Lionel Shriver

Un commentaire vraiment très complet ! Je n'avais pas autant remarqué ce côté peu fiable - pas net, comme tu dis -de la mère narratrice. Je la sentais désorientée, déstabilisée, mais pas irrationnelle. Cela dit, ça commence à faire un petit moment que j'ai lu ce livre, alors j'ai peut-être oublié.
En tout cas, il fait incontestablement partie des livres qui m'ont marquée, il est vraiment bien fait.

Désorientée, je n'ai pas tellement sentie cela chez elle. Dès le départ, pour elle, Kevin est un Monstre, et tout ce qu'il se passe par la suite est logique. Ce qui est perturbant pour elle, c'est l'imperfection de sa vie, cet enfant qu'elle ne contrôle pas, cette peur qu'elle affronte mais qu'elle ne surmonte jamais.

C'est d'ailleurs intéressant aussi tous les passages sur les peurs, nos peurs profondes que l'on affronte ou pas. Ce qui en découle.
La mère d'Eva est agoraphobe, elle ne sort jamais de chez elle. Enfant, Eva était obligée d'aller faire les courses pour sa mère. Elle crevait de peur de traverser la ville pour acheter une brique de lait, mais elle le faisait. Elle avait peur que son "secret" soit révélé à l'école.
Adulte, Eva monte une boite de voyage genre globe trotter, et part tous les 3 mois à l'étranger, avec un sac à dos et aucun repère. Elle a peur de ces voyages, mais elle les fait. Elle en tire une jouissance de martyr, de maîtrise de la raison sur l'affect.

Kevin m'est parfois apparu comme un de ces pays hostiles dans lesquels on peut se retrouver. Des choses semblent familières, mais "pas net". Troublant, déstabilisant. Effrayant, au final, parce que ça perturbe la notion même de réalité. Eva explore Kevin, essaye de l'apprivoiser. Au lieu d'en faire un guide touristique, elle en fait des lettres à son mari. Une cartographie précise de cet enfant étranger.

C'est certain qu'il est très marquant, ce livre.
Et regorge de beaucoup de choses qu'on peut laisse passer, parce que l'auteur les glisse, une fois, deux fois, trois fois. On les intègre sans même s'en rendre compte.

Voilà plusieurs fois que j'entends parler de ce livre (par le forum et par mon entourage) je pense que j'y viendrai mais, pour le moment, il me fait peur.
C'est tellement difficile d'élever un enfant.
J'ai peur de découvrir (même si je le sais déjà) qu'on ne peut, parfois, rien pour empêcher l'irréparable, même s'il s'agit de son enfant et que c'est insupportable.
Ai je bien compris? Ce livre parle t il de cela?

Ca fait combien de fois que je me dis qu'il faut que je lise ce bouquin? 10 fois?
Je dois avoir peur de quelque chose.. D'un côté un peu "sensationnel" peut-être, un excès de pathétique, même si vos commentaires ne semblent pas l'indiquer.

unmotbleu a écrit:

Voilà plusieurs fois que j'entends parler de ce livre (par le forum et par mon entourage) je pense que j'y viendrai mais, pour le moment, il me fait peur.
C'est tellement difficile d'élever un enfant.
J'ai peur de découvrir (même si je le sais déjà) qu'on ne peut, parfois, rien pour empêcher l'irréparable, même s'il s'agit de son enfant et que c'est insupportable.
Ai je bien compris? Ce livre parle t il de cela?

Hum.
Ça ne parle pas vraiment d'élever un enfant et de voir où on aurait pu empêcher certaines choses de se passer.
C'est plus sur une relation très conflictuelle, destructrice, malsaine, manipulatrice, entre un enfant et sa mère. C'est plus comme observer un psychopathe en milieu naturel.
Bien sûr, après, il y a beaucoup de réflexion sur le désir d'enfant, ou non, comment être parent, la difficile conciliation professionnel/famille, le manque de communication au sein d'un couple quand un enfant est entre les deux. Shriver dit des choses qui sont peu dites, je pense, sur cet aspect non évident d'être parent.

topocl a écrit:

Ca fait combien de fois que je me dis qu'il faut que je lise ce bouquin? 10 fois?
Je dois avoir peur de quelque chose.. D'un côté un peu "sensationnel" peut-être, un excès de pathétique, même si vos commentaires ne semblent pas l'indiquer.

Ni dans le sensationnel genre fait divers télévisé, ni dans le pathétique.
Tu peux y aller !

