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| Daniel Boulanger | |
| | Auteur | Message |
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Sigismond Agilité postale
Messages : 875 Inscription le : 25/03/2013
| Sujet: Daniel Boulanger Sam 19 Mar 2016 - 19:08 | |
| Daniel Boulanger, en 1994. Acteur, dialoguiste, scénariste, romancier, nouvelliste, auteur de théâtre, auteur d'ouvrages pour la jeunesse, et aussi poète. Figura longtemps parmi les dix couverts (membres) de l'Académie Goncourt. Talentueux, insaisissable, mieux: difficile à cerner. Poète d'abord facile, je tente souvent et plutôt avec succès un essai de lecture additionné de l'audace d'une relecture à voix haute de quelques pages, à des gens qui se trouvent heureux d'être débarrassés de toute poésie depuis leur scolarité. S'il est possible d'isoler le poète du reste de son activité, c'est cette facette-là de ce touche-à-tout que je souhaite mettre en exergue: Bien entendu, déplacez si l'on pense que sa place est ailleurs sur le forum (et elle peut l'être, en de multiples endroits), à moins qu'il ne faille envisager une présence multi-fils ? Biographie (succincte !): - Spoiler:
Né le 24 janvier 1922 à Compiègne (Oise) dans une famille originaire des Flandres, fils et petit-fils de fromager, il étudie au séminaire, puis rejoint la Résistance pour des opérations de sabotage contre l'armée allemande. Grand voyageur, on le trouve ensuite au Brésil, puis il exerce comme fonctionnaire au Tchad (rédacteur aux Affaires économiques). Mais sa carrière littéraire commence dans les années 1950 avec ses premières nouvelles publiées dans des revues comme Les temps modernes et La nouvelle revue française, une entrée tardive en littérature donc - il ne publia son premier ouvrage qu'à 37 ans .
Il enchaîne ensuite à raison d'un livre par an. A partir de la fin des années 1960 des recueils de poésie, puis de pièces de théâtre, viennent s'ajouter aux romans et nouvelles, jalonner sa création, lui qui reste prolixe et très demandé en matière de septième art.
Quelques distinctions, dans le domaine littéraire, comme:
1970 Prix Max Jacob.
1971 Prix de l'Académie Française.
1979 Prix Prince Pierre de Monaco.
1983 "appelé" (sic) à l'Académie Goncourt.
1983 Prix Kléber Haedens.
En 1989 arrête le cinéma, après le film sur le bicentenaire de la Révolution Française, pour ne se consacrer qu'à l'écriture. Ce père de sept enfants décède le 27 octobre 2014 (à 92 ans) à Senlis, où il avait acquis une fort remarquable demeure historique, où ce faux personnage public et vrai reclus fut, quarante ans durant, veillé par sa gouvernante.
En matière de bibliographie et de filmographie (sommaires !) je passe le relais à wikipedia, vu l'ampleur, n'ayant rien à ajouter en particulier. Mon avis (en bref !): - Spoiler:
Retouches est le titre d'un de ses ouvrages de poésie (1969), le fait est qu'il utilise ensuite ce mot de Retouche (à...) à chaque fois en titre de ses poèmes depuis - il s'en explique ainsi: - Citation :
- Très tôt je m’aperçus que les lettres d’amour que j’envoyais se ressemblaient toutes : demande, attente, merci, nouvel appel, et que les réponses que l’on y faisait avaient le même tour. J’abrégeais donc, je contournai les évidences et ne parlai plus que du décor qui m’entourait, de l’image ou de l’idée qui me tourmentait autant que mon corps, mais je trouvai mes descriptions trop longues et mes cachettes bien théâtrales. Comme j’avais le temps je me suis mis à les réduire et dénuder, à regarder de biais ou par-dessous les villes, les êtres, mes sentiments, tout ce qui me tombait sous la main, à les concentrer en poèmes, c’est-à-dire en chambres fortes, à faire en sorte que le destinataire de ces mots eût à les forcer, à les prendre et reprendre. Je les appelai retouches.
