Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Tom Sharpe

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MessageSujet: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptySam 22 Sep 2007 - 20:40

Tom Sharpe Tom_sh10

(30.03.1928, Londres - 06.06.2013, Espagne)

Tom Sharpe est né en 1928. Il fait ses études à l'université de Cambridge puis sert dans les Marines avant de s'installer en Afrique du Sud en 1951. Travailleur social puis professeur, il dirige un studio photographique. Il est arrêté et expulsé en 1961 pour avoir écrit et fait représenter une pièce de théâtre anti-apartheid. De 1963 à 1972, il est assistant d'histoire au College of Arts and Technology de Cambridge. L'immense succès de ses romans satiriques qu'il publie depuis 1970 lui permet aujourd'hui de vivre dans le Dorset, le pays de Thomas Hardy, et de se consacrer à l'écriture. L'humour féroce de Tom Sharpe se situe dans la grande tradition britannique de P.G. Wodehouse et d'Evelyn Waugh, quoique Sharpe aime à préciser : "Waugh et Wodehouse maniaient la rapière, mais je travaille au coupe-coupe."
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptySam 22 Sep 2007 - 20:43

"La route sanglante du jardinier Blott"

Le moins que l'on puisse dire, c'est que Lady Maud et Sir Giles forment un couple peu harmonieux.
Leur union – bien loin d'un mariage d'amour – a été conclue pour des raisons purement pratiques : elle, descendante d'une longue lignée menacée par la banqueroute et dont les origines remontent à la fondation du Royaume d'Angleterre, a du conclure ce mariage afin de sauver le château familial ; lui, homme d'affaires fortuné, a pu, en s'alliant avec une représentante de la noblesse, obtenir un Siège au Parlement.

Mais après six ans de mariage, Lady Maud se désespère car leur union n'a toujours pas porté ses fruits. Dotée d'un physique peu avenant, son mari n'exerce pas son devoir conjugal. De plus, celui-ci semble plutôt attiré par des pratiques sexuelles sado-masochistes auxquelles son épouse se refuse sans équivoque. Sir Giles préfère de loin recourir à une maîtresse qu'il rejoint régulièrement quand il se rend à Londres et avec qui il peut assouvir ses fantasmes les plus délirants.

Lady Maud, la quarantaine dépassée, sans héritier, sera-t-elle la dernière de la lignée des Handyman ? C'est compter sans sa détermination. Elle met donc son mari devant un choix très simple : soit celui-ci lui fait un héritier, soit elle demande le divorce.

Ces deux éventualités n'étant pas pour séduire Sir Giles outre mesure, celui-ci décide alors, afin d'éviter d'avoir à donner de sa personne tout en conservant la fortune familiale, d'élaborer un stratagème diabolique qui lui permettra de faire d'une pierre deux coups.

Il suffit d'un coup de téléphone au responsable de la Direction Régionale de l'Equipement du Worfordshire et le tour est joué ! Une autoroute traversera le domaine et Sir Giles pourra encaisser les colossales indemnités compensatoires versées aux propriétaires contraints à l'expropriation.

Mais ce que Sir Giles ne sait pas, c'est qu'à partir de ce moment il met le doigt dans un engrenage fatal.
Lady Maud, farouchement déterminée à sauver son château, prend la tête du mouvement de riverains opposés à la construction de l'autoroute et se lance à corps perdu dans une lutte acharnée contre les autorités. Celles-ci ne trouveront en fin de compte rien de mieux que de nommer un médiateur en la personne d'un certain Dundridge, individu bien connu au sein des ministères pour sa propension à rendre catastrophiques les situations les plus anodines.

Très rapidement, Dundridge apprendra à ses dépens qu'il n'est dans toute cette affaire qu'un pion dont usent l'un et l'autre camp afin de parvenir à leurs fins.
Ne souhaitant pas être la dupe des uns et des autres, déterminé à accomplir la mission qui lui a été confiée, Dundridge va alors déclencher l'Opération Overland.

