Jules Renard

 
 

Citation :

Pierre-Jules Renard, dit Jules Renard, né à Châlons-du-Maine (Mayenne) le 22 février 1864 et décédé le 22 mai 1910 à Paris, est un écrivain français.
source et suite

J'ai lu, il y a longtemps, "Poil de carotte" et l'écriture de Jules Renard m'avait alors embarquée dans un univers où la nature est très présente. Renouant, grâce à Mariel, avec la lecture des classiques, c'est avec bonheur que je suis tombée, à la médiathèque, sur les "Histoires naturelles": près de soixante-dix animaux se voient croqués par un Jules Renard maniant avec bonheur l'humour et la poésie.
En quelques mots, il dresse un portrait-robot enjoué ou nostalgique de chaque animal, le parsemant de clins d'oeil et de douce ironie "Le geai: le sous-préfet aux champs." Il utilise les mots comme autant de pigments, de pixels dévoilant une image prise sur le vif: le lièvre au gîte, les perdrix affolées, le pinson invisible chanteur, se dévoilent sous la force évocatrice d'un mot finement choisi.
Le menu peuple des bois et des champs, les âmes discrètes des jardins, les figures emblématiques de la basse-cour ou du monde agricole, deviennent les héros d'un autre type de fables: héros d'histoires que la nature offre aux regards de celui qui sait patienter et observer...Il y a de La Fontaine en Jules Renard! Chez dame Nature, la parade et la péroraison sont aussi de mise, de même que les duels, les vaines batailles ou les délicieuses piques pourfendant de leur dard leur pauvre victime. Les animaux sont parfois un tantinet sot
Le souci permanent du détail est une joie apportée au lecteur avide de sensations poétiques et de surprenantes esquisses: les animaux défilent au gré de la promenade du chasseur d'images qu'est Jules Renard, sous les yeux parfois humides du lecteur ému et étreint par l'empathie de l'auteur.
Le bal de la faune et de la flore se déroule joyeusement, avec la tendresse nostalgique d'une enfance en harmonie avec la nature et les délicieux frissons qu'elle dispense.
Un recueil de textes qui restent d'une étonnante modernité: à lire et conter même aux jeunes enfants!

NB: il existe une très jolie version en littérature jeunesse de ces Histoires naturelles illustrées par Maurizio A.C Quarello

Ravel a mis en musique ces textes: entre autres...

le paon

le grillon

Merci pour ce fil, Chatperlipopette
Le journal de Jules Renard m'accompagne depuis des années



j'aime lire de temps en temps quelques pages, phrases..

je l'ai acheté il y a .. une éternité - à ce moment je lisais presque tout en allemand et là on a donné un titre à ce livre: Idées, plongées dans l'encre

Je crois que je le lirai aussi un jour prochain

Citation :

Le journal de Jules Renard m'accompagne depuis des années

Ah moi aussi.. Rien de tel en cas de cafard!
Dans notre chambre commune, on en aura un exemplaire!

Chatperlipopette a écrit:

Je crois que je le lirai aussi un jour prochain

malheureusement mon exemplaire est en allemand, sinon je l'aurais proposé au cerclage
mais je suis sûre que tu vas adorer cette lecture

Marie a écrit:

Ah moi aussi.. Rien de tel en cas de cafard!
Dans notre chambre commune, on en aura un exemplaire!

tout comme chez Au bon roman on arrive à réunir notre catalogue

Chatperlipopette a écrit:

Ravel a mis en musique ces textes: entre autres...

le paon

le grillon

Chouette ce fil!

kenavo a écrit:

Le journal de Jules Renard m'accompagne depuis des années

Je me suis plongé depuis quelques jours dans ces morceaux choisis du Journal. Je ne vais pas m'arrêter là, je gardais un souvenir de collège pas franchement excitant de Poil de Carotte mais ce que je trouve dans ces fragments de journal n'a vraiment rien d'ennuyeux, c'est même tout le contraire ; j'aime sa recherche de vérité, notamment le concernant, la sincérité semble au coeur de sa démarche littéraire ; il n'hésite pas, par exemple, à coucher sur le papier des envies d'adultère, des doutes concernant son talent d'écrivain (et je n'y vois pas trop de fausse modestie), ou à faire la critique lucide de sa propre vanité. Bref, beaucoup de sujets que bien des gens n'abordent jamais.

Alors non, je ne vais pas me contenter de ces morceaux choisis. Je viens d'acheter L'oeil clair qui semble être un recueil de textes divers publiés quelques années après sa mort, et ensuite, L'écornifleur peut-être.

Après la discussion autour de cet auteur, j'ai hébergé son Journal en français sur ma tablette, je l'ouvre... et la 2ème phrase a déjà tout pour m'enthousiasmer...
 
Un oiseau enveloppé de brumes, comme s'il rapportait des morceaux d'un nuage déchiré à coups de bec.

et voilà que je le retrouve partout...




