Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Parfum de livres… parfum d’ailleurs
Littérature, forum littéraire : passion, imaginaire, partage et liberté. Ce forum livre l’émotion littéraire. Parlez d’écrivains, du plaisir livres, de littérature : romans, poèmes…ou d’arts…
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: Victor Hugo Jeu 12 Mar 2015 - 22:08
La joie est la chaleur que jette dans les âmes Cette clarté d’en haut qu’on nomme Vérité.
-Regard jeté dans une mansarde-
Avec ce genre de vers, on comprend tout de suite mieux la nature du mysticisme hugolien...
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: Victor Hugo Dim 15 Mar 2015 - 22:01
Passé
C'était un grand château du temps de Louis treize. Le couchant rougissait ce palais oublié. Chaque fenêtre au loin, transformée en fournaise, Avait perdu sa forme et n'était plus que braise. Le toit disparaissait dans les rayons noyé.
Sous nos yeux s'étendait, gloire antique abattue, Un de ces parcs dont l'herbe inonde le chemin, Où dans un coin, de lierre à demi revêtue, Sur un piédestal gris, l'hiver, morne statue, Se chauffe avec un feu de marbre sous sa main.
Ô deuil ! le grand bassin dormait, lac solitaire. Un Neptune verdâtre y moisissait dans l'eau. Les roseaux cachaient l'onde et l'eau rongeait la terre. Et les arbres mêlaient leur vieux branchage austère, D'où tombaient autrefois des rimes pour Boileau.
On voyait par moments errer dans la futaie De beaux cerfs qui semblaient regretter les chasseurs ; Et, pauvres marbres blancs qu'un vieux tronc d'arbre étaie, Seules, sous la charmille, hélas ! changée en haie, Soupirer Gabrielle et Vénus, ces deux soeurs !
Les manteaux relevés par la longue rapière, Hélas ! ne passaient plus dans ce jardin sans voix ; Les tritons avaient l'air de fermer la paupière. Et, dans l'ombre, entr'ouvrant ses mâchoires de pierre, Un vieux antre ennuyé bâillait au fond du bois.
Et je vous dis alors : - Ce château dans son ombre A contenu l'amour, frais comme en votre coeur, Et la gloire, et le rire, et les fêtes sans nombre, Et toute cette joie aujourd'hui le rend sombre, Comme un vase noircit rouillé par sa liqueur.
Dans cet antre, où la mousse a recouvert la dalle, Venait, les yeux baissés et le sein palpitant, Ou la belle Caussade ou la jeune Candale, Qui, d'un royal amant conquête féodale, En entrant disait Sire, et Louis en sortant.
Alors comme aujourd'hui, pour Candale ou Caussade, La nuée au ciel bleu mêlait son blond duvet, Un doux rayon dorait le toit grave et maussade, Les vitres flamboyaient sur toute la façade, Le soleil souriait, la nature rêvait !
Alors comme aujourd'hui, deux coeurs unis, deux âmes, Erraient sous ce feuillage où tant d'amour a lui ; Il nommait sa duchesse un ange entre les femmes, Et l'oeil plein de rayons et l'oeil rempli de flammes S'éblouissaient l'un l'autre, alors comme aujourd'hui !
Au loin dans le bois vague on entendait des rires. C'étaient d'autres amants, dans leur bonheur plongés. Par moments un silence arrêtait leurs délires. Tendre, il lui demandait : D'où vient que tu soupires ? Douce, elle répondait : D'où vient que vous songez ?
Tous deux, l'ange et le roi, les mains entrelacées, Ils marchaient, fiers, joyeux, foulant le vert gazon, Ils mêlaient leurs regards, leur souffle, leurs pensées... - Ô temps évanouis ! ô splendeurs éclipsées ! Ô soleils descendus derrière l'horizon !
