LC Bouvier "le poisson-scorpion"

« On peut s’en aller pour ne pas occuper la niche que déjà la société vous prépare, pour ne pas s’appeler Médor; »
 
Ncolas Bouvier

En dehors de l' épisode de Ceylan, Bouvier se moque des conditions atmosphériques. Sur l' Ile d' Aran, il connait le gros temps, la tempete... Il est fiévreux, malade comme un chien et pourtant, ses
impressions sont aussi lucides qu' électrisantes.

merci Shanidar pour l'info sur l'Inde.  Avais-tu acheté le Quarto ?

Exact Bix dans les autres livres lu, les caprices du climat ne l'importune pas psychologiquement comme ici à Ceylan.

La chaleur intense, sa faiblesse, son magot qui fond, la crainte s'installe. La couleur des nuits est propice aux délires, mais qui me paraissent utiles car comme pour les soucis, ils occupent ; de même la vie des insectes qu'il nous présente avec humour et respect, comme il le dit, "La vie des insectes ressemble en ceci à la notre : on n'y a pas plutôt fait connaissance qu'il y a déjà un vainqueur et un vaincu."

Alors qu'il parle avec le vieil ivrogne, démunie, abandonné,  que tracassent ceux de l'échoppe Bouvier devient fataliste : "Il sait que je le comprends, peut-être a-t-il lu dans mes yeux qu'un jour je finirai comme lui."

et

"Le désespoir c'est tout de même mieux que rien du tout, c'est palpable et tenace plus que la joie qui ne dure jamais plus qu'on en peut supporter."

Bouvier perd pied,  le conflit entre  réalité et  manoeuvres occultes lui occasionne des hallucinations, il doute, se reprend pour s'effondrer plus profondément.

Alors qu'il est prêt de craquer, lui parvient un courrier et un mandat, plus une commande. Bouvier se jette dans l'écriture pour honorer la commande, c'est réconcilié avec lui-même qu'il passe les derniers jours sur l'Ile.

Il plie bagage, non sans promener un dernier regard sur la chambre où il vécut plusieurs mois "prisonnier".

Comme toujours ce livre porte les odeurs et là beaucoup de bruits avec les insectes, acteurs omniprésents.

L'écriture de Bouvier n' a jamais été aussi dramatiquement belle, il n'a jamais autant donné de lui physiquement et psychologiquement. Cette Ile lui a pris beaucoup, mais il sait que le voyage prend son dû de l'Homme.

Certainement que ce livre est un exutoire, mais peut-être aussi une rédemption ?




ps : je n'achèterais jamais de rideau en bonites séchées

Bédoulène a écrit:

On est pas sur que sa petite amie soit du scorpion ?

P 91 (éd folio) Elle est justement du Scorpion et "très belle de figure"

Ce n'est pas mon idée, c'est écrit!

Bédoulène a écrit:

Bouvier perd pied,  le conflit entre  réalité et  manoeuvres occultes lui occasionne des hallucinations, il doute, se reprend pour s'effondrer plus profondément.

Je n'en suis pas là mais la première hallucination n’es elle pas cet épisode sur la plage où il se retrouve par terre, comme poussé par un génie? Et sa description "hallucinante" de la cité des insectes, des termites dévorantes, poésie ou folie?


En tout cas, il a l'air guéri physiquement, il n'en parle plus. Par contre il déprime peu à peu, les habitants lui paraissent presque tous malappris, mesquins etc... On se demande un peu le plaisir qu'il prend à rester là, on ne sait pas trop pourquoi, à moins que la fréquentation des insectes lui apporte des joies qu'elle ne m'apporte pas. Et puis survient cette sublime description de l'épicière, il reprend goût à la vie face à ce mastodonte malicieux, cetet tamoule qui reprend la tradition commerciale de son peuple face à l'inertie des autres insulaires.

Et bien ne voilà-t'il pas que l'épicière tamoule a un poisson-scorpion dans un bocal à concombre, dont N Bouvier est un peu jaloux.

(et au passage il a prend de la quinine, d'où l’amélioration de sa santé)

"Je l'ai posé sur le plancher qu'il a traversé comme un éclair pour disparaître dans une crevasse du mur où il attendra que sa maman vienne le chercher.

Elle (la maman) est justement du scorpion et "très belle de figure", c'est donc ma journée de bonté."

j'ai du mal à imaginer qu'il associe le terme "maman" à sa petite amie ?

mais c'est vrai que "très belle de figure" s'associe mal avec la maman scorpion !

on dira que c'est tiré par les cheveux pattes !

