Ian McEwan

Je viens de lire « Sur la plage de Chesil » et j’étais à nouveau impressionné par le langage précis, oui, d’orfèvre, de McEwan, par exemple concernant les gestes et les ressenties intérieures dans la nuit de nôces ET aussi les descriptions du passé des deux. Il faudrait ajouter à ces deux chronologies, niveaux d’histoire, une fin d’histoire en forme de raccourci sur l’avenir surtout d’Edward, et indirectement de son ex-femme. Avec toute la "libération" qui venait pour lui après, Edward semble avoir raté sa vie...

Certains auraient voulu avoir des explications plus claires sur l’attitude de Florence. En ce qui me concerne cela semble assez claire que ce n’est pas juste une frigidité ou une simple aversion. Cela vient de plus loin…, et pas nécessaire d’expliciter qu’il y avait eu très probablement un problème coté père. Les indices sont là, savamment présentés par McEwan. Ce problème lié au contexte historique est moins la pudeur et l’absence de sexualité que l’absence de partage, le manque de mots. Aussi le « problème » de Florence – s’il est de l’ordre d’un abus – serait en grande partie le même de nos jours… Il ne sert pas à grande chose de lui reprocher son attitude qui est blessure. Elle aurait d’abord besoin d’aide.

Car si maintenant on cherche alors le problème coté Florence, l’auteur termine l’histoire en soulignant la responsabilité d’Edward. De la patience, de l’aide cherchée et trouvée…auraient changé deux vies. Ainsi reste l’impression d’un énorme gâchis, ou, comme disait Coline, d’une tragédie.

Le roman est assez court, et il gagne d’être lu d’un trait.

Très bonne lecture !

Je partage totalement ton avis Tom Léo. Pour moi tout cela (les rapports incestieux du côté paternel) était effectivement suggéré de façon très fine, mais néanmoins presque évidente.

J'ai aussi trouvé que le manque de partage, l'absence de mots, et cela du côté d'Edward qui n'avait pas su trouver la faille par laquelle accéder au secret de Florence, était à l'origine de ce monstrueux gâchis.

Une de mes plus belles lectures de l'année 2008, c'est certain.

J'ai toujours hésité à lire Sur la plage de Chesil mais suite à vos derniers commentaires, je vais tout de même me laisser tenter

Merci pour ton commentaire Tom Léo, je te rejoins à 100% dans ta lecture.. un si bon moment!!

sentinelle a écrit:

J'ai toujours hésité à lire Sur la plage de Chesil mais suite à vos derniers commentaires, je vais tout de même me laisser tenter

faut surtout pas hésiter.. un livre tout à fait sublime!!

aeriale a écrit:

Pour moi tout cela (les rapports incestieux du côté paternel) était effectivement suggéré de façon très fine, mais néanmoins presque évidente.

Je vois ce que tu avais envie de me dire de vive voix sur ce livre, chere Aeriale! J'ai pense a cette raison qui aurait provoque un blocage chez Florence, mais puis, je me suis dit que j'allais trop loin ou que le francais me jouait un mauvais tour.
Je dois avoir des reticences et hesitations comme Florence et je dois m'autoaider.

Pour moi aussi, ce livre etait une des trouvailles de l'annee!

Orientale a écrit:

Je vois ce que tu avais envie de me dire de vive voix sur ce livre, chere Aeriale! J'ai pense a cette raison qui aurait provoque un blocage chez Florence, mais puis, je me suis dit que j'allais trop loin ou que le francais me jouait un mauvais tour.

Eh bien non, ton français est nickel Orientale! On avait vu la même chose alors

Quant à Sentinelle, oui il faut que tu le lises et vite!

Ok, dès que je le trouve en biblio, je le prends

L’enfant volé

La petite Kate, trois ans, disparaît d’un supermarché alors que son père était en train de payer ses achats à la caisse. Malgré des recherches intensives (mais vite abandonnées par la police), elle n’est pas retrouvée. Le père, Stephen, écrivain pour enfant renommé, s’acharne à poursuivre de vaines recherches tandis que sa femme s’enfonce dans le mutisme et l’inaction. Le couple ne tarde pas à se séparer et Stephen tente de survivre seul, dans l’incapacité d’écrire. Il participe à des réunions gouvernementales destinées à élaborer un ouvrage de pédagogie, au cours de réunions assez ennuyeuses. Il continue de voir son ami Charles, qui a abandonné une brillante carrière politique pour vivre à la campagne, mais son comportement étrange rebute Stephen.
Un livre très agréable à lire pour son style et ses personnages fragiles et attachants ; il y a aussi des moments assez comiques, quand il s’agit de mener des réunions inutiles et de rencontrer un premier ministre complètement paranoïaque !

