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| Laszlo Nemes | |
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Auteur | Message |
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Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Lun 9 Nov 2015 - 22:50 | |
| Certains critiques parlent du thème d'Antigone et c'est vrai qu'il y a de ça dans cette quête d'offrir une sépulture à un mort. Avec tout ce que ça implique de moral, politique, sacré...
Michel Ciment a consacré sa dernier émission à Laszlo Nemes et je vais m'en régaler demain dans ma voiture... Pourvu qu'il y ait des bouchons !
Projection privée: Laszlo Nemes | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Mar 10 Nov 2015 - 23:25 | |
| Laszlo Nemes sur la question du "beau": - Citation :
- Surtout pour un sujet comme celui-là vient pour un réalisateur la question de la stylisation de l'horreur. Jusqu'où pousse-t-on la mise en scène d'une telle atrocité ?
C'est une question très intéressante. Au début du film, avec le chef opérateur, on a fixé une série de règles, dans laquelle on a inscrit : "Cela ne peut pas être beau." Le Fils de Saul n'est pas un film iconique. A tel point que j'ai eu beaucoup de mal à choisir une photo du film pour la presse. En sachant que ce sera de toute façon toujours réducteur, que prend-t-on ? On ne voulait pas faire de belles choses pour la lumière, pour la composition, pour le cadrage... On ne voulait pas faire un film beau. Il fallait rester au plus près de Saul, d'où cette caméra à l'épaule et l'utilisation d'un objectif quasi unique. Il fallait faire le film le plus simple possible. Souvent les films sur la Shoah peuvent se révéler esthétisants. Il a fallu faire attention à ne pas être amoureux de nous-mêmes et de nos images. D'où aussi ce choix d'avoir cassé nos plans-séquences. Dans ce sens, nous n'avons pas voulu "faire" du Bela Tarr... | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Mer 11 Nov 2015 - 11:59 | |
| Dans l'émission Projection Privée il évoque son souhait de raconter une histoire archétypale, primitive, organique. De créer une expérience immersive en donnant le sentiment du présent dans le passé. De revenir sur des thèmes déjà présents dans ses courts métrages sur la guerre, l'humiliation, l'enfermement. De suggérer par ces images floues le regard fermé de Saul qui ne regarde plus ce qu'il y a autour à force d'être confronté à l'horreur permanente et à des traumatismes incessants. L'enfant permettant d'ouvrir la perspective visuelle, de créer une forme de tunnel dans l'obscurité.
On apprend aussi que Le Fils de Saul aurait du être un film français dont le personnage devait parler français même s'il y avait déjà l'idée de toutes ces langues mélangées forcément. La co-scénariste étant française et Laszlo Nemes ayant vécu en France durant son enfance. Ils n'ont pas réussi à trouver les financements en France car le sujet paraissait trop ambitieux, risqué… Tant pis pour eux! | |
| | | églantine Zen littéraire
Messages : 6498 Inscription le : 15/01/2013 Age : 59 Localisation : Peu importe
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Ven 20 Nov 2015 - 11:05 | |
| - Marko a écrit:
Je suis sorti de cette expérience assez traumatisante avec le sentiment d'avoir vu quelque chose d'essentiel et d'unique. Comment ont-ils fait pour donner la palme d'or à Deephan et pas à ce Fils de Saul qui marquera l'histoire du cinéma pour longtemps?
Voilà quelques temps déjà que j'ai vu ce film . Les évènements m'ont cloué le bec et paralysé les doigts sur le clavier . Mais je rejoins totalement cette impression : je suis ressortie quelque peu hébétée .... avec la conviction toute personnelle d'avoir vu une oeuvre ESSENTIELLE . Laszlo Nemes nous entraine au delà de la sensibilité première pour toucher une partie plus profonde de l'homme et sa quête de sens . Une audace assumée de la part de ce réalisateur en nous offrant un film bijou sur le plan esthétique , une histoire qui s'apparente à une sorte de fable parabolique . | |
| | | Exini Zen littéraire
Messages : 3065 Inscription le : 08/10/2011 Age : 51 Localisation : Toulouse
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Dim 22 Nov 2015 - 10:32 | |
| Avis plus proche de ceux de Mezzavoce et Animal, pour ma part. Certes, le réalisateur choisit la caméra à l'épaule, au plus proche du personnage principal. Une immersion dans l'abomination au plus près et qui réussit le tour de force de ne pas montrer l'immontrable, du moins par la fiction, comme certains le conçoivent. Et on suit quand même tout le processus de déshumanisation (scène de l'appel des sonderkommandos par leur numéros), d'élimination de masse et de tentative de destruction de preuve du génocide - système effroyablement méthodique et logique d'une monstrueuse et absurde idéologie. Et comment filmer l'infilmable ? Par les fonds sonores, les seconds plans, la plupart du temps plus ou moins flous, la vitesse. Saül serait happé par ce système s'il n'avait trouvé un but pour être une dernière fois, même furtivement. Mais... - Marko a écrit:
- Témoignages de ces prisonniers obligés de participer aux différentes étapes de la solution finale et condamnés eux-mêmes à plus ou moins brève échéance tout en le sachant. Donc des individus déjà morts, comme le dit Saul dans le film, aussi bien de par leur destinée fatale annoncée que par le fait d'être les témoins et acteurs involontaires de la déshumanisation et de l'extermination des leurs. Des hommes soumis à des violences inouïes et des traumatismes constants dans cette usine de la mort dont ils ont pu témoigner du vacarme incessant et de la barbarie.