A partir de ce moment, tous les coups seront permis : chantage, dessous-de-table, empoisonnements, menaces, corruption et homicides. Bien retors et malin sera celui ou celle qui l'emportera sur les autres dans ce combat homérique et la pauvre Lady Maud devra s'armer de tout son courage et de toute sa volonté pour affronter les pouvoirs publics et sauvegarder son patrimoine.

Mais ce que personne ne soupçonne, c'est qu'elle possède un atout dans sa manche, une arme secrète, redoutable, absolue : le jardinier Blott !

Avec ce roman, Tom Sharpe nous entraîne dans une tourbillon d'aventures cocasses et délirantes, un jeu de massacre jubilatoire qui nous ferait prendre ce petit coin de province anglaise aux cottages coquets et aux pelouses soignées pour un endroit plus dangereux encore que la jungle la plus sauvage.

« La route sanglante du jardinier Blott » ravira toutes celles et tous ceux qui raffolent d' histoires décalées, de situations burlesques et de personnages saugrenus.
Avec Tom Sharpe, le légendaire humour britannique a de belles années devant lui.
Un remède radical contre la mélancolie.
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptySam 22 Sep 2007 - 20:47

"La grande poursuite"

Frensic est un agent littéraire londonien renommé. Avec son associée Sonia Futtle, il est à la tête d'une agence honorable et respectée des maisons d'édition mais dont les affaires semblent malheureusement au creux de la vague. Pourtant, Frensic est un expert dans l'art de débusquer le manuscrit qui fera un succès commercial et il n'hésite d'ailleurs pas à en retoucher quelques-uns afin d'en assurer le succès commercial.



« A trente ans à peine, il s'était taillé parmi les éditeurs la réputation enviable d'un agent qui ne recommandait que des livres qui se vendaient. On pouvait escompter, d'un roman de chez Frensic, qu'il n'avait besoin d'aucune modification et que de peu de travail de fabrication. Ils faisaient exactement quatre-vingt mille mots, sauf pour les romans historiques qui en faisaient cent cinquante mille, leurs lecteurs étant plus voraces. Ils commençaient par un boum, se poursuivaient avec d'autres boums et avaient une happy end dans un plus grand boum encore. En bref, ils contenaient tous les ingrédients si prisés du public.
Mais si les romans que Frensic soumettait aux éditeurs n'avaient besoin que de peu de modifications, ceux qui arrivaient sur son bureau – oeuvres d'auteurs ambitieux – ne ressortaient que rarement de son étude sans de profondes transformations. Comme il avait découvert les ingrédients du succès populaire dans L'Eclat de l'amour, Frensic les appliquait à tous les livres qui passaient entre ses mains, de telle sorte qu'ils ressortaient du travail de réécriture comme des plum-puddings ou des vins coupés : il y incorporait du sexe, de la violence, des frissons, de la romance et du mystère, et parfois même une pincée d'intellectualisme pour les rendre culturellement honorables. L'honorabilité culturelle était importante pour Frensic. Cela lui assurait des articles dans les meilleurs journaux et donnait l'impression aux lecteurs de participer à une croisade pour la consécration de la pensée. La teneur de la pensée restait, quant à elle, bien entendu, brumeuse. Elle se situait en deçà de ce qui est en général considéré comme tel, mais sans elle, les auteurs de Frensic auraient perdu une partie du public qui méprisait les simples romans d'aventures. De ce fait, il insistait toujours sur la profondeur de la pensée, et bien que dans l'ensemble il considérât avec intelligence et finesse que si on l'utilisait en grandes quantités elle était aussi mortelle pour les chances de succès d'un livre qu'une pinte de strychnine dans un consommé, elle avait, à doses homéopathiques, un effet tonifiant sur les ventes. »




