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| Henri Michaux | |
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+10Esperluette shéhérazade kenavo jack-hubert bukowski Miss Tics tom léo coline shanidar bix229 Cachemire 14 participants | |
Auteur | Message |
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Cachemire Sage de la littérature
Messages : 1998 Inscription le : 11/02/2008 Localisation : Francfort
| Sujet: Henri Michaux Lun 28 Juin 2010 - 20:27 | |
| Henri Michaux (Namur, 24 mai 1899 – Paris, 19 octobre 1984) est un écrivain, poète et peintre d'origine belge d'expression française naturalisé français en 1955. Adolescent angoissé, ses premières expériences littéraires sont marquées par la fréquentation de Tolstoï et Dostoïevski. Même s'il lit beaucoup pendant ses études chez les jésuites, il ne s'oriente pas tout d'abord vers l'écriture mais vers la médecine, qu'il abandonnera assez vite cependant pour s'engager comme matelot. À peu près à la même époque, la découverte de Lautréamont le pousse à écrire. Il en sortira Cas de folie circulaire en 1922, premier texte qui donne déjà une idée de son style. Ensuite les écrits se succèdent (les Rêves et la Jambe en 1923, Qui je fus en 1927,...) et les styles se multiplient. Outre des textes purement poétiques, il rédige des carnets de voyages réels (Ecuador en 1929), Un barbare en Asie en 1933) ou imaginaires (Ailleurs en 1948, parmi beaucoup d'autres), des récits de ses expériences avec les drogues, et notamment la mescaline (Misérable miracle en 1956, Connaissance par les gouffres en 1961,...), des recueils d'aphorismes et de réflexions (Passages en 1950, Poteaux d'angle en 1971,...). Parallèlement à l'écriture, il commence à peindre. Exposé pour la première fois en 1937, il ne cesse ensuite de travailler, au point même que sa production graphique prend en partie le pas sur sa production écrite. Durant toute sa vie, il pratiquera autant l'aquarelle que le dessin au crayon, la gouache que la gravure ou l'encre. D’après www.biographie.net/Henri-Michaux | |
| | | Cachemire Sage de la littérature
Messages : 1998 Inscription le : 11/02/2008 Localisation : Francfort
| Sujet: Ecuador Lun 28 Juin 2010 - 20:29 | |
| EcuadorAprès Un barbare en Asie, La nuit remue et Connaissance par les gouffres, c’est le quatrième ouvrage de Michaux que je découvre et je suis de plus en plus subjuguée par son talent. Ecuador, comme son nom l’indique est le récit de son voyage en Equateur dans les années 1930. Le périple où il prend son temps est raconté, entrecoupé de poésies, comme un voyage d’aventure. Les touristes étant inexistants à l’époque, Michaux doit affronter quantités de situations-limite. Mais il parle aussi de lui-même et de la vie. Il a toujours un regard aigu et poétique sur chaques situations, sans parler d’un humour parfois ironique tout à fait rafraichissant. Je ne me lasserais pas de le lire… - Citation :
- Extrait : Les frissons ont en moi du froid toujours prêt. Mon vide est un grand mangeur, grand broyeur, grand annihilateur. Mon vide est ouate et silence. Silence qui arrête tout. Un silence d’étoiles.