Queenie a écrit:

Et surtout, ne rien lâcher. Jamais. Ni son enfant terrible (qu'elle reste l'ultime ennemi dans une sorte de martyr expiatoire d'avoir enfanter le Monstre, et peut-être, de l'avoir créer par son non désir ?), ni son mari qui ne fait plus aucun effort pour la soutenir, ni son job, ni ses rêves.

C'est la question que je me posais de plus en plus souvent au fur et à mesure que j'avançais dans ma lecture, jusqu'à en être presque convaincue à la fin. Mais la question demeure évidemment sans réponse et plus que tout le reste, bien sûr, c'est ça qui est au centre du roman, peut-on naître mauvais ou le devient-on, éternelle question s'il en est.
En tout cas, oui, c'est un roman qui marque (le film, moins).

Epi a écrit:

Queenie a écrit:

Et surtout, ne rien lâcher. Jamais. Ni son enfant terrible (qu'elle reste l'ultime ennemi dans une sorte de martyr expiatoire d'avoir enfanter le Monstre, et peut-être, de l'avoir créer par son non désir ?), ni son mari qui ne fait plus aucun effort pour la soutenir, ni son job, ni ses rêves.

C'est la question que je me posais de plus en plus souvent au fur et à mesure que j'avançais dans ma lecture, jusqu'à en être presque convaincue à la fin. Mais la question demeure évidemment sans réponse et plus que tout le reste, bien sûr, c'est ça qui est au centre du roman, peut-on naître mauvais ou le devient-on, éternelle question s'il en est.
En tout cas, oui, c'est un roman qui marque (le film, moins).

(le film est moins marquant (mais c'est logique, je trouve, c'est intrinsèque à la forme), mais, alors que je ne l'avais pas énormément aimé, j'en garde vraiment des souvenirs. Et après avoir lu le livre, je trouve qu'il était plutôt pas mal réussi - d'ailleurs Marko est d'accord il me semble. D'où mon envie de le revoir)

J'avais aimé le film, il m'avait donné envie de lire le livre, j'ai oublié.

J'ai lu ton commentaire, j'ai re-envie de lire le livre et re-envie de voir le film.

Damn.

Heyoka a écrit:

J'avais aimé le film, il m'avait donné envie de lire le livre, j'ai oublié.

J'ai lu ton commentaire, j'ai re-envie de lire le livre et re-envie de voir le film.

Damn.

Lis-le !

Oui Maîtresse !

Dans le Challenge Etats-Unis de Madame B.

Madame B. a écrit:

12-Iowa

Lionel Shriver, Big Brother




A travers des histoires de familles, Lionel Shriver, comme beaucoup d’auteurs américains, ausculte les dérives de nos sociétés. Dans Big Brother, elle reprend ce procédé pour parler d’un problème très important aux Etats-Unis, l’obésité.

Musicien de jazz à la dérive, Edison quitte New York pour aller passer deux mois dans l’Iowa, chez sa sœur Pandora. Quand cette dernière va le chercher à l’aéroport elle a un choc. Elle ne l’avait pas vu depuis quatre ans et ne le reconnait pas. Il faut dire qu’il pèse 175 kilos.. Pandora est mariée à Fletcher un homme obsédé par la minceur, la nourriture saine (il ne mange parfois que des carottes crues) et le sport. Elle prend une décision importante : elle décide de l’aider à perdre 100 kilos.

L’auteure montre ainsi, à travers Edison et Fletcher, deux comportement addictifs extrêmes qui traduisent le manque de repères de nos sociétés mais aussi une course vaine à la perfection. Elle en profite, au passage, pour faire un portrait inquiétant de l’Iowa (dont les paysages idylliques cache une dépendance à la drogue car c' est devenu un état complètement bouffé par la  méthamphétamine (les femmes en prennent pour maigrir par exemple).

Cela se lit comme un roman à suspense : Edison suivra-t-il à la lettre le terrible régime mis au point par Pandora ? Est-ce un paru perdu d’avance ? Dommage cependant qu’il soit écrit dans un style un peu trop lisse, que les personnages frôlent parfois la caricature et manque un peu de consistance (ce qui est un comble pour un tel sujet !).

Je me demandais ce qu'il valait justement. Merci Animal de l'avoir copié ici (sinon j'aurais raté l'avis) et merci Madame B. Pour l'avis !

Merci pour l'avis, cela m'intéresse. Ayant eu des problèmes de poids, le sujet "m'attire" pour avoir d'autres points de vue