Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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Parfum de livres… parfum d’ailleurs

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 Jim Harrison

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Cliniou
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyMer 14 Juil 2010 - 21:01

Voici quelques extraits de la première partie de "En Marge":

I. Débuts:

- Ma famille:

« …Qu’ai-je oublié?.….L’horloge biologique suffisait et, venant de derrière la fenêtre grillagée, au-delà de l’écheveau bourdonnant d’un moustique ou d’une mouche, il y avait le grondement serein d’une truie, le couinement étouffé d’un porcelet, le chien du voisin, le camion de lait à trois kilomètres de là, le mugissement d’une vache, le sabot paresseux d’un cheval frappant la terre, le cri du coq que j’attendais depuis longtemps et qui, même s’il faisait encore nuit, chassait les inévitables démons nocturnes. »

« …Une famille perdit six enfants en un mois, tous les enfants qu’elle avait. Que resta-t-il alors aux parents? Pas grand-chose, j’imagine. Quarante ans après, j’entends toujours les voix de mon père et de ma sœur Judith, tous deux tués dans un accident de voiture alors que j’avais vingt-cinq ans. Je suis sûr que, la nuit, les parents des six petites victimes de l’épidémie de grippe, lorsqu’ils regardaient la lune et les étoiles, pouvaient entendre leurs voix, ou alors le matin toutes ces chaises vides ont dû les rendre fous de douleur. »

« Quand vous venez de passer dix heures à creuser des fossés par une torride journée estivale, vous n’entrez pas dans le bar du coin en commençant à pérorer sur les vertus du dur labeur et de l’économie, sans oublier la beauté du calvinisme comme système moral. Vous avez envie de boire plusieurs pintes de bière, point final. »

« Néanmoins, je reconnais volontiers qu’une bonne dose de bêtise, de grossièreté répugnante, de sauvagerie pure et simple caractérisent désormais la chasse et la pêche, que ce soit sur des fermes d’élevage de gibier ou lors de véritables tueries, à cause de la mécanisation de la chasse par des véhicules tous-terrains, ou de l’ignominie des touristes revenant du Mexique avec des centaines de kilos de viande découpées en filets. L’homme a une capacité inépuisable à souiller son environnement et en ce domaine les politiciens ont toujours eu une longueur d’avance. »

« Bien sûr ces changements de comportement culturel et l’invention de multiples diversions font partie d’un système économique qui me dépasse. J’envisage ce système comme un bain dans une piscine anémiée, stérile, bondée, puant le chlore, en comparaison d’une délicieuse baignade dans un lac au fond de bois, la berge du lac bordée de nénuphars en fleurs…..[…..]. Même les profondeurs obscures semblent séduisantes en comparaison d’une piscine, comme une promenade printanière sous la pluie dans les bois en comparaison d’une série télévisée où de gens se font descendre ou tabasser à New York ou à Los Angeles tandis que des durs à cuire enchaînent d’insipides répliques soi-disant spirituelles. »

« Mais c’était un univers sauvage, traversé par d’anciens chemins de bûcherons et, correctement consacré à l’épuisement adolescent, le monde naturel peut vous débarrasser de vos poisons au point que votre curiosité l’emporte et que « vous », l’accumulation des blessures et du désespoir, n’existez plus. »

- Grandir:

« Ces défauts de caractère se sont manifestés de bonne heure, par une lenteur à me lever le matin, une difficulté à enfiler mes vêtements, qui persiste encore aujourd’hui. Ô Seigneur, encore cette même foutue corvée: le slip, les chaussettes, le pantalon, les chaussures, essayer de mettre ses chaussettes sur des pieds mouillés qu’on a oublié d’essuyer après la douche. Se laisser tomber à la renverse sur le lit pour lire quelque chose, la chaussette à moitié mise. La banalité des ceintures et des boutons. J’ai été d’autant plus ravi de lire la biographie de Rimbaud par Graham Robb que le héros de ma jeunesse détestait tant boutonner ses vêtements qu’en Ethiopie il conçut à sa propre intention des vêtements dépourvus de boutons. »

« on entend aujourd’hui beaucoup de bêtises sur le fait que nos enfants ne sauraient plus lire, mais comment pourraient-ils prendre goût si leurs parents ne lisent pas et s’il n’y a pas de livres à la maison? Si les livres ne sont pas traités comme des objets bien-aimés au même titre que la page sportive du journal ou le poste de télévision, pourquoi diable un enfant désirerait-il lire? On se demande comment des professeurs au salaire scandaleusement faible peuvent consacrer leur existence à essayer de lutter contre l stupidité des parents, mais dans notre culture soumise au pouvoir de l’argent tout va apparemment pour le mieux dans le meilleur des mondes pourvu que les parents réussissent à se pointer à l’heure à lur boulot souvent assommant. »

