Georges de la Tour

Citation :

Georges de La Tour est baptisé le 14 mars 1593 à Vic-sur-Seille, siège du bailliage de l'évêché de Metz. L'acte de baptême de Georges de La Tour, conservé à la mairie de Vic-sur-Seille, indique qu'il est le fils de « Jean de la Tour boullengier [= boulanger] », et de Sibylle de Crospaux, issue également d'une famille de boulangers. Il est le deuxième des sept enfants de la famille.

Son parcours, et particulièrement sa formation initiale, restent mal connus. Il débute une carrière de peintre et fait peut-être la rencontre des maîtres hollandais de l'école caravagesque d'Utrecht Gerrit van Honthorst et Hendrick Terbrugghen lors d'un voyage en 1616. Il a été avancé qu'il se serait rendu à Rome où il aurait découvert l'œuvre du Caravage, mais rien ne l'atteste et, s'il est clairement influencé par le caravagisme, cette influence semble plutôt lui avoir été transmise par le biais de la connaissance de l'œuvre de Terbrugghen, peintre auquel il a souvent été comparé. Il serait donc l'un des rares peintres français de l'époque à ne pas avoir entrepris le classique voyage en Italie.

Il se marie le 2 juillet 1617 à Vic-sur-Seille avec Diane Le Nerf, membre d'une famille noble de Lunéville. Les deux époux s'installent dans cette ville où La Tour commence une carrière brillante, sous le règne d'Henri II de Lorraine, admirateur du Caravage : il multiplie les tableaux à sujet religieux mais aussi les scènes de genre, les tableaux réalistes représentant musiciens et mendiants. Il s'installe en 1619 à la cour du château de Lunéville. En 1620, il est même reçu bourgeois de la ville, doté par le duc de lettres d'exemption qui lui octroient les franchises accordées aux aristocrates. Il devient lui-même l'un des habitants les plus riches de Lunéville et reçoit de nombreuses commandes de la bourgeoisie et de la noblesse lorraine, bien qu'il ne parvienne pas à devenir peintre officiel du duc Henri II, ce titre étant alors l'apanage de Claude Deruet.

Mais à partir de 1633, la Lorraine, dirigée depuis peu par le maladroit duc Charles IV, et jusque-là prospère et sûre, sombre dans les destructions de la guerre de Trente ans. Lunéville, où réside La Tour, est incendiée en septembre 1638 et le peintre est obligé de fuir la ville pour se réfugier avec sa famille à Nancy, où l'on trouve sa trace à partir du 8 février 16391. Il se rend à Paris puisque l'on sait qu'en 1639 il y reçoit le titre de peintre ordinaire du roy ainsi qu'un logement au Louvre, le roi Louis XIII possédant un Saint Sébastien soigné par Irène de sa main. Mais ses possessions et privilèges sont chez lui, en Lorraine, et dès que sa maison est reconstruite, en 1641, il est de retour à Lunéville. Le succès est toujours au rendez-vous puisque plusieurs fois le duc de la Ferté, gouverneur français de Lorraine, se voit offrir pour ses étrennes, un tableau du maître – notamment de scènes nocturnes —, le premier étant une Nativité en janvier 16452.

Les œuvres de la fin de sa vie représentent exclusivement des scènes religieuses – bien que marquées par la peinture de genre – probablement, selon le critique Anthony Blunt, en raison du regain d'importance de la vie religieuse dû aux franciscains en Lorraine après la guerre de Trente Ans. Georges de la Tour meurt, d'après son acte de décès, d'une « pleurésie » le 30 janvier 1652 à Lunéville, mais vraisemblablement d'une épidémie qui a également emporté sa femme Diane le 15 janvier 1652 et son valet Jean « dit Montauban » le 22 janvier3. Il sombre rapidement dans l'oubli.
Son fils Étienne (né en 16214) qui a été son apprenti, seul héritier du peintre avec deux sœurs qui ne se marieront pas, va alors réaliser le rêve de son père : acheter le domaine franc de Mesnil près de Lunéville, et gagner ses lettres de noblesse, pour faire oublier son origine roturière. Il décède en 1692.

Wiki

La madeleine pénitente

J’aime bien George de La Tour. La lumière qu’il arrive à créer !

Un de mes peintres favorits et qui soutient la comparaison avec Rembrandt. En tout cas, en ce qui concerne
les effets de lumière sur ses personnages.

En effet Rembrandt est (était) fort en ce qui concerne les effets de lumière ! Et d’une manière tout à fait différente.

Merci Pia pour ta contribution, et je rajoute quelques autres peintures :



Job raillé par sa femme



la Diseuse de bonne aventure



La femme à la puce



La Fillette au brasero

Et celui-ci :

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Ne dirait-on pas une fillette venant réveiller un vieillard qui a trop veillé après dîner ? C'est typique de sa manière d'évoquer les scènes bibliques, sans le moindre décorum ou "effets spéciaux", juste par le sentiment qui naît de leur contemplation.

colimasson a écrit:

la Diseuse de bonne aventure

C'est malin, distraire monsieur avec les prédictions pour lui voler ses bijoux ! 