Samedi

Pas vraiment rentrée dans cette histoire, celle d'un homme de 48 ans neurochirurgien reconnu, qui voit sa vie basculer soi-disant en très peu de temps.
je l'ai trouvé tout au plus chamboulé dans sa petite vie confortable (une fille brillante poétesse, un fils brillant guitariste de blues, une femme aimante et aimée avocate efficace, son squash hedomadaire, sa mercedes.....)

bof, je suis à 100 lieues des préoccupations de ce monsieur (le héros) qui craint comme la peste l'islamisme, le terrorisme etc....
ça ne me parle pas, c'est ultra contemporain mais ça tourne en rond et pour moi, les problèmes des personnages n'en sont pas.

Je suis bien loin du plaisir que j'avais eu à lire "Sur la plage de Chésil", hélas.

Expiation

Ce roman est une merveille de finesse et d'écriture. Il m'a captivée d'entrée avec la description de cette famille bourgeoise et l'analyse subtile des personnages qui la composent. Ian Mc Ewan pose d'abord le cadre, très british, d'une micro société repliée sur ses traditions et décrit au compte goutte chaque moment de cette journée où la jeune adolescente Briony, fière et empétrée dans son monde de rêve, va faire chambouler le destin de ce couple d'amoureux, par vanité autant qu'ignorance. Jamais le nom de viol n'est exprimé, le scandale est vite étouffé, et Robbie sera le coupable idéal.

L'auteur prend le temps d'emporter le lecteur dans cette période troublée de la guerre, nous épargnant aucun drame ni atrocités, sur le front où survit Robby comme dans la tourmente d'un hopital où Briony tente d'expier sa faute. C'est souvent très dur, pesant parfois, et la lecture est intense. Lorsqu' arrive le dénouement (du moins croit-on) on souffle avec eux. Mais Ian Mc Ewan a plus d'un tour dans son sac et la fin n'est peut-être pas celle que l'on croit...

Roman parfait, qui se conclut en une sorte de pirouette sur le pouvoir de l'écrivain, et son univers de possibles. L'auteur est un maître dans l'art de la suggestion, il se fond aussi bien dans le mental d'une ado que dans celui d'un homme détruit par l'injustice, ses images sont d'une force descriptive incroyable, je suis sûre qu'il me marquera longtemps. J'ai très hâte de voir le film à présent!

Super commentaire Aériale, qui rend bien l'atmosphère du roman.

aeriale a écrit:

Expiationje suis sûre qu'il me marquera longtemps. J'ai très hâte de voir le film à présent!

Oui, c'est un livre qui marque, je viens de me rendre compte que cela fait plus d'un an que je l'ai lu et j'ai l'impression que c'était hier.
Le film est pas mal, si tu veux, je peux le cercler.

Epi, t'exagères! J'ai relu le tien et je me suis dit 'elle a tout dit parfaitement, qu'est-ce que je vais dire de plus?'

J'ai des images dans la tête à présent, je veux bien que tu le cercles oui!

Ah non, on a tous quelque chose à dire de plus

OK pour le film, on voit ça par mp.

Que dire de Solaire ?

McEwan a réellement un style d'une fluidité remarquable, extrêmement agréable à lire, c'est en tout cas ce qu'il en ressort d'après la traduction. Il a également un humour pince-sans-rire absolument hilarant, décrivant finement des situations grotesques en ayant l'air de ne pas y toucher. C'est absolument délectable.

Tout ceci donnerait envie de s'enthousiasmer sur un livre comme Solaire. Malheureusement l'auteur nous décrit un personnage tout à fait antipathique, et en même temps trop minable pour qu'on s'y attache d'une quelconque façon : quinquagénaire plutôt moche et bedonnant, infantile dans son incapacité à vivre autrement que dans l'instant, répondant à ses appétits les plus immédiats, sans jamais se poser la question des conséquences, profiteur, menteur, uniquement préoccupé de ses propres besoins. Certes il a eu un prix Nobel de physique pour des travaux brillants dans ses plus jeunes années, mais là encore McEwan suggère qu'il n'était pas forcément franchement mérité. Depuis il repose sur ses lauriers, tire profit de cette gloire passée pour s'autoriser à végéter, pique des idées à droite et à gauche, de façon fort peu honorable, pour entretenir cette pseudo image. Dans sa vie personnelle aussi, il a un certain succès (concept finalement assez peu) mais tous finissent par se lasser. Le livre décrit une dizaine d'années de cette vie qui n'a d'autre constante que la satisfaction immédiate, et c'est finalement assez mince…

En somme, la forme est brillante et séduisante, ce qui explique qu'on puisse aller jusqu'au bout, mais le fond est assez creux donc cela ne laissera pas un souvenir inénarrable…