Charles Envolée postale
Messages : 118 Inscription le : 15/02/2009
| Sujet: Hamé - Insécurité sous la plume d'un barbare Mer 18 Fév 2009 - 16:30 | |
| Mohamed Bourokba dit Hamé est rappeur au sein du groupe La Rumeur. Il est trainé en justice dès 2002 par un Nicolas Sarkozy alors ministre de l’intérieur pour le texte ci-dessous au motif de « diffamation envers la police nationale ». Il refuse d'être soutenu par l'avocat de sa maison de disque EMI car la défense concoctée par celui-ci repose sur la seule liberté d’expression et engage ensuite un avocat à ses frais afin de mettre en exergue la dimension politique du procès. Il accumule alors plaintes... relaxes... pourvois en cassation et appels jusqu’à fin 2008 où il gagne enfin son procès de manière définitive. Si les coulisses de l’affaire vous intéressent vous trouverez de nombreux développements et explications sur internet.
Insécurité sous la plume d'un barbare
Ca y est, les partisans chevronnés du tout sécuritaire sont lâchés. La bride au cou n’est plus et l’air du temps commande aux hommes modernes de prendre le taureau par les couilles. Postés sur leurs pattes arrière, les babines retroussées sur des crocs ruisselant d’écume, les défenseurs de « l’ordre » se disputent à grands coups de mâchoires un mannequin de chiffon affublé d’une casquette Lacoste. Sociologues et universitaires agrippés aux mamelles du ministère de l’intérieur, juristes ventrus du monde pénal, flics au bord de la crise de nerfs en réclamation de nouveaux droits, conseillers disciplinaires en zone d’éducation prioritaire, experts patentés en violences urbaines, missionnaires parlementaires en barbe blanche, journalistes dociles, reporters et cinéastes de « l’extrême », philosophes amateurs des garden-parties de l’Elysée, idéologues du marché triomphant et autres laquais de la plus-value ; et bien évidemment, la cohorte des responsables politiques candidats au poste de premier illusionniste de France... tous, jour après jour, font tinter en prime-time le même son de cloche braillard : « Tolérance zéro » !!! `« Rétablissement de l’ordre républicain bafoué dans ces cités où la police ne va plus ». Ils sont unanimes et hurlent jusqu’à saturation, à longueur d’ondes et d’antenne, qu’il faut « oser » la guerre du « courage civique » face aux hordes de « nouveaux barbares » qui infestent la périphérie de nos villes. Qu’on en finisse avec le diable !!! L’ennemi intérieur, fourbe et infâme, s’est immiscé jusque dans nos campagnes et y a pris position. Ne craignons pas les contrats locaux de sécurité, les couvre-feux, l’abaissement de l’âge pénal à 13 ans, l’ouverture de nouveaux centres de détention pour mineurs, la suppression des allocations familiales aux familles de délinquants... Que la caillera se le tienne pour dit, la République ne laissera pas sombrer le pays dans le chaos apocalyptique des vols de portables, du recel d’autoradios ou du deal de shit sous fond de rodéos nocturnes...
La République menacée, la République atteinte mais la République debout !!!
Quelle leçon d’héroïsme ! Quelle lucidité d’analyse ! Et quel formidable écran de fumée !! A la table des grand-messes, la misère poudreuse et les guenilles post-coloniales de nos quartiers sont le festin des élites. Sous les assauts répétés des faiseurs d’opinion, les phénomènes de délinquance deviennent de strictes questions policières de maintien de l’ordre ; les quartiers en danger se muent en quartiers dangereux dont il faut se protéger par tous les moyens ; et les familles immigrées victimes de la ségrégation et du chômage massif, endossent la responsabilité du « malaise national ». La crème des auteurs de la pensée sécuritaire joue à l’idiot à qui on montre la lune du doigt et qui regarde le doigt. Exit les causes économiques profondes. Exit les déterminismes sociologiques. Exit le risque que le débat prenne un jour l’aspect d’un réquisitoire contre les vrais pourvoyeurs d’insécurité : ceux-là même qui ont réduit des centaines de milliers de famille à vivre avec 4000 francs par mois ; ceux-là même qui appellent de leurs vœux les plus chers la marche forcée vers l’économie de marché débridée.
Nous ne lirons pas, dans la presse respectable, que les banlieues populaires ont été, depuis une vingtaine d’années, complètement éventrées par les mesures économiques et sociales décidées depuis les plus hautes sphères de l’Etat et du patronat pour pallier à la crise sans toucher à leur coffre-fort. Nous n’entendrons pas sous les luminaires des plateaux de télévision, qu’à l’aube maudite du mitterrandisme, nos parents et nos plus grands frères et sœurs ont été les témoins vivants d’une dégradation sans précédent de leur situation déjà fragilisée. L’histoire officielle ne retiendra pas l’énergie colossale déployée par les gouvernements des trois dernières décennies pour effacer les réseaux de solidarité ouvrière enracinées dans nos quartiers. Pas plus qu’elle ne retiendra le travail de récupération et de sape systématique des tentatives d’organisation politique de la jeunesse des cités au milieu des années 80. Qui parmi les scribouillards du vent qui tourne s’indignera de l’opacité entretenue vis-à-vis de la vallée de larmes et de combats que fut l’histoire de nos pères et grands-pères ? Parmi ces hommes de paille éructant la « croisade républicaine », combien déclareront la guerre du « courage civique » devant les ravages psychologiques du mépris de soi chez des générations qui atteignent la vingtaine avec 8 ans d’échec scolaire et 3 ans de chômage ? Les logiques d’autodestruction - toxicomanie, alcoolisme, suicide - où certains d’entre nous sont conduits par pur désespoir et complète perte de foi en l’avenir, mériteront-elles quelconque voix au chapitre de l’insécurité ?
