Adrienn Pàl [Agnes Kocsis]

Moi je n'ai guère d'espoir de le voir il me semble...

Bien peu de gens aurons la possibilité de le voir, malheureusement, Coline. Seulement trois cinéma dans toute la France, et 5 séances dans la semaine. Cela fait mal au coeur.

coline a écrit:

Moi je n'ai guère d'espoir de le voir il me semble...

En DVD. Ou il vous faudrait le même système qu'à Lille. Le majestic propose la "7e séance". Il y a 6 salles mais on peut voter par internet pour un film non programmé. Le film ayant le plus de votes est diffusé une fois. C'était le cas de ce film super initiative !

Adrienn Pal


Un film incontestablement intéressant et à recommander mais comme vous avez dit déjà l'essentiel je vais surtout apporter un petit bémol parce qu'il n'est pas sans défauts.

traversay a écrit:

Plans fixes, scènes courtes, belle photo, dialogues secs, situations absurdes : Agnes Kocsis est une cousine éloignée des cinéastes scandinaves tendance Hamer/Andersson/Kaurismäki.

Effectivement ce film s'inscrit dans cette filiation à laquelle je pourrais ajouter Jacques Tati pour le découpage géométrique des plans et la dimension légèrement décalée et presque futuriste qui cohabite ici avec un univers plus ancré dans une certaine tradition des pays de l'est (délabrement esthétique de l'espace). On pense aussi très fortement à certains plans de Roy Andersson même si la démarche est moins abstraite et surréaliste. La différence de taille à mon sens étant qu'elle n'en a pas la même puissance parce qu'elle tente de mener son récit du côté d'une forme de psychanalyse un peu réductrice et maladroite. Cette idée de "vomir" littéralement son passé et un lien pathologique avec un mari relativement pervers pour s'éveiller à la vie et abandonner son addiction. C'est plutôt naïf et rapide même si le film a aussi une dimension de fable. D'autant plus que l'actrice est totalement inexpressive. C'est nécessaire pour le côté figé et mortuaire de la première partie (Sentinelle en parle très bien) mais on ne sent jamais un éveil ou une vibration chez cette femme même lorsqu'elle se libère. Il n'y aucun climax et son changement n'est suggéré qu'à travers ses choix vestimentaires et ses actes. Elle est trop monolithique. Par contre je trouve bien qu'une femme apporte une certaine sensibilité dans un style de cinéma souvent très conceptuel. Il le reste malgré tout encore un peu. C'est plus théorique que vraiment incarné.

Pour ce qui concerne les strates sociales ça reste en surface. Arabella regrettait le manichéisme riches/pauvres dans le Ken Loach mais ici c'est la même chose... Par contre les lieux traversés sont très bien dessinés et plastiquement intéressants.

Arabella a écrit:

Il y a un ton, une originalité, une humanité dans l'ensemble, une créativité sur le fond et sur la forme qui sortent ce film nettement du lot. Une vraie cinéaste qui a des choses à dire, et qui trouve l'art et la manière de le faire en touchant le spectateur. Un vrai talent à suivre.

Je suis d'accord même si beaucoup de gens sortent de la salle. Je trouve que sur 2h20 le film pourrait se contenter de 1h50 ou 2h. Il y a des répétitions lassantes. Et pourtant je suis habitué aux films qui prennent leur temps.

sentinelle a écrit:

Un film très intéressant, qui aborde des sujets forts comme la fin de vie, l’identité, le passé reconstruit. Un monde froid, très mécanique, dans lequel les bruitages se font la part belle : sonneries, escaliers roulants, métro, percolateurs, défibrillateurs, fermetures automatiques des portes, écrans.

C'est la dimension la plus intéressante. Ce côté fantomatique de l'identité et du souvenir. Chacun reconstruit la réalité à sa façon ou la nie. La façon de boucler le film est très réussie et l'union de toutes ces pulsations en une seule est une très belle fin. D'autant plus qu'il y a une ébauche de partage et de compassion entre ces 2 femmes même si elle demeure timide. Et pour le monde froid, mécanique et les bruitages on se souvient de Tati.

Il y aurait encore plein de choses à raconter car le film est riche et ambitieux. Je l'aime beaucoup mais je ne le place pas aussi haut qu'Arabella. Il a des concurrents plus intéressants à mon sens parmi les auteurs cités plus haut. Roy Andersson notamment est un cinéaste génial. Reste que je suivrai sa filmographie avec beaucoup d'intérêt.

Merci déjà d'avoir pris de temps de faire un post si long et détaillé Marko, et je suis soulagée que tu n'aies pas passé un trop mauvais moment en allant voir ce film si particulier.

En ce qui concerne les préférences des metteurs en scène, cela reste un exercice toujours un peu périlleux, parce que quand même un tant soit peu subjectif, je ne vais pas lancer de débat ici, mais je suggère que nous fassions (je ne sais pas si cela a déjà été fait) un top 10 de nos films préférés de l'année. Ce sera intéressants, et même si cela en dira surtout beaucoup sur nous-même, pourra donner quelques idées de films à voir.

Je comprends ta réserve sur le côté un peu simpliste du mieux être de l'héroïne, de la libération apportée par la rupture avec son compagnon, cela m'a aussi un peu interrogé. Mais finalement pas gênée tant que cela, parce que le film n'est pas complètement réaliste (même si hyper réalistes dans certaines images), un peu décalé et stylisé, conceptuel. Lorsque Piroska bouge un domino, et qu'elle part à la recherche d'Adrienn Pal, et qu'elle est donc moins disponible, et moins à la merci du sadisme de son compagnon, il trouve moins son compte dans la relation et part, avec ce morceau très réussi, de la rupture. Ce qui finalement est bénéfique pour elle, et provoque un mieux être, mais dans une dynamique, pas brutalement, puisque l'enclenchement c'était ses démarches pour retrouver Adrienn. Mais je comprends que l'on puisse ne pas être totalement convaincu, sur le plan psychologique réaliste c'est simpliste, mais je crois que la réalisatrice n'est pas complètement sur ce positionnement. Mais là, c'est un point de vue.

En revanche je n'ai pas été gênée par le côté monolithique et inexpressif du jeu de l'actrice. Parce que même si une dynamique positive s'enclenche, tout ne va pas pour le mieux dans le meilleur des mondes. Comme pour le corps, même si Piroska, ne se gave plus, il faudra un sacré temps pour qu'il fonde et revienne à une certaine norme, de même pour le visage, il faudra beaucoup de temps pour que l'expression et l'émotion y reviennent. Et une rechute est toujours possible.

Peut être qu'il y aurait été possible de faire un peu plus court, en même temps comme j'ai apprécié, je ne sais pas trop ce qu'il aurait été souhaitable d'enlever, et comme je l'ai suivi dans une salle pourtant bien remplie d'où personne n'est sorti avant la fin, je ne sais pas trop. On se laisse toujours un peu emporté par une appréciation globale, c'est plus facile de faire des analyses plus précises en revisionnant en DVD, avec des arrêts et retours.