Il semblerait avoir été inspiré par ce poème de Gérard de Nerval :
Fantaisie
Il est un air pour qui je donnerais Tout Rossini, tout Mozart et tout Weber, Un air très-vieux, languissant et funèbre, Qui pour moi seul a des charmes secrets.
Or, chaque fois que je viens à l'entendre, De deux cents ans mon âme rajeunit : C'est sous Louis treize; et je crois voir s'étendre Un coteau vert, que le couchant jaunit,
Puis un château de brique à coins de pierre, Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs, Ceint de grands parcs, avec une rivière Baignant ses pieds, qui coule entre des fleurs ;
Puis une dame, à sa haute fenêtre, Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens, Que dans une autre existence peut-être, J'ai déjà vue... et dont je me souviens !
Certains critiques disent que chez Nerval, tout se passe à l'intérieur de l'âme et évolue du souvenir à un fantasme de réalité historique, alors que chez Hugo, tout serait extérieur, objectif, la chose vue permettant de reconstituer le passé par lequel il accède, par la médiation de l'éternité. Même dans ce dernier cas, ça me semble encore très subjectif.
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: Victor Hugo Mar 17 Mar 2015 - 21:27
Victor Hugo maniait aussi le crayon pour dessiner :
Messages : 17 Inscription le : 14/12/2015 Age : 38 Localisation : Beaune
Sujet: Re: Victor Hugo Mar 22 Déc 2015 - 21:34
Bonjour à vous tous!
Tout nouveau sur ce forum, je découvre avec plaisir un fil sur les poésies de Victor Hugo. Je suis probablement bien moins finement lettré que la plupart d'entre vous et c'est justement la raison pour laquelle je viens solliciter votre jugement. Mon poème préféré de cet auteur (attention, rien d'original en vue) c'est "Demain dès l'Aube".
Musicien de formation, c'est aussi celui que j'ai choisi pour écrire une chanson récemment. L'exercice est périlleux et la longueur du poème est a priori incompatible avec une forme longue. J'ai donc du faire des choix, dont j'aimerais discuter avec vous. Auriez-vous la gentillesse de vous prêter à un commentaire sur cette mise en musique ? Tout doit y passer (choix de répétitions, agencement formel, mélodie, style...) mais chut, j'en dis déjà trop !
Au plaisir de vous lire et n'hésitez pas à me livrer toutes vos remarques ;-) (j'en ai marre d'entendre ma famille me dire 'c'est beau"...;-) )
Gaëtan Maire Espoir postal
Messages : 17 Inscription le : 14/12/2015 Age : 38 Localisation : Beaune
Sujet: Re: Victor Hugo Mar 5 Jan 2016 - 18:51
Et bien, cela n'intéresse pas grand monde ! Un petit article paru ce dimanche dans l'Est Républicain pourra peut-être susciter davantage de réactions ?
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
Sujet: Re: Victor Hugo Mar 5 Jan 2016 - 20:42
En relisant le poète franco-ontarien Patrice Desbiens récemment, j'ai vu qu'il revenait souvent au recueil Les feuilles d'automne. Le forum a tendance à encourager des fils distincts pour traiter du volet prose et de la partie poétique d'une oeuvre. Victor Hugo reste une sommité en ce domaine. Il semblerait même qu'il soit plus poète qu'autre chose.
Ça fait plusieurs années que je suis sur le forum. Comme plusieurs le savent, je suis sourd de naissance. Il est curieux de voir que tu fais un effort musical pour ton enfant. Ça fait du bien de voir que tu y penses. Il s'agit de choses qui sont parfois difficiles à aborder avec le commun des mortels et je n'ai pas de misère à concevoir que la musique puisse rejoindre des sensibilités au passage. Pour ma part, je fais le pari de m'investir dans la contrée de la poésie, qui est un autre versant de la musicalité des choses.
