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| Milan Fust [Hongrie] | |
| | Auteur | Message |
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bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Milan Fust [Hongrie] Mar 29 Déc 2009 - 19:19 | |
| Milan Fust, 1887-1967, est un écrivain hongrois, poète, romancier, homme de théâtre. Ami de Frygyes Karinthy et Dezo Kostolannyi, il joua un rôle important dans les lettres en Hongrie. Bibliographie 1958 Histoire de ma femme, 1990 Les malheureux, 1999 Avent, 2007 L'histoire de la solitude, 2008 Le précipice, | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Milan Fust Mar 29 Déc 2009 - 20:46 | |
| L' HISTOIRE DE MA FEMME
Ce livre est préocupant. Une sorte de bloc irréductible à l' analyse. L' histoire est simple pourtant. Un homme, capitaine de la marine marchande épouse, sans trop savoir pourquoi, une jeune française. Ils vivent quelques années ensemble , mais sans etre vraiment heureux. Ils finissent par se séparer et il apprend sa mort huit ans plus tard. La seule chose qui s'est passée bien avant d' en arriver là, c'est qu' il tombe éperdument amoureux d' elle...
Qui est le capitaine Storr, le narrateur de cette histoire? Derrière son apparence d' homme fort et d' ours très mal léché, se cache un homme tissé de contradictions. Persuadé que la femme qu' il a épousé le trompe depuis le début, il s' invente en plus, des histoires et s' enferme dans un piège qu' il a plus ou moins construit lui-meme. Il voyage, travaille, esquisse des intrigues amoureuses, et vit en meme temps avec elle des moments tumulteueux, pervers, destructeurs. Derrière ces épisodes plutot sordides, sa passion demeure, inouie, morbide et inassouvissable. Le seul moment de bonheur sans mélange, il le connait alors qu' il est gravement malade, entre la vie et la mort, et qu' elle reste jour et nuit à le veiller.
De cette histoire nous ne saurons jamais que ce que nous en dit le capitaine Storr, le narrateur de cette histoire.
Mais quelle histoire ? Sa femme est elle infidèle comme il le croit ou bien n' est-il un homme torturé par la jalousie, incapable d' aimer ? Imagine-t-il qu' il peut se tromper et qu' il détruit ce qu' il aime le plus au monde ? Pourquoi l' aime t'il vraiment quand elle est absente, séparée ou morte ? Parce que seule la distance peut permettre d' inventer une passion ?
Telle est cette histoire d' obsessions, de destruction.. De questions sans réponses. De solitude extreme.
Un abime, comme les Possédés de Dostoievski.
Ma femme serait-elle un etre angélique ? oui ? Non ? D' ailleurs, je ne me faisais plus d' illusions. Je savais que je ne lui demanderais plus rien, ni sur son passé, ni sur ses secrets.
Car qu' y a-t-il au fond du coeur humain ? Dans le for intérieur de l' homme ? Ne nous berçons pas de mensonges. Seuls les lents monstres qui rampent au fond des mers reflètent l' image valable de cette obscurité. P. 291
Ne plus jamais la revoir ! Ne plus jamais penser meme à cette posssibilité ! C' était une chose déjà décidée d' ailleurs ; mais à ce moment, je le décidai plus fermement encore...
Et pourtant, jusqu' alors, en moi, il n' y avait pas eu autre chose qu' un "plus jamais" ; et cependant l' espoir aussi était en moi, inextinguible ; l' espoir que tout cela n' était que provisoire et qu' un beau jour, elle et moi nous parlerions. Et si ce n' était en ce monde, alors ce serait un autre. J' en avais le sentiment très doux, un sentiment qui me promettait une merveilleuse tranquilité, une tranquillité définitive. P. 381
Je n' avais qu' un seul désir : rentrer à la maison et me remettre à ces notes. Car j' avais le sentiment qu' en elles résidait toute la sérénité de mon ame et que consigner ici le récit de tous mes égarements resterait ma seule chance de pardon sur cette terre. ... J' avais essayé de vivre, j' avais échoué... Que faire ? Mais cela, ces notes, je ne les lacherai plus. Et je comprends maintenant ce qu' est la force qui pousse certains d' entre nous à écrire. Commnet réussir à tourner à son profit la malédiction de sa vie autrement qu' en la recréant, en la remodelant, en l' examinant de plus près... P. 421
Et voilà. Cette meme nuit, je finis par trouver la lettre d' Espagne. Ecrite d' une main étrangère ; elle ne comportait ni plus ni moins que cette nouvelle. Qu' elle était morte. Avant de mourir, elle avait du demander à quelqu' un de me prévenir....
