Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]

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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyDim 5 Jan 2014 - 11:01

Bédoulène a écrit:

et il ta paru plus sympathique ou encore moins ?  sourire 

Sympathique ? Non ; mais plus humain, assurément oui. A la fois sentimental et cruel...
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colimasson
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyLun 6 Jan 2014 - 13:16

Les pubs que vous ne verrez plus jamais – Tome 2 : Spécial sexisme (2013) d’Annie Pastor


shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 88742510

« Le devoir d’une femme, c’est d’être à la maison, de manger After Eight et d’être belle. »


Le sexisme machiste voire misogyne ne date certainement pas d’hier mais en matière publicitaire, il est encore possible de remonter aux sources d’une époque où la femme était dévolue à sa cuisine. Quelques années plus tard, un progrès notable est à signaler : « S’il vous plaît… laissez votre femme vous rejoindre dans le salon ! »


shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 Pub10

Les publicités regroupées dans cet ouvrage semblent ainsi remonter un fil chronologique qui retrace presque les étapes d’une libération féminine aussi factice que le bonheur mis en scène dans ces annonces. Même si celles-ci ne sont pas précisément datées, le visuel et la thématique nous renseignent indirectement sur une décennie. On passe ainsi de la revendication au droit de posséder les plus beaux appareils ménagers à la revendication au droit d’être la plus séduisante pour obtenir un emploi rémunéré. Plus tard, la femme aura le droit de s’amuser en montrant ses dessous de jupons voire ses porte-jarretelles. Dans le rôle de la femme-objet, elle se doit d’être polyvalente, qu’il s’agisse de vanter de la lingerie féminine, des appareils technologiques, des barres chocolatées, des caleçons masculins ou du lait sans lactose. Parfois, l’objet de la publicité disparaît derrière l’image de la femme : sa représentation est devenue un topoï qui véhicule à lui seul le discours, les émotions et la mémoire culturelle. Et lorsque certains publicitaires essaient de dépasser ce stade de la représentation féminine, il s’aventure sur des routes extrêmes qui rivalisent souvent d’indécence.


« Sous prétexte de dénoncer la violence conjugale, les publicités d’aujourd’hui montrent volontiers des femmes portant des traces de coups. Mais comment peut-on prétendre vendre un parfum en présentant une femme marquée d’un œil au beurre noir ? »


Plus efficace que le premier volume, cet ouvrage gagne en incisivité en se concentrant sur une thématique riche et précise de la publicité. Si l’agencement des chapitres garde une cohérence qui permet de démontrer l’évolution de la représentation féminine au cours du siècle dernier, Annie Pastor ne s’empêche toutefois pas de glisser des publicités contemporaines tout au long des pages. La comparaison nous permet de juger que si la forme a évolué, le fond est resté sensiblement le même. L’épidémie sexiste se propage même aujourd’hui jusqu’à la représentation de l’homme. Est-ce la seule façon pour la femme d’obtenir son salut ? …


Pub pour des préservatifs :
shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 Latin_10


Pour du ketchup :
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Très, très osée :
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Au tour des mecs :
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Snifff :
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Salon de l'agriculture :
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Ce n'est que du lait (mais sans lactose, quand même)
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Bagnole :
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Scandale provoqué par Belvedere Vodka


Citation :
Cette publicité fait référence à une scène de viol : « Contrairement à certaines personnes, Belvédère va toujours en douceur ». Le président de Belvédère s’est excusé et a déclaré que la marque s’était engagée depuis dans la lutte contre les violences sexuelles.