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| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Henri Michaux Lun 28 Juin 2010 - 21:38 | |
| Oui, Michaux est radicalement original...et il l' était déà dès Ecuador. Et totalement indémodable... | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Henri Michaux Mar 29 Juin 2010 - 9:05 | |
| Michaux est inclassable et son oeuvre poétique unique, je me souviens d'avoir lu certains extraits de Plume à des enfants qui comprenant les textes à leurs façons ont trouvé ça très drôle et quelque peu magique (alors que les parents s'inquiétaient de la violence des mots...). Il faut aussi découvrir les dessins de Michaux qui s'est beaucoup intéressé aux oeuvres des aliénés. Voilà, c'est je crois ce qui est perturbant et fascinant chez Michaux, sa faculté d'aborder les rivages de l'étrange, de l'étranger, du différent (de sa violence comme de sa poésie) tout en laissant libre court à l'imagination (dans ce qu'elle a aussi de dévorant...). Michaux reste pour moi d'une grande brutalité et d'une grande poésie et cet alliage est incroyablement fertile en mots et situations déroutantes. Comme si l'enfance et la folie se réunissaient en lui pour permettre au lecteur de sortir de son univers familier et de s'enfoncer dans les méandres torturés d'un esprit renonçant à la lumière. | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| | | | tom léo Sage de la littérature
Messages : 2698 Inscription le : 06/08/2008 Age : 61 Localisation : Bourgogne
| Sujet: Re: Henri Michaux Mer 25 Aoû 2010 - 17:48 | |
| J'ai lu, ou plutôt pour la deuxième moitié: parcouru, Poteaux d'angle, et je reste assez désorienté. Je n'arrive pas à me former une opinion absolument claire; l'auteur m'échappe et aussi une partie de ces aphorismes. Question de langue? Peut-être! Des fois j'étais très touché par la correspondance avec mon vécu, et puis, en général, je trouvais la tonalité souvent un peu hautain et s'apitoyant. Il s'adresse souvent au lecteur, ou un 'tu/toi" imaginaire, et lui fais - ainsi je l'ai pris - la léçon. Donc, ce livre n'a pas pu me convaincre, malgré quelques très belles réflexions. | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Henri Michaux Mer 25 Aoû 2010 - 21:52 | |
| ça ne m' étonne pas, Tom Léo... Vient un moment où l' évolution d' un artiste nous éloigne de lui...
Je préfère de beauoup le Michaux du début qui s' était trouvé d' emblée. Dès Ecuador... | |
| | | Miss Tics Posteur en quête
Messages : 92 Inscription le : 03/06/2007 Age : 50 Localisation : Bordeaux
| Sujet: Re: Henri Michaux Jeu 26 Aoû 2010 - 17:09 | |
| J'ai lu avec plaisir La vie dans les plis et Face aux verrous. Avec une grande préférence pour le second. Évidemment, Michaux se lit mais ne se raconte pas. Un mini extrait quand même : - Citation :
- L'amnésique se rappelait la Lune.
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| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Henri Michaux Lun 4 Mar 2013 - 12:36 | |
| J'ai de quoi pour vous dans Passages et qui correspond assez bien à mon état d'esprit du moment : - Citation :
- Il se peut fort bien que je ne continue pas longtemps, fatigué un jour de... ces improvisations qui ne deviennent pas des oeuvres.
Il ne faudrait pas que jamais je n'oublie. J'étouffais. Je crevais entre les mots.
J'étais paralysé devant les murs. Ce n'est plus pareil maintenant. Ce ne sera plus jamais pareil.
J'ai connu mon plancton. Je l'ai entendu! Je sais qu'il est là, maintenant, qu'on le remarque ou non, masse de mouvements flottants sans fin, nourriture océanique d'apaisement.
Les races les plus dures, sur la flûte ont été élégiaques. Leur fierté, là, c'est comme si elle n'était pas engagée. Les guerriers peuvent pleurer. Les razzieurs de troupeaux, les violeurs de femmes peuvent s'attendrir.
Pas besoin de se justifier. Et on peut aller jusqu'au bout sans ridicule.
Un poème aurait vendu la mèche dix fois et la prose rend tout ignoble.
Mots, mots qui viennent expliquer, commenter, ravaler, rendre plausible, raisonnable, réel, mots, prose comme le chacal.