Mais malgré son flair et son talent pour dénicher les succès commerciaux, Frensic voit ses affaires péricliter. Des manuscrits qu'il a proposés aux maisons d'édition sont refusés, un des auteurs qu'il a lancé est assigné en justice pour diffamation et ne se verra pas réédité. C'est à point nommé qu'arrive sur son bureau un manuscrit dont l'auteur tient absolument à garder l'anonymat. Ce roman intitulé « Pitié, ô hommes, pour la vierge » traite sans pudeur de la relation amoureuse d'un adolescent avec une femme de quatre-vingts ans.
Aussitôt, Frensic sent qu'il tient là de quoi monter un « coup » littéraire qui va lui rapporter de juteux bénéfices. Il se met aussitôt en relation avec une respectable maison d'édition qui a connu de par le passé ses heures de gloire mais qui s'achemine peu à peu vers la faillite. Qu'importe ! Frensic mise avant tout sur la respectabilité et le renom de cet illustre éditeur. Quant à l'argent, c'est sur un éditeur américain, Hutchmeyer, que compte Frensic.


« On disait de Hutchmeyer qu'il était l'éditeur le plus illettré du monde, et parce qu'il avait commencé comme manager, il avait ADAPTE ses dons pugilistiques au commerce du livre et avait tenu, un jour, jusqu'à huit rounds avec Mailer. On disait aussi qu'il ne lisait jamais les livres qu'il achetait et que les seuls caractères qu'il savait lire étaient ceux des chèques et des billets de banque. On disait qu'il était propriétaire de la moitié de la forêt d'Amazonie et que quand il regardait un arbre, tout ce qu'il y voyait, c'était un protège-livre. On disait beaucoup de choses sur Hutchmeyer, la plupart désagréables, et bien que chacune contînt une parcelle de vérité, elles atteignaient un tel degré de contradiction lorsqu'on les rassemblait que Hutchmeyer se retranchait derrière elles pour garder le secret de sa réussite. Cela au moins, personne ne le remettait en question. La réussite de Hutchmeyer était immense. Légendaire de son vivant, il hantait les pensées des éditeurs pendant leurs insomnies, ceux-là mêmes qui avaient refusé Love Story alors que le livre allait faire un tabac, repoussé Forsyth et ignoré Ian Flemming, et qui maintenant se retournaient dans leur lit, se maudissant de leur stupidité. Hutchmeyer, quant à lui, dormait d'un sommeil profond. »




Le richissime américain, humant le plus que probable best-seller, accepte de financer une avance sur recettes de deux millions de dollars mais à une seule condition : l'auteur devra se rendre aux Etats-Unis pour y faire la promotion de son roman. Et c'est là que le bât blesse pour Frensic : l'auteur tient absolument à rester anonyme et ne souhaite pas effectuer cette opération promotionnelle. Que faire ? Et si utiliser un prête-nom s'avérait être la solution de secours ? D'autant plus que Frensic traîne derrière lui depuis quelques années un obscur auteur qui s'est toujours vu refuser son ouvrage et que Frensic, par compassion envers cet écrivaillon, encourage sans cesse à remanier son oeuvre. Cet homme, Peter Piper, après maintes tergiversations et après avoir obtenu la promesse que son propre roman « A la recherche d'une enfance perdue » serait ensuite édité, accepte de se faire passer pour l'auteur du sulfureux best-seller.

Peter Piper traverse donc l'Atlantique et c'est à partir de ce moment que tout va déraper. Entre un accueil ultra-médiatisé aux Etats-unis qui va dégénérer en émeute sanglante, une soirée explosive dans le Maine, une fuite éperdue qui le conduira jusqu'en Louisiane en compagnie d'une nymphomane siliconée et liftée de cinquante-huit ans, Peter Piper ne va cesser d'accumuler bourdes et gaffes au risque de faire péricliter tout l'échafaudage médiatico-commercial mis en place par Frensic et Hutchmeyer.

Frensic devra de son côté tout faire pour tenter de recoller les morceaux et essayer de mener à bien la finalisation de son projet éditorial. Mais c'est sans compter sur l'aveuglement de Piper et son obstination à faire éditer son propre roman. Frensic devra faire preuve de sagacité et d'une redoutable détermination pour arriver à ses fins. Et si finalement la solution la plus simple ne consistait pas à trouver le véritable auteur de « Pitié, ô hommes pour la vierge » ? Mais là aussi, la surprise risque d'être de taille...