Au Québec, nous avons une association destinée aux personnes sourdes qui vivent également avec des problèmes visuels. Il s'agit de l'Association du Syndrôme de Usher du Québec. Je peux dire qu'il y a plusieurs personnes qui prennent part à la vie de cette association qui sont également des chef de file dans la mobilisation de la communauté sourde québécoise. Nous avons même des cinéastes qui vivent avec cette problématique de la vue.
Sur une note plus personnelle, je suis également parent d'un enfant en compagnie d'une copine sourde. Mon fils peut être considéré comme un CODA (enfant entendant de parents sourds).
Gaëtan Maire Espoir postal
Messages : 17 Inscription le : 14/12/2015 Age : 38 Localisation : Beaune
Sujet: Re: Victor Hugo Mar 5 Jan 2016 - 22:05
Citation :
Il est curieux de voir que tu fais un effort musical pour ton enfant. Ça fait du bien de voir que tu y penses. Il s'agit de choses qui sont parfois difficiles à aborder avec le commun des mortels et je n'ai pas de misère à concevoir que la musique puisse rejoindre des sensibilités au passage.
Pas si curieux que cela : je suis musicien de formation, ce qui ne m'empêche pas d'apprécier la littérature. Et ces deux arts se rencontrent bien souvent avec merveille.
Citation :
Pour ma part, je fais le pari de m'investir dans la contrée de la poésie, qui est un autre versant de la musicalité des choses.
Fort bien! Je serais ravi de lire vos travaux avez-vous un site ?
Citation :
Au Québec, nous avons une association destinée aux personnes sourdes qui vivent également avec des problèmes visuels. Il s'agit de l'Association du Syndrôme de Usher du Québec. Je peux dire qu'il y a plusieurs personnes qui prennent part à la vie de cette association qui sont également des chef de file dans la mobilisation de la communauté sourde québécoise. Nous avons même des cinéastes qui vivent avec cette problématique de la vue.
J'ignorais ce syndrome, j'irai faire un tour sur le site de votre association.
Quand à votre fils, considéré "CODA", je pense qu'il développera une sensibilité et une compréhension du monde du handicap bien différente de celles de ses petits camarades : cela sera, à n'en pas douter, un atout formidable pour lui.
jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
Sujet: Re: Victor Hugo Mer 6 Jan 2016 - 16:59
Gaëtan Maire a écrit:
Citation :
Pour ma part, je fais le pari de m'investir dans la contrée de la poésie, qui est un autre versant de la musicalité des choses.
Fort bien! Je serais ravi de lire vos travaux avez-vous un site ?
Pour le moment, je me consacre à l'écriture surtout dans le cadre de mes travaux scolaires et de mes démarches d'atelier. Je ne suis pas très friand à l'idée de faire apparaître un grand nombre d'écrits sur le Net, puisque la notion des droits d'auteurs et de propriété intellectuelle entre en ligne de compte. Je préfère publier quelque chose auparavant sous forme de recueil. Le temps venu, je vous en ferai part à la communauté du forum.
Sigismond Agilité postale
Messages : 875 Inscription le : 25/03/2013
Sujet: Re: Victor Hugo Mer 23 Nov 2016 - 1:05
Thierry Cabot a écrit:
A plus de soixante-dix ans, Victor Hugo possède encore une belle verve. (...)
Et Victor Hugo encore jeune est déjà un maître chevronné, à l'art poétique extrêmement abouti ! (NB je dis encore jeune au lieu de jeune tout court en raison de sa précocité)
Il a vingt-sept ans lors de la parution du recueil Les Orientales (1829), d'où est extrait ce poème Extase, daté d'un peu plus tôt, vingt-cinq novembre 1828:
Extase "Et j'entendis une grande voix." Apocalypse.
J'étais seul près des flots, par une nuit d'étoiles. Pas un nuage aux cieux, sur les mers pas de voiles. Mes yeux plongeaient plus loin que le monde réel. Et les bois, et les monts, et toute la nature, Semblaient interroger dans un confus murmure Les flots des mers, les feux du ciel.
