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| Hermann Ungar [République tchèque] | |
| | Auteur | Message |
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animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Hermann Ungar [République tchèque] Mer 13 Mai 2009 - 21:51 | |
| - Citation :
- Hermann Ungar (Boskovice, Moravie, 1893 – Prague, 1929). Né dans une famille de petits industriels juifs cultivés, il suit à Brno une formation de juriste. Au sortir de la Première Guerre mondiale et parallèlement à une carrière diplomatique décevante menée pour l’essentiel à Berlin, il élabore en allemand, comme ses compatriotes Kafka, Perutz, Rilke et Weiss, une œuvre romanesque et dramatique qui lui vaut une notoriété presque immédiate et l’admiration de nombreux écrivains tels que Thomas Mann, Stefan Zweig, Alfred Döblin, Ernest Weiss ou Bertolt Brecht. En pleine maturité créative, il meurt à l’âge de trente-six ans, d’une crise d’appendicite mal soignée. En publiant après un demi-siècle d’inexplicable oubli, la totalité de ses livres : Enfants et meurtriers, La Classe, Les Mutilés, Le Voyage de Colbert, L’Assassinat du capitaine Hanika, La Tonnelle, les éditions Ombres ont permis, à l’œuvre intense et perturbante de ce singulier écrivain de retrouver la juste place qu’elle mérite.
Lorsque, en 1987, nous avons réédité simultanément Enfants et Meutriers et Les Mutilés, le nom de Hermann Ungar était donc inconnu du public français. On le connaissait à peine plus dans les pays de langue allemande, où il ne figurait que dans de rares histoires de la littérature ou dictionnaire d’auteurs. Nous avions découvert les deux nouvelles et le roman dans les traductions de Guy Fritsch-Estrangin, depuis longtemps épuisées et, dans la hâte où nous étions, tout nouveaux éditeurs, de faire partager notre enthousiasme au public français, nous avons décidé de les reprendre telles quelles. Au cours des années suivantes, nous avons confié à François Rey la tâche de traduire le reste de l’œuvre proprement littéraire, à savoir successivement La Classe, Le Voyage de Colbert, L’Assassinat du capitaine Hanika et La Tonnelle, puis de retraduire les deux premiers volumes. Un tel travail de retraduction s’avérait indispensable pour assurer l’unité de l’œuvre en langue française et restituer aux textes leur radicalité, tant stylistique que thématique, et la précision quasi obsessionnelle de leur écriture. Mais il s’agissait au moins autant, sinon plus, de donner à lire leur ancrage dans la littérature judéo pragoise du début du XXe siècle et cette dimension comique constamment présente qui apparente Ungar à son aîné Kafka et dont on ne saurait dissocier l’amertume, voire la noirceur fondamentales de ses récits sans à coup sûr les mutiler pour la seconde fois. source : Editions Ombres Ils font donc pour leur Petite Bibliothèque Ombres des petits livres bleus souples et agréables au toucher avec des pages d'un papier couleur qui me rappelle le déjà vieilli, très lisse, classique de mise en page, très propre et comfortable à lire. c'est bien. | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Mer 13 Mai 2009 - 22:29 | |
| Les mutilés - quatrième de couverture a écrit:
- Deux romans, douze nouvelles, trois pièces de théâtre, un essai : l’œuvre complète d’Hermann Ungar (1893-1929) encombre moins de dix centimètres de rayonnage d’une bibliothèque. Et pourtant, elle a du poids... Le pouvoir d’évocation de l’écrivain, son aisance à extérioriser des abîmes de non-dit, à les cristalliser dans des scènes crues et viscérales, confèrent à sa prose une violence rare, bien incongrue à notre époque de consensus cotonneux. Naturellement, le phénomène Ungar n’est pas isolé. C’est un phénomène. Disons qu’il incarne une tendance extrême au sein d’un art déjà outré en soi : l’expressionnisme allemand de l’entre-deux guerres. Biographiquement comme thématiquement, tout le rapproche de Franz Kafka ou de Franz Werfel : juif de langue allemande, né et élevé en Bobême-Moravie (province de l’empire austro-hongrois, qui devint en 1918 la Tchécoslovaquie indépendante). Mais malgré un succès critique certain dans les années 20 – des écrivains comme Thomas Mann ont célébré son talent –, Ungar reste le plus méconnu des écrivains de sa génération. Il ne figure dans aucun dictionnaire, dans aucune histoire de la littérature. Mais depuis quelques années, Ungar devient un écrivain culte en France. Car on ne peut rester indifférent à l’énergie subversive de sa prose, bien plus réaliste et actuelle que la prose poétique de ses contemporains surréalistes français. L’aspect visuel de l’expressionnisme allemand nous est aujourd’hui plus familier que sa dimension verbale. Mais bien que jamais officialisé sous forme de mouvement, il domina l’avant-garde littéraire de la Mittel-Europa des années 20. Les écrivains expressionnistes sont comme des scientifiques subjectifs de la littérature. Ils ont chacun leurs spécialités : Kafka est par exemple un logicien de l’ego ; Ungar, lui, plus âpre et moins abstrait, est le biologiste qui donne corps aux pulsions et aux fantasmes tout en les stigmatisant. Il met à vif l’aspect répressif de la société avec un sadomasochisme aussi bien physique que psychologique. »
Vincent Ostria (Les Inrockuptibles, 1993). c'est marrant je croyais que bix avait posté le début quelque part ? je ne retrovue pas (même avec la "recherche google"). C'est l'histoire d'un employé de banque, Franz Polzer, de milieu modeste, le type lambda, qui travaille, qui dort, qui n'a pas une vie extraordinaire... qui stress pas mal, pour le travail, la vie en général, mais "ça va"... enfin, ça a l'air. Entre sa logeuse Klara Porges (dont il devient en quelque sorte l'esclave), son ami d'enfance très gravement malade et amputé, Karl Fanta ou ses collègues de bureau... le cauchemar se dessine au fur et à mesure. L'angoisse est perpétuelle, faire les choses a peu près convenablement, conserver les apparences d'une certaine sécurité. C'est dingue, et ça empire de page en page. Le bonhomme tombe sous la barre de la normalité, voir médiocrité pour tomber dans la catégorie acteur de son propre cauchemar... tout est une angoisse, un problème, se préserver à tout prix, chercher un peu de tranquilité. Et il n'est même pas vraiment sympathique. c'est Horrible. Et ça nous entraine avec un mélange de gêne et de bonheur un peu plus loin... Le cauchemar se justifie par les comportements des autres dont les peurs et les folies se dévoilent à leur tour. Horreur psychologique, dégoût physique... avec malgré tout de l'humour... "malin plaisir" ? c'est possible. Toujours est il que des rapprochements bizarres se font avec naturel et ne laissent pas indifférents. Aussi terribles que soient les situations, des superpositions de personnage se font (femme, soeur, mère...), de