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Messages : 9564 Inscription le : 26/02/2007 Localisation : Moorea
Sujet: Georges Brassens Mer 23 Avr 2008 - 5:16
Lettres à Toussenot 1946-1950 Textes rassemblés par Janine Marc-Pezet Editions Textuel
Citation :
Ami indéfectible et indécrottable, le jeune Georges Charles Brassens a entretenu une correspondance enthousiaste avec Roger Toussenot, journaliste rencontré dans les couloirs du journal Le Libertaire.
Les liens sont forts et les échanges sont exaltés, Brassens allant jusqu’à écrire à Toussenot : « Toi, tu es l’ami du meilleur de moi-même. »
Cette correspondance a été confiée à Janine Marc-Pezet par Pierre Ontoniente, secrétaire et également ami de Brassens. C’est Toussenot lui-même qui a opéré, fin 1954, une sélection dans les lettres qu’il a reçues de son ami, afin d’éclairer « plus réellement l’invisibilité d’un grand poète de la révolte et de la mort ».
Dans cette édition, seules les lettres de Brassens sont reproduites. Elles permettent de suivre fidèlement une période charnière dans la vie de l’artiste.
De 1946 à 1952, il passe d’une vie de reclus et de disette aux premiers succès : le premier album 33 tours (La mauvaise réputation) sort en 1953.
A ce moment-là, pourtant, le chanteur ne pense qu’à une chose : aider les « bons copains » qui ont partagé les jours de vache maigre depuis 1944.A cette date en effet, le jeune poète décide de ne pas retourner au travail obligatoire en Allemagne.
Il se cache 9 impasse Florimont, chez Jeanne Le Bonniec (La Cane de Jeanne ;Chez Jeanne et Marcel Planche (Chanson pour l'Auvergnat ). Cette impasse a été un lieu de maturation pour Brassens. Tandis que son ventre crie famine, il s’insurge déjà contre les cons, les flics, les gens vertueux, les faux libertaires et les vrais imbéciles. Roger Toussenot devient, à distance, son oxygène, sa nourriture, lui qui apporte ou envoie des victuailles et surtout matière à alimenter et faire mûrir l’esprit du texte tel que Brassens le défendra quelques années après : « C’est toi, abominable philosophe, qui m’excites, qui me pousses, qui prend un plaisir sadique à me faire penser, à me rendre intelligent ! Comme si le fait d’être ne suffisait pas à un homme de ma condition, il faut encore que tu m’obliges à survoler, bandit ! ».
Au fil des lettres, le chanteur naissant rencontre les auteurs de textes qu’il mettra en musique, débat à propos des thèmes qui lui tiennent à cœur : « La chanson un art mineur? Ou quelque chose dans ce goût-là...? Il y a des chansons mineures, voilà tout. C’est un préjugé. » ; et surtout, d’un œil à la fois indulgent et exigeant, il regarde évoluer ses amis et le monde qui l’entoure. Pour les croquer, plus tard, d’un trait de plume et de quelques accords de guitare.
Par quels hasards de la vie Brassens est-il devenu un célèbre auteur-compositeur-interprète et Toussenot un homme de belles lettres et de belles pensées de son temps mais inconnu, tout du moins du grand public ? Brassens croyait plus en son ami qu’en ses propres chansons : « Ces conseils, en vérité, c’est à moi plutôt qu’à toi que je les adresse. Sans doute ai-je confiance en moi, mais je crois encore bien plus à ta résistance qu’à la mienne. ».
Sur fond de tableau d’après-guerre, une question sous-tend cette correspondance : combien de Toussenot un artiste rencontre-t-il dans sa vie pour devenir ce qu’il est ?
Combien faut-il de personnes réelles pour qu’un univers artistique se forme, sorte de l’impasse et voie le jour ; la postérité ne retenant souvent que le nom d’un seul être humain ?
Les acteurs de la pièce qui se joue dans ces pages savaient-ils qu’un seul d’entre eux serait l’élu -heureux et malheureux- et deviendrait porteur d’un esprit, l’esprit du temps, et de leurs interminables discussions sur la poésie, l’époque et l’avenir du monde ?
Hymne à l’amitié et à la création, à travers ce recueil, on comprend qu’aimer un artiste, c’est aimer, à travers lui, tout l’univers qui l’a fait naître.
