Anna Akhmatova [Russie]

coline a écrit:

« Comment se fait-il que trois têtes en l'air pleines de courants d'air qui n'en faisaient qu'à leur guise, trois personnes incroyablement écervelées – A.A, O.M, et moi, aient pu préserver, sauvegarder et conserver toute notre vie cette triple union, cette amitié indestructible ? Nous étions tous tentés par autre chose – faire la roue, trouver une flûte pour charmer les rats, « danser devant l'Arche sainte… », nous nous faisions enrager les uns les autres, nous nous efforcions de nous remettre mutuellement les idées en place, mais notre amitié et notre union étaient inébranlables. Nous nous tenions les uns à côté des autres. Pour préserver cette amitié, il fallait de la constance et de la volonté.  Comment avons-nous fait pour surmonter les crises, inévitables aussi bien en amour qu'en amitié ? Nous avions compris quelque chose dès le début, pas grand-chose, bien sûr, mais cela a suffi pour cimenter notre lien. »

J'aime beaucoup cet extrait. Les têtes pleines de courants d'air....Qui n'en faisait qu'à leur guise...Ecervelées...Mais de qui est-il d'Anna ou de Nadejda? Au vu des extraits que tu nous as mis je dirai d'Anna? Mais je me trompe? En tout cas j'aime beaucoup. Et malgré la terreur, une amitié pareille, un tel échange me rend "jalouse".

pia a écrit:

coline a écrit:

« Comment se fait-il que trois têtes en l'air pleines de courants d'air qui n'en faisaient qu'à leur guise, trois personnes incroyablement écervelées – A.A, O.M, et moi, aient pu préserver, sauvegarder et conserver toute notre vie cette triple union, cette amitié indestructible ? Nous étions tous tentés par autre chose – faire la roue, trouver une flûte pour charmer les rats, « danser devant l'Arche sainte… », nous nous faisions enrager les uns les autres, nous nous efforcions de nous remettre mutuellement les idées en place, mais notre amitié et notre union étaient inébranlables. Nous nous tenions les uns à côté des autres. Pour préserver cette amitié, il fallait de la constance et de la volonté.  Comment avons-nous fait pour surmonter les crises, inévitables aussi bien en amour qu'en amitié ? Nous avions compris quelque chose dès le début, pas grand-chose, bien sûr, mais cela a suffi pour cimenter notre lien. »

J'aime beaucoup cet extrait. Les têtes pleines de courants d'air....Qui n'en faisait qu'à leur guise...Ecervelées...Mais de qui est-il d'Anna ou de Nadejda? Au vu des extraits que tu nous as mis je dirai d'Anna? Mais je me trompe? En tout cas j'aime beaucoup. Et malgré la terreur, une amitié pareille, un tel échange me rend "jalouse".

"trois personnes incroyablement écervelées – A.A, O.M, et moi"

C'est Nadedja qui écrit cela, dans son livre "Sur Anna Akhmatova".
Cette amitié était c'est vrai très belle, et indestructible malgré ce qu'ils ont dû traverser tous les trois. Anna et Ossip liés par la poésie et l'amitié, Ossip et Nadeja liés par l'amour, Anna et Nadedja reliées par Ossip dans une amitié incroyablement solidaire. Ils ont pris des risques les uns pour les autres, ils ont partagé des toits provisoires, des riens de nourriture, aucun jamais n'était délaissé. J'admire leur fidélité, leur intégrité, leur intelligence et leur talent littéraire...à tous les trois, même si Nadedja n'était pas destinée à devenir écrivain.

Coline toujours à fond quand un sujet te passionne !   

Marko a écrit:

Coline toujours à fond quand un sujet te passionne !   

Eh oui, c'est tout moi...Tu le sais bien...J'essaie d'épuiser un sujet ou l'oeuvre d'un écrivain qui me passionne.  
Là cette plongée actuelle risque de m'accaparer encore longtemps car j'ai de la matière et qu'elle m'emmène loin dans les biographies et les oeuvres de 4 grands poètes russes victimes de l'ère stalinienne?

Tu vois Marko, je vais prolonger ainsi de plusieurs mois mon voyage à Saint Pétersbourg.  

Pardonnez mon entêtement mais il me mène à un approfondissement. Peut-être réussirai-je à en entraîner quelques uns sur mes traces?... 

Tu pourras également y associer le parcours de Shostakovich qui est tout aussi douloureux et incroyable. Une époque vraiment effroyable

Marko a écrit:

Tu pourras également y associer le parcours de Shostakovich qui est tout aussi douloureux et incroyable. Une époque vraiment effroyable

  Evidemment, je n'oublie pas Shostakovitch...Pour l'instant je suis dans les textes d'Anna Akhmatova, Ossip Mandelstam, Nadedja Mandelstam, Marina Tsvetaieva et prochainement Boris Pasternak...Oeuvres et biographies...
J'ai pour projet d'essayer d'écrire, pour la mettre en espace, une lecture à partir de toutes ces oeuvres qui dialoguent entre elles. Cinq personnages (au moins), des textes (c'est fou tout ce que j'ai entre les mains! Il va y avoir un gros boulot de sélection!) et une musique qui serait celle de Shostakovitch bien sûr.  

Marko a écrit:

C'est très intéressant. Pour compléter ton fil conducteur Akhmatova je rajoute l'un des 6 poèmes de Marina Tsvetaeva mis en musique par Shostakovich et dédié à Akhmatova. Ils s'admiraient tous réciproquement. Akhmatova dédiant des poèmes à Shostakovich et ce dernier lui dédiant certaines compositions.

Citation :

Anna Akhmatova and Shostakovich admired each other from afar, but did not meet. Akhmatova rarely missed a Shostakovich premiere. After the first performance of the Eleventh Symphony in 1957 she compared its hopeful revolutionary songs, which the critics had dimissed as devoid of interest (this was the time of the Krushchev thaw) to "white birds flying against a terrible black sky." The next year she dedicated the Soviet edition of her "Poems": "To Dmitry Dmitrievich Shostakovich, in whose epoch I lived on earth." The two eventually met in 1961. "We sat in silence for twenty minutes. It was wonderful," recalled Akhmatova later in her diaries.

(note from Natasha's Dance by Orlando Figes)

LIEN

Poème d'Anna Akhmatova dédié à Dimitri Shostakovitch

  La musique
à Dimitri Shostakovitch

Il y a en elle un miracle qui brûle.
Sous nos yeux, elle forme un cristal.
C’est elle-même qui me parle.
Quand les autres ont peur de s’approcher.

Quand le dernier ami a détourné les yeux.
Elle est restée avec moi dans ma tombe.
Elle a chanté comme un premier orage,
Ou comme si les fleurs se mettaient toutes à parler.