leurs images et apportent avec habileté de la densité à ce qui pourrait couler dans la farce cruelle de mauvais goût. Plus ça va et plus l'escalade d'une folie tendant à l'absurde se justifie et sonne "vrai". ça ressemble sûrement au fil des pages à un monde connu, avec ses mécanismes, ses obsessions, ses angoisses et les mélanges bizarres qui sommeillent parfois dans nos esprit. Il charge franchement la balance dans le "pas beau" mais c'est très bien articulé et très dynamique et il se maintient incontestablement du bon côté (abrasif mais tout de même). Je ne suis pas accro au cradingue pour le plaisir ou à la surrenchère de vacheries gratuites, c'est lassant, j'ai eu quelques craintes de saturer... craintes non justifiées. Le dénouement de cette histoire ressemble à du policier, un suspens de meurtre et de meurtrier. Difficile de dire ce qui reste de ce petit voyage, de cette petite descente tout en bas des gens et du quotidien, d'une petite cruauté. De ces peurs continuelles et de toutes ces images corporelles Les personnages tiennent des discours d'explications, il est notamment question, à travers l'inquiétant boucher devenu infirmier d'expiation (en plus de tablier, de couteau et de sang de veau). Le Franz Polzer s'affirme presque, c'est à voir, la fin est ouverte. En acceptant le pire (et en l'exprimant), en ayant gagné le réflexe de douter de tout et de tout le monde, abandonné l'espoir d'un peu d'ordre, de sécurité, les choses finalement se calme et c'est à se demander si elles sont plus moches ? En profitant de détails supplémentaires sur l'auteur et d'une fin supplémentaire ajoutée au livre, on reste sur ces impressions et on découvre que cet univers est inspiré en partie d'épisodes de la vie de l'auteur, au moins pour leur contexte. Etrange, à la fois horrible et pas moche. Je précise que le commentaire est "soft" ainsi que l'extrait du "au fil de nos lectures" que je remets ici : - Citation :
- Franz Polzer se hâta de rentrer. Il était nerveux et inquiet. Il se préparait là des changements dont on ne pouvait prévoir l'issue. Si le malade devait déménager chez lui, dans quelle chambre Madame Porges l'installerait-elle ? Sans doute pas dans la pièce aux beaux meubles. En fin de compte, il serait obligé, lui, Polzer, de s'installer dans la chambre de la veuve et de dormir tous les jours, lit contre lit, à côté d'elle. Quel coup lui tomberait dessus, alors ? Les pleurs de Dora résonnaient encore à ses oreilles. Si Karl déménageait, elle finirait par faire des choses qui risquaient de semer le désordre et la consternation. En la voyant fixer l'eau du fleuve, il avait eu l'impression qu'elle pensait à la mort. Mardi prochain, il fallait absolument qu'il amène Madame Porges. Aussi pénible que ce fût, c'était peut-être le mieux à faire. Il était vraisemblable que Madame Porges ne serait pas d'accord avec le projet de Karl de déménager chez elle. Peut-être réussirait-elle à convaincre Madame Fanta de prendre un infirmier pour lui. Il était possible que les deux femmes s'entendent bien. A l'occasion, il dirait tout à Madame Porges. La certitude qu'il ne serait pas obligé d'aller seul chez Karl la prochaine fois lui était agréable. En effet, la présence de Madame Porges le protégerait des confessions fiévreuses de Karl et Dora Fanta, qui le laissaient perplexe et désarmé. La veuve maintiendrait le calme, peut-être même pourrait-elle tout arranger.
