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| Manuel Puig [Argentine] | |
| | Auteur | Message |
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domreader Zen littéraire
Messages : 3409 Inscription le : 19/06/2007 Localisation : Ile de France
| Sujet: Manuel Puig [Argentine] Ven 28 Nov 2014 - 17:16 | |
| Source WikipédiaManuel Puig est né en 1932 en Argentine et mort en 1990 au Mexique. Alors qu'il n'a que quatre ans, sa mère lui fait découvrir le cinéma, seule distraction dans la petite ville de la pampa où ils vivent. En 1946, il va à Buenos Aires poursuivre sa scolarité, avant d'entrer en 1951 à la Faculté de Philosophie et de Lettres. Une bourse lui permet, en 1956, d'étudier le cinéma à Rome, puis il enseigne l'espagnol à Londres et à Stockholm. Il commence à écrire des scénarios pour le cinéma, puis met en chantier son premier roman, à New York, en 1963. Juan Goytisolo envoie La Trahison de Rita Hayworth au concours Seix Barral, que le roman remporte. Le titre révélait déjà l'utilisation du cinéma et de la culture populaire dans ses romans. Manuel Puig poursuit sa carrière de romancier avec succès, mais subit des pressions de la censure argentine, et il s'installe au Mexique dans les années 1970, où il aborde librement le sujet de l'homosexualité dans son roman le plus connu Le Baiser de la Femme Araignée, 1976. Puig publiera encore quelques romans, dont " Pubis Angélical" (1979) et " Tombe La nuit tropicale" (1982), qui prouvent une grande maîtrise de l'art du dialogue. Il est également l'auteur de plusieurs pièces de théâtre. En 1981, il s'installe, à Rio de Janeiro. Il retourne ensuite au Mexique avec sa mère, à Cuernavaca, où il meurt à 58 ans, d'une crise cardiaque à la suite d'une opération. | |
| | | domreader Zen littéraire
Messages : 3409 Inscription le : 19/06/2007 Localisation : Ile de France
| Sujet: Re: Manuel Puig [Argentine] Ven 28 Nov 2014 - 17:24 | |
| Le Baiser de la Femme Araignée Manuel PuigVoilà un drôle de huis clos carcéral, puisqu’il n’en est pas vraiment un, tant on s’évade à l’extérieur par l’imagination, le récit, le souvenir. Deux hommes sont réunis dans une cellule, l’un est un prisonnier politique Valentin, l’autre un homosexuel condamné pour détournement de mineur, c’est Molina. A priori ces deux hommes n’ont rien en commun, ils sont de milieux différents et ont tous deux des aspirations on ne peut plus différentes. L’un ne pense qu’à poursuivre la lutte révolutionnaire, l’autre qu’à un amour ébauché avec un autre homme dans un café. Grâce à Molina cependant, une sorte d’amitié se tisse au fil des jours et surtout des nuits pendant lesquelles il raconte à Valentin des films américains des années 40. De même que Valentin nous sommes suspendus à ses lèvres tant son talent d’évocation est puissant. Mais les cartes sont brouillées et les lignes sont fluctuantes, qu’adviendra-t-il de cette amitié à géométrie variable. Qui est l’araignée, et qui est réellement pris dans la toile ? Un très étonnant roman qui fait une belle place à l’amitié, parfois amoureuse entre ces deux hommes que tout sépare et qui finissent par se rapprocher par le biais de l’évocation ou plutôt de l’évasion cinématographique. Un roman étrange et savamment construit d’alternances entre les dialogues de ces deux hommes, des récits de films, des délires fiévreux, ou encore des rapports de police. De très beaux moments, toujours pudiques et émouvants, et au final un texte assez remarquable, même si la traduction ne se fait pas assez oublier. | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Manuel Puig [Argentine] Ven 28 Nov 2014 - 18:24 | |
| ce livre parait intéressant avec un sujet pas banal. Merci Dom, ton commentaire en dit juste ce qu'il faut. | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Manuel Puig [Argentine] Lun 2 Nov 2015 - 17:17 | |
| Le baiser de la femme-araignée
Pour occuper leurs longues soirées, un prisonnier raconte à l'autre les films qui l'ont marqués. Cela commence par La féline de Jacques Tourneur dont la totalité de l'énigme sera contée nuit après nuit tissant un lien de plus en plus dense et intense entre les deux prisonniers.
