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| Les frères Dardenne | |
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Auteur | Message |
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Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Dim 26 Juin 2011 - 13:00 | |
| Un fait divers qui me fait penser aux échanges qu'on avait à propos du comportement étonnant d'humanité du père agressé avec son fils par "le gamin au vélo": Loïc Sécher a été condamné à 16 ans de réclusion pour le viol d'une adolescente de 14 ans qui s'est rétractée 5 ou 6 ans après. Acquitté en révision de procès il n'a pas eu un seul mouvement de colère envers son accusatrice à qui il s'est adressé au tribunal. En sortant d'audience il a dit: « Je pense que pour Emilie, (ce procès) était nécessaire, pour qu'elle puisse se reconstruire. » Cette bonté et cette empathie qui dépassent sa propre révolte et son désir de vengeance existe bien. Peut-être un moyen aussi de se réparer soi-même en ne se laissant pas détruire par le ressentiment et l'injustice? - Citation :
- Vous avez un avantage terrible sur la personne qui vous calomnie ou se montre volontairement injuste envers vous; vous avez le pouvoir de lui pardonner. (Anonyme)
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| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Mer 28 Mai 2014 - 21:46 | |
| Je pensais trouver quelques commentaires sur le film... et non! Alors je m'y colle. Je suis un peu embarrassé par ce film parce qu'il a des qualités incontestables mais aussi certains aspects qui ont modéré mon enthousiasme. Les Dardenne ont toujours cette humanité subtile et (presque) non manichéenne, ce sens de la mise en scène réaliste au plus près d'une certaine "vérité" dans l'émotion, du conte moral et du suspens social. Ils se sont inspirés ici d'un des chapitres de l'essai collectif dirigé par Pierre Bourdieu "La Misère du Monde" où il était question du même enjeu moral mais vécu du point de vue d'un syndicaliste. Enjeu énoncé dès les premières minutes: une femme risque de perdre son emploi dans une entreprise de panneaux solaires si ses collègues maintiennent leur vote initial de vouloir préserver une prime annuelle conséquente en échange de son licenciement ... Point de départ que ne tiendrait pas vraiment la route s'il n'était nuancé par d'autres aspects rendant le dilemme plus complexe (intimidations, CDD menacés, possibilité de travailler 3 heures de plus par semaine moyennant augmentation de salaire...). D'autant plus que cette femme sort d'un arrêt maladie pour dépression dans laquelle elle s'enfoncerait à nouveau très rapidement si son mari ne lui donnait l'impulsion qui va la libérer. Sandra aura donc un week-end, malgré ses réticences et sa pudeur, pour convaincre ses collègues de revenir sur leur décision. Occasion pour les Dardenne de nous faire découvrir, à travers chaque rencontre, diverses réactions émotionnelles de la plus égocentrique à la plus généreuse en même temps qu'un tour d'horizon représentatif d'une Belgique plurielle et des difficultés sociales bien actuelles. Ce qui m'a gêné c'est qu'on imagine trop à l'avance le scénario. On anticipe la diversité des réactions et cette succession de rencontres devient un peu répétitive. Les acteurs m'ont par ailleurs semblé très inégaux et certaines séquences sonnent faux. Leur méthode de travail est de faire répéter les scènes collectivement jusqu'à ce que les comédiens oublient la maîtrise et se lâchent pour exprimer une vérité notamment à travers leur corps. Ils doivent avoir une "présence". Pourtant j'ai parfois trop vu la construction et l'artifice qui m'ont maintenu un peu à distance. En revanche Marion Cotillard m'a semblé irréprochable et il y a une scène magnifique qui m'a tiré les larmes sans prévenir. Celle de la rencontre avec l'entraîneur de football. Sa générosité est sidérante de justesse. Mais au-delà de la dimension sociale, le film propose de manière touchante bien qu'un peu maladroite à mon avis l'histoire d'une renaissance. Dans l'émission Projection Privée de Michel Ciment, les Dardenne disent que cette femme a davantage besoin pour sortir de sa dépression de renouer du lien social en créant un élan de solidarité qu'en puisant dans sa réserve de Xanax. Certes mais c'est un peu trop beau et raccourci même si la scène finale est très belle. Un film que je montrerais à mes élèves de collège et lycée si j'étais prof par son côté un peu didactique qui montre ce qu'est la solidarité, l'égoïsme et les problèmes moraux que posent ce type de situations sociales. Pour l'émotion aussi qui touchera beaucoup de gens. | |
| | | Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Mer 28 Mai 2014 - 23:38 | |
| Deux jours, une nuit
Ce nouveau film des frères Dardenne m'a déçu et je partage tes réserves, en ayant eu l'impression de suivre une trame programmée à l'avance, sans surprise ni nuances. Je n'ai pu être touché par les émotions tant celles-ci deviennent alors calculées, très loin de la spontanéité recherchée par la mise en scène. La dépendance de Sandra aux médicaments est instrumentalisée sur un plan dramatique et son parcours, cette recherche d'affirmation et de réappropriation de soi dans sa relation aux autres, m'a laissé à distance. Plus généralement, le cinéma des Dardenne ne se renouvelle pas ou trop peu à mon goût. Je ne suis plus emporté, bousculé, et les quelques scènes marquantes sont rares. Marion Cotillard est crédible mais sa présence n'apporte rien de particulier : sa détresse et sa combativité sont forcées et la course contre la montre qu'elle mène finit par prendre en otage son personnage. Mon commentaire est sans doute sévère et la sincérité du regard des Dardenne pour soutenir un lien social, une solidarité et un partage n'est pas mise en doute. Deux jours, une nuit est tout de même pour moi un gâchis par rapport aux intentions affichées. | |
| | | darkanny Zen littéraire
Messages : 7078 Inscription le : 02/09/2009 Localisation : Besançon
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Jeu 29 Mai 2014 - 8:53 | |
| J'ai trouvé justement que la répétition des scènes de rencontre entre les salariés et Marion Cotillard avait quelque chose de poignant, avec son pauvre petit discours programmé à l'avance qu'elle est obligée de déclamer à chaque fois. C'est justement cette répétition qui a quelque chose de cruel, on l'a obligée à se transformer en une mendiante (ce qu'elle dit à un moment d'ailleurs) et même si ce scénario a quelque chose de programmé, c'est un douloureux parallèle avec la programmation si bien orchestrée du ou des licenciements, car on se doute bien que l'entreprise ne va pas s'en arrêter là.
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| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Jeu 29 Mai 2014 - 9:34 | |
| Ce qui m'a plus intéressé c'est que d'habitude les personnages des Dardenne sont en mouvement depuis le début, ils avancent jusqu'à l'épuisement et finissent par s'arrêter, se poser, résoudre (ou pas) un conflit et se calmer. Ici c'est le contraire. C'est une femme dépressive en retrait, à l'arrêt qui se remet progressivement en mouvement. Elle hésite, recule puis avance. Le dernier plan est une marche en avant dans une rue. Libérée. Cette idée du mouvement dans leurs films me plait bien. | |
| | | bertrand-môgendre Sage de la littérature
Messages : 1299 Inscription le : 03/02/2007 Age : 69 Localisation : ici et là
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Jeu 29 Mai 2014 - 9:48 | |
| à l'honneur les frères Dardenne, certes, n'oublions pas Alain Marcoen, le talentueux directeur photo, qui, présentera une rétrospective de leur travail : http://www.fiff.be/fr/Archives/28-ans-28-FIFF/2013/Films/L-Age-de-raison-le-cinema-des-Freres-Dardenne Un entretien avec Alain. http://www.afcinema.com/Entretien-avec-le-directeur-de-la-photographie-Alain-Marcoen-SBC-a-propos-du-film-Le-Gamin-au-velo-de-Jean-Pierre-et-Luc-Dardenne.html | |
| | | topocl Abeille bibliophile
Messages : 11706 Inscription le : 12/02/2011
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Jeu 29 Mai 2014 - 9:52 | |
| - Marko a écrit:
Je pensais trouver quelques commentaires sur le film... et non! Alors je m'y colle.