J' aurai cinquante trois ans à l' automne... Et bien que je tienne cette lettre à la main, je ne crois toujours pas qu' il en soit ainsi. Mais je suis fermement convaicu qu' un beau jour, un jour de soleil radieux, elle me réapparaitra quelque part, au coin d' une rue, dans un quartier désert, et que meme si alors elle n' est plus jeune, elle trottinera tout aussi gentiment qu' autrefois de son pas qui m' est familier. Sur mon ame ce sera ainsi. P. 430
Dernière édition par bix229 le Mer 30 Déc 2009 - 0:13, édité 1 fois | |
| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Milan Fust [Hongrie] Jeu 28 Mar 2013 - 22:38 | |
| Histoire d'une solitude ( Egy magány története, 1956). Traduit du Hongrois par Sophie Aude en 2007. Préface de Peter Esterhazy (traduction de Agnès Járfás). 153 pages. " Le 1er janvier 1956, Milán Füst écrit ceci dans sa lettre à un ami : « Peu avant Noël, une jeune femme s'est annoncée chez nous, elle s'est présentée comme Mlle Ersébet Lakato-Lőwy, elle a justifié de son identité et, en proposant des gages, elle nous a emprunté cent vingt forints. Nous n'avons pas accepté les gages, car elle se référait à toi en disant qu'elle était la fille de ta soeur, autrement dit que tu étais son oncle. Nous nous sommes donc mis à sa disposition, quant à elle, elle nous a promis de régler sa dette par des citrons qu'elle allait se procurer à l'épicerie locale de l'armée russe, citrons que tu devais nous apporter à Budapest avant Noël. »" (Introduction, page 9). Bien sûr, il s'agissait d'une escroquerie, mais cette Ersébet Lakato-Lőwy va se retrouver dans le livre (l'a-t-elle jamais su ?). " Autant l'anecdote initiale est claire et simple (aux contours simples), ordinaire et banale, autant... autant... comment est-il au juste, ce livre ?" se demande Peter Esterhazy (page 10). C'est une bonne question. Le roman parle de solitude, bien sûr, c'est dans le titre, mais pas que de ça, et pas tout le temps. Au début, la belle demoiselle dont on a déjà parlé arrive. Elle demande de l'argent, raconte une jolie histoire : elle connaît des détails sur le narrateur, sa famille. Notre héros se demande quoi faire, et laisse sa mère décider (on se rend vite compte que c'est elle qui commande). Cette dernière, d'habitude très suspicieuse, donne son accord pour verser les cent vingt couronnes : - Citation :
- "- [...] Si l'on veut m'embobiner avec une telle adresse, qu'elle m'embobine, pour la modique somme de cent vingt couronnes, essaie qui veut.
- Quelle largesse, - lui dis-je. Cent vingt couronnes ne sont pas rien, et nous ne sommes plus si riches que cela. - Ma mère me regarda d'un air méprisant [...]" (page 24) Le narrateur est historien de l'art. Il étudie del Piombo, puis Le Caravage. Il est seul, mais il recherche parfois la compagnie des hommes. Il sort alors. - Citation :
- "L'inquiétude m'arrachait à ma solitude pour me jeter parmi les hommes comme un affamé, puis de nouveau elle m'arrachait à eux pour me renvoyer dans la solitude. - Tout va mal, pensais-je alors." (page 30)
- Citation :
- "Tout laborieux que je fusse les temps derniers, la vérité est qu'il n'existe pas fainéant plus appliqué que moi. J'ai hérité cela de mon père. C'est quand je ne fais rien que je suis dans mon état normal. Je peux passer des heures à regarder les mouches, et à rire de leur bourdonnement sur la fenêtre. [...] Et en même temps, je ne suis pas seulement comme ça, car deux personnes parlent à l'intérieur de moi." (page 31).