domreader a très bien parlé de l'ambiance hypnotique de ce livre uniquement composé de dialogues (en dehors de textes psychanalytiques placés comme des notes de bas de page). Les seules descriptions sont celles faites par Molina racontant les scènes successives de films dans lesquels le lecteur finit par s'introduire totalement. Le rythme des dialogues, l'hypnose qui en jaillit est à peine perturbée par ces étonnantes incises psychanalytiques : il s'agit de résumés des grandes théories (de Freud à Marcuse) sur les raisons de l'homosexualité : déviance ou normalité ? Libération sexuelle et répression de la libido sont alors proposées au lecteur pour aboutir à cette conclusion : le couple formé par un homme et une femme, cette 'normalité' n'est en réalité qu'une construction artificielle de nos sociétés modernes. La relation entre Molina et Valentin ressemble alors à une mise en application des thèses proposées. Et ce jeu de miroir est totalement fascinant, comme sont fascinants les récits nocturnes de Molina qui mettent tous en scène des femmes fatales dont les amours finissent mal (mâle ?).
La position du lecteur au début du livre est assez inconfortable : on ne sait pas qui parle, on ne sait pas immédiatement que les deux hommes sont incarcérés, on ne comprend pas tout de suite qu'il s'agit de récits cinématographiques enchâssés dans le récit-dialogue… Tout cela crée une ambiance assez étrange mais quand on commence à comprendre que l'araignée est en train de tisser sa toile autour du lecteur lui-même, il est trop tard pour s'en débarrasser et emprisonné (tout comme les deux hommes) on ne peut que désirer poursuivre jusqu'au bout cette lecture totalement atypique et déroutante.
Et puis, une fois le livre refermé, ce qui m'étonne le plus, c'est qu'il s'agit d'un roman qui, au-delà de sa maîtrise formelle, interroge l'idée de couple et introduit la question, toujours renaissante, du 'contre-nature'. Qu'il s'agisse de La féline, femme-panthère qui ne peut être embrassée par un homme ou de celle qui se prostitue pour pouvoir vivre dans près de son homme, qu'il s'agisse d'une française éprise d'un bourreau nazi, qu'il s'agisse de Molina, dont la féminité s'affirme même dans le genre qu'il se donne (il parle de lui en disant 'elle'), les questions sous-jacentes de la position de l'être dans le couple rejaillissent avec force. Faut-il nécessairement que la 'femme' (je mets des guillemets car il s'agit ici aussi bien de la femme fatale du cinéma que de la 'tapette' incarcérée) se soumette à l'homme pour pouvoir être heureuse ? Faut-il nécessairement que l'homme impose sa virilité, sa force physique, sa jalousie pour pouvoir se vivre homme ? Pour quelles raisons ses schémas fonctionnent encore parfaitement aujourd'hui, après la révolution sexuelle et malgré le mariage homosexuel ? Les notes psychanalytiques donnent certaines réponses à ses questions et le cheminement intérieur, personnel, de Valentin met en application ce qui se joue en sous-main. C'est à un véritable plaidoyer pour les 'femmes' et à une vraie redéfinition du rôle du masculin et du féminin dans le couple que s'attache Puig. Je ne m'attendais pas à un tel brûlot, ni à une telle finesse analytique, je ne m'attendais pas à tant de fascination, ni à tant de questionnements une fois refermé ce long dialogue.
Merci à domreader d'avoir parlé de ce 'roman', d'avoir dégagé les grandes lignes de force qui sous-tendent cet ovni littéraire.
Je suis maintenant terriblement curieuse de voir le film qui a été tiré de ce livre troublant.
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| Sujet: Re: Manuel Puig [Argentine] | |
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