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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyJeu 9 Jan 2014 - 14:56

La Révolte (1870) de Villiers de l'Isle-Adam


shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 97828410

La Révolte de Villiers de l’Isle-Adam survient en 1870. L’auteur, jusqu’alors réputé pour ses compositions qui œuvrent plutôt dans le style romantique, passe sans crier gare au réalisme. Le romantisme de l’amour partagé devient romantisme de l’amour pour soi, ses ambitions et ses idéaux. D’un côté se trouve Félix, riche banquier pour qui toutes les affaires réussissent depuis qu’il a eu la bonne idée de se marier. De l’autre côté se trouve ladite épouse, Elisabeth, excellente comptable, laborieuse, sans coquetterie et pas frivole pour un sou, qui passe ses journées penchée sur des livres de compte depuis le jour où elle s’est mise en ménage. On ne précisera pas à qui profite le plus cette union. Tout n’est cependant pas perdu car Félix sait reconnaître, en des termes certes maladroits, les grandes qualités dont fait preuve son épouse :


« Comme tenue des livres, tu es un excellent comptable ; comme femme, il paraît que tu es très bien et point bête, ce qui est quelque chose. Enfin, comme caractère laborieux, tu passes mes espérances. […] Et, si j’ai triplé ma fortune, je puis bien dire que c’est grâce à toi. »


Oui, mais Elisabeth ne veut plus ressembler à ce portrait. Alors que leur fille dort dans sa chambre, elle revendique, sans élever la voix, son droit de claquer la porte du foyer et de s’en aller vivre dans la campagne. On imagine mal cette femme de tête s’empêtrer dans les terres boueuses des forêts, vivant sans le moindre confort, sans le moindre appui matériel et sans le moindre soutien affectif, mais sa révolte germait en elle depuis si longtemps qu’elle éclate avec toutes les disproportions d’une frustration difficilement contenue. L’homme, qui se croyait alors maître en sa demeure, se fait écraser par son épouse sans le moindre honneur. Et de larmoyer sur l’avenir de ses affaires et sur l’avenir de leur enfant –sans jamais, pragmatiquement, évoquer leur amour-, tandis qu’Elisabeth se dévoue tout entière à son rêve, déployant une richesse de verve sans égal lorsqu’il s’agit d’imaginer la vie qui l’attend, et ne lâchant que quelques froides paroles à celui qui l’a détruite: « Et vous ne sauriez vous figurer cependant, monsieur, l’indifférence que vous m’avez toujours inspirée ».


La séparation traîne et semble devoir n’être qu’un long dialogue. Mais enfin, la rupture survient. Entre le premier et le deuxième acte, Elisabeth abandonne l’époux, le foyer et l’enfant. Le deuxième acte sera d’un réalisme encore plus glaçant. La Révolte revendiquée dans le titre n’est pas seulement celle d’une femme rejetant la sécurité familiale et matérielle mais aussi celle d’un auteur rejetant l’assurance d’une gloire formatée. Sa pièce ne fut représentée que cinq fois, le temps de s’attirer les défaveurs des critiques et l’incompréhension de tous. En marge de sa pièce, Villiers de l’Isle-Adam écrivit une réponse qui fait aujourd’hui office de préface à la Révolte. Le morceau pourrait faire partie intégrante du spectacle. Presque aussi long que la pièce, il semble la couver et lui insuffler sa première substance.


« Aujourd’hui, le Théâtre aux règles posées par des hommes amusants […] tombe de lui-même dans ses propres ruines, et nous n’aurons malheureusement pas grands efforts à déployer pour achever son paisible écroulement dans l’ignominie et l’oubli. On y assiste, on rit, mais on le méprise. On dit de ce qu’il enfante : « C’est un Succès » - Le mot GLOIRE ne se prononce plus. »


Avec sa Révolte, Villiers de l’Isle Adam n’obtint si l’un, ni l’autre, et ce n’est pas aujourd’hui que changera cette situation. Son réalisme extralucide est devenu banal ; son romantisme égoïste s’appelle maintenant individualisme. Avec ses phrases taillées à la serpe, Villiers de l’Isle Adam nous renvoie le reflet d’une tendance contemporaine qui ne surprend plus. Quoi qu’aient pu dire ses détracteurs, sa Révolte est passée dans les mœurs.


shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 Linda-10


Citation :
ELISABETH : […] Je me sens absente, dans cette enfant, -qui a des façons de me regarder… comme si j’étais une étrangère ! … […] Croyez-vous que j’eusse hésité à en faire ma compagne de malheur ?... – Mais, si certains désespoirs ont leur grandeur et leur beauté, le mien, en tombant dans la nature de votre enfant, n’y deviendrait qu’un poison ! Tenez, mon cœur a saigné goutte à goutte tout son amour ! … Je suis une morte : je glacerais ma fille en l’embrassant.


