Lecture en commun - James Baldwin : La conversion

Livvy a écrit:

Ce sera sans moi cette fois. Dommage, j'ai vraiment envie de participer à une lecture commune, je n'ai jamais fait cela.

oui, c'est dommage.. mais ce ne sera que partie remise.. on va trouver certainement un livre où tu peux participer

Dommage que j'aie trop d'autres lectures en cours en ce moment pour vous joindre. Mais je suivrai vos commentaires, cet auteur m'intéresse.

1 partie : Le septième jour

Nous suivons John, un garçon de 14 ans. Il est dans une période critique de sa vie. Depuis toujours il est sensé être Homme de Dieu, prédicateur, comme son père. Mais John se pose des questions, et a de moins en moins envie de suivre la voie de son père. Père violent, pas très reconnu dans sa communauté, "prédicateur bouche-trou, un saint homme à tout faire". Mais sa toute puissance s'affirme en famille, là il n'admet aucune contestation et exerce sa violence sur tous, les enfants et sa femme. Roy, le frère plus jeune de John se révolte contre ce père et ses préceptes, tourne au mauvais garçon, reçoit un coup de couteau. Et paradoxalement, il est le préféré du père, qui semble plus l'aimer que le sage John, qui voudrait quand à lui s'échapper par les études, pour lesquelles il montre de grandes aptitudes.

Cette première partie donne envie de continuer et de découvrir la suite, les personnages sont très bien campés, même si on a lu ce genre de choses par ailleurs, en tenant quand même compte de la date de rédaction de ce roman, et à l'époque cette façon de décrire la communauté noire n'était pas si courante. Mais l'écriture de James Baldwin, fine et délicate apporte un grand plus, il a un art de suggérer plein de choses, sans insister. Bien sûr les relations familiales, mais aussi l'éveil de la sexualité, l'attirance de John pour Elisha, la complexité des relations entre John et Roy, et aussi leurs sentiments pour leurs soeurs. On s'attache d'emblée à ces personnages et on a envie de savoir ce qu'ils vont devenir.

Arabella a écrit:

Cette première partie donne envie de continuer et de découvrir la suite, les personnages sont très bien campés, même si on a lu ce genre de choses par ailleurs, en tenant quand même compte de la date de rédaction de ce roman, et à l'époque cette façon de décrire la communauté noire n'était pas si courante. Mais l'écriture de James Baldwin, fine et délicate apporte un grand plus, il a un art de suggérer plein de choses, sans insister. Bien sûr les relations familiales, mais aussi l'éveil de la sexualité, l'attirance de John pour Elisha, la complexité des relations entre John et Roy, et aussi leurs sentiments pour leurs soeurs. On s'attache d'emblée à ces personnages et on a envie de savoir ce qu'ils vont devenir.

mêmes impressions que toi sur cette partie..
voilà une lecture qui va être plutôt riche au sujet de l'écriture, moins au sujet de discussion.. c'est tout à fait bien écrit, il a ce talent de "montrer" les gens sans dépenser trop de phrases pour les décrire.. j'aime cette atmosphère NewYorkais/Harlem 1935.. et il y a beaucoup de personnages qui sont riches en couleurs.. j'adore..

J'ai lu jusqu'a la page 75 et je vois deja tous les personnages bien situes. Le jeune John dans lequel on devrait retrouver l'auteur, (eleve par un pasteur noir) est tout dechire par l'amour de Dieu qu'il porte en lui et auquel il aspire, par le peu d'amour, par la tension et la haine qu'il ressent pour son pere malgre qu'il le suis toujours dans ses preceptes de predicateur. Le pere Gabriel est peu reconnu dans la communaute et violent et cruel a la maison pour tout le monde et John en est encore plus bouleverse. Il y a la mere, Elisabeth, infiniment devouee a Dieu et a sa famille, sorte de tampon qui assume toute la violence et tous les malheurs dans la famille. La structure du roman est orchestree tres habilement autour de l'ame tourmentee de John, adolescent.
Il y a aussi Florence, la soeur de Gabriel (du pere predicateur) qui est bien presente dans cette famille et qui est tout le temps revoltee contre son frere et ses exces.
Petit a petit, a travers les souvenirs de Florence, on commence a voir quelle a ete la vie des personnes agees avant que nous les rencontrions dans cette communaute de noirs a Harlem.
Il y a encore pas mal a lire, mais je trouve que James Baldwin est un ecrivain tres meritable - pour son ecriture delicate, mais suggerant enormement de sentiments et d'idees ; pour son courage de parler de cette facon bouleversante de la vie dans une ambiance de mystique collective, rythmée par les prêches, les prières et les gospels.
Il y a plein de sentiments tout humains et tout horrifiants pour l'epoque que l'auteur fait comprendre par ses personnages de son roman.
Je me sens tout attiree par le monde de Baldwin dans ce livre, ces persoonages, ce qui m'est tres etrange, se trnasforment en archetypes devant mes yeux.

