Arcadi et Boris Strougatski [Russie]

Arcadi Strougatski (né le 28/08/1925 à Batoum – décédé le 12/10/1991 à Moscou)
et Boris Strougatski (né le 15/04/1933 à Leningrad - décédé le 19/11/2012)

Les Strougatski sont peut-être les écrivains de science fiction les mieux connus de feu l’Union Soviétique. Leur travail s’est fait comme celui des pianistes qui jouent une partition à quatre mains. Pourtant leurs métiers sont bien différents ; Arcadi, l’aîné, est interprète de japonais ; Boris est astrophysicien. L’un des deux est assis devant la machine à écrire, l’autre à côté. L’un propose une phrase, ils la travaillent en tournure, rythme, remarques, tout un usinage…

La science-fiction des frères Strougatski louvoie de Staline à Gorbatchev, entre censure et soumission. Même quand les thèmes de leurs œuvres restent d’un certain classicisme, la part de réflexion critique se révèle prépondérante. Parfois conte philosophique, parfois utopie, la science-fiction des frères Strougatski décrit avant tout des individus évoluant dans des milieux étouffants, à la recherche d’une échappée. Elle fustige en même temps la petitesse des sentiments, les contraintes sociales, la bureaucratie.

Leurs romans portent l’empreinte de l’héritage culturel russe, on retrouve entre autre trace de l’ironie acerbe des « Ames mortes » de Maxime Gorki. Un de leurs romans « Stalker », a été adapté brillamment au cinéma par Andreï Tarkovski.

Les œuvres principales des frères Strougatski (d’après Wikipedia) :
Les Revenants des étoiles - Le Rayon fantastique N°120, 1963
L’Escargot sur la pente - Éditions Champ Libre, 1972
Il est difficile d'être un dieu (Moscou 1964) - Présence du futur N°161, 1973 - Denoël, 2009
Le lundi commence le samedi (Moscou 1966) - Présence du futur N°179, 1974
Les Mutants du brouillard - Albin Michel, 1975
Le Dernier Cercle du paradis - Le Masque Science Fiction N°80, 1978
L'Île habitée - L'âge d'homme, 1980 - rééd. Denoël, 2010
L'Arc en ciel lointain - Fleuve noir, 1982
Le Scarabée dans la fourmilière - Fleuve noir, 1982
La Machine des désirs (nouvelle) - Proxima, 1983
La Seconde Invasion des martiens - Fleuve noir, 1983
Un milliard d'années avant la fin du monde : Manuscrit découvert en d'étranges circonstances - Fleuve noir, 1983
Le Petit - Fleuve noir, 1984
Un gars de l'enfer - Présence du futur N° 244, 1987
L'Auberge de l'alpiniste mort - Présence du futur N° 457, 1988
Les vagues éteignent le vent - Présence du futur N° 502, 1989
Destin boîteux - Hachette-Progrès, 1991
Stalker, parfois sous-titré Pique-nique au bord du chemin - 1972 - Présence du futur N° 314, 1994 - rééd. Denoël, 2010

Un article plus fouillé sur les frères Strougatski se lit chez Le cafard cosmique.



Il est difficile d'être un dieu



Des historiens bien intentionnés suivent l’évolution d’une planète en proie à une dictature obscurantiste. Difficile de se retenir d’intervenir pour ceux, qui grâce à leur supériorité technologique, sont perçus comme des dieux. C’est imho un des meilleurs romans des Strougatski. Le sujet est grave mais décrit intelligemment, jamais pesant et même dans un style plutôt léger.

J'ai lu Stalker il y a pas mal de temps, peut être une autre lecture pourrait me tenter.

Stalker Plein d'autres a decouvrir alors!

J'avais trouvé Difficile d'être un Dieu pas mal du tout - sachant qu'à l'époque où je l'ai lu, il y avait encore l'Est et l'Ouest, le texte se lisait différemment...

Stalker, bien sûr, est un incontournable (je l'avais trouvé en édition d'occasion tout abîmé, à une époque où il n'avait pas été réédité depuis des années...).
Les vagues éteignent le vent m'avait laissé dubitatif, il a dû y avoir quelque chose que je n'avais pas compris, à l'époque.
Mais comme je n'avais lu ni L'île habitée, ni Le scarabée dans la fourmilière, qui comporte les mêmes personnages et qui précédaient, ceci peut expliquer cela...

Il ne me reste plus grand chose de L'Auberge de l'alpiniste mort, curieusement.
Une histoire de type policier très curieuse...

Globalement, il y a beaucoup plus de Strougatski traduits en allemand qu'en français, je ne sais pas pourquoi... est-ce que l'Allemagne serait plus ouverte à la SF de l'Est ?
Le lundi commence le samedi, par exemple, n'est pas disponible en français ; en allemand, si ("Montag beginnt am Samstag").

eXPie a écrit:

Globalement, il y a beaucoup plus de Strougatski traduits en allemand qu'en français, je ne sais pas pourquoi... est-ce que l'Allemagne serait plus ouverte à la SF de l'Est ?
Le lundi commence le samedi, par exemple, n'est pas disponible en français ; en allemand, si ("Montag beginnt am Samstag").

Intéressante question à laquelle je ne sais pas répondre n’ayant jamais touché à la science-fiction en langue allemande.

Ceci étant dit « Le lundi commence le samedi » a été traduit en français par Bernadette Crest et publié en 1974 dans la collection « Présence du futur » des éditions Denoël. Le roman n’a pas été republié depuis mais comme les éditions Denoël ont commencé par rééditer les romans des Strougatski, « Le lundi commence le samedi » le sera peut-être prochainement. En attendant la plupart des textes d’Arcadi et de Boris Strougatski sont disponibles en ligne et en russe – comme celui de Понедельник начинается в субботу (« Le lundi commence le samedi ») - mais aucune traduction ne l’est

le lundi commence le samedi


très divertissant

un jeune programmeur se trouve plus ou moins pris au piège dans la ville de Solovets (dont l'institut scientifique a besoin d'un programmeur). Il est hébergé chez la sorcière du village, dans une isba à pattes de poule, dans laquelle le miroir réfléchit à voix haute, le chat échappé d'un conte populaire ou d'un poème de Pouchkine récite des vers ou chante des chansons malgré sa mémoire défaillante, où se trouve un divan-translator et d'étranges professeurs de magie. Une pièce de cinq kopecks revient toujours se loger dans la poche du héros, les clins d'oeil aux légendes et contes, ainsi qu'à toute une mythologie de la SF (voyage à travers le temps...) ou alchimique (recherche de la jeunesse éternelle...) foisonnent dans un roman qui se lit aussi vite qu'une traversée interstellaire à travers les oeuvres de fiction...

Dans le fameux institut, Privalov croise des géants grecs, des vampires, des doubles, des dromovoï (petits génies russes), des djinns enfermés dans des bouteilles, des homoncules ; au musée est exposée une dent de Dracula, la sorcière reçoit un coup de fil qui lui donne rendez-vous au Mont-Chauve, les mages sont d'étranges personnages, certains attachants et d'autres détestables (comme Merlin)...

Bref on trouve dans ce roman tout ce qui peut nourrir l'imaginaire, plus quelques références à Montesquieu, des interrogations sur ce qu'est la fiction, des dialogues incisifs... Un bon livre pour passer un bon moment de détente, loin de la SF alarmiste ou politique. Nous sommes ici plus proche des légendes populaires que de la cyberculture...

Décès de Boris Strougatski le lundi 19 nov. 2012.