Le lendemain, Franz ayant dit qu'il passerait prendre ses devoirs, Polzer se leva de bonne heure. Il rédigea les devoirs proprement, sur du papier ministre blanc et sans la moindre rature. En sortant de la banque, il se hâta de rentrer pour ne pas manquer Franz. Il entendit sa voix dans la cuisine. Il alla dans sa chambre et attendit que Franz le rejoigne. Il avait fait exprès du bruit en fermant la porte et s'est raclé la gorge dans le vestibule, pour qu'on entende son arrivée de la cuisine. Il arpenta nerveusement sa chambre pendant un quart d'heure environ avant que Franz n'entrât. Polzer lui remit les devoirs. Franz y jeta un coup d'oeil rapide. - Il n'y a pas de fautes, Polzer ? - Je crois qu'il n'y a pas de fautes. Comment va ton père, Franz ? - Ah, mon Dieu, dit Franz,mon père ! Tu vois, Polzer, je crois que mon père n'ira jamais mieux. - Il faut toujours garder l'espoir, Franz. - Oui, oui... Dis-moi, Polzer, il parîat que je ressemble à ce qu'il était avant. Tu crois qu'un jour je serai aussi malade que lui ? Polzer attira le garçon contre lui. Il pressa sa tête sur sa poitrine. La question de Franz Fata l'avait ému. Sa main s'attarda un instant sur ses cheveux soyeux. Il l'en retira vivement, envahi soudain par une brume de souvenirs où se mêlaient le père du garçon, des devoirs pris dans le Livre d'exercices, des larmes et une lointaine tendresse. - Il nous torture, ma mère et moi, dit Franz. Maman croit que tu pourrais nous aider. Polzer tenait toujours fermement le garçon. Il sentait ses membres sveltes contre son corps. Il sentait la poitrine de Franz Fanta se soulever et s'abaisser au ryhtme de sa respiration. Le garçon regarda Franz Polzer. Polzer évita son regard. Il sentait battre le pouls de Franz. Il avait déjà vu ce visage. Dora avait raison. Polzer était bouleversé, angoissé, par des ressemblances oubliées. - Est-ce que tu m'aimes, Polzer ? dit Franz Fanta. Alors, effrayé, Polzer lâcha le garçon. Il est possible que ce soit assez cru et polymorphe pour qu'on s'y retrouve et s'y mélange. ps : excusez moi, je crois que j'ai fait encore plus de fautes que d'habitudes ce soir... | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Mer 13 Mai 2009 - 22:37 | |
| - animal a écrit:
- c'est marrant je croyais que bix avait posté le début quelque part ? je ne retrovue pas (même avec la "recherche google").
mais tu sais qu'avec la rechercher google on ne trouve rien du tout le début que Bix avait mis est ici | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Mer 13 Mai 2009 - 22:41 | |
| oui mais c'est un autre début ! ... faudra que je trouve le courage pour le début des Mutilés. Le truc on le lit et on se dit : "Mais je suis un quasi Franz Polzer !" | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Mer 13 Mai 2009 - 22:46 | |
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| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Jeu 14 Mai 2009 - 22:20 | |
| le début qu'il me semblait avoir déjà lu (en librairie alors ??? ) à moins que ça ne "ressemble trop" ???? - Citation :
- Depuis sa vingtième année, Franz Polzer était employé dans une banque. Chaque jour, à huit heures moins le quart du matin, il partait pour son bureau. Jamais une minute plus tôt ou plus tard. A l'instant où il sortait de la ruelle dans laquelle il habitait, l'horloge de la tour sonnait trois coups.
Franz Polzer, depuis tout le temps qu'il était à la banque, n'avait jamais changé de poste ni de logement. Il occupait toujours la même chambre, où il s'était installé après avoir abandonné ses étude et débuté dans sa profession. Sa logeuse, une femme à peu près de son âge, était veuve. Quand il avait emménagé chez elle, elle portait encore le deuil de son mari. Jamais, au cours de ces nombreuses années, il ne s'était trouvé dans la rue entre huit heures et midi, en dehors des dimanches. Il ne savait plus ce que c'est qu'une matinée de semaine, quand les magasins sont ouverts et qu'une foule presséese bouscule dans les rues. Il n'avait jamais manqué un seul jour à la banque. Les rues par lesquelles il passait le matin offraient chaque jour la même image. Les rideaux de fer se levaient sur les vitrines des magasins. Devant les portes, les commis attendaient leurs patrons. Chaque jour il croisait les mêmes gens, garçons et filles se rendant à l'école, demoiselles de comptoir flétries, hommes de mauvaise humeur qui se hâtaient vers leurs bureaux. Il marchait parmi eux, les gens de son heure, comme eux se hâtant, ignoré de chacun et les ignorant tous : l'un des leurs. | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Ven 15 Mai 2009 - 8:07 | |
| Cela semble fort i,téressant, je note Animal. | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Dim 11 Oct 2009 - 11:37 | |
| Enfants et meurtriers - quatrième de couverture a écrit:
- Salué dès sa parution en 1920 par Thomas Mann comme « l’aube d’un très grand talent » Enfants et meurtriers, premier livre d’Hermann Ungar, se compose de deux récits « Histoire d’un meurtre », description minutieuse de l’enfance d’un criminel, une enfance piétinée, sans amour où la solitude et la honte sont telles que l’assassinat seul l’apaise alors. « Un homme et une servante », le second récit, retrace la vie d’un orphelin humilié par sa condition, sa frustration sociale et sexuelle, sa relation obsessionnelle pour la servante de l’hospice et qui ne trouve d’issue que dans la cruauté et la mortification.