C'est vrai que c'est paradoxal, parce que l'auteur décrit un monde dur, violent, avec en plus une espère d'hystérie autour de la religion, et qu'il le fait avec un écriture élégante, fine et subtile. Et du coup ce n'est pas trop, on est pas dans le stéréotype, mais on se sent proche des personnages.

ouh là là, j'avais oublié cette lecture, je ne suis pas très dispo en ce moment ! je viens de le commander sur amazon, j'espère l'avoir assez vite ! en attendant, je lis vos commentaires...

krys a écrit:

j'espère l'avoir assez vite ! en attendant, je lis vos commentaires...

j'espère que tu pourras nous rejoindre.. en tout cas cela se lit assez vite

II. Les prières de saints

1) La prière de Florence

Dans cette deuxième partie, la construction semble devenir plus originale, nous sommes à l'église, et les personnages prient, et se faisant se trouvent confrontés à eux-mêmes. Le première prière est celle de Florence, la soeur du père de John, qui est aussi présent à l'église. La vie de Florence défile en elle, ses relations avec sa mère et son frère, son départ alors que sa mère était mourante, son mariage avec Frank et maintenant sa maladie. Une vie dure, sans véritable perspective, entre le souvenir de l'esclavage qu'a connu sa mère, l'absence d'études, pas de possibilité d'avoir un autre métier que domestique, et la haine pour son frère. Une vie bien amère.

Sans être complètement surprenant, l'ambiance de cette prière est très bien rendue, et nous voyons en quelques page toute la vie de cette femme défiler, avec ses déceptions et ses frustrations. Une sensation d'avoir peut être fait des erreurs. Mais il est trop tard pour revenir dessus.

Au milieu de cette transe collective de priere, Florence reste recueillie sur elle-meme et prie de sa propre maniere. J'aime bien son personnage qui fait pendant a celui de Gabriel.
Je suis ravie par le talent de l'auetur qui manie remarquablement le passage d'un plan a un autre.

Je n'en suis, pour ma part, qu'au tout début. J'ai lu 30 ou 40 pages seulement.
Et j'aime beaucoup. J'ai pour le moment une dualité entre les couleurs sombres, grises du quotidien de John, sa famille qui semble le regarder de haut, son père stricte, l'austérité de la religion... et la blancheur de la neige dans Central Park, lieu ou déambule pour le moment mon personnage. Il s'y cherche et s'interroge.

Arabella a écrit:

Roy, le frère plus jeune de John se révolte contre ce père et ses préceptes, tourne au mauvais garçon, reçoit un coup de couteau. Et paradoxalement, il est le préféré du père, qui semble plus l'aimer que le sage John, qui voudrait quand à lui s'échapper par les études, pour lesquelles il montre de grandes aptitudes.

Est-ce vraiment paradoxale ?
Comme le dit Florence, Roy est le fils qui ressemble le plus à son père. Le père a beaucoup de caractère est doit être sensible à la dureté, l'insoumission de son second fils. Il l'apprécie car tous les deux sont du même moule. John, jusqu'à présent, s'est montré plus obéissant, plus réservé, plus sage. Son père doit le trouver insignifiant. Je pense que John ressemble davantage à sa mère. C'est plus le fils de sa femme que son garçon à lui.