*photo de Pieter Henket
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Marie
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyVen 10 Jan 2014 - 7:36

Les infortunes d'Alice
Barbara Comyns



shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 51rq0r10


Ce roman a été lu dans l'intention louable de faire diminuer une PAL d'une ampleur assez dramatique, mais là n'est pas le sujet.

C'est un roman qui date de 1959 , on a l'impression de lire un roman-feuilleton du début du 20 ème siècle, époque à laquelle se situe le récit.

Donc il raconte le sinistre destin de cette pauvre Alice ( non, il ne faut pas que je commence à pleurer..), père tyrannique, mère qui meurt dans des conditions dramatiques, marâtre, évidemment, comment y échapper. Quelques éléments sympathiques au début toutefois, le père est vétérinaire, et Alice est chargée de l'entretien des animaux divers et variés.

Après.. ça ne s'arrange guère.. Nous ne sommes pas dans Jane Eyre, il nous manque un Rochester!

La pauvre Alice va de malheur en malheur, et pour tenter de se détacher un tant soit peu de la sinistre réalité, se met à léviter de temps en temps. Pour de bon.. C'est là que même en considérant la dimension métaphorique de la lévitation, on se dit ( enfin moi, les autres peuvent léviter autant qu'ils veulent..) que la distance, sans un support naturel ou technologique, il vaut peut être mieux la mettre à l'horizontale?
Car l'altitude, c'est bien joli, mais la terre est basse..

Bref.. ce mélo assumé, raconté comme cela, peut bien sûr prêter à sourire. Pauvre Alice! Je me demande d'ailleurs ce que l'auteur a voulu faire, un pastiche?
Mais ce roman, avec son côté suranné, m'a rappelé des lectures d'enfance, en particulier un roman d'A.J. Cronin intitulé Le chapelier et son château qui, au niveau mélo, faisait très fort aussi. Sauf que!!! Cronin avait le bon goût de toujours, à la fin, en sauver quelques-uns, les gentils, bien sûr. Ce qui convenait tout à fait au coeur de midinette qui sommeille toujours en moi..

Alice, arrête tes bêtises, descends tout de suite, on va changer d'auteur!
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topocl
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyVen 10 Jan 2014 - 8:16

J'admire toujours qu'on lise jusqu'au bout ce genre de bouquins. Mais je comprend. Tu voulais voir quel gentil serait sauvé. Quelle déception pour toi!
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyVen 10 Jan 2014 - 9:03

Coli, la pub avec l'animateur est particulièrement ignoble !

mais ton commentaire est très intéressant !


Marie je reste sur Alice aux pays des merveilles, alors !  sourire 
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Heyoka
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyVen 10 Jan 2014 - 10:36

topocl a écrit:
J'admire toujours qu'on lise jusqu'au bout ce genre de bouquins.

Idem.

Mais c'est parce que Marie, elle lâche rien.  Very Happy 

Et puis après, le commentaire est drôle.
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colimasson
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyMar 14 Jan 2014 - 17:40

Qui a peur de Virginia Woolf ? (1962) d'Edward Albee


shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 24856310

On imagine mal Virginia Woolf en grand loup croque-mitaine, effrayant les enfants dans leurs chaumières. Et pourtant, c'est notre Virginia Woolf bien connue qui sert de rengaine à George et Martha. Eux-mêmes sont de beaux prototypes d'un monde bourgeois et intellectuel névrosé. Secs et taris jusqu'à l'os, il ne leur reste plus que le sens de l'humour et l'imagination tordue pour se détruire jusqu'au bout. Mais ce vieux couple qui affiche des décennies de vie conjugale au compteur, n'entend pas régler ses petits problèmes en tête-à-tête -on imagine que cela a déjà dû être tenté des milliers de fois. Il serait plus drôle et peut-être plus cruel d'inviter un jeune couple encore bercé d'illusions pour les inclure dans des jeux où la folie et le sérieux alternent au-delà de toute démarcation nette.