Du côté de son père, il a envie de glandouiller, et du côté de sa mère, il est poussé à s'activer. Sa mère est présentée comme pas très instruite par le narrateur, mais elle finit par lui imposer ses quatre volontés. Bientôt, c'est l'armée. Grâce à des appuis, il se retrouve chez les Hussards. Il ne fera pas la guerre, mais il va lui arriver quelques petites (més)aventures... Il a un problème, ou plutôt une caractéristique fondamentale, notre héros. Une fois, il était en visite chez sa tante, et la regardait préparer le café. - Citation :
- "Je suis assis là, m'ennuyant à plaisir, lorsque quelque chose attire soudain mon attention. Je devais avoir dix-sept ans. Je me rends compte soudain que ce n'est pas du vrai café, mais de la pure chicorée qu'elle met dans le pot, alors qu'elle n'était ni pauvre, ni particulièrement près de ses sous. Je lui demande pourquoi elle fait ainsi.
- Il y a des gens qui n'aiment que le succédané de café. Comme moi, - me répond-elle. [...] Il y a des gens qui choisissent le succédané de café, et ainsi pour toute chose en ce monde. - Et la voilà qui rit. [...] Tu n'as jamais rien vu de pareil ? Il y a des gens, disons, qui n'aiment que l'imagination ou les fantasmagories, et pas la réalité. Pour certains les arts, pour les autres la collection de timbres, - tu n'as jamais rien rencontré de pareil ? [...] Retiens bien, petit, que c'est toujours la plus grande passion qui détermine quel tournant prendra ta vie. Moi, apparemment, la solitude et l'imagination sont mes plus grandes passions. C'est pour cela que je vis si seule." (pages 69-70). - Citation :
- "En certaines circonstances, l'homme aime à éprouver de l'aversion, moi en tout cas." (page 144).
Cela aurait pu donner une analyse psychologique larmoyante d'un personnage pitoyable, mais pas du tout. Un curieux livre, mais réussi. Un bon choix de Bix, donc !
Dernière édition par eXPie le Ven 29 Mar 2013 - 8:05, édité 2 fois | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Milan Fust [Hongrie] Jeu 28 Mar 2013 - 22:55 | |
| Merci, eXPie !
Si j' en juge par tes impressions, ce livre est nettement moins dramatique que L' Histoire de ma femme. Tant mieux ou tant pis... Je n' ai pas encore lu Histoire d' une solitude, je le lirai en espérant que Fust n' est pas que l' auteur d' un seul grand livre... | |
| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Milan Fust [Hongrie] Jeu 28 Mar 2013 - 23:11 | |
| - bix229 a écrit:
- Si j' en juge par tes impressions, ce livre est nettement moins dramatique que L' Histoire de ma femme. Tant mieux ou tant pis... Je n' ai pas encore lu Histoire d' une solitude, je le lirai en espérant que Fust n' est pas que l' auteur d' un seul grand livre...
Ça n'est quand même pas drôle... Il y a des événements qui restent obscurs (enfin, plus ou moins). Le personnage de la mère est assez monstrueux, finalement. mais le narrateur se résigne d'une certaine façon : il préfère la solitude et l'imagination, il est comme ça... Que peut-il y faire ? L'Histoire de ma femme doit avoir d'autres proportions. Près de 500 pages, alors que là, Histoire d'une solitude, c'est 153 pages pas très tassées. C'est manifestement un auteur vraiment intéressant. | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Milan Fust [Hongrie] Jeu 2 Oct 2014 - 21:04 | |
| J'ai lu récemment L'histoire d'une solitude. C'est pathétique, ce type qui a du mal à se libérer de sa mère, et à partager la vie d'autres personnes, même d'un chien. En même temps une espèce de second degré, d'humour, mordant certes, met tout cela à distance, et en fait quelque chose de presque drôle par moments. Cela donne un ton original et personnel. Une bonne lecture. | |
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| Sujet: Re: Milan Fust [Hongrie] | |
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| | | | Milan Fust [Hongrie] | |
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