"Je suis déjà mort", la réponse de Saül est individualiste. Il représente peut-être un partie - voire la majorité - de ceux qui sont passés par les camps. Mais tous n'étaient pas prisonniers du système, et résistaient à la volonté d'asservir, de détruire toute personnalité, individualité. Dessin d'Anatoli Garnik montrant son travail et sa vie quotidienne de déporté utilisé par un einsatzgruppe pour brûler les corps des fusillés, preuves du génocide. Ces déportés ne vivaient qu'une dizaine de jours. Il eût le temps de croquer une douzaine de dessins durant cette courte période. L'un d'eux, non trouvé sur internet, caricature le nazisme avec un humour corrosif et effrayant à la fois.Chez les SonderKommandos, se sachant proches de la fin, une révolte s'organise, une volonté de survie, un éclat de vie sur les visages existe. Ils ne sont pas déjà morts. Au bout d'un moment, tout comme Animal, j'ai ressenti une certaine lassitude, je ne suis pas rentré dans l'histoire. Je me suis ennuyé ? Peut-être, ça fait deux semaines, je ne me rappelle plus. Une plongée radicale au début - pas plus d'une demi-heure, le temps d'admirer la technique du réalisateur pour faire rentrer le spectateur directement dans la banalité de l'atroce - avant de me lasser de la prise de position, de me détacher (de remonter à la surface ?). Seules les scènes de dialogues avec les autres sonderkommandos me ramenaient au film. Mais mon avis est purement personnel. Quand je me suis levé, une femme s'accrochait aux accoudoirs, tremblante, des larmes coulant sur ses joues. | |
| | | Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Jeu 26 Nov 2015 - 0:14 | |
| Le fils de Saul
Je suis resté malheureusement, comme certains, à l'extérieur du film malgré l'intensité et la cohérence de la mise en scène de Nemes. Le spectateur est en effet plongé immédiatement dans un décor de cauchemar et de chaos, suivant les pas de Saul au rythme d'une fuite en avant perpétuelle. Les bruits, les cris sont omniprésents mais presque relégués en sourdine, à l'arrière-plan tant prime la sensation d'être dans un monde déjà englouti par la mort. La quête symbolique de Saul est alors une lutte désespérée pour affirmer la possibilité d'un avenir, d'une continuité.
J'ai cependant trouvé que la démonstration d'un dispositif de cinéma fragilisait considérablement l'incarnation du propos, que ce soit par la rigueur du cadrage, les flous de l'image, les mouvements de caméra auprès de Saul. Une tension extrême est renouvelée de bout en bout pour saisir l'horreur quotidienne du camp, mais la dimension technique de cet effort m'a au final empêché d'être investi émotionnellement dans le film. C'est une impression vraiment frustrante. | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Jeu 26 Nov 2015 - 23:16 | |
| L'avis dont je me sens le plus proche, est peut être celui d'Avadoro. Je ne suis pas non plus vraiment rentrée dans ce film, j'ai trop eu conscience de quelque chose de pensé, certainement avec intelligence, mais qui n'emportait pas au final car trop pensé et construit, et n'échappant pas à un certain artifice. Les intentions ne suffisent pas, il faut que le résultat puisse les traduire avec une certaine évidence pour le spectateur. Et là je n'ai pas été convaincue. Pour un tel sujet, il manquait sacrément une émotion. | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Ven 27 Nov 2015 - 0:35 | |
| Il ne cherche pas l'émotion dans le sens empathique du terme mais à travers la sidération d'une immersion dans un monde complément absurde et cauchemardesque où on ne peut jamais savoir ou anticiper ce qui va se passer parce que les règles sont folles. Un monde de terreur, de désespoir et de traumatisme constant qui n'a aucune logique autre que la déshumanisation et la mort. C'est le premier film à faire éprouver ce que cette expérience a pu être. Ce qu'il en fait est d'une force incroyable. On est dans une usine de mort et ces personnages sont déjà des fantômes. Il choisit aussi le point de vue intéressant de quelqu'un qui est tellement immergé dans cette folie qu'il ne la regarde même plus autrement que par fragments. En ce qui me concerne j'ai ressenti viscéralement ce que vivait ce personnage et c'était une expérience dont l'effroi n'était modéré que par cette évasion en forme de parabole et de conte moral qui offre un début de lueur. Franchement ce film est magnifique. Mais je peux comprendre vos réticences même si je ne les partage pas. | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Ven 27 Nov 2015 - 6:25 | |