Messages : 9564 Inscription le : 26/02/2007 Localisation : Moorea
Sujet: Re: Georges Brassens Mer 23 Avr 2008 - 5:39
Ces lettres de Georges Brassens nous éclairent sur ses goûts littéraires, sur son écriture et son goût des mots , mais aussi sur l'état de misère dans lequel il vivait chez la fameuse Jeanne, qui l'avait accueilli. Souvent, il écrivait, mais le problème était de poster la lettre, car personne n'avait les moyens d'acheter un timbre... Quand nous ne mangeons qu’une fois (et encore c’est une façon de parler) toutes les quarante-huit heures, il ne m’est pas possible de t’adresser du courrier car les forces me manquent et je ne m’occupe que de vie intérieure et de soucis de surface» (août 1949).
Extraits copiés ailleurs
Paris, 2 juillet 1948
...... Ceci- dit, et pour être emmerdant, j'ajouterai que ton entêtement à engueuler les cuistres me fait peur. Je sais bien que la majorité des hommes " a tué les restes de son enfance", " a trahi sa jeunesse", etc ( Toussenot dixit). Corne d'Auroch le sait. Quelques autres le savent. Mais la multitude, elle, ne peut pas le savoir. Alors pourquoi le dire? Besoin de véhémence? Soulagement physique? Pourquoi l'écrireplus précisément? Te voilà maintenant en contradiction avec tes théories! Oui, je sais aussi que Baudelaire considérait le droit de se contredire comme une noble nécessité de l'homme bien né. De même, n'est -ce-pas toi qui me l'a appris? Valéry posait comme condition d'existence de l'Esprit la possibilité de contradiction. Oui, bien sûr! Mais quand même, quelle fatigue inutile! Tes insultes sont encore un hommage à leur connerie! Chacune de tes polémiques ( excellentes d'ailleurs, beaucoup trop excellentes) est un poème fracassant à la gloire de la bêtise humaine. Il est pour le moins savoureux de voir de voir un type très intelligent se préoccuper à ce point de la sottise et de la médiocrité de la société de son temps. Pour un homme de valeur, il n'y a pas de connerie, il ne doit pas y en avoir! Tu vois trop la vérité, tu désenchantes tout ce que tu touches. Tu es le destructeur de tes trésors, malheureux! Plus je te connais, plus je sens qu'il y a du Nietzsche dans ta nature. Tu parles, tu parles de façon éblouissante certes, mais tu parles et tu ne devrais que chanter. CHANTER, comprends-tu? Vois-tu, tu es trop violent avec les imbéciles, trop intégral. Pourquoi ne pratiquerais-tu pas la théorie de la non-violence? Ils sont cons, c'est un fait, mais que veux tu y faire? Tu ne dis rien aux aveugles qui ne voient pas. Alors! Crois moi, laisse les sots à leur sottise. Crée des fêtes. Pense à tes amis. Trouve la paix. Redécouvre les voluptés perdues. Deviens l'artisan de ton âme, le musicien de ton silence, l'écrivain de ton génie. Et excuse moi de te souhaiter avec un autre comportement. Tu sais bien que mon amitié n'a rien à voir avec les conseils que je te donne. Tu es: cela suffit. Le reste est littérature! ... Je te prie de trouver entre mes mots le meilleur de mon âme.
Georges
Lettres à Toussenot 1946-1950 Georges Brassens p 38,39
Il pleut et je reviens tout seul de voir le tableau de Paris voilé de brume. Je hante la bibliothèque. J'y admire les merveilles du monde et la mesure sublime de ce que les hommes pourraient faire s'ils ne devenaient pas des grandes personnes. C'est Chamfort qui mettra la dernière main à cette lettre en disant pour nous: " Il y a des redites pour l'oreille et pour l'esprit; il n'y en a pas pour le coeur."