On n'invente rien, aujourd'hui

colimasson a écrit:

Merci Pia pour ta contribution, et je rajoute quelques autres peintures :



Job raillé par sa femme

 Toile citée par René Char, qui l'intitule "Le prisonnier": Google paraît confirmer les deux hypothèses d'intitulé, "Le prisonnier" étant plus répandu   .
Au premier abord il ne semble pas un hasard que les couleurs et teintes soient celles du feu. Et d'ailleurs la lecture du tableau se fait en partant de la chandelle.

René Char, dans Fureur et Mystère a écrit:

La reproduction en couleur du Prisonnier de Georges de La Tour que j'ai piquée sur le mur de chaux de la pièce où je travaille semble, avec le temps, réfléchir son sens dans notre condition. Elle serre le cœur mais aussi désaltère ! Depuis deux ans, pas un réfractaire qui n'ait, passant la porte, brûlé ses yeux aux preuves de cette chandelle. La femme explique, l'emmuré écoute. Les mots qui tombent de cette terrestre silhouette d'ange rouge sont des mots essentiels, des mots qui portent immédiatement secours. Au fond du cachot, les minutes de suif de la clarté tirent et diluent les traits de l'homme assis. Sa maigreur d'ortie sèche, je ne vois pas un souvenir pour la faire frissonner. L'écuelle est une ruine. Mais la robe gonflée emplit soudain tout le cachot. Le Verbe de la femme donne naissance à l'inespéré mieux que n'importe quelle aurore.
    Reconnaissance à Georges de La Tour qui maîtrisa les ténèbres hitlériennes avec un dialogue d'êtres humains.  

 A noter que le "bureau" en question a toutes les chances d'être un petit bureau improvisé, de planque, de clandestin, de maquisard du "Capitaine Alexandre" (le pseudonyme de résistant de René Char); c'est ce que je comprends au vu de la place de ce texte dans l'ouvrage de Char (c'est situé dans les Feuillets d'Hypnos, dans Fureur et Mystère).
 Le: "pas un réfractaire" ou le: "son sens dans notre condition" corroborent l'hypothèse.

pia a écrit:

La madeleine pénitente

J’aime bien George de La Tour. La lumière qu’il arrive à créer !

Aussi intitulée "Madeleine à la veilleuse", d'où le poème éponyme de René Char (toujours).  Ce poème se trouve dans "La fontaine narratrice" (1947) et donc, toujours, dans le corpus de "Fureur et mystère".

Voici le poème, un peu plus qu'un simple commentaire de tableau, même si, l'ayant lu, vous ne regarderez jamais plus cette toile de la même façon:

Citation :

MADELEINE À LA VEILLEUSE

par Georges de La Tour

   

Je voudrais aujourd'hui que l'herbe fût blanche pour fouler l'évidence de vous voir souffrir : je ne regarderais pas sous votre main si jeune la forme dure, sans crépi de la mort. Un jour discrétionnaire, d'autres pourtant moins avides que moi, retireront votre chemise de toile, occuperont vôtre alcôve. Mais ils oublieront en partant de noyer la veilleuse et un peu d'huile se répandra par le poignard de la flamme sur l'impossible solution.

Merci Sigismond d'avoir trouvé ce "commentaire" (poème) de tableau de René Char. On voudrait que tous les commentaires de tableaux soient comme ça. Et en effet je vois le tableau différemment maintenant. A la René Char!

Ce n'est donc pas seulement une vanité que la Madeleine tient à sa main ?

Sur ce fil, nous tous qui avons posté avons privilégié les toiles de de La Tour à ambiance nocturne, plutôt que celles à ambiance diurne, à l'exception de "La diseuse de bonne aventure": est-ce un hasard, je ne le crois pas, celles-ci nous frappent, ou nous interpellent, nous intriguent sans doute davantage aujourd'hui, il serait, peut-être, intéressant de tenter de comprendre pourquoi.

La lumière, d'une bougie qu'on imagine à calme flamme apaisante, est au centre-gauche, point de départ de la lecture du tableau, interrompue et masquée par l'avant-bras et la main levée.
Le spectateur se situe encore une fois dans l'ombre, par rapport au tableau, et est coupé de la lumière directe par ce personnage du premier plan, qui n'est pourtant pas le personnage principal, c'est sans doute même le moins "principal" des trois !. Ce personnage-ci, pourtant, renvoie la lumière du blanc lumineux de son buste, vers le nouveau-né, central et langé de linge d'un blanc nettement plus mat.
Ne peut-on y voir une allégorie d'un ventre féminin n'ayant pas encore porté d'enfant qui envoie la lumière (vie ?) vers un nouveau-né ?

