Paul Auster

L'invention de la solitude

on pourra dire mon premier Auster (étant donné que j'avais lu la musique du hasard il y a si longtemps que je ne m'en souviens pas).

Une très belle écriture, à la fois tendre, froide, et d'une tristesse incroyable.
Un livre un peu construit comme du collage : des émotions mises les unes après les autres, les unes avec les autres. Pas vraiment d'histoire, juste celle de la disparition du père, de la construction de soi, du rapport à autrui.

Investissement de lieux clos dans une solitude provoquée et provocante (d'inspiration, de sécurité)

Ce roman me laissera plus des traces et des sensations qu'un souvenir imperissable. quoiqu'en quelque sorte, ces sensations seront des souvenirs imperissables, mais pas hyper palpables et difficilement racontables.

une puissance de l'écriture, en tout cas, c'est certain, même si parfois un peu trop "théorisée" pour me toucher vraiment et me transporter loin.
Mais en tout cas, ça donne l'envie d'aller voir plus loin.

Citation :

« J'avais une blessure, et je découvre maintenant qu'elle est très profonde. Au lieu de la guérir, comme je me le figurais, l'acte d'écrire l'a entretenue. Je sens par moments la douleur qui se concentre dans ma main droite, comme si, chaque fois que je prends la plume et l'appuie sur la page, ma main était lacérée. [Au lieu de m'aider à enterrer mon père, ces mots le maintiennent en vie, plus en vie peut-être que jamais.] »

Citation :

« Le livre de la mémoire. Livre six.
Il trouve extraordinaire, même dans l'ordinaire de son existence quotidienne, de sentir le sol sous ses pieds, et le mouvement de ses poumons qui s'enflent et se contractent à chaque respiration, de savoir qu'il peut, en posant un pied devant l'autre, marcher de là où il est à l'endroit où il veut aller. Il trouve extraordinaire que, certains matins, juste après son réveil, quand il se penche pour lacer ses chaussures, un flot de bonheur l'envahisse, un bonheur si intense, si naturellement en harmonie avec l'univers qu'il prend conscience d'être vivant dans le présent, ce présent qui l'entoure et le pénètre, qui l'envahit soudain, le submerge de la conscience d'être vivant. Et le bonheur qu'il découvre en lui à cet instant est extraordinaire. Et qu'il le soit ou non, il trouve ce bonheur extraordinaire. »

Paul Auster est certainement l'auteur dont j'ai lu le plus de romans : j'ai connu en effet ma grande période austérienne au début des années 90 mais je suis confrontée à un grand désarroi depuis quelques années : je n'arrive plus à apprécier un livre de cet auteur écrit après 1997 !
Serais-je blasée des thèmes austériens ?

En tout cas, je ne retrouve plus les joies et plaisirs que j'avais à lire, je cite en vrac mes préférés : Le Voyage d'Anna Blume (1989), La Musique du hasard (1991), Léviathan (1993), Mr. Vertigo (1994) et mon préféré Moon Palace (1990).
Moon Palace est d'ailleurs le livre que j'ai le plus prêté à mon entourage.
J'ai d'emblée moins apprécié sa Trilogie new-yorkaise .

Et quelle déception avec La nuit de l'Oracle .
Quant à Je pensais que mon père était Dieu, j'ai bien essayé de le commencer mais pas moyen de le terminer… gentillet mais sans plus.
Idem avec son petit dernier, Dans le scriptorium , pas moyen d'arriver au mot fin, je l'ai même laissé tombé après 50 pages tellement j'étais frustrée de ne plus retrouver "mon Paul Auster à moi" des livres précédents (eh oui, j'en étais arrivée à le considérer "mien" à ma grande époque austérienne lol)!
Alors qu'est-ce qu'il m'arrive ou que lui arrive-t-il ?
Je trouve que sa plume se fait plus lourde, moins incisive, qu'il tourne toujours autour des mêmes thèmes mais sans plus de magies aucune ou alors j'en ai fait le tour de Paul Auster et je suis passée à autre chose, tout simplement ?
Je pense quand même que ses meilleurs romans se situent au début des années 90 et que si je suis lassée par l'auteur, c'est qu'il tourne à peu sur lui-même ces dernières années avec moins de souplesse et d'allant qu'avant.

Enfin, malgré ces critiques, je cite toujours Paul Auster comme un de mes auteurs préférés et j'espère encore le retrouver un jour ou l'autre… soupir…

une question qui me vient spontanément : as tu vu son film Lulu on the bridge ?


je suppose que sur le fil Paul Auster on est pardonné pour les questions qui n'ont l'air qu'à moitié connectées...

Non l'Animal ! Tu me le conseilles ? Je n'ai pas lu non plus le livre (je boude un peu Paul Auster pour le moment, comme tu as pu le constater lol).

Je crois que je vais faire une annonce publique : si vous avez aimé - mais vraiment aimé - un livre de Paul Auster écrit après 1997, dites-moi lequel car j'en suis au stade où je n'ose plus lire Paul Auster de peur d'être à nouveau cruellement déçue !

oui je le conseille ! un film à l'envoutante bizarre bizarrerie... et une scène incroyablement déstabilisante. beaucoup aimé au cinéma... édité en dvd devenu introuvable (ici en tout cas) reste des possibilités de passage tv (sur la tnt il y a quelques mois)

Je l'ai vu... et lu. Harvey Keitel...
J'ai aussi un problème avec Paul Auster, Sentinelle, mais ce n'est pas le même. Je compte consulter prochainement
J'ai tout lu, sauf Dans le scriptorium. Et, à la lecture, j'aime beaucoup. Et puis, j'oublie très , très rapidement, les histoires racontées. Sauf L'invention de la solitude, bien sûr.
Je suis très inquiète, et ne comprends pas bien pourquoi cette amnésie ciblée.

mmmmh.... de quoi je peux me souvenir... c'est un peu bizarre oui, je n'en ai pas lu tant que ça, des fragments... sur les derniers et l'invention de la solitude j'y arrive à peu près... peut être que les histoires en termes d'action ne sont pas tellement marquantes ? ... c'est l'ambiance qui reste, cette impression de cheminement mental incessant...

