Vous avez déjà entendu son nom, sa musique est probablement déjà passée par vos oreilles, on vous a dit tout et son contraire à son propos:
Marilyn MansonJe ne vais pas faire une biographie du personnage, ni présenter sa musique de façon exhaustive puisque je vais nier son dernier album (je vais même considérer qu'il n'a jamais existé... vous avez bien compris, je ne l'aime pas du tout du tout
). Je vais vous présenter celui qui m'a fait entrer dans la philosophie... tout simplement.
Souvent décrit comme un monstre, un pervers, un fou, un meurtrier ou tout simplement un piètre provocateur de plus, Marilyn Manson (Brian Warner, de son vrai nom) n'est pas aussi simple à cerner. Certes, il semble facile à réduire à l'un de ces qualificatifs, mais qui se penche sur le personnage ne peut rester que dubitatif. Provocateur? Oui sûrement! Il se réclame comme tel. Juste provocateur? Plus discutable, ses textes et sa musique ont une réelle qualité, en plus de faire passer un message pas toujours aussi stupide qu'il n'y paraît.
La musique de Marilyn Manson est avant tout une forme de thérapie pour lui-même. En ce sens, il n'est pas tellement loin de groupes comme Korn ou Slipknot qui ont eux aussi explosé au milieu des années 90, en réponse à la vague grunge "nirvanienne".
Relativement pessimiste quant au devenir de notre société de consommation, hypocrite, soutenue par un discours moraliste (religieux ou non, mais étant américain, MM est plus touché par la religion) plein de bonne volonté révélant surtout une carence fondamentale. Cependant, penser que sa musique a un discours résolument négatif, sans ouverture à un changement salvateur, c'est faire la même erreur que ceux qui disent de Nietzsche qu'il est "nihiliste". La comparaison avec ce dernier n'est d'ailleurs pas tout innocente. Marilyn Manson se réclame souvent de Nietzsche (et c'est par lui que je me suis intéressé à la philosophie). Comme Nietzsche, il détruit, décortique, pointe les problèmes, mais s'il le fait, c'est pour libérer! S'arrêter au nihilisme, c'est couper la métamorphose nietzschéenne du chameau (portant le fardeau des valeurs), du lion (détruisant les valeurs) et de l'enfant (jouant avec le monde, le reconstruisant sans jamais se réduire à sa création). Marilyn Manson sublime sa négativité dans la musique et appel à la libération de l'esprit.
Là où le bas blesse, c'est qu'à côté de ce discours, Marilyn Manson a l'air d'apprécier le monde du Showbiz (même s'il crache allègrement dessus dans son album "Mechanical Animal"), ses extravagance, son hypocrisie et finalement son image de modèle décadent. Il semble se complaire dans sa richesse, sa notoriété, son contrôle sur une jeunesse facilement manipulable qu'il appelle à se libérer pourvu qu'elle se range sous son étendard. Ambiguë donc, on ne sait jamais vraiment où le ranger.
Musicalement non plus, Marilyn Manson n'est jamais clair. Son premier album (le très souvent oublié "Portrait of an american family") verse plutôt dans un rock/metal aux vague relents industriels sans que la sauce ne prenne vraiment. Il sort ensuite "Smile Like Children", dans le même style même si l'entièreté du contenu se laisse difficilement définir comme de la "musique". Paradoxalement, c'est sur cet album qu'il connaîtra son premier succès, celui qui l'a lancé sur MTV pour finalement en faire une vraie rockstar: "Sweet Dream". La chanson a fait un tel carton que l'album relativement minable sur lequel elle est sortie fût totalement oublié. Une année plus tard, son succès se confirme avec la sortie du monumental "Antichrist Superstar". Ambiance gothique, couleurs sales, sombres, textes violents, provocateurs, toujours entre le déchaînement et un calme malsain, musique résolument industrielle, au revoir le rock/metal gentillement provocateur. Pour certains, cet album approche la perfection et représente un horizon indépassable dans l'oeuvre de Manson, un horizon au-delà duquel il est impossible de concevoir un renouveau, Manson s'arrête là. Fort de son succès, Manson sort un nouvel album: "Mechanical Animal". En opposition totale avec le premier, Manson opère la première grande rupture avec ses fans. Il crache sur le