Ces deux textes antérieurs aux Mutilés, moins démonstrativement ignobles dans l'ensemble et plus facilement identifiables sont donc attachés à l'enfance. Une enfance où les frustrations et une violence sociale et humaine transforment ce qu'il pourrait y avoir d'amour en un refuge de haine et de méchanceté. Non sans quelques hésitations et questionnements. On peut aussi dire vengeance, et cruauté. Si la lucidité de ces témoignages (il s'agit de témoignages-confessions des intéressés à la première personne) ne cherchant ni pardon et ni excuses ne rejettent pas le lecteur, si le "malin plaisir" de l'auteur à aller fouiller les recoins sombres de l'âme humaine (et à écrire des trucs potentiellement bien crades) ne l'écoeure pas, c'est que son talent est déjà là, progression des récits, détails, caractères et que la tension entre une lueur fragile et le besoin bestial de refuge dans un rapport de force sont parfaitement bien racontés et expliqués. Un petit mot sur la deuxième nouvelle, Un homme et une servante, qui aborde en plus en sombre et désillusionné l'émigration en Amérique et un mélange d'ascension sociale et d'industrialisation. Un élargissement de l'horizon et une autre preuve de la sagacité de l'auteur... Moins horrible que les Mutilés malgré des passages difficiles, une autre lecture marquante (ça fait réfléchir là où se crée le malaise) et encore un superbe petit livre de la Petite Bibliothèque Ombres... | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Dim 11 Oct 2009 - 21:49 | |
| Très intéressant. J'ai fini La classe, peut être un commentaire demain | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Dim 11 Oct 2009 - 22:30 | |
| - animal a écrit:
- et encore un superbe petit livre de la Petite Bibliothèque Ombres...
Avec en plus des dessins d'Egon Schiele en couverture pour nous mettre l'eau à la bouche! | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Dim 11 Oct 2009 - 22:34 | |
| il y a quelques coquilles dans celui là, en fait, pour le reste ils font vraiment un boulot superbe. Il serait bien capable de te plaire même si c'est difficile de présupposer de l'effet des morceaux tordus ! | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Mar 13 Oct 2009 - 21:51 | |
| La classe Josef Blau est un professeur qui déteste ses élèves et qui en a peur. Peur un jour de perdre le contrôle de sa classe et de perdre son poste. Alors il est d'une sévérité extrême, anticipe tous les pièges que les élèves seraient succeptibles de lui tendre. De la même façon, il soupçonne une éventuelle infidélité de sa femme. Une sorte de personnage obsessionnelle et angoissé. Et le monde semble par moments prendre la figure de ses pires cauchemards. Etrange livre, entre une description minutieuse et presque maniaque, et un monde qui par moments semble se dissoudre, pencher vers l'onirique et le fantastique. On se demande si certains événements sont réels, ou imaginés par le héros, ou s'ils deviennent réels parce qu'ils sont imaginé et que la force de l'imagination fini par leur donner vie. L'univers de Josef Blau est peuplé d'êtres inquiètants, menacants, malveillants. Et comme il est