Autrefois, je croyais la peau du tambour nécessaire. Je vois bien que non maintenant. N'importe quel bois fait l'affaire sur quoi les doigts, la main peuvent taper. Vite, plus vite, moins vite, lentement, très lentement. Toute vie ramenée à ça. Mesure de quoi? On ne sait. À tout hasard, on se prépare une respiration nouvelle pour un évènement capital, pas apparu encore, pour un nouvel aiguillage ou une grande expérience ou un désastre sans recours, où il faudra qu'elle soit ample et lente pour méditer sagement hors de l'horreur et résister à la vaine envie de vouloir encore redémarrer...
Henri Michaux, Passages (1937-1963), 1998 (1963), p. 85-86. | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Henri Michaux Lun 4 Mar 2013 - 22:28 | |
| Je suis en train de relire La nuit remue et j'y retrouve cet humour un brin ironique et touchant qui m'avait émue il y a quelques années. Une sorte de férocité dans les mots, des obsessions (le point, la tête, la terre) et puis une légèreté, une facilité à dire le pire comme le plus poétique, comme si les mots étaient jeté par-dessus bord, comme en voyage, un voyage court et au long court puisque les textes de Michaux sont souvent brefs mais emportent longtemps... Je reviendrai à la fin de ma lecture pour en dire un peu plus... | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Henri Michaux Dim 10 Mar 2013 - 3:31 | |
| Dans Chemin faisant, recueil d'essais courts, Jacques Brault a commenté la particularité de ce qui constitue «Le genre Michaux» : - Citation :
- Michaux, traversant et bousculant la littérature, débouche sur la littérature. Ni poète, ni romancier, inclassable et mal logé dans un genre ou l'autre, il arrache le langage à la fixité des compartimentations, il le relance sur la route de ses risques, là où les contraires et les contraintes s'épousent, le corps étant esprit, l'esprit corps, la main voyante, les yeux tactiles, ces épousailles cependant ne durent pas, elles affrontent des intempéries, s'engluent dans l'ennui des haltes, elles se brisent et chacun marche de son côté comme avant; ou bien l'un veut rester l'autre repartir, des accords renaissent, des disputes, et des séparations produisent des clans, des familles, des individus irréductibles, au bout du compte il faut réinventer un code rhétorique pour dirimer les alliances antérieures.
Jacques Brault, Chemin faisant, 1994, Boréal, p. 161. | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Henri Michaux Jeu 11 Avr 2013 - 20:41 | |
| (très beau et très pertinent le passage de Brault que tu cites jack-hubert bukowski) La nuit remueImpossible de parler de Michaux sans mettre l'accent sur son formidable humour. Noir. Cruel. Et même bien souvent nourrit par l'irascibilité d'un auteur que l'on sent ligoté dans un monde auquel il tente maladroitement et surtout d'une manière désespérément inventive d'échapper. Michaux n'aime pas beaucoup les autres et s'aime encore moins. Il le fait savoir à travers des textes emprunts d'une rare force et d'une troublante colère. Mais, Michaux ne se prend pas au sérieux et même lorsque l'on sent chez lui un profond dégoût pour sa vie, se cache derrière un mot, une situation (toujours poussée à l'extrême, ou totalement absurde, ou parfaitement surréaliste) une image qui désamorce la rage, qui jugule l'horreur pour ouvrir sur un rire, à la fois ténébreux et salvateur. Lire Michaux s'est accepté d'être précipité dans des mondes inconnus, peuplés d'animaux aux noms exotiques et aux pratiques étranges, décalées, bizarres. C'est voir le monde avec d'autres yeux, c'est souvent assister à des actes d'une grande violence et d'une grande incongruité (incongruité qui ne manque jamais de faire naître un certain malaise et un certain sourire) et découvrir à la marge, une drôlerie, un pied de nez ou un véritable désespoir qui replace immédiatement le texte au sein d'une réalité dure, drôle, fantastique. Lire Michaux est au fond une expérience unique, car elle touche en même temps les extrêmes de nos possibles sentiments : du plus noir désespoir au rire le plus naïf, le plus joueur, le plus désespérant… Bonheur... | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Henri Michaux Jeu 11 Avr 2013 - 20:55 | |