Portrait de Jules Renard par Félix Vallotton


Renard écrit en avril 1894 dans son Journal : « Vallotton, un air doux, simple, distingué, des cheveux plats, nettement séparés par une raie bien droite, des gestes sobres, des théories peu compliquées, et je ne sais quoi de très égoïste dans tout ce qu’il dit. » Son ironie méchante disparaît pourtant lorsqu’il se met à parler de l’artiste, et c’est à lui qu’il demande en 1895 de faire les illustrations de La Maîtresse que publie la revue Le Rire. « Mon cher Vallotton, écrit-il en septembre 1895, exquis vos premiers dessins. Je vous remercie et vous serre la main. Jules Renard. « Ce fut le début d’une collaboration qui donna plusieurs livres illustrés, dont un remarquable Poil de carotte.

Nathalia Brodskaïa, Félix Vallotton : Le Nabi étranger

Ça fait-ti pas penser à la tête qu'aurait un Tintin vagabond...?

jack-hubert bukowski a écrit:

Ça fait-ti pas penser à la tête qu'aurait un Tintin vagabond...?

ah oui... et pourquoi pas, il est sympa

Jules Renard : un auteur à découvrir ou à redécouvrir.

Son journal est remarquable (on y trouve de vraies pépites). "Poil de Carotte" est un chef-d'oeuvre.

Je suis à fond sur Jules Renard en ce moment. Je recommande chaudement son premier roman, Les cloportes.
Renard l'a renié assez rapidement et n'a jamais souhaité le publier. C'est pourtant un très très grand roman, je trouve.
Disons qu'il y a dedans à la fois tout Renard et tout ce qui fait que ce n'est encore tout à fait du Renard. Mix intéressant.

C'est un "roman paysan" qui se lit très rapidement grâce, il les a déjà mis en place, à de très courts chapitres "tranche de vie" (une page ou deux), qui se dégustent à merveille.

Ce n'est pas encore du Renard, parce que le récit est encore présenté et alimenté de façon assez "traditionnelle" (avec même quelques descriptions longuettes !). Un côté ronron/robinet-qui-coule.
Mais c'est aussi déjà tout Renard, avec des scènes horriblement drôles, la petite incision qui fait mal... magnifique de détachement et de cruauté. Mais avec, derrière, une grande détresse... Il y a comme un sentiment de malaise qui est maintenu 200 pages durant. J'ai trouvé ça assez prodigieux, cet effort constant de créer un malaise et de n'en sortir jamais. C'est assez superbe. Mais si Renard se marre à déshumaniser impitoyablement ses personnages, et on en rit avec lui tellement il est méchant, je crois que c'est un de ses textes les plus désespérés, avec comme grands thèmes le drame humain intérieur et l'absurdité de la vie.

Néanmoins, il y a quand même derrière tout ça une grosse tendresse (que Renard aura tendance à étouffer dans ses romans ultérieurs), avec des scènes assez émouvantes et terribles, mais uniquement lorsqu'il s'agit des deux servantes, Honorine et sa petite-fille Françoise, qui observent cette famille catastrophique où règne une grande incompréhension, comme un grand malentendu général et sans retour, fait de situations ineptes entre gens déshumanisés (surtout les personnages masculins).
Le final est horrible...

A mon avis, laissez tomber Nos frères farouches, Ragotte (dont le cadre est identique) et foncez sur Les cloportes  

...
Rien à voir. C'est pour l'anecdote. A un moment, il y a une scène qui décrit, sur une page entière, la sensation d'avoir des fourmis au réveil. C'est bête, hein, mais j'avais encore jamais lu ça... Je sais pas vous ? C'est très étonnant à lire et parfaitement restitué. On s’y croirait...
...

J'ai lu aussi son théâtre le mois dernier.
Mouais...
Le pain de ménage et Le plaisir de rompre, qui sont souvent cités, ne m'ont guère emballé. Idem pour Monsieur Vernet, présenté souvent comme un de ses chefs-d’œuvre, mais qui n'est à mon avis qu'une resucée sans grand intérêt de L'écornifleur.
En revanche, deux saynètes m'ont vachement enthousiasmé : La demande et Huit jours à la campagne. Deux babioles, mais fort réussies.
Je continue à penser que sa grande réussite théâtrale est Poil de carotte (lue il y a quelques années). La pièce n'a pas grand-chose à voir avec le roman, mais c'est tout aussi fort.

...

Au final, je recommanderais de lire L'écornifleur, Poil de carotte (roman + pièce), Les cloportes et Crime de village (un petit recueil de nouvelles très bon).

Il me reste à lire quelques petits recueils composites (je suis pas pressé... et puis on les trouve difficilement...) et, surtout, tonnerre de tonnerre, son Journal

Je finirai par ce mot de Gide lors de la parution de Poil de carotte je crois, qui me revient souvent en tête :
"J'admire Jules Renard comme s'il était mort. Je le relis comme un classique... Et vive la littérature française !"