Au passage, la technique picturale d'intérieur nuit utilisée par de La Tour se reproduit à l'identique (bougie masqué et bras au premier plan) dans cette œuvre, déjà postée un peu plus haut sur le fil:

Ce nouveau-né est, en tous cas, un bébé de facture "vraie", exacte.
Y voir une Vierge maternante, ainsi que je le laisse entendre sur le fil "La mère et la maternité dans l'art" est une piste, dans le contexte historique du tableau, mais qui peut s'avérer complètement fausse. Optons, prudemment, pour une "Nativité" ?

Le parti pris de ne montrer aucune pilosité, y compris sur les sourcils esquissés, nimbe l'ensemble d'une grande douceur, les attitudes sont figées sans raideur, au contraire même le personnage du premier plan semble très animé (une sage-femme ? une voisine ? une sœur ?). Et nous avons cette habituelle palette aux tons chauds, avec des déclinaisons de rouge, propre aux intérieurs de nuit chez de La Tour.
Mais ce rouge est aussi porté par le personnage situé le plus dans la pénombre, comme un retrait léger de la plus chaude couleur de la toile.
Accentuant ceci, les modelés arrondis confèrent ce supplément de douceur harmonieuse.
Une grande sérénité sourd de ce tableau, très propice à une méditation...nocturne ?

Georges de La Tour inspire, décidément, les écrivains, après René Char plus haut dans le fil voici ce que dit Pascal Quignard du "Nouveau-né", il est moins hésitant que je ne le suis sur l'aspect Marial/Nativité. Peut-être a-t-il trouvé la clef, qui situerait cette œuvre a de subtils confins art profane / art sacré.
 

Pascal Quignard, à propos du \"Nouveau-né" de Georges de La Tour a écrit:

« Dans le Nouveau-né, la lumière de la chandelle est masquée derrière la main levée.

Elle hésite entre bénir ou protéger la flamme et se concentre sur l'énigme d'un minuscule homme ligoté de bandelettes, qui sera un jour un mort. Le bébé devient le foyer dont la clarté vient sculpter de sollicitude les deux visages des jeunes femmes qui sont penchées sur lui.

Chez La Tour, les dieux sont sans nimbes, les anges sont sans ailes, les fantômes sans ombre. On ne sait si c'est un enfant ou Jésus. Ou plutôt : tout enfant est Jésus. Toute femme qui se penche sur son nouveau-né est Marie qui veille un fils qui va mourir. »

sans doute sur une impression trop rapide (et une certaine envie de ne pas voir les choses comme Quignard ?), si je trouve quelque chose d'un peu morbide dans le tableau, je pense que c'est une occasion d'envisager ce qui fait qu'on le trouve néanmoins serein, doux, apaisant éventuellement.

et pour ça je pense que la femme de profil qui masque la flamme de la chandelle est essentielle. si on attribue à la mère un rien d'étonnement ou d'interrogation devant le mystère, pourquoi pas ? qui n'est pas que celui de la mort mais aussi, d'abord ici, celui de la vie (ou de l'incarnation ?).

spectateurs plongés nous aussi dans l'ombre on peut en revenir à la femme qui porte la chandelle et la renvoie vers l'enfant, elle agit et montre, révèle ? non sans intimité (ça fait partie de ce qui marche chez de la Tour ce sentiment d'intimité de vision individuelle ?). Elle guide la lumière, le regard et les pensées (méditations) vers le mystère éclairci (partiellement), agissante on peut lui prêter un savoir ou une sagesse qu'elle partage par son geste.

dans l'absolu elle peut se révéler alter-ego de la mère enrichie d'une expérience, ce qui renforce le sentiment de transmission (en douceur). ça serait trop différent sans ce personnage qui s'efface ?

Je trouve aussi, Animal, que Pascal Quignard nous propose là une lecture de tableau digne d'un curé de campagne de l'ancien temps (sauf son respect, et sauf celui des curés de campagne de l'ancien temps) .

J'ai beau écarquiller, je ne vois rien de morbide dans ce tableau, j'ai presque envie d'ergoter en réponse qu'à l'époque de Georges de La Tour ça faisait belle lurette qu'on n'entourait plus les corps des trépassés avec des bandelettes, mais qu'on les couvrait d'un drap mortuaire.

Tout à l'opposé, beaucoup de joie, une joie profonde, calme et sereine (avec peut-être même une pointe d'exubérance suggérée par le personnage de premier plan).
Tout à l'opposé, j'y vois la joie du grand mystère de la vie, au milieu des ténèbres.

Enfin, pour les besoins de la symbolique qu'il met en exergue, il part du postulat que ce nouveau-né est un garçon, et si c'était une fille ?
Ne la verrait-il pas, l'extrême douceur, où prendrait-il le rappel-avertissement à la souffrance et à la mort si cette toile mettait en scène trois personnages féminins ?

On retrouve cette sensation d'intimité, de sobriété et de recueillement dans "Tous les matins du monde". Je ne sais pas trop ce que vaut le roman sur le plan littéraire parce que je ne l'ai pas encore lu mais le film de Corneau est assez réussi !