Cette pièce d'Edward Albee, représentée pour la première fois en 1962, commence avec la même fougue qu'un Ubu Roi. « Ha ! Saloperie de saloperie ! » s'écriera Martha, avant de passer ses nerfs éprouvés sur son faiblard de George. La femme n'est plus une vicieuse qui cache son jeu derrière une allure de petite chose fragile : elle est ouvertement rageuse, et sa vulgarité ne s'encombre pas de colifichets trompeurs. La perfidie est passée du côté de George, pas aussi soumis qu'il n'y paraît. Et lorsque Nick et Honey font leur apparition, croyant passer un bon moment à siroter des cocktails avec George et Martha, ces derniers mènent une valse effroyable qui semble devoir lier la réconciliation avec l'acharnement sur une tierce personne -ici le couple frais et naïf formé par les invités. Les querelles se construisent sur fond de rancœur et de jalousie. Tous professeurs en université, enfants ou parents proches de ce milieu, les altercations qui les réunissent sont des luttes de pouvoir primitives malgré leur fond de sophistication intellectuelle. Il semble qu'après s'être contenus de longues années à donner une bonne image d'eux-mêmes, Martha et Georges aient besoin de relâcher un peu de pression. Dans les chaumières, les instincts refoulés se déchaînent plus violemment que jamais. On s'insulte, on se frappe, on dévore, on frôle le coma éthylique et on copule. Des fantômes d'enfants morts-nés ou écrasés par des voitures surplombent cette scène sur laquelle pulsion de vie et pulsion de mort ne se sont jamais si bien affrontées.


Edward Albee possède un sens de la répartie acéré (« Si tu existais, je divorcerais »), qui semble jailli du milieu universitaire, sans jamais avoir pu en remonter à la source. En chantonnant Qui a peur de Virginia Woolf?, il donne un exutoire à sa colère contre l'hypocrisie d'un milieu qui s'enferme dans son intellectualisme au détriment de tout humanisme. Rien d'étonnant à ce que la mort et les penchants destructeurs soient les derniers vestiges des relations humaines. Et si, pour dénoncer ce milieu, Edward Albee utilise ses codes et rivalise de talent littéraire, il se laisse enfermer dans son propre piège. Où se termine la dénonciation, et où commence la collaboration ?


« MARTHA
[…] Je pleure tout le temps. Et Jojo aussi pleure tout le temps. Nous pleurons tout le temps, tous les deux et après… Nous recueillons nos larmes et nous les mettons dans le frigidaire jusqu’à ce qu’elles soient toutes gelées… (Elle rit plus haut.) et… après… nous les mettons dans… nos… verres. »



La cruauté transfigurée par Edward Albee semble bien plus intéressante que les bons sentiments ou l'amour plan-plan. Votre couple bat de l'aile ? Flanquez-vous sur la gueule, comme George et Martha ! Cela semble terriblement plus excitant...


shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 Jan_ma10


Citation :
GEORGE
(ton de conversation mondaine et aimable)
Les goûts de Martha, en ce qui concerne les boissons, se sont beaucoup simplifiés, avec les années… ils se sont… épurés… Quand je lui faisais la cour –enfin… c’est une façon de parler, n’est-ce pas ?- mais, disons qu’à l’époque où je lui faisais la cour…
MARTHA (enjouée)
Où tu me prenais, mon chéri…
GEORGE
(apporte les verres à HONEY et à NICK)
Bref, lorsque je courtisais Martha, elle commandait des breuvages incroyables. Vous ne pouvez pas savoir ! Dès que nous entrions dans un bar, c’était toujours la même histoire… Elle fronçait les sourcils, se torturait les méninges et, brusquement, c’était la trouvaille : par exemple un Alexandra avec de la crème de cacao frappée, des cerises à l’eau-de-vie, du rhum flambé… Une explosion, quoi !
MARTHA
C’était rudement bon. J’adorais ça.
GEORGE
De vrais petits cocktails pour dames.
MARTHA
Hé ! il arrive mon alcool à brûler ?
GEORGE
(se dirige à nouveau vers le bar)
Mais, avec les années, Martha a appris à ne pas mélanger n’importe quoi avec n’importe quoi… Maintenant, elle sait qu’on met le lait dans le café, le citron sur le poisson… et que l’alcool pur (Il tend le verre à MARTHA)… tiens, mon ange… est réservé à la très pure Martha. (Il lève son verre.) A votre santé. 


Citation :
GEORGE
Comment ils se sont mariés ? Eh bien ! ça s’est passé comme ça… Un beau matin, la souris s’aperçut qu’elle était toute gonflée ; alors elle trottina chez le Blondinet, lui colla son ventre sous le nez et lui déclara… « Regardez ce qui m’arrive… »
[…] « Regardez : je suis toute gonflée. » « Oh !... mon Dieu… » s’écria le Blondinet…
[…] … et après – pchchchchch…- elle se dégonfla… comme par enchantement… pchchchchch…


*peinture de Jan Mandjin, Festin burlesque vers 1550
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MessageSujet: qui a peur de Virginia Woolf ?   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyMer 15 Jan 2014 - 0:42

"La cruauté transfigurée par Edward Albee semble bien plus intéressante que les bons sentiments ou l'amour plan-plan. Votre couple bat de l'aile ? Flanquez-vous sur la gueule, comme George et Martha ! Cela semble terriblement plus excitant..."

Chacun ses goûts, mais ça fait mal Wink et plaisanterie mise à part, je rappelle que" Les homicides au sein du couple ont fait 174 victimes l'an dernier, dont une majorité de femmes. C'est 28 de plus qu'en 2011." source France TV."

Ca, c'est moins amusant  No 

Ceci dit, Liz Taylor et Richard Burton ont magnifiquement incarné ces deux amoureux violents qui ne sont pas que fiction, hélas.
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kenavo
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyMer 15 Jan 2014 - 9:41

merci pour ton commentaire Coli, j'ai adoré cette pièce de théâtre...
dommage qu'il n'y a pas plus de textes de lui disponible en français, j'aurais bien aimé le voir avec son fil à lui...
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colimasson
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyMer 15 Jan 2014 - 14:19

kenavo a écrit:

dommage qu'il n'y a pas plus de textes de lui disponible en français, j'aurais bien aimé le voir avec son fil à lui...

Ah bon, comment ça ?
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyMer 15 Jan 2014 - 19:46

ah oui, je viens de revérifier... il y a quand même plus que cela traduit de lui...
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyMer 15 Jan 2014 - 21:59

shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 L-autr10

L'autre vie de Valérie Straub

de Stéphane Padovani.

quatrième de couverture a écrit:
Après la politique, la lutte armée et la prison, vient le silence et celle qui fut Valérie Straub. Que lui reste-t-il à vivre sinon la bienvenue
de quelques mains ouvertes ? Mais pour qui gronde encore de haine viscérale, sa dette n’est pas expiée...

Un dialogue à travers l'écrit et l'absence pour Valérie Straub qui sort de prison pour trouver, peut-être, une vie meilleure. Le contact des gens, l'engagement, pas la rédemption mais l'évolution... on peut trouver beaucoup de thème et une écriture assez concise. J'ai peur d'avoir l'air trop négatif mais je dois dire que je suis resté en dehors de la dite écriture et que je ne m'imaginais pas lire la même chose sur 100, 150 ou 200 pages, ce petit livre en faisant une cinquantaine. Peut-être les thèmes trop condensés et quelques références obligatoires, une écriture de douleur moderne (violence, maladie, deuil, capitalisme) qui ne se délie pas assez et qui m'a laissé froid.