Et les étoiles d'or, légions infinies, A voix haute, à voix basse, avec mille harmonies, Disaient, en inclinant leurs couronnes de feu ; Et les flots bleus, que rien ne gouverne et n'arrête, Disaient, en recourbant l'écume de leur crête : - C'est le Seigneur, le Seigneur Dieu !
Ma tartine d'élucubrations:
Spoiler:
Le titre, - Extase - il est possible que je me méprenne, mais la notion doit être entendue dans un sens mystique, ou tendant vers le mysticisme en tous cas.
A l'appui de cette considération, la manière d'exergue y incite, et incite est peu dire:
"Et j'entendis une grande voix. Apocalypse."
Alors c'est un verset tronqué, mais de quel passage ? S'agit-il d'Apocalypse 10:12: "Alors j'ouïs une grande voix dans le ciel, qui disait : Maintenant est le salut, la force, le règne de notre Dieu, et la puissance de son Christ; car l'accusateur de nos frères, qui les accusait devant notre Dieu jour et nuit, a été précipité."
Ou de 19:6: "Et j'entendis comme une voix d'une foule nombreuse, comme un bruit de grosses eaux, et comme un bruit de forts tonnerres, disant: Alléluia! Car le Seigneur notre Dieu tout-puissant est entré dans son règne."
Ou de 19:1: "Après cela, j'entendis dans le ciel comme une voix forte d'une foule nombreuse qui disait: Alléluia! Le salut, la gloire, et la puissance sont à notre Dieu, (...)"
Ou de 14:2: "Et j'entendis une voix du ciel comme le bruit des grandes eaux, et comme le bruit d'un grand tonnerre; et j'entendis une voix de joueurs de harpe, qui jouaient de leurs harpes, (...)"
Ou peut-être encore d'un autre passage de l'Apocalypse -plusieurs autres sont possibles ?
J'incline pour un référent à la Révélation de Jean (alias l'Apocalypse) non distinct. Ajoutant que ce qui compte sans doute pour Hugo, c'est d'apposer un frontispice, manière de situer son texte, sinon dans ce lignage-là (déférence gardée, il va sans dire), du moins en rappel.
D'où -peut-être- la petite malice consistant à tronquer le verset, pour qu'on ne sache pas très bien, qu'on se dise qu'en fin de compte c'est la référence à l'Apocalypse, sans autre spécification, qu'il faut garder à l'esprit.
Histoire, sans doute, qu'il n'y ait nulle équivoque, que nous ne passions pas outre le côté cosmique et tellurique (et mystique, ainsi que dit précédemment).
Le premier alexandrin est une perfection dans la simplicité, sans doute ce qu'il y a de plus difficile à faire en poésie (en art en général ?).
J'étais seul près des flots, par une nuit d'étoiles.
Longue respiration, bien ralentir au milieu du vers. Comme cela on met en valeur le point d'orgue, le sonore "étoiles" qui le clôt (sonore bien que finissant sur un -e muet, vers dit féminin en approche poétique classique).
Flots à l'hémistiche, étoiles à la fin du vers. Les mots essentiels du vers sont encore mis en valeur par l'usage de mots plutôt sourds, excepté nuit, placé en seconde moitié, avant étoiles qui s'en trouve encore valorisé en terminaison de vers.
Du second vers on attend qu'il précise, nous livre un détail, nous fasse entrer dans l'esquisse à peine brossée au premier vers. Justement, cet "étoiles", ouverture d'immensité totale, permettrait au poète de faire tout développement qui lui passerait par la tête.
Et bien, non !
Pas un nuage aux cieux, sur les mers pas de voiles.
Nous serons encore cantonnés à de l'abstrait, du cadre à l'état d'esquisse. De façon assez élégante, le poète sert un parallèle au vers 1 une correspondance dans le vers 2, par renversement en quelque sorte, le ciel se trouve dans le premier hémistiche et la mer dans le second. Et la césure est sur plus loin, qui est ce que propose d'essentiel le vers (plus loin à lire lentement, il me semble, à la limite de l'emphase).