« La grande poursuite » est un roman hilarant et décapant, une attaque humoristique et critique d'une certaine conception de l'édition qui ne vise qu'à faire de l'argent. Féroce attaque contre la littérature-marketing, ce livre est à rapprocher de l'excellent « Bonheur, marque déposée » de Will Ferguson (éditions 10/18) pour sa critique acerbe des milieux éditoriaux de plus en plus enclins à négliger la qualité des textes au profit du succès commercial immédiat et du chiffre d'affaires. Road-movie déjanté, « La grande poursuite » est un récit jubilatoire qui se lit d'une traite, une comédie à l'anglaise pleine de surprises et de rebondissements
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptyDim 23 Sep 2007 - 12:12

aaaah Tom Sharpe : j'étais littéralement tombée amoureuse de sa série Wilt quand je l'avais empruntée à la biblio vers mes 21 ans. du coup, récemment j'ai racheté les 4 tomes, et attend le moment propice pour me les enfiler laugh

en attendant, j'avais tout de même pris le temps il y a quelques mois d'aller fureter vers l'un de ses autres ouvrages :

Mêlée ouverte au Zoulouland



Ce roman a pour thème un sujet assez grave : la colonisation de l’Afrique du Sud par les Anglais. Tom Sharpe y ayant vécu, on pourrait penser qu’il va faire un roman poncif sur les conflits raciaux, voir un livre hypra engagé capable de soulever des foules. Mais Sharpe va bien au-delà de cela. Il décide de jouer la carte de l’humour, du burlesque, du cynisme, du ridicule, de la bêtise, de la violence et du sexe.

Le « héros », le kommandant van Heerden voue une passion démesurée pour la bourgeoisie anglaise. Admiratif des derniers vestiges de leurs pouvoirs, il admire leur sang froid, leur baroque et leur mépris, parfaitement incarnés par miss Hazelstone. Lorsque celle-ci l’appelle un jour pour lui annoncer qu’elle vient de tuer son cuisinier noir, le chef de la police ne s’inquiète pas plus que ça : il pense étouffer l’affaire très rapidement. Un Caffre tué ne valant que le quart d’un homme. Seulement, au lieu de pénétrer dans un monde propre et civilisé, quand il arrive à Jacaranda (la propriété des Hazelstone) il apprend que miss Hazelstone vivait une passion dévorante avec son cuisinier et qu’elle veut passer en justice pour le meurtre de son amant. Pour le Kommandant, une seule chose compte : parvenir à conserver l’honneur de cette grande famille de juriste. Et pour cela, il va provoquer les pires choses.

Entre la description des policiers complêtement abrutis, assoiffés de sang, aux perversions sexuels et morbides démesurés et les Hazelstone illuminés, pédants et autoritaires, le roman passe très rapidement du réalisme social à l’absurde total.
Souvent assimilé à l’humour des Monthy Python et des Marx Brothers, Tom Sharpe utilise l’effet boule de neige dans l’exagération, tout en conservant ses personnages dans un état de quiproquo perpétuel.
Ainsi, lorsque le Konstable Els tue 21 policiers, il est persuadé de faire son devoir et de tuer des envahisseurs hostiles (tout en y prenant un plaisir certain).
Lorsque miss Hazelstone explique sa passion commune avec FivePence le cuisinier, pour le caoutchouc et le travestissement, elle est certaine qu’elle sera enfin comprise (et avec un peu de chance, enfermée pour le meurtre de son amant).
Et le Kommandant van Heerden qui se persuade que son cœur est malade, et oblige les médecins à lui transplanter le cœur de celui qu’il conduit la potence, tout en le sachant innocent.
Sans oublier les lambeaux de peaux qui collent aux arbres, les corps transpercés de piques acérés, les sexes bourrés de novocaïne pour retarder l’éjaculation, un évêque alcoolique, la collection de vêtements en caoutchouc, la potence branlante… etc

Sharpe fait une critique acerbe de la situation en Afrique du Sud dans les années 70, sans que le lecteur est l’impression qu’on lui fasse la leçon, mais au contraire, en lui payant une bonne tranche de rigolade.
Un humour délirant avec quelques pointes de cynisme bien placées qui pourraient faire penser au roman de J.K Toole : la conjuration des imbéciles ; en un peu plus délirant tout de même. Roman à suivre avec Outrage public à la pudeur.

