Abdelatif Kechiche

Le peu qu'on nous donne d'Emma - mais je dois être aussi influencée par la BD - me laisse à penser que c'est plus complexe qu'un personnage uniquement égoïste. Elle est probablement plus lucide sur les impasses, et prend des décisions difficiles de façon radicale.
Je la trouve sévère mais juste.
Et pas plus égoïste qu'Adèle.
Qui n'est pas égoïste ? Surtout dans les relations conflictuelles...

Je ne trouve pas qu' Emma soit égoïste. Elle réagit face à quelqu'un qui ment, elle se sent trahie, donc je ne vois pas pourquoi elle se laisserait faire comme une nigaude.
Quand je parlais d'Adèle c'est bien d'Adèle qu'il s'agissait, dans l'histoire relatée, pas son destin d'actrice

Qu'elle se sente trahie et qu'elle décide de rompre est compréhensible.
Je parlais de ce qui s'est passé avant et de la façon qu'elle a eue de délaisser Adèle et de mépriser ses aspirations.
Etablir une relation amoureuse avec une jeune fille de seize ans n'est pas anodin et, Emma devait savoir que, l'adulte, ce serait elle.
Elle voudrait la modeler et attend d'elle qu'elle se comporte comme une personne aboutie: ce n'est pas possible!
Je ne dis pas qu'Adèle est parfaite, loin s'en faut, je dis qu'elle n'a pas la même maturité, qu'elle est encore un être en devenir (ce qui est bien naturel à son âge).

Oui, c'est vrai,  tu as raison.
Disons que les torts sont partagés.  
La relation devait être faussée dès le départ.
Je ne sais pas pourquoi mais je n'aime pas cette Emma.
Un peu prétentieuse peut être.
Pourquoi veut elle absolument qu'Adèle se réalise par des écrits par exemple?
Ne voudrait elle pas qu'elle devienne artiste comme elle car elle réalise qu'elle a misé sur une personne qu'elle commence à consédérer comme inférieure.
Mon avis est qu'on si on n'en arrive pas à aimer une personne pour ce qu'elle est la relation est vouée à l'échec et contrairement aux apparences c'est Adèle qui est trahie.
Trahison pour trahison, quelle est la pire?
C'est un film qui marque et qui donne à réfléchir. La preuve.  
Merci pour ton avis Darkanny. C'est intéressant, en effet de confronter les points de vue de ces deux femmes.


(je ne vois plus ton message précédent dans lequel tu me rappelais qu'Adèle fêtait ses 18ans au cours du film! Etrange.)

Oui je m'excuse de l'avoir retiré
En fait je disais qu'Adèle était largement adulte dans le chapitre 2, lors de leur vie commune.
Donc il n'est plus question vraiment de manque de maturité.

Par contre c'est vrai qu'elle porte en permanence le masque de l'enfance, quelquefois même poupon.
Ce qui contraste avec la fausse dureté de l'expression d'Emma.

Pas de problème, j'ai eu le temps de le lire.  

Que penses tu de la dernière partie de mon message, relative à la nature de la relation entre Emma et Adèle?

unmotbleu a écrit:

Mon avis est qu'on si on n'en arrive pas à aimer une personne pour ce qu'elle est la relation est vouée à l'échec et contrairement aux apparences

Cette phrase ?

Oui celle là (avec comme exemple celle d'avant)

Mais dans ce film tout est un peu biaisé
On nous montre Adèle comme une petite institutrice (qui plus est avec des maternelles) qui n'a pas d'ambition autre que celle de "transmettre" ce qu'elle même a appris par le biais de l'école (qui joue son rôle ici d'ascenceur social)
Et par contre Emma nous est présentée comme une artiste, qui connaît la philosophie (mais pas l'anglais), et qui semble plus "cutivée" qu'Adèle, branchée, etc...

Il n'y a pourtant pas de différence majeure entre le niveau de culture de ces deux filles.

Et pourtant ça coince, les barrières sont là.
Pour en revenir à ta phrase, je ne sais pas trop quoi dire, sinon que les barrières socio culturelles sont plus fortes que l'amour, même si aucune des deux filles ne voulait en arriver là.

L'exemple du vernissage est assez révélateur.
Vous êtes déjà allées à un vernissage ?
Vous avez vaguement reçu un carton d'invitation dû à la copine du copain du peintre.

Vous vous y rendez la boule au ventre, étant sûre de ne connaître que la copine du copain du peintre.
Vous êtres persuadée que vous serez incapable de dire quelque chose qui sorte du commun devant les toiles.
Personne ne vous parle, il n' y a plus une seule coupe de champagne.
Vous n'avez qu'une envie c'est de partir en catimini, vite fait bien fait.

C'est peut-être exagéré mais ça part d'une expérience vécue.