ça m'est passé plutôt à côté cependant il n'est pas impossible que ça puisse intéresser d'autres personnes.  jypeurien 
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyJeu 23 Jan 2014 - 13:55

Volpone ou le Renard (1606) de Benjamin Jonson


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Volpone est une pièce de théâtre -il aurait aussi pu être une fable. Son personnage principal, Volpone, est un vieillard qui a accumulé une richesse qui ferait saliver d'envie bon nombre de ses semblables. Sans amis ni famille, et par crainte d'être délaissé, il feint d'être à l'article de la mort. Si ceux qui l'entourent ne sont pas animés de nobles intentions, et s'ils espèrent avant tout pouvoir récupérer son héritage, Volpone réussit au moins à ne pas être seul. La vieillesse semblait déjà être un lourd fardeau au 17e siècle et Volpone montre qu'un peu d'or dans sa guenille peut changer bien des égards dûs aux vieillards. Ce n'est pas pour rien que Jonson appelle aussi Volpone le "renard" et il continue plus loin, avec les prétendants à l'héritage, à affubler des caractères d'animaux à ses personnages. Le cher discipline de Volpone, son complice dans l'art de simuler une agonie, s'appelle Mosca, autrement dit "la mouche". Il aide le vieillard à faire tourner en bourrique Voltore -le "vautour"-, Corbaccio -la "corneille"- et Corvino -le "corbeau". Entre autres personnages apparaîtront également Bonario, Canina et Columba, dont les caractères transparaissent immédiatement dans les dénominations. Il sera toutefois malaisé de jongler entre ces différents personnages qui finissent par se ranger dans les deux catégories presque classiques : les mauvais et les moins pires. Ainsi les trois vautours se mêlent-ils souvent dans un ballet tordu, alternant entre sourires forcés adressés à Volpone et grimaces balancées à Mosca, dans l'espoir d'apprendre ces deux informations cruciales : quand le vieillard va-t-il se décider à mourir, et qui sera son héritier ?


Cette intrigue principale se double d'une intrigue mineure qui emmêle les caractères et ralentit considérablement le rythme de progression de la première. Il semblerait que seuls le premier et le dernier acte soient véritablement dévolus à celle-ci, les actes centraux servant à donner de la longueur à une comédie qui veille à respecter les règles de la dramaturgie classique. Sur le papier, Volpone devient parfois éthéré. On se détache de la lecture en attendant le retour à l'intrigue principale qui, non seulement plus cynique, permettait également de présenter avec plus d'audace le caractère bouffon des personnages et leurs obsessions pour un amour qui n'a rien d'humain, qu'il soit amour-propre ou amour de l'or -les deux se confondant souvent. On se rend compte alors que la forme ne suffit pas à captiver son auditoire et Benjamin Jonson ne parvient pas à enthousiasmer par la seule beauté de ses tirades. Rival de Shakespeare, on se demande parfois qui a copié l'autre tant leurs verve endiablées semblent se poursuivre l'une et l'autre dans la recherche de la plus grande puissance de harangue.


"Ces coquins honteux, rogneux, pouilleux, miteux et marmiteux, avec un pauvre liard d'antimoine au naturel, galamment encortiqué de divers cartouches, peuvent fort bien, sans nul remords, vous tuer une vingtaine de gens par semaine; mais ces gaillards décharnés et faméliques, qui ont les organes de l'âme à moitié bouchés par les terrestres obstructions, ne manquent point de trouver des zélateurs parmi les pauvres artisans racornis, mangeurs de salades, qui sont ravis d'avoir un sou de purgatif, dût-il les dépêcher dans l'autre monde!"


On s'accroche à ces belles pièces de langue jusqu'à ce que survienne enfin le dernier acte qui, renouant avec l'intrigue principale, permet au lecteur de retrouver enfin la connivence qui lui avait échappé. On regrette que les oiseaux de malheur qui s'agitent autour de Volpone n'aient pas eu le courage de rester plus longtemps au chevet du vieillard. Le cynisme semble avoir honte de lui-même et traverse la pièce à toute vitesse, se laissant plus comprendre qu'il n'ose vraiment se faire voir. Benjamin Jonson tiendrait-il lui aussi du vautour ? ...