Citation :
« Le kommandant van Heerden avait imposer à ses hommes de fouiller tous les véhicules de fond en comble, et les camions de l’entreprise JOJO contenaient vingt-cinq tonnes d’abats immangeables, mais sans nul doute nutritifs, qui entraient dans une large part dans le « foie et l’amour » que JOJO promettait aux chiens des serviteurs dociles. C’étaient des cervelles de porc, des boyaux de bœuf et des entrailles de tous les animaux malades possibles et imaginables. Les hommes qui se trouvaient au barrage de la route de Durban furent donc mis à rude épreuve pour s’assurer que miss Hazelstone ne se cachait pas dans le magma infâme qui les accueillait chaque fois qu’ils arrêtaient l’un de ces camions. Les occupants des voitures dont le nombre grossissait, n’étaient pas peu surpris de voir les policiers grimper à bord des camions JOJO, vêtus d’un simple maillot de bain, d’un masque et de palmes, puis plonger dans un tas de viande semi-liquide dont même le peu regretté vautour n’aurait pas voulu pour son repas. »
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptyLun 24 Sep 2007 - 2:31

Comme je l'ai écrit sur ton blog Bibliomane, j'ai très très envie de le découvrir; ça va bien venir un jour!
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptySam 29 Sep 2007 - 22:23

Ma préference va à Wodehouse, mais un bon Sharpe tous les mois doit avoir de très bonnes vertus laugh
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptyMar 26 Fév 2008 - 0:03

me voilà plongée dans une relecture des Wilt :

Année : 1976

Professeur de culture générale d'un lycée technique, Henry Wilt est au bord du gouffre. Ses cours de culture générale sont une catastrophe, ses élèves de viande 1 ou plâtre 2 préfèrent parler de tout sauf de littérature. Sa femme Eva le rend cinglé : elle lui reproche son mode de vie banal, qu'il n'est jamais eu de promotion depuis son entrée comme assistant, et qu'il ne lui accorde pas assez d'intérêt.
Du coup, Henry Wilt, compressé par sa vie professionnel et sa femme, ne pense qu'à une chose : exterminer tous ses problèmes, et Eva Wilt en premier. Celle-ci est la femme au foyer dynamique qui a toujours une nouvelle activité en cours : poterie, yoga, agencement floral... Elle épuise Wilt et l'épuise encore plus lorsqu'elle s'acoquine avec un couple aux moeurs sexuelles libérées.

Tom Sharpe se sert de ce roman pour faire une critique acerbe et burlesque de la société. J'ai bien rit et éprouvé de la sympathie pour tous ces personnages complètement paumés dans leur vie. qui essayent désespérement de donner un sens à leurs existences.

J'ai nettement préféré la description du couple bourgeois bohéme libéral, carrément grotesque et enfermés dans une hypocrisie pathétique. Imaginez un homme venant d'une riche famille avec sur les épaules l'obligation de faire bonne figure, ce qui inclut trouver une femme bien sous tous rapports.
Seulement Gaskell est féru du caoutchouc et a de fortes tendances masochistes, difficile de trouver une bonne bourgeoise dans ces cas-là. Sauf qu'il rencontre (apparemment en hôpital psychiatrique) Sally, une femme des plus libérée qui pense que tout épanouissement passe avant tout par un bon orgasme. A fortes tendances lesbiennes, elle tentera de séduire Eva Wilt en lui faisant croire à l'effet bénéfique de la Touch Therapy...