p 81
Paris, jeudi 8 juin 1950
Mon cher vieux,
Je crains que tu n’attaches trop d’importance aux diverses critiques que je te prodigue depuis quelques temps. Il se peut que je me trompe en jugeant l’expression de ta pensée. Cela m’est déjà arrivé. Et cela m’arrivera encore. Je suis parfois étourdi…..Je vais aborder maintenant un sujet qui me tient à cœur : les rapports des mots et des idées. Ne commence pas par me dire que tu es d’accord. Je ne te demande pas ton avis, que je connais ; je te donne le mien. D’abord, chez moi,le mot a une importance capitale. J’ai appris des mots qui ont fini par devenir des idées. Les mots me plaisent par leur son, par ce que tu appellerais « la musique extérieure ». Je ne veux plus savoir les noms de ceux qui m’ont poussé dans cette voie. Parmi les contemporains du surréalisme, il y a Max Jacob en particulier. Jacob a dit à quelque chose près : « Le sens des mots a moins d’importance que le son ( l’euphonie) ». Et ceci est capital. Mais, cependant, il faut tenir compte que l’un des poètes que j’estime le plus se nomme La Fontaine et que, de ce fait, j’entends tout de même tirer de chacun de mes mots le maximum de signification, ou, si tu aimes mieux : d’ironie, de saveur ,et même de morale. Verlaine a exprimé les mêmes concepts dans ce poème que tu prises plus que les autres, me semble-t-il : « De la musique avant toute chose… » …Chez toi, ce sont les pensées, les idées déjà pensées qui créent les mots. Tu es sans doute meilleur penseur que moi ! Je pense en mots ! Et si j’étais seulement sculpteur, je ferais comme le héros du conte de Wilde, je penserais en bronze. Comprends moi : les idées ne m’émeuvent réellement qu’à travers un autre ( comme toi). Dans mon alchimie, c’est l’émerveillement de l’image obtenue qui me rend reconnaissant envers la pensée à l’instant précis où je me sens plus profond, plus réel. Mon langage est l’incantation, comme Villon. Le tien est l’aphorisme, l’axiome ou la prose philosophique. A longueur de journées, en haussant les épaules, je me dis des trucs philosophiques que je ne juge pas nécessaire d’écrire, tandis que toi, à longueur de journées, tu contes de ravissantes choses, non moins philosophiques certes mais libérées de l’ambition terrible du mot « philosophique » a priori, et que tu ne juges pas digne de figurer dans tes cartons. De cette différence de nature vient notre affectueux antagonisme. Bon, tu vas venir. Je m’expliquerai mieux lorsque tu seras en face de moi. L’important, a dit Léautaud, n’est pas de faire des chefs-d’œuvres, c’est de se donner du plaisir. Idée peu grandiose, j’en conviens, peu faite pour un Michel-Ange dont tu sembles connaître les vers traduits en français ( où les as-tu-pris ?)mais pleine de piquant et pas sotte . Je pense comme Léautaud et j’écris au jour le jour, en amateur. Bonafé appréciait beaucoup mon manque de spécialisation et cette fantaisie grave. Je ne suis rien avant la lettre, je n’ai pas de doctrine, d’idée vivant plus longtemps que les roses, et j’aime que tu diffères de moi. Récréation chaque jour, mort chaque nuit, et résurrection obligée par le souffle invisible qui fait que nous nous rencontrons à travers l’espace et le temps…
Je t’embrasse
Georges p 179-180
Toute la charpente de son oeuvre est dans ces lettres... écrites avec humour, poésie et une grande sincérité. Un très beau livre pour qui aime Georges Brassens
Supplique pour être enterré sur la plage de Sète ici
Le temps ne fait rien à l'affaire
ici
Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
Sujet: Re: Georges Brassens Mer 23 Avr 2008 - 12:44
Merci Marie d'avoir ouvert ce fil !
J'ai un livre sur Brassens : Brassens au bois de son coeur par Jean-Paul Sermonte. I se compose de 6 parties :
1 : de Sète à Paris 2 : l'ère Brassens 3 : aperçu d'une oeuvre
4 : témoignages et hommages 5 : l'après Brassens
6 : le métier
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Georges Brassens Mar 15 Mar 2011 - 10:56
¨
Expo 'Brassens ou la liberté'
Citation :
Après Miles Davis et Serge Gainsbourg, la Cité de la musique rend hommage à Georges Brassens, disparu il y a 30 ans. Un parcours qui renouvelle l'image de chanteur bourru. Grâce à de nombreux documents inédits et aux dessins décalés de Joann Sfar, on découvre un Brassens sensuel et généreux. Visite guidée en compagnie de Clémentine Deroudille, petite-fille de Robert Doisneau et commissaire de l'exposition à la Cité de la musique.