Troisième vers, celui de la vision/révélation (Mes yeux en tête de vers, c'est amené sans la moindre équivoque possible)
Mes yeux plongeaient plus loin que le monde réel.
Qu'est ce plus loin ? En deux vers nous approchons du quart du poème ! Comment nous insuffler ce sur quoi cette vision débouche en si peu ?
Et les bois, et les monts, et toute la nature,
Le Et, énumératif mais surtout cadençant, répété la bagatelle de trois fois, suffit à in-définir la terre "terrestre". Petit ralentissement imposé ensuite (notez que l'on est dans un poème lent, "qui ne se gueule pas", où l'on détache et scande, mais sans flûter) - le vocable donnant l'allure est lâché - ici on murmure (s'il est un mot, en français, qui se susurre).
Semblaient interroger dans un confus murmure
Victor Hugo nous gratifie de deux mots donnant trois syllabes de suite en u, l'ensemble étant impossible à chantonner (réciter, psalmodier, etc...) sur une note haute et forte, le tout balisé en rime par "nature" (il s'agit bien sûr de "confus murmure").
La strophe finit (comme finira la suivante) en un vers de neuf pieds, rétablissant le cadencement (césuré sur "mers"), toujours d'impeccable rythme et de simplicité majuscule:
Les flots des mers, les feux du ciel.
En termes d'éléments, nous avons presque les quatre, il ne manque que l'air (encore que "ciel" l'évoque): il y a, en deux vers, la terre, le feu, l'eau.
Reprise du "Et" entraînant, cadençant en tête de strophe:
Et les étoiles d'or, légions infinies, A voix haute, à voix basse, avec mille harmonies,
Nous y voilà, à ce "Et j'entendis une grande voix." ! D'un calme, d'une voix unique, d'une diction du poème pour laquelle on pourrait adopter un ton si bas qu'il faudrait presque tendre l'oreille, on passe à une chorale impossible à dénombrer ("légions infinies", "mille harmonies"), ce n'est pas un déferlement sonore cacophonique, mais le concert d'un gigantesque orchestre !
Sur le "à voix haute, à voix basse" on peut sans doute voir une traduction du fait observable que les astres nous apparaissent plus ou moins scintillants, en raison de leur taille, du lieu d'observation, de leur éloignement, etc...
Ce que clament ces mille harmonies est l'évidente chute finale du poème, mais par quel procédé le poète va-t-il faire tenir sa réponse sur la finale, sur les trois vers qui reste ?
Par un rappel tout basique, vraiment désarmant de hardiesse dans la simplicité, du mot "disaient" qui équilibre à merveille la strophe, tout en jouant sur le son "-Di" amplificateur qu'on retrouve au tout dernier mot, je veux dire par là en permettant un effet sonore à la diction:
Disaient, en inclinant leurs couronnes de feu ; Et les flots bleus, que rien ne gouverne et n'arrête, Disaient, en recourbant l'écume de leur crête : - C'est le Seigneur, le Seigneur Dieu !
Je trouve d'une rare maestria la façon dont Hugo suspend un instant sa phrase -comme suspendue dans le vide sidéral dont il est question somme toute-, qui suggère la descente depuis les cieux pour permettre la réponse des flots, avec un judicieux point-virgule pour accentuer.
Disaient, en inclinant leurs couronnes de feu ;
Le "Disaient" est la clef de cet unisson colossal et permet de balancer ensemble les réponses (NB: répons, peut-être mieux approprié ?) des cieux et de la mer.