L'écriture de Sharpe est fluide, faite de rebondissements, plus incroyables les uns que les autres. Impossible de s'ennuyer.
Il a une façon de peindre le portrait des personnages, en quelques traits il en ressort tout le ridicule, et parvient à en faire une caricature complète de la société.

On a pas le temps de s'ennuyer, les scènes de la fin, avec les flics et les interrogatoires, suivies du rassemblement des preuves est une sorte de grande fanfaronnade autour du système judiciaire.
Et les moments où le directeur de l'école essaye à tout pris d'obtenir des financements alors que les flics sont en train de creuser un trou dans sa cour pour essayer d'extirper un cadavre, soi disant victime de l'un des professeurs.

extrait :
« Aujourd'hui, toujours ramant vers Eel Stretch, il fulminait en silence conte la contraception, l'avortement et tout le cortège de malheurs qui accompagnait la promiscuité sexuelle, à la fois cause, symptôme et cause symptomatique de cette pétaudière immorale qu'était devenue la vie sur terre. Dans ses imprécations il n'oubliait pas les randonneurs. Le révérend Saint John Froude avait pour cette engeance le plus grand mépris : elle venait souiller son petit paradis paroissial avec ses bateaux, ses transistors et son ignoble appétit de jouissance. Imaginez quelle tendresse il pouvait porter à des randonneurs assez audacieux pour profaner son paysage quotidien avec des capotes gonflées de messages insensés. »
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptyDim 9 Mar 2008 - 11:49

Il faut absolument lire les deux premiers WILT, c'est indispensable pour les abdos. Bon après, ça fait trop. Mais les deux premiers, c'est quand même déstabilisant et drôle. Je trouve les histoires assez inracontables car il s'agit essentiellement de comique de situation, le tout, avec une peinture d ela société qui décape.

Wilt 1, ou, Comment se sortir d'une poupée gonflable et de beaucoup d'autres ennuis encore est improbable au possible, on y voit un homme fantasmant sur le meurtre imaginé de sa femme qui accumule les boulettes et la malchance.

Wilt 2, ou, Comment se débarrasser d'un crocodile, de terroristes et d'une jeune fille au pair où le pauvre Wilt, toujours avec sa femme, devenu papa rêve encore de fuite au bout de la planète.
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptyDim 9 Mar 2008 - 11:56

Ah oui, Wilt 1 est incroyable. Ca commence très fort, comme un début de James Bond. On se dit qu'il va y avoir une pause, mais non.
C'est de plus en plus fort, toujours plus fort.
A ne pas lire dans le métro sous peine de se faire remarquer (quelqu'un qui rigole en lisant un livre est suspect).
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptySam 29 Mar 2008 - 18:27

Vos commentaires unanimes sur WILT vont me décider à le lire (quand j'en aurai le temps). Mon libraire m'en avait dit également beaucoup de bien.
Le seul roman de Sharpe que j'ai lu (il y a un bout de temps) est Le bâtard récalcitrant. Il y est question, entre autres choses, d'un jeune homme qui, ayant vécu son enfance et son adolescence dans un milieu surprotégé, loin des réalités de la vie, se retrouve à l'âge adulte totalement ignorant des us et coutumes de ses "semblables", mais à un point tel qu'il ne sait toujours pas de quelle manière on "fait les bébés".
A ce sujet, voir la scène absurde et hilarante quand notre grand benêt est convoqué par le gynécologue de sa femme (avec laquelle il n'a jamais couché, cela va sans dire) pour tenter de lui expliquer les mécanismes de la copulation, sous le regard indigné et dégoûté du jeune homme.
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptyMar 11 Nov 2008 - 21:42

Les mots de Chris à propos de Le bâtard récalcitrant

Chrisdusud a écrit:
Je viens de terminer "le batard récalcitrant" de Tom Sharpe.
Un livre vraiment très plaisant ! Des personnages délirants, des situations completement loufoques ! Ce livre est un pur régal du genre. Il mérite (presque) la comparaison avec 'la conjuration des imbéciles" tant dans le style d'écriture que dans l'humour, avec une bonne satyre de quelques aspects économiques anglais.
Brievement c'est l'histoire d'un garçon appelé "le batard" par son grand père qui l'élève étrangement à abri de toute proximité sociale. Aussi, à 18 ans, Lockhart va devoir affronter sa vie conjugale, sociale .. un peu comme un éléphant entrant dans un magasin de porcelaine.