showbiz, l'argent, les drogues, il se se voit comme un extraterrestre. Le style oscille entre l'indus et un glam rock sur lequel Davd Bowie n'aurait probablement pas craché. Il conquiert un plus grand public, moins tourné vers le metal. Son succès est définitif, rien ne semble pouvoir l'arrêter... et pourtant. La turie de Colombine et les accusations portées sur Manson lui feront stoper sa tournée mondiale. Depuis longtemps la cible des lobbies chrétiens qui voient d'un très mauvais oeil le succès d'un artiste aussi anti-religieux jouant assez fréquemment avec l'imagerie sataniste, il est désormais coincé: les deux jeunes responsables des meurtres de Colombine étaient en effet de grands fans de Marilyn Manson. Pour les autorités, les médias et l'opinion publique, le responsable est Manson. Il est attaqué de toute part, il s'enferme chez lui, ne crée plus, tout semble s'arrêter pour lui. En 2000 il revient pourtant avec un album "Holy Wood" plus provocateur que jamais. Manson semble bien décidé à se venger. Tout le monde en prend pour son compte: les politiciens, les religieux, la société américaine, les médias. L'ambiance est assez similaire à celle d'Antichrist Superstar, mais le succès ne sera pas aussi grand. Les fans qui s'étaient arrêtés sur Antichrist Superstar l'abandonnent définitivement, considérant qu'on ne peut pas jouer deux fois sur le même terrain, ceux qui sont arrivés avec Mechanical Animal se sentent trahis. Manson a toutefois réussi à faire parler de lui, et au fond, c'est tout ce qui compte puisqu'il s'agissait de (se) prouver que son image d'épouvantail-séduisant était intacte.
Trois ans plus tard, Marilyn Manson fait à nouveau parler de lui. Après une absence aussi longue (pour MTV du moins), on commençait à se demander sir Marilyn Manson n'allait pas s'arrêter avec Holy Wood. La sortie du single "Tainted Love" semble avoir le même effet que "Sweet Dreams" en son temps (d'autant que les deux sont des reprises). Cependant, on ne peut s'empêcher de se demander si l'élan créateur de Manson n'est pas brisé, lui fallait-il une reprise? Ne pouvait-il pas écrire lui-même une chanson? Qu'importe, à la fin de l'année, c'est "The Golden Age Of Grotesque" qui vient ravir tous les nouveaux fans de la "Tainted Love Generation". La thématique n'est plus tournée vers la religion, la société ou les médias, il semble plutôt s'intéresser à l'Allemagne de Weimar, cette Allemagne décadente, se préparant à l'arrivée du nazisme. On peut voir cet album comme une critique métaphorique de notre société, qui se prépare à un nouvel ordre mondial, avec les attentats du 11 septembre, la domination des Etats-Unis agissant en toute impunité et n'hésitant pas à recourir à des méthodes dignes des pires régimes dictatoriaux. Musicalement, le tout reste assez médiocre. Les fans de la nouvelle génération se contentent de ce qu'ils ont, oubliant souvent tout ce qui a précédé dans l'œuvre de Manson, les autres le lâchent définitivement.
Manson se fera à nouveau attendre, quatre années durant, sans une nouvelle, si ce n'est un mariage qui se soldera par un divorce moins d'un an plus tard et la sortie d'un nouveau single/reprise qui, selon toute vraisemblance, devait jouer le rôle de ses prédécesseurs et remettre Manson sur les rails, mais ça ne prend plus. Son dernier album ne recevra pas de critiques élogieuses et l'artiste replonge dans l'oubli presqu'instantanément…
Fini la description, place aux extraits (pour que vous puissiez juger de la diversité de sa musique).
Lunchbox (album: Protrait Of An American Family)
Sweet Dreams (album: Smile Like Children)
The Beautiful People (album Antichrist Superstar) Clip grandiose, Manson au sommet de son art, une écoute au casque révèle toute la complexité de l'oeuvre.
Come White (album: Mechanical Animal)
The Nobodies (album: Holy Wood)
Mobscene (album: The Golden Age Of Grotesque)
J'espère vous avoir donné un nouveau regard sur cet artiste souvent mal compris et sur lequel on dit souvent tout et n'importe quoi. Comme vous l'aurez compris, j'ai été un très grand fan de Marilyn Manson. Aujourd'hui, je l'écoute plus par nostalgie, mais j'ai été heureux de me replonger dans sa musique pour vous en parler!