Au départ c'était pas gagné :
Je suis pas une Mordue de Beckett. Vu quelques pièces, quelques bouts de pièces, lu quelques textes, quelques bouts de textes, et j'avais jamais été réellement convaincue. Un truc qui me turlupinait.
Ensuite, j'ai vraiment du mal avec Berling. Genre l'acteur dont je connais le nom, mais dont je ne me souviens jamais de ce qu'il fait tellement je le trouve insipide.
Seul Pinon avait droit à une pointe d'enthousiasme.
Et puis j'ai vu ce Fin de Partie, et maintenant je suis bonne pour me replonger "pour de Vrai" dans les écrits du Sieur Beckett.
D'abord, l'ambiance était posée dès le départ, grâce à ce rideau de fer ahurissant qu'ils ont au Théâtre de l'Atelier. Un truc qui remonte doucement et avec un petit bruit pas hypra agréable : entre le truc ultra morbide et le sourire en coin un peu jaune. ça collait vraiment idéalement avec le ton général de la pièce.
Et puis Berling apparaît... et là j'hésite... son corps qu'il a voulu tout cassé, tout rigide, tout tendu, tout mou, tout traînant... au départ je suis méfiante. Et puis j'y ai cru. Surtout dans ces grands moments d'absence où il se pose immobile, une ombre, un meuble, un truc qui n'a plus l'air tout à fait vivant.
Pinon "apparaît". (Dans son fauteuil roulant, j'ai pas pu m'empêcher de penser à Alien 4... Mais ça n'a rien à faire là...)
Il cause, il pose l'ambiance, il amène l'humour, le cynisme, le sombre. Il est tout ce qu'il faut être.
Et les deux ensemble ça fonctionne.
L'un, debout, toujours en mouvement, parlant peu (Berling) porte sur tout son corps le poids de sa non existence.
L'autre, coincé dans son fauteuil, bavard (Pinon) donne un coup de vie et d'existence brute.
A cela s'ajoute les deux vieux enfermés dans deux grosses "marmites". Fantomatiques présences. Des pantins du passé.
Et puis les dialogues sont Extra, les acteurs les font entendre et vivre.
On rit jaune, on plonge dans le sombre glauque, on rit un peu plus franchement des fois.
On frôle la violence, la haine, la colère, la barbarie.
Une histoire de fin du monde (évidemment j'ai eu des bribes de souvenir de Sur la Route de McCarthy et en voyant Blindness y'a encore eu quelques connexions).
Classe.