Alex van Warmerdam

J'ai bien aimé la finesse et le côté désincarné et aérien. Sûr qu'à côté d'un Haneke c'est moins les gros traits bien épais creusés à la machette.
C'est pour ça qu'au final je lui en veux d'être tellement resté dans l'inexpliqué. Et je ne crois pas que ce soit cela qui favorise la bonne impression de départ.

animal a écrit:

je trouve ça plus neutre, au bon sens du terme, que Haneke à moins que ce ne soit les aspects déréalisés ou non explicites qui favorisent cette impression. ça m'a paru plus festif, avec un peu de place pour ne pas se prendre trop au sérieux ?

je n'ai vu que celui là, les autres films changent peut-être la façon de voir ?

Oui, absolument. Ceci dit, ses films sont de plus en plus sombres. J'y reviens.

Marko a écrit:

Citation :

Camiel Borgman surgit dans les rues tranquilles d’une banlieue cossue, pour sonner à la porte d’une famille bourgeoise. Qui est-il ? Un rêve, un démon, une allégorie, ou l’incarnation bien réelle de nos peurs ?

Je sors de ce film sans être bien au clair sur ce que j'ai vu et compris (c'est plutôt une bonne chose d'ailleurs). J'étais impatient de retrouver l'univers surréaliste et tragico-burlesque de ce cinéaste et je dois reconnaître que côté mise en scène je suis comblé.
La séquence d'ouverture est une des plus intrigantes vues depuis longtemps. Format scope, grande qualité de la photographie, sens du cadre et des ambiances, acteurs énigmatiques et imprévisibles... On est quelque part entre la froideur du Funny Games de Haneke et les rituels décalés du cinéma de  Yorgos Lanthimos (Canines) pour faire court.

J'ai été constamment en éveil, ne sachant pas vraiment où il allait nous emmener. Il y a quelque chose de très mystérieux, dérangeant, un peu démoniaque et probablement plus ou moins psychanalytique dans ce qui se passe à l'écran même si on peut aussi se dire que tout ça est un peu artificiel et creux. Je balance entre les deux mais j'ai été envoûté par cette histoire d'intrusion dans un espace rassurant et bourgeois d'un mal étrange qui contamine les différents protagonistes. Mal incarné par un personnage (Borgman) qui est une sorte de figure à la fois christique et diabolique, de séducteur pasolinien, de clochard surgi des entrailles de la terre qui vient accomplir une mission ambiguë, rétablir un équilibre ou générer le chaos... Je serais curieux d'en débattre avec vous.
C'est en tout cas un objet filmique brillant et troublant que je conseille vivement. Ovni du mois!

Il est peut-être temps d'arrêter de considérer Alex van Warmerdam comme le "Tati néerlandais". Son huitième film est de loin le plus sombre de sa carrière, même s'il subsiste dans Borgman des éléments burlesques (les cadavres dans le lac). "Qui est Borgman ? Un rêve, un démon, une allégorie où l'incarnation bien réelle de nos peurs ?" Euh, un peu tout cela à la fois dans cette fable (farce) noire à mi-chemin entre le Haneke de Funny Games, le Théorème de Pasolini et Bunuel. Warmerdam voulait faire un film très ouvert à l'interprétation, qui pose plus de questions qu'il n'apporte de réponses. De ce point de vue, Borgman ne rate pas sa cible. L'absurde métaphysique est peu présent dans le cinéma contemporain qui emprunte des voies bien plus balisées, hyper formatées. Dans tous ses films, le réalisateur montre que ses origines théâtrales sont bien présentes. Borgman a cet aspect là, également, l'impression générale est celle d'un huis-clos alors que les scènes extérieures sont nombreuses et libératrices, d'une certaine façon. C'est un film sur le mal, sur l'extinction du capitalisme (?), sur le retour à la virginité de l'homme des cavernes, ou des forêts si l'on préfère. Ou bien pas du tout. A chacun de créer sa propre interprétation. A condition de vouloir jouer avec le cinéaste.

"La peau de Bax"

Allociné a écrit:

Le matin de son anniversaire, Schneider, tueur à gages et père de famille dévoué, est missionné pour abattre Ramon Bax. Écrivain solitaire vivant au milieu des marécages, c’est une cible facile. Schneider accepte, il sera rentré pour dîner. Mais la tâche se révèle plus compliquée que prévue.

Pas besoin d'en dire plus. De toute façon, ce n'est - presque - qu'un prétexte.

Un vraie bonne découverte ! Le scénario est imprévisible, se joue des apparences. Le réalisateur part d'une base dramatique pour tourner vers la comédie noire et (un peu) déjantée. L'inattendu surgit partout. Une scène tragique, par un rien, déclencher un sourire ou l'hilarité.
Entre Schneider, mari aimant et dévoué devenant un tueur froid, calculateur et qui a quelques "principes" (plus proches de TOC...) et Bax, au départ loser antipathique empêtré dans ses problèmes personnels, ses relations avec les autres (copine, fille dépressive...), il y a du potentiel, utilisé à merveille.
Un film où la drôlerie et l'absurde côtoie le drame, où le film d'auteur se cache sous le film de genre.

Il a été primé à "L'étrange festival" de Paris (que je ne connaissais pas) dans la catégorie "nouveau genre". Maintenant, je peux écrire que ce n'est pas pour rien !