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"Corbaccio : C'est excellent! Je vais sûrement lui survivre.
Cela me rajeunit pour le moins de vingt ans."


Maurice Castelain (introduction) a écrit:
"L'éloge de la Folie et trois dialogues de Lucien, traduits par Erasme, sont la source évidente de beaucoup d'idées, d'images, d'expressions que l'on admirait jusqu'ici comme étant de [Benjamin Josnon]. Le mot plagiat n'avait point alors le sens défavorable que nous y attachons: Shakespeare et Molière "prenaient leur bien où ils le trouvaient". Jonson, qui avait plus de culture et moins de génie, empruntait davantage encore."


*peinture de Bernard Buffet
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MessageSujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE]   shot - "One shot": Un auteur/un livre...  [INDEX 1ER MESSAGE] - Page 35 EmptyLun 10 Fév 2014 - 14:04

Les chroniques de Krondor – Tome 1 : Pug, l’apprenti (1982) de R. E. Feist


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En 1997, je lisais le premier volume des aventures de Harry Potter. Un peu plus de 15 ans s’écoulent et me donnent l’occasion de lire le premier volume des Chroniques de Krondor. On pourrait croire que cette progression témoigne d’une évolution dirigeant mes lectures vers plus de noblesse dans le monde belliqueux et surhumain de la fantaïsie. Il n’en est rien. Rendez-moi mon Harry Potter !


L’histoire de Pug l’apprenti ressemble à s’y méprendre à celle du petit sorcier. Comme lui, il est orphelin. On retrouve le mythe de l’enfant bâtard qui découvrira avec le temps qu’il est issu d’une lignée royale et qu’il n’a pas à rougir d’être un pauvre trublion sans grâce et sans amis. Parce qu’il ressemble à un canard boiteux, Pug regarde ses camarades avec envie : leur ressemblera-t-il un jour enfin ? se demande-t-il avec un mélange d’appréhension et d’envie. Mais oui, crétin, a-t-on envie de lui répondre –c’est le but de tout roman initiatique, et celui-ci, avec ses 2000 pages et des poussières, traîne un peu les basques pour permettre à son personnage de s’accomplir en écrasant les autres comme ceux-ci l’ont écrasé.  Comme Harry Potter, Pug aime à sortir des sentiers battus et lorsqu’il se promène dans la forêt, il rencontre le garde-forestier géant et barbu qui vit dans une cabane au milieu des conifères, en compagnie d’un dragon de compagnie aussi adorable qu’un toutou. Hagrid et Norbert, sortez de ce pastiche !


Alors que J. K. Rowling conférait une âme à ses personnages en sondant leurs caractères et en exploitant toute la complexité de leurs sentiments, R. E. Feist se bat encore au seul stade de la description physique : « Les cheveux bruns, les yeux bleus, Roland était grand pour son âge », semble-t-il peiner à écrire jusqu’à ce que, le point posé en fin de phrase, on l’entende presque soupirer de soulagement. Un personnage de décrit, un ! Lorsqu’il s’agit de nous dresser le portrait de Pug, héros principal de ce roman, R. E. Feist introduit davantage de variations. « Pug rougit » -le suspens est à son comble : « Il était le plus petit des garçons de son âge au château ». Et comme il est le plus petit des garçons, forcément, il a un peu de mal avec les filles et ça lui cause bien des tourments. R. E. Feist plonge alors tête la première dans l’exploration sentimentale de sa petite créature : « Pug aperçut la princesse et sentit son cœur se serrer un peu ». Nous n’en saurons pas davantage, mais le temps nous aidera à comprendre que ce personnage connaît maintes réactions organiques étranges. Ainsi, après une vingtaines de pages de faux suspens menant à la nomination de Pug en tant qu’apprenti (c’est le titre du volume), lorsque le maître Kulgan lui demande : « Pug, orphelin du château, acceptes-tu de te mettre à son service ? », le pauvre petit fut paralysé de son corps tout entier : « Pug était tout raide ». Drôles de mœurs…