source et suite
en même temps l'annonce de la parution (début mars) d'un Gallimard Découvertes sur lui:
Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
Sujet: Re: Georges Brassens Mar 15 Mar 2011 - 18:38
Sujet: Re: Georges Brassens Mar 15 Mar 2011 - 19:56
Brassens, c' est un copain d' abord ! Il me suit depuis l' enfance. Je connaissais toutes ses chansons, certaines par coeur... D' une certaine façon, il est toujours vivant pour moi. La musique s' oublie moins que les livres, parce qu' on y revient toujours. Dans ma tete, il y a toujours une chanson, un blues, des notes et des blue notes Une jam session permanente...
eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
Sujet: Re: Georges Brassens Jeu 24 Mar 2011 - 21:54
Citation :
QUAND LE CROQU’MORT… - L’Auvergnat est mort “Toi l’étranger quand tu mourras /Quand le croqu’mort t’emportera / Qu’il te conduise à travers ciel/ Au père éternel”, les dernières paroles de Chanson pour l’Auvergnat, de Georges Brassens, ont des accents funèbres aujourd’hui. La Montagne annonce la mort de Louis Cambon, l’Auvergnat à qui Georges Brassens aurait dédié cette chanson en 1954.
L’homme est mort à Raulhac, dans le Cantal à l’âge de 95 ans précise le journal. C’est dans le “Bar des amis”, troquet du quatorzième arrondissement de Paris que les deux hommes se seraient rencontrés raconte Sud-Ouest. Louis Cambon, tenancier du bar, décrivait les habitudes de Georges Brassens dans une interview accordée à La Montagne en 1998 : il “s’installait à un coin du comptoir et ne disait mot”.
(source : ici).
Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
Sujet: Re: Georges Brassens Ven 25 Mar 2011 - 8:56
dans mon livre il est écrit que la Chanson pour l'Auvergnat été dédiée à Marcel Planche le mari de Jeanne
Invité Invité
Sujet: Re: Georges Brassens Lun 11 Juil 2011 - 19:47
Ne manquez pas cette série d'émissions qui lui est consacrée cette semaine sur France Inter: J'ai rendez-vous avec vous, du lundi au vendredi de 15h à 16h.
Premier épisode
Citation :
Georges Brassens est né à Sète en octobre 1921. En 1940 il choisit Paris, et c'est à Paris que "Georges" est devenu "Brassens", que le mythe Brassens est né... Qui était cet homme à la fois si bourru et si humain, si timide et si direct ? Comment était Georges Brassens côté scène, côté public, et côté jardin, chez lui avec ses amis ? Jusqu'où allait son amour de la poésie et que savait il de la musique ? Comment a-t-il écrit ses textes merveilleux qui sont devenus des classiques ?...
Pour ce premier numéro c'est Raymond Devos qui nous parle de l'écriture de son ami Georges Brassens
Sujet: Re: Georges Brassens Lun 11 Juil 2011 - 20:21
Je n' y manquerai pas : les copains d' abord !
Orientale Agilité postale
Messages : 903 Inscription le : 13/09/2009 Age : 71 Localisation : Syldavie
Sujet: Re: Georges Brassens Mar 12 Juil 2011 - 11:08
nezumi a écrit:
Ne manquez pas cette série d'émissions qui lui est consacrée cette semaine sur France Inter: J'ai rendez-vous avec vous, du lundi au vendredi de 15h à 16h.
Premier épisode
Il me semble que c'est reecoutable sur Internet! Pour bien apprendre le francais, c'est obligatoire - je blague, bien sur, j'adore Brassens depuis la classe preparatoire au lycee francais. Mes profs ont eu du mal a m'expliquer ce que veut dire "Gare au gorille"
Sujet: Re: Georges Brassens Mar 12 Juil 2011 - 15:56
Brassens est un maitre de la langue française qu' il adorait et un bon ! C' est pour ça, d' ailleurs qu' il rend hommage à des poètes français : Francis Jammes, Paul Fort, Aragon, Villon, Hugo...
A écouter aussi Paco Ibanez, grand admirateur de Brassens, et qui a chanté certaines de ses chansons en espagnol...
Invité Invité
Sujet: Re: Georges Brassens Mar 12 Juil 2011 - 19:35
Orientale a écrit:
Il me semble que c'est reecoutable sur Internet!
oui bien sûr, il faut cliquer sur le lien en vert que j'ai donné, il mène sur le site de l'émission où les épisodes de cette série sont archivés.
Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
Sujet: Re: Georges Brassens Mer 13 Juil 2011 - 7:16
merci pour le lien Nezumi !
Exini Zen littéraire
Messages : 3065 Inscription le : 08/10/2011 Age : 51 Localisation : Toulouse