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| Yves Préfontaine | |
| | Auteur | Message |
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jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Yves Préfontaine Mer 27 Fév 2013 - 12:39 | |
| Depuis quand un poète a-t-il besoin de présentations? Yves Préfontaine s'est illustré dans la contrée poétique québécoise au cours de la vingtaine. Nous étions alors en 1954. Il prend part à la génération de l'Hexagone. Il persiste toujours dans cette même contrée de nos jours. À une époque, il a traité de poésie du pays. Nous voyons tout ceci dans Terre d'alerte, une anthologie préparée par Thierry Bissonnette et publiée en 2009. Ceci comprend ses oeuvres entre 1954 et 2008. Sans plus me perdre dans les détails, je vous présente «Le silence l'effacement des signes» dans Le désert, maintenant : - Citation :
- «Le silence l'effacement des signes»
I
Comme ce sentier vers l'astre intérieur où l'on se perd dans les ronces.
Et tout à coup la lumière investit la blessure que l'on croyait mortelle.
Et certes mortelle la blessure.
Mais la lumière toujours plus loin nous fait marcher contre la mort.
II
Je ne sais rien. Je n'ai rien appris malgré les larmes et les travaux aveugles.
Mais j'apprends lentement le goût terrestre et l'ampleur de ce qui reste.
III
Pierres aiguës...
Qui vive?
Là où rien ne se peut sauf le mirage ou connaissance réelle de l'inouï.
J'entends battre mon sang dans la roche froide.
IV
Splendeur des clartés étendues sur ce qui reste de terre à demi hivernée.
Le Nord, le Nord éclate dans l'arbre froidissant. Le Nord éclate dans le sang de lumière qui me crève l'oeil.
V
Je vois aveugle je vois maintenant l'essence des clartés très proches d'un dieu. Je vois comme entre deux astres la giration profonde des courbes et des fables.
Splendeur sans nom.
Tant de lumière se dissout dans mon corps et mes paumes ouvertes frissonnent d'une impossible offrande. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Yves Préfontaine Ven 1 Mar 2013 - 10:01 | |
| Yves Préfontaine a écrit de belles choses. Entre autres, il a écrit «Pays sans parole». Je vous le retranscris ici : - Citation :
- «Pays sans parole»
Une détresse saigne à l'ombre de l'automne Sitôt que murs les fruits se flétrissent
Cette femme ici ne parle plus que de braises dans l'âtre tandis que l'homme assume seul l'intimité du froid et toutes blessures faites au visage de sa terre qu'il s'acharne à semer
Cette femme ici ne parle plus que de mots tandis que l'homme se fane debout les mains ouvertes la poitrine ouverte son corps tout entier accueillant la gerçure énorme d'un pays sans parole
S'endorment toutes racines l'été jonché de cendres si le chant n'éclot de l'écorce même du pays S'éteigne ce peuple naufragé si ne peut croître en joie le germe si ne s'écarte comme grisaille le silence frileux
Ô barque de mes mots Les giboulées te taraudent et le cri n'a plus de glaise où pétrir une parole
Ô barque éventrée de mes fables de verglas dieu s'amoindrit parmi les forêts explosées les villes le froid craque les murs et la haine s'embrase sans armes La patience en nos os bleus comme un couteau de glaçon La haine La saison des poings mûrs | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Yves Préfontaine Dim 3 Mar 2013 - 11:04 | |
| Tout à fait par hasard, j'ai saisi au vol une page du recueil. J'ai pu lire «Dans le cheminement vieilli des genèses» dans Nuaison. J'y ai retrouvé des thèmes familiers et une manière d'aborder la poésie qui ne m'est pas étrangère : - Citation :
- «Dans le cheminement vieilli des genèses»
À Anne Hébert, la plus essentielle.
I
Je crois que je vois la source ou ce qui de la source donne brouillard si le froid touche l'eau
Je vois que je crois - j'ai cru l'instant d'une source proche de ces mots
J'entends bien que le chant n'est pas ici n'est pas d'ici mais qu'ailleurs n'est pas autre part qu'en l'instant où je suis qu'en l'instant multiple et singulier où je suis dans une sorte de source avec ces semblants ces fétus ces balises ou ces naufrages qui me servent de mots je crois
II
Le roc a longtemps réfléchi avant d'engendrer le sol
Le sol se meut glaise pétrie par le langage du germen
Il explose en maintes phrases
Or nous avons appris les figures les visages feuillus les clartés
Ainsi nous connaîtrons le sucre de la plaie après l'aiguille saumâtre jadis tel un sapin de larmes
III
Dans le cheminement vieilli des genèses et des paroles flamboyées géodes sans éclat il n'est plus de croissance plus de pain
et nourrir notre durée n'est pas aisé
IV
S'il fallait encore un crime pour l'homme réduit à la minceur de ses doigts à la maigreur de son regard nous irions saigner le sang même des planètes nous irions dans ces mots demain exhumer les sorcelleries de la première pluie sur la pierre encore chaude
V
Mémoire
Nous connaîtrons le soleil et son incertitude lumineuse
VI
J'affleure du dedans vers l'écorce
Je ne suis qu'un mot tout entier tendu vers la phrase qui se perd se dissout et reprend sa marche sinueuse vers le sens
J'affleure de l'écorce vers ce que je sais du vent
- je veux dire l'espace - - je veux dire quel étrange remuement quel bruit lourd au-delà de ces murs où mes yeux portent leurs torches aveugles - J'affleure et m'effeuille sitôt dans la joie tue de l'herbe
Était-ce l'herbe - je veux dire - était-ce le feu un semblant un rien où j'affleurais comme l'idée que j'ai de l'herbe ou d'affleurer ou d'être l'idée dans l'herbe du mot
Paris, automne 1967 | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Yves Préfontaine Sam 6 Juil 2013 - 10:28 | |
| Yves Préfontaine a écrit quelque chose de beau. J'en ai pris connaissance en lisant une récapitulation d'un colloque sur la poésie. Je vous retranscris ce poème qui reprend une thématique récurrente de la condition québécoise : - Yves Préfontaine, Terre d'alerte, 2009, TYPO/Anthologie, p. 132. a écrit:
- PAYS SANS PAROLE
Une détresse saigne à l'ombre de l'automne Sitôt que mûrs les fruits se flétrissent
Cette femme ici ne parle plus que de braises dans l'âtre tandis que l'homme assume seul l'inimitié du froid et toutes blessures faites au visage de sa terre qu'il s'acharne à semer
Cette femme ici ne parle plus que de mots tandis que l'homme se fane debout les mains ouvertes la poitrine ouverte son corps tout entier accueillant la gerçure énorme d'un pays sans parole | |
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