Dans cette première partie, j'ai été surpris par cette scène violente dans laquelle le père panse la plaie de Roy. On s'aperçoit que, si violent soit-il, il ne maitrise rien. Y compris dans sa famille. Florence est insolente et lui dit son fait sans crainte. Roy le menace. Et même si John se tait, on le sent près du point de rupture. On comprend que même sa femme ne le craint pas. Il gueule bien fort mais brasse beaucoup d'air.
Et ce qui me surprend le plus, c'est qu'il ne semble pas parvenir à s'imposer par le verbe. Il est odieux, blessant, ordonne à Florence de se taire, la menace. Ce n'est pas un orateur qui en impose. Pour un prédicateur, c'est fort regrettable. Seule la boucle de son ceinturon tient les autres à distance.

Harelde a écrit:

Est-ce vraiment paradoxale ?
Comme le dit Florence, Roy est le fils qui ressemble le plus à son père.

Roy est le SEUL fils de Gabriel, son dernier espoir, cela tu le liras un peu plus tard. Et ce fils decoit son pere en tout. Gabriel est une ame tourmentee, toujours dechire entre sa foi obssessionnelle et les elans de sa chair.
Il y a beaucoup de secrets dans cette famille et l'auteur les devoile magnifiquement lorsque les souvenirs reviennent dans les pensees des personnages.

Arabella a écrit:

La vie de Florence défile en elle, ses relations avec sa mère et son frère, son départ alors que sa mère était mourante, son mariage avec Frank et maintenant sa maladie. Une vie dure, sans véritable perspective, entre le souvenir de l'esclavage qu'a connu sa mère, l'absence d'études, pas de possibilité d'avoir un autre métier que domestique, et la haine pour son frère. Une vie bien amère.

oui, en effet.. pas très rigolo.. et j'ai quand même bien aimé cette partie/prière.. au moins elle a essayé de faire son chemin, elle voulait partir, elle est partie, elle voulait faire autre chose de sa vie, elle l'a au moins tentée.. ce personnage m'est très sympa avec sa franchise et dans son intégrité
Son frère, qu'on découvre plus dans la deuxième partie, est surtout de la haine réprimée. Il n'a pas choisi ce chemin vers Dieu par lui-même.. il n'arrive pas à mener une vie dévouée dans ce sens.. et cette insatisfaction se montre encore et toujours dans son aggressivité envers sa femme et ses enfants..

Harelde a écrit:

Son père doit le trouver insignifiant. Je pense que John ressemble davantage à sa mère. C'est plus le fils de sa femme que son garçon à lui.

je pense que c'est surtout qu'il aime Roy à cause de ce caractère qui lui ressemble et qu'il vient d'opprimer en lui même depuis tant d'années..

Harelde a écrit:

Dans cette première partie, j'ai été surpris par cette scène violente dans laquelle le père panse la plaie de Roy. On s'aperçoit que, si violent soit-il, il ne maitrise rien. Y compris dans sa famille. Florence est insolente et lui dit son fait sans crainte. Roy le menace. Et même si John se tait, on le sent près du point de rupture. On comprend que même sa femme ne le craint pas. Il gueule bien fort mais brasse beaucoup d'air.
Et ce qui me surprend le plus, c'est qu'il ne semble pas parvenir à s'imposer par le verbe. Il est odieux, blessant, ordonne à Florence de se taire, la menace. Ce n'est pas un orateur qui en impose. Pour un prédicateur, c'est fort regrettable. Seule la boucle de son ceinturon tient les autres à distance.

oui.. en tant que père qui règne avec son ceinturon, pas étonnant qu'il ne retrouve que peu de respect dans sa famille.. et tu as raison, lui, un homme qui devrait se manifester avec des mots, n'arrive pas dans sa famille..
je ne sais pas s'il est à plaindre ou à détester..


Orientale, peut être mieux mettre en spoiler des informations qui sont assez importantes et qu'on découvre beaucoup plus tard dans le livre

kenavo a écrit:

Orientale, peut être mieux mettre en spoiler des informations qui sont assez importantes et qu'on découvre beaucoup plus tard dans le livre

OK, Kenavo, promis, jure.
Je suis un peu en avance, je vais attendre qu'on rattrape.
J'ai deja dit que le personnage de Florence est tres entier et positif malgre sa vie pleine de souffrance. Et elle est malheurese, a la fin de la priere, elle a des visions et des pensees sur la mort qui l'approche.
D'apres ce que j'ai lu, Gabriel ne seme que du mal autour lui tout en faisant tout son possible d'etre un homme de Dieu. Pas simple ce personnage qui ne fait qu'avancer apres chaque perturbation.