ça me perturbe cette réflexion Marie

Marie a écrit:

J'ai aussi un problème avec Paul Auster, Sentinelle, mais ce n'est pas le même. Je compte consulter prochainement
J'ai tout lu, sauf Dans le scriptorium. Et, à la lecture, j'aime beaucoup. Et puis, j'oublie très , très rapidement, les histoires racontées. Sauf L'invention de la solitude, bien sûr.
Je suis très inquiète, et ne comprends pas bien pourquoi cette amnésie ciblée.

Hmmm effectivement, ce que tu me dis là m'inquiète également Marie !
Il faut croire que les thèmes austériens touchent une petite corde sensible que tu t'empresses d'enfouir bien confortablement dès le livre terminé

D''autant plus qu'il me semble bien difficile d'oublier de quoi il s'agit dans la mesure où Paul Auster tourne toujours autour des mêmes thèmes : l'identité, la solitude, la subsistance, l'argent, la relation au père, la quête initiatique, la reconstruction de soi après un deuil ou une séparation, le poids du hasard dans nos destinées... la notion de l'absence est très présente dans ses livres... à quoi associes-tu le mot absence Marie ??
C'était juste une essai pour une ptite séance de psychanalyse en toute intimité sur le net

Minute, je m'allonge, Sentinelle.
L'absence.... oui.... et bien....je me demande si je ne vais pas m'absenter un peu, là... Reste là, ne bouge surtout pas, je reviens!

Marie a écrit:

Minute, je m'allonge, Sentinelle.
L'absence.... oui.... et bien....je me demande si je ne vais pas m'absenter un peu, là... Reste là, ne bouge surtout pas, je reviens!

Zut alors, ce divan n'est pas aussi confortable que je le pensais !

sousmarin a écrit:

Il n'est pas mauvais mais je pense qu’il lui manque un peu d’humour…en clair, il est un peu trop austère pour moi …je ne le considère pas comme un auteur majeur.

Alison Lurie, dissèque le même milieu social au scalpel et elle est tellement plus drôle… :arrow:

Je ne m'étais jamais fait la réflexion mais je suis d'accord avec toi sur ce point : il n'a pas beaucoup d'humour notre ami Paul !

Je ne connais pas du tout Alison Lurie, mais je suppose qu'un fil doit lui être consacré alors je ne vais pas tarder à y jeter un oeil.


Une amie m'a prêté "Le livre des illusions", quelqu'un l'aurait-il lu ?

je crois que oui, mais je ne me souviens plus et je ne l'ai pas sous la patte (je chercherai voir de quoi ça cause pour me rafraichir la mémoire...)

Citation :

Une amie m'a prêté "Le livre des illusions", quelqu'un l'aurait-il lu ?

Mais bien sûr! Et je vais te raconter. Donc, heu.... :?:
Tu vois!!! Bon, je me rallonge, c'est urgent.
Mais j'avais beaucoup aimé à la lecture!
Sentinelle, tu n'as jamais lu Alison Lurie???? Allonge toi avec moi, on va en parler.

animal a écrit:

je crois que oui, mais je ne me souviens plus

Marie a écrit:

Mais bien sûr! Et je vais te raconter. Donc, heu.... :?:

Ah ça, on peut dire que vous n'avez pas votre pareil pour me convaincre de l'extrême urgence qu'il y a à lire ce chef d'œuvre inoubliable que semble représenter cette œuvre du siècle ! :king:

Marie a écrit:

Mais j'avais beaucoup aimé à la lecture!

Enfin tu as aimé pendant la lecture, c'est déjà un indice

Marie a écrit:

Sentinelle, tu n'as jamais lu Alison Lurie???? Allonge toi avec moi, on va en parler.

Bien volontiers Marie !
Alors attends un peu que je m'installe… petit thé de la main droite, petit sablé de la main gauche, j'allonge les jambes confortablement et je mets ma petite couverture pour maintenir mes petits petons bien au chaud. Voilà je suis toute ouïe !

Sache cependant que j'ai déjà pris les initiatives pour combler mes lacunes et que je suis allée à la bibliothèque de mon quartier pour aller dégoter "Un été à Key West" de Alison Lurie !

je pourrais avoir un sablé? Excuse moi, j'étais sur une urgence. Ah, toi aussi? Y a du boulot sur ce forum...
Donc, Alison Lurie, oui. Mes préférés sont les premiers, Liaisons étrangères, et La ville de nulle part. Que je relirais volontiers, d'ailleurs...
Mais on n'est pas sur le fil Auster, là? J'ai bien aimé ce qu'a écrit sa femme, Siri Hustvedt, et là, je m'en souviens, comment expliques tu ça?

Je ne me l'explique pas, c'est effectivement étrange
As-tu déjà rencontré ce même type de symptômes avec d'autres auteurs, et si oui lesquels ?

Tu veux encore un autre sablé ?

J'aime aussi Siri Hustvedt :)