguère, 1966 Citation introduisant la publication numéro III : Il y aura un jour (je vous l'ai dit hier) Il y aura un jour qui n'aura pas de matin Car il n'y aura pas eu non plus de nuit Et ceux qui voudront alors dormir N'auront plus leur place parmi les deboutRoland Giguère | |
| | | unmotbleu Sage de la littérature
Messages : 1329 Inscription le : 08/03/2013 Age : 65 Localisation : Normandie Rouen
| Sujet: Re: Roland Giguère Mer 13 Mar 2013 - 9:33 | |
| je ne connais pas du tout Roland GIGUERE. que me recommanderais tu comme première approche? tu as l'air de l'aimer beaucoup. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Mer 13 Mar 2013 - 9:58 | |
| @unmotbleu,
Les recueils les plus connus et considérés comme faisant partie du canon (classique de littérature) sont L'âge de la parole (le plus connu et emblématique de la démarche générationnelle de Giguère), Forêt vierge folle et La main au feu. Il y a également d'autres points de départ pour entrer dans l'oeuvre, mais ces trois recueils sont interreliés entre eux, ce qui rend leur lecture croisée d'autant plus agréable pour comprendre le projet poétique giguérien. | |
| | | unmotbleu Sage de la littérature
Messages : 1329 Inscription le : 08/03/2013 Age : 65 Localisation : Normandie Rouen
| Sujet: Re: Roland Giguère Mer 13 Mar 2013 - 10:25 | |
| Merci. allons y pour l'âge de la parole" | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Mer 20 Mar 2013 - 8:12 | |
| Je reprends deux extraits de poèmes de L'âge de la parole, l'un est un extrait et le second, un poème complet. - Citation :
- «Midi perdu»
[...]
et toi TOI tu m'apparaissais de temps à autre quelquefois pas souvent rarement même tu m'apparaissais toujours entre deux cris poussés du fond de l'être tu m'apparaissais entre deux nuits comme un midi drapée de tous les mots que je t'avais dits et cent mille fois répétés
on ne savait plus où donner la tête plusieurs la donnaient au premier venu d'autres la donnaient au lit du fleuve les magiciens travaillaient jour et nuit à en faire disparaître des centaines
et toi TOI je voyais ta chevelure à la dérive tes mains signalaient de trop nombreux écueils
nous avions beaucoup à faire nous avions à espérer pour des milliers d'autres qui n'espéraient plus nous avions trop à faire rire et pleurer à la fois
[...]
Roland Giguère, L'âge de la parole, 1991, TYPO, p. 84-85. - Citation :
- «Paysage dépaysé»
à mes amis peintres
La tempête faisait rage et la neige nous entrait dans la poitrine pleine poitrine couronnée de lancinantes banquises couronnes d'épines enfoncées dans le front des mots d'amour
large tempête à nos yeux dans un monde dépaysé chaque nuit nous arrachait un cri et nous grandissions dans l'agonie lentement nous vieillissions et le paysage vieillissait avec nous - contre nous
le paysage n'était plus le même le paysage était sombre le paysage ne nous allait plus comme un gant n'avait plus les couleurs de notre jeunesse le paysage le beau paysage n'était plus beau il n'y avait plus de ruisseaux plus de fougères plus d'eau il n'y avait plus rien
le paysage était à refaire.
Ibid., p. 110. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Roland Giguère Sam 30 Mar 2013 - 9:55 | |
| Je viens de lire Coeur par coeur. Roland Giguère a surtout travaillé les thèmes de l'amour et de l'écriture - tant poétique qu'artistique. Dans ce recueil, certains poèmes sont encore remarquablement assez longs. Je retiens encore une fois un seul poème - court, celui-là : - Citation :
- «La main au coeur»
Comme la main creuse sa ligne de vie sur le cuivre verni comme la main cherche dans les fibres du poirier le fruit du hasard comme la main trace sur la pierre calcaire un moment de pur désir comme la main glisse sur la soie et laisse l'empreinte infinie du destin
la main sait toujours où elle va dans l'âme blanche du papier
Roland Giguère, Coeur par coeur, 2004, L'Hexagone, p. 20. | |
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| | | | Roland Giguère | |
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