Je suis un peu embarrassé par ce film parce qu'il a des qualités incontestables mais aussi certains aspects qui ont modéré mon enthousiasme.
Et bien mon manque d'enthousiasme fait que, courageusement , j'ai attendu que quelqu'un « s'y colle ». Merci, Marko. Les frères Dardenne, le sujet, tout ça fait un excellent candidat à « Ulysse ravi » dans Télérama. Bon, mais... Oui, le sujet est pathétique, et nous interroge tous, ouvre à l'échange et à nous interroger sur nous même... C'est déjà bien mais, cela ne suffit pas à faire un grand ou bon film. Déjà la donnée de base, elle m'a paru impossible. Ce chef d'entreprise qui laisse le choix et voue son entreprise à désormais fonctionner , quel que soit le choix final, avec des rancunes, des racoeurs et des suspicions...(outre qu'au niveau légal...???). Passons Ma première phrase à la sortie, ça a été" heureusement, il n'étaient pas 150 dans cette boite". Thème et variations sur une scène de base unique, 10 fois rejouée, cette fois-ci Marko, il me semble que j'aurais pu l'écrire. Il m ' a manqué du romanesque , dans ce film. Des idées qui pétillent. Quant à la fin, espoir, oui, mais je n'y ai pas cru une seconde. | |
| | | tom léo Sage de la littérature
Messages : 2698 Inscription le : 06/08/2008 Age : 61 Localisation : Bourgogne
| Sujet: Deux jours, une nuit Ven 30 Mai 2014 - 7:37 | |
| Deux jours, une nuitJ'ai vu ce nouveau film des frères belges hier, et je donne mon opinion. Je n'ai pas à ma disposition cette connaissance approfondie de l'oeuvre des Dardenne, ni des possibilités d'analyse si poussées et impressionantes de certains ici. Donc, il s'agissait d'un des premiers films des Dardenne que j'ai vu, et ainsi pour moi personnellement ne comptait pas l'effet de répétition ou de non-enouvellement des sujets et de leurs traitement par les réalisateurs. En ce qui me concerne, il ne me semble pas que les sujets « engagés » de telle façon, ancrés dans le monde de travail (dans un sens très concret) sont tellement traités. Je comprends que pour un large public on veut voir « autre chose » ; cela ne fait pas recette. Pour ma part je suis reconnaissant qu'ici est traité des questions de licenciement, de chantage au lieu de travail etc. Oui, j'ai aussi vu que certains détails sont « adaptés » au besoin de la mise en scène ou du récit Impossible par exemple de s'imaginer - Spoiler:
qu'une femme ayant fait une tentative de suicide est libéré dix minutes après de l'hôpital !