Voilà, c'est un livre réussi je trouve par la force qui s'en dégage, notamment.
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MessageSujet: Outrage public à la pudeur.   Tom Sharpe EmptyMar 25 Nov 2008 - 9:49

Outrage public à la pudeur.

On retrouve le bon vieux Commandant Van Heerden de Mêlée ouverte à Zoulouland. Après sa transplantation d'un cœur anglais, il rêve de plus en plus de "devenir" anglais. Et lorsqu'il tombe par hasard sur trois individus qui représentent pour lui la crème de la British Attitud, il va tout faire pour intégrer leur cercle.

A côté de ça on découvre le lieutenant Verkramp qui rêve de prendre la place de commandant, et qui pour ça va profiter d'une absence de son supérieur pour tenter de reprendre en main le chaos qui est en place.

On retrouve aussi Els, bien vivant, et toujours aussi adepte des grandes explosions, des fusillades, et des testicules.


Entre le commandant qui va une nouvelle fois être déçu par l'envers du décor des anglais. Cette fois, le cercle composé du Général Heathcote-Kilkoon, de son épouse et du major Bloxham, s'avèrera complètement factice. Tout ne sera qu'apparat derrière lequel se dissimule une vacuité des plus pathétiques. Mais le commandant, malgré tout, s'obstinera toujours à trouver une certaine classe dans leurs actions les plus ridicules.
Les parties de chasse à courre, où c'est un noir qui sert d'appat, les histoires de guerre auxquels aucun n'a participé, la libido bestiale de Mrs Heatcote-Kilkoon, l'homosexualité latente du général... tout ne sera que sujet à des quiproquos de plus en plus incroyables.

Mais le plus drôle c'est tout de même Verkramp, un raté de chez raté. Qui pour arrêter les terroristes communistes balance sur le terrain, pour infiltrer les dits terroristes, des agents secrets. Sous ses ordres, ceux-ci finiront par faire de la ville de Piemburg un no man's land d'après-guerre.
Verkramp qui, voulant éradiquer les relations sexuelles entre les policiers blancs et les noires, mettra en pratique une méthode tirée d'un bouquin de psychiatrie. Faire défiler des images de femmes noires nues, et balancer des électrochocs sur les pénis en érection des policiers excités... Le résultat ne sera pas du tout celui escompté... bien évidemment...

Et les femmes, qui toujours ressemblent à des monstres assoiffés de sexe, prêtes à engloutir ses pauvres hommes innocents et sans défense.
Un truc récurrent chez Sharpe : la femme plantureuse qui en écartant les cuisses semble avoir une gueule béante de crocs acérés à la place du vagin.
Des situations à mourir de rire.

Tom Sharpe qui nous balance, sous couvert de situations plus absurdes et poussées à leur paroxysme, une belle critique de la politique de colonisation de l'Afrique du Sud par les anglais.

Oho.
Que c'est drôle, que c'est méchant. J'en veux encore.
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptyMar 4 Mai 2010 - 18:15

Oublié de dire qu'est sorti un nouveau livre de Tom Sharpe en mars 2010 :

Tom Sharpe Le-gan10
Le gang des mégères inapprivoisées.
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptyVen 25 Fév 2011 - 17:09

Je viens mettre un petit bémol à tous ces commentaires enthousiastes sur la série Wilt, en tout cas sur Wilt 1, parce que je n’ai pas encore lu les autres. Mais comme on dit que Wilt 1 est le meilleur de tous…

Le début part bien. J’aime beaucoup les premières phrases du roman :