| ETAPES
Autrefois j'avais mon malheur. Les dieux mauvais me l'ont enlevé. Mais alors ils ont dit : "En compensation, on va lui donner quelque chose. Oui ! Oui ! Il faut absolument que nous lui donnions quelque chose." Et moi-même, d'abord, je ne vis que ce quelque chose et j'étais presque content. Cependant ils m'avaient enlevé mon malheur. Et comme si ça ne suffisait pas, ils me donnèrent un balancier. Or moi qui avait fait tant de faux pas, je fus content ; dans mon innocence, je fus content. Le balancier était commode, mais sauter devint impossible. Et comme si ça ne suffisait pas, ils m'enlevèrent mon marteau et mes outils. Le marteau fut remplacé par un autre plus léger, et celui-ci par un autre encore plus léger, et ainsi de suite successivement, et mes outils disparurent l'un après l'autre, jusqu'aux clous ! Quand je songe à la façon dont ça s'est fait, encore maintenant j'en reste bouche bée. Ils m'ont enlevé ensuite mes chiffons, mes bouteilles cassées, tous les débris. Alors, comme si ça ne suffisait pas, ils m'ont enlevé mon aigle. Cet aigle avait coutume de se percher sur un vieil arbre mort. Or ils l'arrachèrent pour planter des arbres vivants et vigoureux. L'aigle ne revint pas. Et ils prirent encore mes éclairs. Ils m'ont arraché mes ongles et mes dents. Ils m'ont donné un oeuf à couver.
extrait de La nuit remue | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Henri Michaux Jeu 11 Avr 2013 - 20:57 | |
| Michaux voyait plus loin, voyait autrement. Ailleurs. Des mondes qui n' existaient que pour lui et qu' il dessinait après avoir absorbé des hallucinogènes. Mais meme sans, il était un voyant et un visonnaire comme Antonin Artaud. Lisez Voyage au pays des Tarahumaras.... | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Henri Michaux Sam 11 Mai 2013 - 15:37 | |
| Depuis qu'Igor nous a posté cette photo, je me suis mise à la recherche d'un texte qui pourrait l'accompagner... je l'ai trouvé chez cet auteur... j'espère qu'Igor est d'accord pour mon emprunt de sa photo pour 'illustrer' ce texte Je vous écris d’un pays lointain, 1938 VIII Depuis longtemps, longtemps, lui confie-t-elle, nous somme en débat avec la mer. De très rares fois, bleue, douce, on la croirait contente. Mais cela ne saurait durer. Son odeur du reste le dit, une odeur de pourri (si ce n’était son amertume). Ici je devrais expliquer l’affaire des vagues. C’est follement compliqué, et la mer… Je vous prie, ayez confiance en moi. Est-ce que je voudrais vous tromper ? Elle n’est pas qu’un mot. Elle n’est pas qu’une peur. Elle existe, je vous le jure ; on la voit constamment. Qui ? Mais nous, nous la voyons. Elle vient de très loin pour nous chicaner et nous effrayer. Quand vous viendrez, vous la verrez vous-même, vous serez tout étonné. « Tiens ! » direz-vous, car elle stupéfie. Nous la regardons ensemble. Je suis sûre que je n’aurai plus peur. Dites-moi, cela arrivera-t-il jamais ?IX Je ne peux pas vous laisser sur un doute, continue-t-elle, sur un manque de confiance. Je voudrais vous parler de la mer. Mais il reste l’embarras. Les ruisseaux avancent ; mais elle, non. Écoutez, ne vous fâchez pas, je vous le jure, je ne songe pas à vous tromper. Elle est comme ça. Pour fort qu’elle s’agite, elle s’arrête devant un peu de sable. C’est une grande embarrassée. Elle voudrait sûrement avancer, mais le fait est là. Plus tard peut-être, un jour elle avancera. | |
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| | | | Henri Michaux | |
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