On a relèvé le discours, la demande répétitive de la protagoniste principale : Oui, une mendiante qui manque de foi presque dans sa propre demarche. Et qui par ailleurs est bien consciente qu'elle demande une forme de « sacrifice » des autres. Mais ces autres, on les a mis devant un choix cruel, un choix qui les renvoie à une certaine forme d'égoïsme, qui en fait pour ainsi dire ceux qui décident des sorts des autres. Cela est en grande partie aujourd'hui ressenti dans le monde de travail : la solidarité ne compte plus . C'est le chacun pour soi. Dans cette domaine j'ai eu (je me sens pas de tout concerné dans ma propre vie professionnelle) des contacts ahurissants, des récits terribles. On pourrait ainsi regretter qu'on met un peu les responsabilités des « patrons » dans un arrière-fond, mais ce n'est qu'une apparence : on n'est pas dupe. Mais au même moment – et je trouve cela quand même très bien – des tels conflits dans le monde du travail ne viennent pas (ou plus?) juste de ceux qui sont « en haut ». Dans le film il y a ce sujet de l'influence, de la participation de chacun dans la responsabilité de ce monde « cruel ». Et quels en sont les conséquences ??? L'égoïsme se cache donc ici et là. Ou la générosité ! Donc, c'est banal de dire qu'il y a ici des réactions fortes différentes face à la situation, mais ceci implique aussi une variété de choix possible. Et je trouve cela plus réaliste que l'irréalisme de certains détails de ce film. Donc, moi j'ai aimé ce film et, comme le soulignait Marko dans son dernier post, une femme qui termine (ce film) avec la note plus encourageante (malgré la défaite extérieure) qu'"on s'est battu". Et c'est ça ! Battons- nous ! | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Ven 30 Mai 2014 - 8:39 | |
| Pour ton spoiler Tom Léo:
c'est possible si l'entourage est contenant ou s'il est d'accord (ou parfois pas!) avec le patient pour qu'il reste à la maison, si le geste impulsif- ou même réfléchi- traduisait certes un mal être parfois profond mais pas nécessairement un réel désir de mort (la limite étant étroite pour le médecin et le patient lui-même) et avec le relai par un suivi ambulatoire rapide. Il y a aussi des unités de "crise" ou on peut rester de quelques heures à 3 jours. Beaucoup de patients vus aux urgences pour un geste suicidaire rentrent rapidement chez eux. S'il y a des signes plus inquiétants on les incite à rester à l'hôpital et au pire on fait une hospitalisation sous contrainte. Le film ne dit pas la nature de sa dépression ni son intensité. | |
| | | tom léo Sage de la littérature
Messages : 2698 Inscription le : 06/08/2008 Age : 61 Localisation : Bourgogne
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Ven 30 Mai 2014 - 19:10 | |
| Merci pour ces explications, Marko, qui néanmoins m'étonnent un peu...
Je viens de trouver encore un entretien avec les frères Dardenne, voir: http://www.lavie.fr//culture/cinema/freres-dardenne-recreer-de-la-solidarite-dans-une-societe-ou-la-peur-regne-23-05-2014-53253_35.php | |
| | | Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Dim 1 Juin 2014 - 19:25 | |
| Vos arguments sont très intéressants et l'angle du sujet choisi pose en effet beaucoup de questions. Je pense qu'il y a de mon côté une certaine lassitude puisque je n'ai plus été touché par leurs films depuis L'enfant. Marko a souligné l'idée d'un mouvement, caractéristique de leur cinéma et je suis resté sur la touche. Le rôle du mari (Fabrizio Rongione) m'a aussi agacé à force de surinterpréter chaque émotion de sa femme, contribuant à disperser une intensité dramatique au détriment de l'exploration d'une mécanique oppressante dans le monde du travail. | |
| | | Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
| Sujet: Re: Les frères Dardenne Ven 28 Oct 2016 - 22:51 | |
| La fille inconnueLe film m'a laissé perplexe, avec des impressions très contrastées. Adèle Haenel livre une interprétation très dense, à la fois sur la retenue et dans l'expression d'une colère butée, et donne à ressentir les états d'âme d'une jeune médecin. Confrontée indirectement à un drame qui bouscule des certitudes, qui l'interroge dans sa relation à son métier, elle tente de se ressaisir dans l'action et dans une recherche de compréhension de l'autre, pour effacer un silence et un vide. L'attention des frères Dardenne à la figure principale du film est cependant trop souvent éclipsée par un scénario qui finit par multiplier les rebondissements et sorties de piste. Le discours de la mise en scène devient aussi culpabilisant et sans nuances, alors même que le contexte d'une détresse collective révèle des perspectives jusqu'au bout ambigües. La fille inconnue contient de nombreux temps forts, renouvelle en partie le cinéma des Dardenne, mais le parti-pris ne m'a pas touché dans une tendance à la dramatisation. | |
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