« Chaque fois qu’Henry promenait son chien ou, pour être plus précis, chaque fois que son chien l’emmenait promener ou, pour être exact, chaque fois que Mrs Wilt leur enjoignait de débarasser le plancher car c’était l’heure de ses exercices de yoga, il suivait invariablement le même chemin. Le chien le prenait docilement, et Wilt suivait le chien. »

Et puis, petit à petit, l’histoire s’enlise dans une suite d’évènements tous plus invraisemblables les uns que les autres. Je n’avais peut-être pas ouvert le bon livre si j’espérais trouver quelque chose qui soit un peu réaliste avec Tom Sharpe mais je ne crois pas qu’un enchaînement de péripéties abracadabrantes constitue quelque chose de passionnant pour le lecteur. A la fin, on finit par s’y habituer et par se lasser parce que l’effet de surprise et d’étonnement ne se produit même plus.

La critique de la société et des manières petit-bourgeois des proches d’Henry fait sourire, mais malheureusement ces réflexions sont trop rares. Je m’attendais à quelque chose d’un peu plus méchant…
J’apprécie toutefois beaucoup ce passage :

« Les Pringsheim et leurs affidés symbolisaient tout ce qu’il avait en horreur. Ils étaient frelatés, superficiels, prétentieux : une bande de clowns dont les excentricités, contrairement aux siennes, n’avaient même pas l’excuse de la naïveté. Ils faisaient non seulement semblant de s’amuser. Ils riaient pour s’entendre rire et faisaient étalage d’un appétit sexuel qui n’avait rien à voir avec un sentiment ou un instinct quelconque et n’était que le fruit sec de leur imagination rabougrie. Copulo ergo sum. Et la Sally Salope qui s’était foutu de lui parce qu’il n’avait pas le courage de ses instincts. Comme si l’instinct consistait à éjaculer dans le corps chimiquement stérilisé d’une femme qu’il avait rencontrée vingt minutes auparavant. Wilt avait réagi tout à fait instinctivement en fuyant devant cette concupiscence faite de goût du pouvoir, d’arrogance et d’un insupportable mépris qui présupposait que ce qu’il était, ce peu de chose qu’il était, ne représentait qu’une extension de son pénis, et que l’expression ultime de ses pensées, de ses sentiments, de ses espoirs et de ses ambitions ne pouvait être atteinte qu’entre les cuisses d’une pute à la mode. Et c’était ça la libération ? »

J’ai un peu peur de continuer avec la suite de la série. Ce premier roman m’avait déjà paru s’étendre dans des longueurs dispensables, je me demande ce que sera la suite…
En revanche, les commentaires que vous avez laissés sur Le Bâtard récalcitrant me font envie… surtout lorsque vous comparez le héros de ce livre à celui de La Conjuration des imbéciles ! :dentsblanches :

Autrement, j’ai entendu parler de films tirés d’adaptations de romans de Tom Sharpe : Wilt ou comment se sortir d’une poupée gonflable et beaucoup d’autres ennuis encore par Michael Tuchner et Sexes faibles de Serge Meynard d’après La route sanglante du jardinier Blott.
Si quelqu’un a déjà vu l’un de ces deux films, je serais curieuse d’entre son avis Razz

Et enfin, puisque l’on parle de Yankee dans Wilt 1, je ne peux m’empêcher de partager avec vous cet aphorisme de E. B. White Razz

Citation :
Pour les étrangers, un Yankee est un Américain.
Pour les Américains, un Yankee est un Nordiste.
Pour les Nordistes, un Yankee est quelqu'un de la côte Est.
Pour ceux de la côte Est, un Yankee est un habitant de la Nouvelle-Angleterre.
Pour ceux de la Nouvelle-Angleterre, un Yankee est un habitant du Vermont.
Et dans le Vermont, un Yankee est quelqu'un qui mange des tartes au petit-déjeuner.
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MessageSujet: Re: Tom Sharpe   Tom Sharpe EmptyMar 8 Mar 2011 - 14:56

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