On n'est pas surpris que, par artifice certes un peu rebattu mais qui fonctionne là, Hugo retarde de dire le nom du créateur jusqu'au dernier mot du poème, manière de clin d'œil: Comme Dieu est, peut-on souligner, à l'origine comme au dernier mot de la création et de l'humanité, l'alpha et l'oméga, ou encore Celui Qui Est...
shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
Sujet: Re: Victor Hugo Mer 23 Nov 2016 - 8:52
Pourquoi mettre en spoiler ta dissection (brillante) de ce poème, Sigismond ? Je connais mal Hugo poète..., je ne suis pas forcément une 'mystique' mais j'ai trouvé passionnant ce que tu dis du rythme du poème. Merci.
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
Sujet: Re: Victor Hugo Mer 23 Nov 2016 - 21:29
oui mais comme personne n'est parfait Hugo a forcé en sa position de politicien à la colonisation de l'Algérie.
Sigismond Agilité postale
Messages : 875 Inscription le : 25/03/2013
Sujet: Re: Victor Hugo Jeu 24 Nov 2016 - 14:45
Bédoulène a écrit:
oui mais comme personne n'est parfait Hugo a forcé en sa position de politicien à la colonisation de l'Algérie.
La colonisation était une idée de gauche, voir par exemple ceci. Ou encore ceci.Ou cela, etc... En cela Victor Hugo était juste orthodoxe vis-à-vis de son camp, non ?
shanidar a écrit:
Pourquoi mettre en spoiler ta dissection (brillante) de ce poème, Sigismond ? Je connais mal Hugo poète..., je ne suis pas forcément une 'mystique' mais j'ai trouvé passionnant ce que tu dis du rythme du poème. Merci.
Pour plusieurs raisons (bonnes ou mauvaises ), en fait: - D'abord ceux qui postent dans la section poésie du forum, et on les en remercie, en général copient-collent (puisque la poésie est sans doute un domaine littéraire où l'on trouve, sinon presque tout, du moins beaucoup sur la Toile, et que le format du poème est très compatible avec celui d'un message de forum) ou copient tout court des poèmes secs (ou bruts si vous préférez) sans commentaires: Je ne souhaite pas me singulariser, mais tout au contraire me conformer à ce qui se fait sur Parfum.
- Ensuite, quand, comme c'est le cas ici, le commentaire est autrement plus long que le poème, j'estime que la moindre justice à rendre à l'œuvre est que ce soit celle-ci qui apparaisse, et non le commentaire, que le Parfumé ira voir si bon lui semble.
- Enfin, le message initial de Kenavo sur le fil du bar poétique encourage, sans doute sans le vouloir expressément, à une certaine discrétion de commentaires sur les fils des auteurs de poésie.
Pour être clair, et ne pas tourner autour du pot: - J'ai un point de vue très distinct et tu as pu le remarquer Shanidar, puisque je ne poste jamais ou quasi sur les fils des auteurs dans la section poésie sans commenter, et ainsi tenter de susciter l'échange par le biais mon pauvre laïus...au reste, n'y sommes-nous pas encouragés par le sous-titre même de la section poésie, qui est, se terminant par trois lourds points de suspension: "Comme pour les autres fils, vos commentaires et pas que les poèmes..." ?
shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
Sujet: Re: Victor Hugo Jeu 24 Nov 2016 - 16:08
Je pense que la seule raison recevable est la deuxième : ne pas porter préjudice au texte.
Mais les autres me conviennent moyennement. Je préfère largement qu'un parfumé nous expose (même en quelques mots) pourquoi il a choisi de poster tel ou tel poème plutôt qu'un texte brut (c'est d'ailleurs aussi valable pour la musique et les peintures-photos). D'autre part je pense que l'invitation de kenavo est à réserver au fil du bar poétique et qu'elle ne doit pas avoir d'incidence sur les fils d'auteurs.
Je l'ai déjà dit, je lis très peu de poésies (j'essaie d'arranger ça d'ailleurs) et je trouve plus intéressant que quelqu'un me guide avec sa propre lecture, mais chacun fait comme il peut...