odieux pour se défendre, les gens qui l'entourrent finissent peut être par lui témoigner l'hostilité et la malveillance dont il les affuble. En même temps, étrangement, l'auteur n'est pas forcement pessimiste sur le devenir de son personnage et sur la nature humaine en général, la fin du roman le prouve. Et le portrait qu'il trace de Josef Blau, entre angoisses et maniaqueries, reste saisissant et malgré tout touchant, il nous donne des clés pour comprendre son fonctionnement. Un livre très original, dérangeant par instants, mais en même temps difficile à oublier. Entre l'horrible, le dérisoire, mais en même temps traversé d'éclairs d'humanité. | |
| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Mar 29 Mai 2012 - 22:18 | |
| Le Voyage de Colbert ( Colberts Reise. Erzählungen, 1930). Nouvelles et récits traduits de l'allemand par François Rey. Editions Ombres. 115 pages. 1/ Le Voyage de Colbert (21 pages). "Colbert commença son voyage en 1910. Il mourrut en 1911 des suites des émotions que ce voyage lui occasionna. Modlizki l'avait trop gravement déçu. [...] La déception de Colbert fut d'autant plus grave que Modlizki avait grandi dès sa prime jeunesse dans sa propre maison. Modlizki, en effet, était de basse extraction - son père, un ivrogne, avait quitté la vie de manière peu glorieuse. Surpris au cours d'un vol, il était tombé du haut d'une échelle et était mort dans l'heure, sans avoir reçu l'absolution pour son dernier péché. [...] Colbert, en revanche, s'enorgueillissait de sang français. [...] Ainsi portait-il la barbe coupée à la française et de fines moustaches retroussées en pointes." (page 7). Colbert est un peu ridicule, un peu pathétique, mais quand même touchant. Pris dans son obsession de voyage, il ne se rend pas compte qu'il a en quelque sorte élevé un serpent en son sein. La méchanceté (qui vient d'une forme de revanche ? d'un sentiment de supériorité non assumée ?) de Modlizki est bien rendue. C'est une bonne nouvelle, mais on ne peut pas dire qu'elle soit agréable à lire : Ungar vise autre chose. 2/ La Raison d'être (5 pages) Lepopold est un homme pauvre. Il vient de sortir d'une maison. - Citation :
- "Il avait l'impression d'avoir oublié quelque chose là-haut. Il fit lentement demi-tour et remonta les trois étages d'escalier raide qui menaient chez le musicien.
« Excusez ! » dit-il, et il entra. Dans la pièce il vit immédiatement le tableau. Il l'avait à peine vu tout à l'heure. Il savait à présent que c'était le souvenir du tableau qu'il avait oublié." (page 29). "On voyait un dessus de table. Un homme aux mains osseuses déployées sur la table comptait des pièces d'argent. Les mains étaient étroites et avaient de longs doigts. A côté de lui était assise une femme dont la blouse dénouée laissait voir des seins pendants plus qu'elle ne les cachait." (page 30). La faim, la misère. C'est horrible. 3/ Mellon, l'« acteur ». (4 pages) - Citation :
- "Si l'on considère les choses d'un point de vue plus élevé, les vainqueurs, dans la vie, sont généralement les vaincus. La mort de ceux qui n'ont pas réussi rayonne parfois de l'éclat de la victoire." (page 35).
