Parlez-moi de vous [Pierre Pinaud]

Parlez-moi de vous


Je suis gêné pour parler de ce (premier) film parce qu'on y trouve une terrible envie de nous raconter une belle histoire émouvante sur les blessures de l'abandon tout en essayant d'éviter certains pièges mélodramatiques pour mieux laisser quelques brèches psychologiques entrouvertes à la fin au lieu d'un grossier happy end que d'autres nous auraient asséné. On y trouve également deux formidables acteurs (Karin Viard et Nicolas Duvauchelle) qui donnent vie à ce projet... Le problème est que le résultat, bien que parfois touchant, donne le sentiment d'une histoire grossière et fabriquée maladroitement, sans aucune subtilité dans la description du mal être névrotique de Karin Viard pourtant géniale dans les moments d'émotion (avec un plan de vraies larmes en temps réel digne de Nicole Kidman dans Birth). C'est une vision presque de comédie alors même qu'il tente de nous suggérer la souffrance de cette femme enfermée dans une rétention émotionnelle et des rituels obsessionnels montrés de manière très caricaturale. Les ressorts psychologiques sont non seulement prévisibles mais surlignés à grands renforts de musique mélancolique à chaque moment d'émotion et surtout en adoptant une manière de filmer trop explicative sans laisser de place à la suggestion. Chaque geste, chaque regard, nous guide vers l'émotion attendue. C'était un beau sujet mais le résultat n'est pas crédible et un peu scolaire. Reste que c'est relativement divertissant et que Karin Viard est souvent hypnotisante même si on sent l'irrésistible envie de faire la foffolle y compris dans les scènes les plus graves.

Marko a écrit:

Parlez-moi de vous

Je n'avais pas dû me souvenir de ta critique Marko, simplement que tu n'étais pas emballé. J'y suis donc allée sans a priori, croyant même y trouver une comédie vu la BA et les extraits qu'elle proposait. Tant mieux, dans un sens j'ai plutôt eu une bonne surprise. Les films avec Karin Viard (que j'aime beaucoup) sont rarement des loupés, et celui ci ne déroge pas à ma petite constatation. Effectivement ce film évite les clichés mélos et l'happy end dans lesquels d'autres se seraient vautrés. C'est une très bonne chose et une des raisons qui font que je l'ai aimé. Mais ce n'est pas la seule bien sûr. Je n'y ai pas trouvé tant de maladresses ni de lourdeurs, pas du tout même. Il est vrai que je ne suis pas une professionnelle en la matière et que les cas de refoulement et de mal être suite à l'abandon ne sont pas mon lot quotidien. J'en parle juste en spectatrice lambda et j'avoue que ce mélange de légèreté tendant vers le comique (certaines répliques, les tics de Viard, son malaise lors des apartés avec Nicolas Duvauchelle) et de scènes beaucoup plus fortes (le choc de la première rencontre, sa déception inévitable, cet appel d'une auditrice qui lui renvoie tout son passé) m'ont au contraire désarçonnée et surement accentué l'émotion qui en découlait. Ce qui etait prévisible pour toi l'était moins pour moi, je me suis donc laissée prendre au charme de ce petit film qui m'a paru au contraire délicat et tout en retenue. Comme quoi. J'ai même beaucoup aimé les extraits musicaux, c'est dire que nos regards sont bien différents et qu'en matière de ravages psychologiques et de recherches de parenté je suis une béotienne. Mais parfois cela a du bon aussi...Et Karin Viard est définitivement une grande!
(sans compter chaussée de ses Louboutin

C'est surtout la mise en Scène qui me parait maladroite et indécise entre comédie et mélodrame. Mais le film n'est pas désagréable.

Parlez-moi de vous

Comme Marko, je n'ai pas apprécié la mise en scène : très maladroite dans une forme de platitude, elle dépend entièrement de l'engagement des interprètes. Karin Viard donne vie à son personnage mais frôle souvent l'excès et la caricature, tandis que Nicolas Duvauchelle s'en sort honorablement (toujours dans le même registre, ce qui peut agacer).
Il y a des idées, une volonté de créativité, mais j'ai rarement été emporté par un sujet traité trop superficiellement. La comédie semble toujours forcée dans ses effets, et verrouille une sensibilité au lieu de la soutenir. Le lien familial et la perception de l'abandon ne sont alors que les instruments du scénario, sans une véritable appropriation de la part du réalisateur.
Parlez-moi de vous reste plaisant, voire touchant dans ses meilleures séquences...ce n'est malheureusement pas suffisant pour convaincre.