Transmettre ses valeurs peut être en soi une ambition, je crois.
Créer en est une autre.
Je pense qu'Emma n'aime pas vraiment Adèle mais qu'elle cultive son narcissisme jusqu'au jour où elle s'aperçoit qu'elle s'est trompée.
Adèle, quant à elle, ne lui demande rien que la laisser être.
Ensuite, tout dérape, cette dernière se sent mal et trouve une mauvaise réponse à une vraie souffrance.

Le sujet est sans fin. Je te remercie d'avoir donné ton point de vue.

PS: je suis déjà allée à des vernissages mais le peintre est une amie et plusieurs des autres invités aussi donc je suis restée.
autrement c'est tel que tu le décris et une fois vues les œuvres exposées, et donnés les quelques bonjours aux personnes connues, je m'en vais.

'scusez je n'ai pas tout relu, mais je suis allé faire le cobaye !

la première demi heure m'a fait me demander si je n'aurais pas mieux fait de sortir, prendre l'air, promenade, sieste peut-être ? la dernière demi heure est un peu plus intéressante.

dans l'ensemble un je ne sais quoi me retient de dire que c'est "mauvais", toujours est-il que ça m'a laissé grandement indifférent voire un peu agacé. Très mécanique, un côté voyeur déplaisant, des clichés ou juste le plan-plan de cette histoire (parce que oui, quand même et avec une notion de durée pas très bien arrangée), ou juste les quatre tics en boucle. (et les miraculeuses scènes d'école pseudo-vérité...)

je ne me suis pas senti pris au piège de quoi que ce soit car j'ai trouvé ça vide, je n'ai pas perçu de propos (à la rigueur du détournement de propos) et n'ai pas ressenti d'émotion dans la manière de faire vivre les personnages à travers le film. je me demande même si les scènes de sexe ne sont pas là pour masquer le vide et faire semblant d'imaginer un rythme au film.

en tout cas c'est un cinéma qui ne m'intéresse pas et probablement qui se regarde beaucoup et s'imagine certainement en faire au moins autant.

A ce point-là ? 

Le côté mécanique, il m'a semblé le voir dans une sorte de répétitions, toujours le même geste ou expression d'Adèle, qui était censé exprimé tout le "naturel", mais à force d'être répété, trop de naturel tue le naturel, en quelque sorte....Pseudo vérité, je pense aussi comprendre à peu près, et je ne peux pas dire que je ne partage pas non plus.

Mais ce qui m'a gêné, c'est tout le contenu "conceptuel" qu'il peut y avoir dans ce film. J'y ai pensé en suivant la discussion entre Darkanny et unmotbleu. La conception de l'amour que cela laisse apparaître. Un coup de foudre, juste un regard qui se croise et ça y est, pour la vie (les références à Marivaux pour le coup renforcent), et puis ensuite la seule chose qui fonctionne vraiment entre ces deux là, c'est le sexe. Parce qu'à part ça, elles n'ont rien en commun, et aucune ne fait l'effort pour aller dans le monde de l'autre. Vous avez souligné pour Emma, mais Adèle ne fait non plus aucun effort : à la question d'Emma au début quels peintres elle connaît, c'est Picasso et rien d'autre. Et dans les dix après et un certain nombre d'années de vie commune, ce serait sans doute la même chose. Une fille qui s'intéresse à des bouquins genre Marivaux, qui a fait cinq ans d'études et pour être instit a du passer un concours difficile avec plein de trucs théoriques. Donc c'est vraiment une question de volonté. Revendiquée me semble-t-il, parce que Kechiche fait quand même sacrément pencher la balance du côté d'Adèle. Et c'est comme c'était pas naturel de vouloir autre chose dans une relation, ce serait nier la nature même de ce qu'est l'amour, une sorte de perversion venant d'une vision sociale étriquée et normative, de vouloir partager une même vision du monde des intérêts communs, de pouvoir partager ce que fait la vie de l'autre...Foutaise semble nous dire le réalisateur, il n'y a que la réalité du corps et une désir non bridé par l'intellect et les règles sociales. Un peu pauvre au final...

Un tout grand merci pour ton point de vue Animal. Et les autres aussi bien sûr, mais je savais que ce genre de film ne serait pas la tasse de thé d'Animal et j'étais tellement curieuse de savoir si lui aussi allait succomber malgré tout. Et bien non. Je ne pense pas m'y retrouver non plus même si j'ai bien conscience que le seul moyen de le vérifier serait d'y aller sur place. Mais la durée du film est trop longue, puis le cinéma de ce réalisateur ne m'a jamais attirée non plus

Le contenu "conceptuel" du réalisateur développé par Arabella m'en éloigne d'ailleurs  encore un peu plus...

mais de rien.  

ah, tant qu'on y est, le rapport à la peinture (ou à l'art en général ?) dans le film vous en diriez quoi ?