Le narrateur nous raconte la vie tragique d'un camarade de classe, qui voulait devenir acteur. Là encore, il y a du pathétique. 4/ Dans La Guerre secrète, le narrateur est pris dans une position délicate et a peur d'être dénoncé. (5 pages) 5/ Dans Alexandre (6 pages), le narrateur du même nom se sent mis à l'écart, rien que du fait du prénom qu'il porte, tellement différent des "Josef, Franz, Wenzel, Lasidslas. J'étais le seul à porter ce nom particulier. Je crois que tout est lié à ce nom. Si je m'étais appelé Procope ou Cyrille, je serais devenu paysan, artisan, journalier, ou même curé du pays, comme Josef Chlup. Wenzel Svatek s'est pendu, c'est vrai, et c'est moi-même qui l'ai trouvé pendu à un jeune arbre dans la forêt. Il avait quatorze ans. Mais son geste avait des causes particulières, et ce n'est pas de cela que je voulais parler." (page 45). Une histoire malheureuse, pleine de regrets. | |
| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Hermann Ungar [République tchèque] Mar 29 Mai 2012 - 22:18 | |
| 6/ Les Frères (4 pages) : deux frères rentrent chez eux. "Ils ne s'étaient pas vus depuis deux ans". (page 51). Ils n'arrivent toujours pas à communiquer. Finalement, comme dans la nouvelle précédente, ils se disent : - Citation :
- "Oh, pourquoi avons-nous quitté la maison ? - Que cherchions-nous, qui nous a faits partir ?" (page 53).
7/ Tulpe (5 pages). Une nouvelle drôle, pour changer. Enfin, drôle... Tulpe est conseiller supérieur d'enregistrement. Il vit une vie très réglée. "Comme chaque jour, Tulpe avait commencé par défaire les deux derniers boutons de son gilet, qui se tendait sur son ventre lorsqu'il s'asseyait, puis, ayant lissé ses moustaches et les deux pointes de sa barbe, il avait allumé son cigare." (page 55). Nouvelle caustique sur les milieux administratifs, la vie réglée au millimètre, les convenances. 8/ Le Voyageur en vins (32 pages). Un homme prend la suite de son père. Profession : voyageur en vins. Il visite les clients, achète et vend du vin. - Citation :
- "Je ne cherche sans doute rien d'autre qu'à refaire en esprit, pas à pas, le chemin que j'ai parcouru, parce qu'il y a un secret plaisir dans le tourment que le coeur conçoit de son impuissance à faire que les choses telles qu'elles se sont passées se repassent autrement. Je vais revivre les stations du chemin et, en les revivant, je connaîtrai l'inéluctable fin." (pages 68-69).
C'est une nouvelle de dimensions plus importantes que les précédentes. Il y a une succession d'événements parfois singuliers, la tentation de s'inventer une vie plus intéressante, comme l'avait fait son père avant lui. "[...] j'ai moi-même souvent ri de lui. Aujourd'hui je ne le fais plus." (page 71). 9/ L'Employé de Banque (10 pages). Des espoirs qui se noient sans qu'on n'y prenne vraiment garde dans un quotidien plein de petites tâches sans intérêt, mais qui absorbent... comme notre vie ? "On m'avait prédit qu'avec mes dispositions et à force de travail et de persévérance, je pourrais parvenir à un poste de direction dans ma profession." (page 94). Petite vie, petites gens, maniaqueries, mesquinerie, sens des apparences. 10/ Bobeck se marie (8 pages). "Le gros Oncle Bobeck multipliait les singes à l'adresse de ses invités, il riait, il buvait, il posait sa main dodue sur la main de sa nouvelle épouse, la veuve Mathilde Kosterhoun, qui baissait les yeux en-souriant." (page 103). Ça mange, ça boit, sa déboutonne les gilets, ça reboit, ça remange à s'en faire péter la sous-ventrière, ça parle nourriture. Et ça laisse une impression de tristesse en arrière-bouche. Des nouvelles souvent dérangeantes, pleines de misères et de drames, aux personnages médiocres broyés par la vie, sa misère, sa petite routine, les apparences à sauver. Personne n'est heureux. Personne n'a pu accomplir son rêve. Tout juste s'il est permis d'essayer, mais il y a tant de raisons d'échouer : la méchanceté, la pauvreté, et parfois le quotidien bureaucratique qui fait de la vie un grand vide. Hermann Ungar a un très grand talent pour rendre tout ça, avec un fond tordu. Il n'y a pas vraiment d'empathie, l'histoire est généralement objective, factuelle. Et en même temps un peu tordue. A ne pas lire pour se remonter le moral. | |
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