Fédor Dostoïevski [Russie]

Je suis en train de me poser des questions à propos des livres de Dostoievski.
Je me demande si je ne préfère pas des romans comme L' Eternel mari, Dans mon souterrain... Ou Le Double et meme L' Idiot.
Plutot que les Possédés ou Les Frères Karmazov...
Parce que dans ces deux livres, les personnages me semblent moins autonomes, plus dépendants de l' auteur à qui ils servent de porte paroles de ses convictions politiques et religieuses.
J' espère ne pas choquer Tom Leo...

bix229 a écrit:

Je me demande si je ne préfère pas des romans comme L' Eternel mari, Dans mon souterrain... Ou Le Double et meme L' Idiot.
Plutot que les Possédés ou Les Frères Karmazov...
Parce que dans ces deux livres, les personnages me semblent moins autonomes, plus dépendants de l' auteur à qui ils servent de porte paroles de ses convictions politiques et religieuses.
J' espère ne pas choquer Tom Leo...

Non, tu ne me choques pas si facilement que ça. Je partage ton impression que dans ces deux livres "Les frères Karamazov" et "Les possédés", beaucoup de "thèses" sont véhiculés. Dans un CERTAIN sens cela peut des fois prendre le dessus sur un "roman" tout court, littéraire, etc.

En ce qui me concerne je n'ai pas trop de problèmes avec cela car je suis très intéressé par tous ces débats politiques, philosophiques, réligieuses etc. qu'on trouve régulièrement étalés dans les livres mentionnés. Pour comprendre la Russie du XIXème siècle (et peut-être même celle d'aujourd'hui...?), ses problèmes, ses approches, on y trouve "tout" à volonté. Mais des fois ça peut être un peu lourd pour l'un ou l'autre lecteur.

bix229 a écrit:

Je suis en train de me poser des questions à propos des livres de Dostoievski.
Je me demande si je ne préfère pas des romans comme L' Eternel mari, Dans mon souterrain... Ou Le Double et meme L' Idiot.
Plutot que les Possédés ou Les Frères Karmazov...

On peut trouver Les Possédés un peu excessif, même à l'aune de Dostoievski...

J'ai pour ma part beaucoup de mal à comprendre l'association entre Les possédés et Les frères Karamazov, qui sont très, très différents. Tout au moins pour moi....

Bien entendu, les deux livres sont différents ... Mais l' association est claire et Tom Leo l' a bien vu...
Ces deux livres exposent les débats politiques, philosophiques et religieux qui agitaient la Russie et la position personnelle de Dostoievski dans les deux cas.

Le personnages sont toujours formidables mais ils incarnent des idées,
des convictions, celles de l' auteur, et en tant que tels, je les trouve moins crédibles.

Et ces débats et digressions sont parfois pesants, surtout dans Les Frères Karamazov, meme si, comme le remarque justement Tom Leo, ils
éclairent l' histoire des idées et des évènements en Russie.

On sait aussi que Dostoievski s' était faché avec Tourgueniev, qui affichait
des idées politiques "libérales", disons progressistes, et qu' il avait acquises
en France.
Un peu semblables à celles de Dostoievski à ses débuts, et qui l' avaient
d' ailleurs envoyé en déportation.

bix229 a écrit:

Je suis en train de me poser des questions à propos des livres de Dostoievski.
Je me demande si je ne préfère pas des romans comme L' Eternel mari, Dans mon souterrain... Ou Le Double et même L' Idiot.
Plutot que les Possédés ou Les Frères Karmazov...
Parce que dans ces deux livres, les personnages me semblent moins autonomes, plus dépendants de l' auteur à qui ils servent de porte paroles de ses convictions politiques et religieuses.

en effet, c'est le cas, "Les Possédés" est un oeuvre visionnaire. Dostoievski, après son séjour au baigne,où il a "rencontré" le peuple russe, a compris l'impasse des nihilistes-"socialistes" prônant le matérialisme et athéisme, dans cet oeuvre il décrit avec l'ironie l'étroitesse d'esprit de ces gens , qui prétendaient se battre pour le bien-être du peuple, en étant complétement éloignés de celui-ci, il a compris qu'ils vont mener la Russie droit dans le mur, c'est ce qu'il s'est passé....
En lisant Bulgakov ("Maitre et Marguerite", "Coeur de chien"), on peut trouver des ressemblances entre les nihilistes dostoievskiens et les soviétiques bulkakoviens, ahurissants de bêtise, mais il y a un demi-siècle de décalage entre les deux...
Dostoievski prétendait que sans Dieu russe, sans la spiritualité, le peuple russe n'existera pas....En effet, les communistes de 20ème siècle ont tout fait pour détruire la spiritualité du peuple russe pour finalement remplacer la foi par une idéologie.
On voit aussi l'influence néfaste du nihilisme sur Ivan Karamazov et le drame qui en découle dans "Frères Karamazov".("Mais alors, s'il n'y a pas de Dieu, tout est permis")

Dans le recueil « Les très riches heures de l'humanité » de Stefan Zweig il y a une histoire concernant l’expérience de Dostoïevski des geôles tsariste et la création artistique qui m’a toujours fascinée.