Je pense que les hallucinations sont provoquées par l' association maladie, le climat, la solitude.

Il n'est pas complètement guéri puisqu'il se plaint souvent de la faiblesse de ses jambes.

Pourquoi reste-t-il ? il me semble qu'il devait après l'inde partir en Chine mais que la frontière était fermée (explication trouvée sur internet) donc il est obligé de choisir Ceylan, mais sur l'ile au début de livre je crois qu'il évoque des grèves, transports etc...  

Il se demande lui-même qu'est-ce qui le pousse à rester, mais il est bien affaibli  et Shanidar nous a dit que dans sa traversée de l'Inde il avait eu la malaria, donc on peut penser qu'il traînait encore les germes de la maladie.

Topocl a écrit : En tout cas, il a l'air guéri physiquement, il n'en parle plus. Par contre il déprime peu à peu, les habitants lui paraissent presque tous malappris, mesquins etc... On se demande un peu le plaisir qu'il prend à rester là, on ne sait pas trop pourquoi, à moins que la fréquentation des insectes lui apporte des joies qu'elle ne m'apporte pas. Et puis survient cette sublime description de l'épicière, il reprend goût à la vie face à ce mastodonte malicieux, cetet tamoule qui reprend la tradition commerciale de son peuple face à l'inertie des autres insulaires.

il les respecte et je pense que le livre acquis dans son passage à la capitale le conforte dans ses observations.(ta remarque sur les joies   )

oui délicieuse description de cette femme qui le tente et très juste remarque sur la tradition commerciale

et oui le voilà en chair le poisson-scorpion que d'ailleurs l'épicière lui donne !



Le chapitre intitulé PADRE est des plus étrange et déroutant (Chymère s'y serait intéressé )

mais quand l'écriture a cette qualité peu importe le sujet.

Bédoulène a écrit:

"Je l'ai posé sur le plancher qu'il a traversé comme un éclair pour disparaître dans une crevasse du mur où il attendra que sa maman vienne le chercher.

Elle (la maman) est justement du scorpion et "très belle de figure", c'est donc ma journée de bonté."

j'ai du mal à imaginer qu'il associe le terme "maman" à sa petite amie ?

mais c'est vrai que "très belle de figure" s'associe mal avec la maman scorpion !

on dira que c'est tiré par les cheveux pattes !

Pour ma part, je reste sur mon idée qu'il parle de sa petite amie, qu'il appelle "Elle" depuis le début du chapitre.

Bédoulène a écrit:

oui délicieuse description de cette femme qui le tente et très juste remarque sur la tradition commerciale

je me suis dit que dans un autre livre, on pourrait lire la même remarque sur une commerçante juive, mais que pour les Tamoules, contexte autre, cela fait anthropologique et non raciste.

sur les insectes :

N Bouvier a écrit:

" La vie des insectes ressemble en ceci à la nôtre : on n'y a pas plutôt fait connaissance qu'il y a déjà un vainqueur et un vaincu."

oui j' ai relevé aussi la phrase concernant les insectes ! très vraie !

ta remarque sur la Tamoule par rapport au racisme est importante.

Bon donc ELLE est scorpion, je veux bien le croire, mais là il aurait pu faire la réflexion devant le poisson dans le bocal !

J'ai bien aimé aussi ce qu'il imagine sur le mari de l'épicière " Ou que ramené à l'état d 'homoncule, il fulmine et gesticule à son aise sous son gigantesque séant".
c'est du Brassens ça !

Bédoulène a écrit:

c'est du Brassens ça !  

mâtiné des croyances insulaires!

Haha! Bouvier est de plus en plus misanthrope, et lui et moi, décidément, ne sommes pas de la même espèce :

N Bouvier a écrit:

"il n'y a plus que les insectes pour me faire rire ici"

L'escarbot (je découvre que c'est l'autre nom du scarabée)

Finalement, N Bouvier pense comme moi :

Citation :

"je n'ai pas encore compris dans quel piège j'étais tombé ici ni pourquoi je m'obstine à y croupir. »

Nicolas Bouvier, nomade dans l'âme qui rêve de le redevenir, poursuit son lent et sombre cheminement vers le non-sens, entouré d'hommes hostiles , de visions et d'insectes crissants.
Et puis, au final, le choc à la fois insignifiant et décisif, qui va permettre de repartir,il plie ses bagages.

merci, Bédoulène, c'était une très bonne idée, cette lecture!