| pendant le film et après (bien que pas beaucoup) j'ai repensé aussi à Requiem pour un massacre qui est aussi un traumatisme extrême mais dont je trouve la mise en oeuvre plus aboutie et je ne suis pas sûr qu'au fond l'un soit plus conventionnel que l'autre. le regard est techniquement plus extérieur et montre plus de choses, essentielles si on peut dire, sans pour autant lâcher ce gamin au bord de l'implosion (ou déjà perdu bien après). | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Ven 27 Nov 2015 - 8:02 | |
| Le dispositif et les partis pris, trop fabriqués à mon sens m'ont empêché de me sentir immergé. Je suis toujours restée dans la position du spectateur, et plus de la façon dont était fait et construit le film, que de ce qu'il racontait. Ce qui compte tenu du sujet est gênant. Le savoir faire est impressionnant, mais à mon sens il ne permet pas réellement le ressenti. Enfin pour moi. Et même ce que tu appelles un début de lueur est quelque part tellement programmé et peu spontané... | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Ven 27 Nov 2015 - 9:13 | |
| - animal a écrit:
- pendant le film et après (bien que pas beaucoup) j'ai repensé aussi à Requiem pour un massacre qui est aussi un traumatisme extrême mais dont je trouve la mise en oeuvre plus aboutie et je ne suis pas sûr qu'au fond l'un soit plus conventionnel que l'autre. le regard est techniquement plus extérieur et montre plus de choses, essentielles si on peut dire, sans pour autant lâcher ce gamin au bord de l'implosion (ou déjà perdu bien après).
Il s'est d'ailleurs beaucoup inspiré de ce film dont il a rencontré le chef opérateur je crois. | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Ven 27 Nov 2015 - 9:17 | |
| - Arabella a écrit:
- Et même ce que tu appelles un début de lueur est quelque part tellement programmé et peu spontané...
Peut-etre un peu c'est vrai. Comme un prétexte pour justifier le projet d'immersion, lui donner une perspective symbolique et morale. Mais ce qu'il en fait est intéressant car Saul échoue partiellement dans sa quête mais l'essentiel a été fait. Ça reste une belle idée qui anime cet homme déjà mort. C'est bien la seule respiration qu'il puisse s'autoriser. Et le spectateur en a besoin. | |
| | | pia Zen littéraire
Messages : 6473 Inscription le : 04/08/2013 Age : 56 Localisation : Entre Paris et Utrecht
| Sujet: Re: Laszlo Nemes Dim 1 Mai 2016 - 17:17 | |
| Le fils de Saul
Et bien j’ai beaucoup aimé ce film, non seulement parce qu’il ne fait pas de misérabilisme, on ne nous en donne pas le temps, mais parce que la guerre, et ce qu’elle a engendré de situations dans la situation n’est pas toujours connu. J’ai encore appris quelque chose aujourd’hui. On dit toujours que les rescapés des camps ne veulent pas parler de ce qu’ils ont vécu et c’est compréhensible….Comment dire que pour survivre on a poussé les gens dans les douches, après leur avoir ordonné de se déshabiller, que l’on a trié leurs affaires, que l’on a débarrassé et brulé les corps, nettoyé les salles. Je disais que l’on a pas le temps de se morfondre sur la vie de ce type parce que le film nous immerge entièrement dans l’action de ces hommes qui n’avaient pas le temps de réfléchir, de se recueillir. Ils bougeaient sans cesse, on leur ordonnait sans cesse, ils n’avaient aucune certitudes. Les cris, les coups de feu, les plaintes….Tout va vite. Saul a une sorte de parenthèse (une sorte de folie passagère ? Ou d’absence passagère ?) où il ne peut plus accepter, et pour ça il est prêt à prendre tous les risques et à mettre en péril ses compagnons, pour un enfant qu’il veut enterrer. Au moins un qu’il enterrera. Cela le porte, rien ne l’importe plus que cet enfant mort. Ses compagnons, qui ont encore un peu d’instinct de survie accepte sans récrier, ce fait, contre lequel ils ne peuvent se révolter. Un beau film. | |
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