D'où, certes, le côté cohérent de la somme poétique, et aussi la petite musique répétitive qui devient assez vite familière. Mais d'où aussi, peut-être, cette affinité que j'entretiens avec le recueil Tchadiennes, le premier, est-il hors projet ? Poésie plus libre, plus tous azimuts, plus colorée, plus chaude. Autre fait le démarquant: les poèmes n'y sont pas intitulés. Est-ce l'inspiration africaine, ou un hommage à la culture africaine ? Toujours est-il que je trouve à Tchadiennes un surcroît de dimension d'oralité, un rien moindre dans ses productions postérieures. Les poèmes de Daniel Boulanger sont brefs, jetés à la page avec cette épure et bien sûr le blanc, le grand blanc de la page figure le silence ou le vide ou le nécessaire vaste cadre pour la mise en relief plus accentuée des mots. Dans le recueil Tchadiennes uniquement, le retour à la ligne se traduit en général par une mise en majuscule du premier mot, ce qui paraît indiquer de façon certaine l'attachement à la notion, au concept de vers. Pour des exceptions, voir, dans mon message suivant, les troisièmes et quatrièmes citations, pour un exemple mixte la cinquième. Il paraît abandonner définitivement cette ultime manière de rappel au vers classique (ou habituel) par la suite. Poète peu rimailleur, encore qu'on en croise parfois, mais vraiment de loin en loin, sont-elles volontaires ces rimes ? On peut aller jusqu'à se le demander. Poète à peine plus allitératif, mais pourtant, ses poèmes passent remarquablement à voix haute, ça c'est une gageure, a-t-on assez reproché (sans entrer dans le débat est-ce ou non à juste titre ?) à la poésie francophone contemporaine de n'être faite que pour l'écrit, en sus d'être jugée comme passablement encodée, sinon hermétique ?
Daniel Boulanger dans "A bout de souffle", de J-L Godard, 1960.
Dernière édition par Sigismond le Dim 20 Mar 2016 - 7:22, édité 4 fois | |
| | | Sigismond Agilité postale
Messages : 875 Inscription le : 25/03/2013
| Sujet: Re: Daniel Boulanger Sam 19 Mar 2016 - 19:16 | |
| Je n'ai lu (mais aussi relu, et je m'y replonge volontiers) que quatre d'entre les livres de poésies de Daniel Boulanger à ce jour. Mon préféré est Tchadiennes, son tout premier, un véritable choc, rien lu de tel, je ne savais pas à quoi le rattacher, mais j'ai vite accepté de me laisser décontenancer, d'avancer en lecteur nu, sans les référents, lesquels sont, au demeurant, parfois d'handicapants artifices. Un petit échantillonnage de ses poèmes, imaginez, pour un rendu correct, que chacun soit tout seul à occuper une page du forum: - Tchadiennes a écrit:
- Midi.
La brousse a l'odeur du foie. Le noir est plein de gouffres blancs.
Chaque regard est un suicide. - Tchadiennes a écrit:
- Instant, crâne énorme.
Ma tempe bat l'horizon. - Tchadiennes a écrit:
- Devant les mufles fous d'urine
s'ouvre la lumière accomplie, mâle et femelle. - Tchadiennes a écrit:
- Au centre de la zone interdite,
l'arbre ne cesse de bondir et la tornade enivre sa licorne. - Tchadiennes a écrit:
- Entre le ciel et la folie
l'épaisseur d'un nerf.
Essaie de te rappeler cette chose en forme d'œuf qui engrossait la nuit. - Hôtel de l'image a écrit:
- retouche au virtuose
face à lui-même et toujours lui sur l'arrière et les flancs il fait son suzerain de son double étrange - Hôtel de l'image a écrit:
- retouche à la fête
au fond tremble encor l'allée d'arbres mais dans les architectures plates du présent se balance un costume vide dans le trou d'une fenêtre - Hôtel de l'image a écrit:
- retouche à l'école
du haut de la colline le cimetière est une page d'écriture aux lignes bien tirées
étrangers, visiteurs, gens d'ici en font la même lecture - Drageoir a écrit:
retouche au bannissement
caressé par la soie d'un regret le silence tient sa note obscure la ville en cerf-volant dans les fumées - Drageoir a écrit:
retouche à la habanera
l'ombre barbouillée de griottes se balance
l'épaule au blanc du ciel orange
Et un dernier, si vous lisez jusque là, extraordinaire de puissance en peu de mots (à mon humble avis): - Drageoir a écrit:
-
retouche au rustique
au bas du mur bouge encore le ciel déchiré par un chien
la nuit écarte les jambes | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Daniel Boulanger Dim 20 Mar 2016 - 7:23 | |
| merci Sigismond, je trouve que la briéveté donne de la force aux mots et les blancs posent l'oralité. | |
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| Sujet: Re: Daniel Boulanger | |
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| | | | Daniel Boulanger | |
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