Mon préféré de Dostoïevski est "l'Idiot" pour sa démesure, et ce personnage du prince complètement inadapté à la société qui l'entoure ! Par contre le souci que j'ai avec l'auteur (dans ses autres livres aussi) c'est de m'y retrouver avec les patronymes russes, surtout quand les personnages sont nombreux...

maline a écrit:

Dans le recueil « Les très riches heures de l'humanité » de Stefan Zweig il y a une histoire concernant l’expérience de Dostoïevski des geôles tsariste et la création artistique qui m’a toujours fascinée.

la meilleure chose à faire, c'est lire ses "Souvenirs de la maison des morts", où il raconte son séjour au baigne.

krys a écrit:

Par contre le souci que j'ai avec l'auteur (dans ses autres livres aussi) c'est de m'y retrouver avec les patronymes russes, surtout quand les personnages sont nombreux...

c'est vrai, c'est pas toujours évident....
Dans des livres comme "Les Possédés" où il y a beaucoup de personnages, on s'y perd....
Fais une liste que tu pourras consulter de temps à autre....

azazello a écrit:

Dostoievski, après son séjour au baigne,

azazello a écrit:

la meilleure chose à faire, c'est lire ses "Souvenirs de la maison des morts", où il raconte son séjour au baigne.

Baigne = Bagne?

je sais je chipote mais ça m'intrigue.

Pas taper.

odrey a écrit:

azazello a écrit:

Dostoievski, après son séjour au baigne,

azazello a écrit:

la meilleure chose à faire, c'est lire ses "Souvenirs de la maison des morts", où il raconte son séjour au baigne.

Baigne = Bagne?

je sais je chipote mais ça m'intrigue.

Pas taper.

Oui, c'est ça, le bagne.
Ca a été une expérience fondamentale pour Dostoïevski, ça et le peloton d'exécution dont il a réchappé.
Il y a eu un opéra (de Janacek) qui en a été tiré.

toutes mes excuses, BAGNE, bien sûr!

Citation :

Ca a été une expérience fondamentale pour Dostoïevski, ça et le peloton d'exécution dont il a réchappé.

oui, il raconte cette expérience dans L'Idiot

Dans son numéro de mars, à paraitre, le Magazine Littéraire consacre son dossier à Dostoïevski.

Sydney a écrit:

Dans son numéro de mars, à paraitre, le Magazine Littéraire consacre son dossier à Dostoïevski.

En plus, je suis en plein dans la lecture de Crime et Châtiment, ça tombe bien !

Les frères Karamazoff

De ce livre complexe, qui ne se laisse pas facilement résumer tant il a de facettes, on pourrait parler sans fin… Je ne vais pas essayer de le résumer, ni de l’analyser car ce serait déjà le trahir, mais je vais vous donner ici quelques unes de mes impressions de lecture. Il m’a fallu six mois de décantation avant d’entreprendre d’en parler (je l’ai lu l’été dernier). Comme souvent après un choc, on reste muet et il m’a été d’abord très difficile d’en dire quelque chose tellement une telle lecture laisse de puissantes impressions.

Le message, peut-être le fil conducteur que je vois dans l’Å“uvre, c’est que la seule solution au drame de la vie est une solution d’amour. Dans ce livre, on sent bien que tout homme est libre mais aussi enchaîné par sa nature, ses passions, sa place dans la société et même par ses rêves. Tous les personnages y sont amoureux de la vie et à la fois déchirés par la vie : le passionné et brutal Dimitri, Ivan avec son intelligence critique mais destructrice, le père Karamazoff, bouffon libidineux, Aliocha qui nous enchante par son innocence réaliste, Smerdiakov et ses bassesses.

Si le début du livre peut dérouter, c’est que l’écrivain nous présente l’histoire de cette « brave petite famille » et de chaque personnage en débordant de détails et d’anecdotes qui, parfois, nous font perdre le fil de l’essentiel : qui est qui, dans cette drôle de famille ? Néanmoins, tout au long du livre, on ne peut qu’être sous le charme de nombreuses descriptions. Par exemple, celle d’Aliocha, « une âme éprise de lumière et d’amour », ou bien celle de la vie exemplaire du staretz Zossima, moins russe « éclairé ». L’Å“uvre entière est bien sûr avant tout une méditation sur le Bien et le Mal, qui reflète les tensions du mystique Dostoïevski, « un torturé de Dieu pris dans une tension douloureuse entre les deux pôles de l’extase et de l’anéantissement » (Pierre Assouline)

En effet, il semble qu’une force souterraine obscure possède les Karamazoff et en même temps, ils ont une volonté de vivre à n’importe quel prix. Comme le dit l’avocat général au moment du procès pour parricide de Dimitri, cette famille résume presque tous les éléments caractéristiques de la société russe cultivée de l’époque de l’auteur. Il y a donc à la fois dans ce livre la peinture très attentive d’une époque, d’une culture et d’une âme russe et la description de tout le déploiement possible de l’âme humaine, de ses pires ignominies à ses élans les plus sublimes...
Il y aurait encore tant à dire… par exemple qu'il faut du temps pour lire ce monument de la littérature et plus encore toute une vie pour le comprendre…Il est certain en tout cas, et je rejoins ici certains d’entre vous, que le livre « les Frères Karamazoff » est un des sommets de la création littéraire !

« Je me suis contenté de porter à l’extrême ce que vous ne vous êtes jamais aventuré à pousser ne fût-ce que jusqu’à mi-chemin » Dostoïevski