Essayons un peu de nous intéresser à l’univers de Krondor. On y trouve des forêts, des châteaux, des elfes et des bestioles, comme dans n’importe quel autre livre de fantaïsie. L’originalité de ce monde tient surtout à l’épithète qui accompagne des mots que l’on trouve dans n’importe quel autre livre. Mettez-moi de l’elfe à toutes les sauces et la plus vulgaire campagne devient une lande frissonnante de monstriaux. « Les chevaux elfiques » sont bien plus impressionnants que de simples poulains et prière de s’agenouiller devant la « reine des elfes ». De toute façon, tout ceci est beau. Si Pug le pense, c’est que c’est vrai : « Il emplit ses yeux de cette vue qui le laissait muet ». Si seulement il n’y avait que la vue qui le laissait muet ! Mais ce n'est pas le cas, et le pauvre Pug est aussi passionnant qu’un flétan.


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Si ni le personnage, ni les paysages n’ont su retenir votre attention, peut-être apprécierez-vous toutefois le voyage que nous permet d’effectuer R.E. Feist vers une société franchement sexualisée, comme aucun conte pour enfants n’avait jamais osé la décrire : « Les filles s’asseyaient le long du muret qui longeait le jardin de la princesse et papotaient au sujet des dames de la cour du duc. Elles mettaient presque toujours leurs plus belles jupes ou leurs plus belles robes et leurs cheveux brillaient tant elles les avaient lavés et brossés ».[/i] Les intérêts politiques se veulent un mélange de système féodal et d’utopie sociale dont le système est aussi confus et imprécis que n’importe quel programme électoral contemporain : « Il devait être alors au service du propriétaire, sans lui être lié comme l’était un serf. Les francs tenanciers étaient des hommes libres qui donnaient une partie de leurs récoltes ou de leurs troupeaux en échange de la terre qu’on leur laissait. Il devait être libre. »


Après une heure de lecture, le moral est déjà au plus bas. Une heure de lecture de plus, et la folie guette le lecteur qui pense avec envie à la pile de vaisselle sale à laver qui l’attend –tout lui semble alors plus enviable que la lecture de ces Chroniques. Mine de rien, on saute une page, puis deux… puis dix, vingt, cinquante d’un coup ! Arrivé au milieu du livre, on se rend compte que l’histoire n’a pas beaucoup évolué. Pug ressemble toujours à un Pog. Aux trois quarts du livre, on se félicite de n’avoir pas perdu son temps : « Ils s’étaient battus trois fois en six jours et maintenant les nains n’étaient plus que cinquante-deux ». Follement palpitant. Le souffle épique semble tout de même prendre de l’ampleur : « Nous risquons énormément : notre famille, notre clan, notre honneur et peut-être l’empire lui-même ». Cela semble ridicule au lecteur qui risque de perdre plusieurs dizaines d’heures à lire les quelques 2000 pages des Chroniques de Krondor.


C’est à ce moment-là que se pose la question de l’utilité de certaines lectures. Question peut-être hérétique pour certains mais que je ne peux pas m’empêcher de me poser : à quoi cela sert-il de lire Pug ? L’univers n’est pas original, l’écriture est affligeante, et le tout nécessite des heures de lecture qui auraient pu être utilisées à meilleur escient. N’importe quelle vie semblera plus intéressante que celle de Pug –même la vôtre.


Dans les dernières pages de ce volume, un personnage quelconque est traversé par une étincelle de génie : « Froissant le parchemin, il le jeta dans un brasero et quand il fut totalement consumé par les flammes, il oublia ses inquiétudes et retourna à sa tente ». Le livre devrait subir le même sort.


Je remercie l’ami qui m’a offert ce livre pour Noël. Cela partait d’une bonne intention.


*nature morte de Jean-Siménon Chardin
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