Les pédagogues du dressage républicain n’auront pas en ce sens la critique fertile. Ils n’esquisseront nulle moue face à la coriace reproduction des inégalités sociales au travers des échelons du système scolaire, ni l’élimination précoce du circuit de l’enseignement de larges franges de jeunes qui ne retiennent de l’école que la violence qui leur a été faite. Les rapports du ministère de l’intérieur ne feront jamais état des centaines de nos frères abattus par les forces de police sans qu’aucun des assassins n’ait été inquiété. Il n’y figurera nulle mention de l’éclatement des noyaux familiaux qu’ont provoqué l’arsenal des lois racistes Pandraud-Pasqua-Debré-Chevènement et l’application à plein rendement de la double peine. Les études ministérielles sur la santé refermeront bien vite le dossier des milliers de cancers liés à la vétusté de l’habitat ou au non-respect des normes de sécurité sur les chantiers de travail. La moyenne effroyablement basse de l’espérance de vie dans nos quartiers ne leur semblera être, elle aussi, qu’un chiffre indigne de tout commentaire. Bref, ils n’agiteront jamais au vu de tous le visage autrement plus violent et criminel de l’insécurité. Aux humiliés l’humilité et la honte, aux puissants le soin de bâtir des grilles de lecture.
À l’exacte opposée des manipulations affleure la dure réalité. Et elle a le cuir épais. La réalité est que vivre aujourd’hui dans nos quartiers c’est avoir plus de chance de vivre des situations d’abandon économique, de fragilisation psychologique, de discrimination à l’embauche, de précarité du logement, d’humiliations policières régulières, d’instruction bâclée, d’expérience carcérale, d’absence d’horizon, de repli individualiste cadenassé, de tentation à la débrouille illicite... c’est se rapprocher de la prison ou de la mort un peu plus vite que les autres... Les hommes et les femmes qui dirigent ce pays savent tout cela. Ils savent aussi que la libéralisation massive de la vie économique française est en très bonne voie. Ils savent que les privatisations, les fusions, les délocalisations de nombreux secteurs d’activité vont se généraliser comme va se généraliser la paupérisation. Ils savent que la nouvelle configuration du marché exige la normalisation du salariat précaire et l’existence d’une forte réserve de chômeurs et de sans-papiers. Et ils savent surtout que les banlieues populaires - parce qu’elles subissent de plein fouet et avec le plus d’acuité les mutations de la société française - sont des zones où la contestation sociale est susceptible de prendre de radicales formes de lutte si elle trouve un vecteur qui l’organise. On comprendra qu’il est de nécessité impérieuse d’installer toujours plus d’instruments de contrôle et de répression « éclair » au sein de nos quartiers. On comprendra que le monde du pouvoir et du profit sans borne a tout intérêt à nous criminaliser en disposant de notre mémoire et de nos vies comme d’un crachoir.
Hamé
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Babelle Zen littéraire
Messages : 5065 Inscription le : 14/02/2007 Localisation : FSB
| Sujet: Re: Hamé - Insécurité sous la plume d'un barbare Mer 18 Fév 2009 - 17:05 | |
| Intéressant d'entendre Hamé ICI, et ce que dit Devedjian n'est pas mal non plus. Les artistes ne sont pas des délinquants! Et lorsqu'il y a un "dérapage" (ce qui ne semble pas le cas ici) , il est quand même moindre par rapport à celui que nous a fait le président au salon de l'agriculture. Il y a plus de haine et de mépris pour les gens chez Sarko que chez Hamé. Hamé relaxé 2 fois : ça veut dire que la justice est encore indépendante de l'état...
Dernière édition par Babelle le Mer 18 Fév 2009 - 19:14, édité 1 fois | |
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Charles Envolée postale
Messages : 118 Inscription le : 15/02/2009
| Sujet: Re: Hamé - Insécurité sous la plume d'un barbare Mer 18 Fév 2009 - 17:19 | |
| Quatre fois avec la relaxe définitive (sic!) | |
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Invité Invité
| Sujet: Re: Hamé - Insécurité sous la plume d'un barbare Mer 18 Fév 2009 - 19:02 | |
| J'ai appris dans une des émissions "C dans l'air" que notre président est le plus procédurier que nous ayions eu ( enfin depuis que la censure ne contrôle plus les médias ).
Il est notamment des plus chatouilleux sur tout ce qui concerne sa personne même, et n'hésite pas à saisir les tribunaux pour "offense sur la personne du chef de l'état". ( cf la poupée vaudou ou encore la pancarte "casse toi po'v con" brandie par un manifestant ).
Etre ainsi procédurier lui a joué des tours, puisqu'il a également été le premier chef de l'état "bafoué" par une cour de justice ; en effet le jugement concernant la poupée avait été remis à plus tard sous motif que "le caractère urgent de cette affaire n'avait pas été démontré". ( citation de mémoire ) Ceci alors que le Président demandait un jugement express ( avec retrait tout aussi express de la poupée des points de vente.) |
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| Sujet: Re: Hamé - Insécurité sous la plume d'un barbare | |
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