« Tous les deux ou trois ans je retombe sur une citation d’une lettre de Rilke, la dernière fois dans le livre étonnant de Richard Flanagan intitulé Death of a River Guide: « C’est au fond le seul courage qui soit exigé de nous: avoir le courage de regarder le plus étrange, le plus singulier et le plus inexplicable dans ce qui s’offre à nous. Le fait que, de ce point de vue, l’humanité se soit comportée avec lâcheté a causé un tort irréparable à la vie tout entière; les expériences que nous qualifions de « vision », ce qu’on appelle le « monde des esprits », la mort, toutes ces choses qui nous sont si proches et que nous évitons quotidiennement ont été éliminées de la vie au point que les sens grâce auxquels nous pourrions des appréhender sont atrophiés. Sans parler de Dieu; »

« Qu’avais-je donc en tête? Un autoportrait de cette époque, dessiné avec une grande économie de trait, me fait légèrement grimacer, hausser vaguement les épaules. […..]
Les grands hérons bleus parmi les pins blancs, le huard qui faisait le tour d’un massif de roseaux avec son petit en remorque, l’ourson qui regardait du haut d’un peuplier, voilà d’agréables images issues du passé, mais elles demeurent beaucoup moins nettes que celle du serpent d’eau qui t’a mordu à la cheville, [….]. Qu’avais-je donc en tête pour, dès ma prime jeunesse, me mettre ainsi en marge? Tu fais l’impossible pour créer un mode de vie qui convienne à ta vocation de poète, ou plutôt un mode de survie qui n’est pas sans ressembler au rituel d’une société primitive par lequel un jeune homme peut commencer de pratiquer la chasse et la cueillette. A la place d’ainés, tu as tes livres. Ton père et tes maîtres t’ont peut-être enseigné à te débrouiller dans le monde, mais tu es tout seul dans cet effort entrepris pour consacrer ta vie à la création littéraire. Le sentiment religieux d’une vocation tente d’ignorer complètement l’énigme biblique selon laquelle « beaucoup sont appelés, mais peu sont élus », même si cette phrase s’incruste au fond de ton cerveau pour remonter à la surface à la moindre crise de mélancolie ou de doute. »

- Le Monde Réel:

« J’avais cinquante ans lorsque j’ai enfin compris que je m’étais marié parce que je ne pensais pas pouvoir survivre seul. Je crois qu’il y a quelque chose en nous qui tente inconsciemment de s’assurer que nous allons continuer de vivre. J’étais tout bonnement incapable d’écarter seul les ténèbres compactes accumulées par les perceptions de mes sens. […] Peut-être est-ce toujours le cas. Je me suis également dit que le fait de grandir dans une famille unie et aimante ne vous prépare guère de manière adéquate à la vie en dehors de cette famille. C’est peut-être une hérésie, mais j’en suis convaincu. On s’habitue au tiède cocon de l’amour humain, dont on constate l’absence dès qu’on descend de la véranda familiale. »

(la suite demain)
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Cliniou
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyJeu 15 Juil 2010 - 11:44

II. Sept Obsessions:

- L’Alcool:

« Je crois vraiment que, lorsqu’on a passé sa journée à manier une pelle ou derrière un bureau en grinçant mentalement des dents depuis le matin, l’alcool constitue le rite de passage obligé entre ce labeur ingrat et vos loisirs du soir, cette partie de votre vie qui a lieu lorsque vous n’êtes pas obligé de gagner votre croûte, les soirées et les week-ends consacrés à la poursuite d’un bonheur auquel on croit mordicus avoir droit. »

« Il est clairement établi que les conducteurs en état d’ivresse, un délit dont je n’ai jamais été reconnu coupable, tuent environ vingt-cinq mille personnes par an. Mais on peut se demander pourquoi les conducteurs qui ne sont pas en état d’ivresse tuent chaque année à peu près le même nombre de gens. Bien sûr, ils sont beaucoup plus nombreux, mais si la propagande était correcte, ils devraient être parfaits. »

«L’histoire littéraire est saturée par l’iconographie de l’alcool, […]. Nous participons tous à ce que les Français appellent la comédie humaine, où notre comportement tend peut-être à la sincérité, mais n’y parvient jamais. Quand une chanson country dit: « La vie a un aspect sombre et trouble. », bon nombre d’entre nous le voient à gauche, à droite, devant et derrière, à la périphérie du champ visuel, mais la tragédie classique exige des individus d’exception en guerre contre des ennemis, le hasard ou le destin. Les étudiants en littérature comprennent que la tragédie n’inclut pas les gueules de bois. La souffrance des gueules de bois, aussi intense soit-elle, ne saurait s’élever au-dessus de la simple farce. »

« Quand vous avez la gueule de bois en avion, vous volez toujours en solo dans une transe intérieure et auto-référentielle saturée des caprices d’un modeste apitoiement sur soi, modeste car la blessure a été infligée par nul autre que vous-même. De toute évidence, si jamais l’avion atterrit sur le dos, vous serez la seule victime de l’accident. Le meurtre et la gueule de bois sont profondément sentimentaux, encore plus que la fête des mères ou un premier amour. […] L’apitoiement sur soi est sans doute la plus dommageable des émotions frelatées. Vous vous vautrez avec délectation dans votre bain de boue intime, votre chimie cérébrale est une soupe lyophilisée de regrets insincères. Alors, le grand garçon en tournée promotionnelle oublie aisément toutes les décennies où aucun éditeur ne prenait la peine de lui proposer la moindre tournée promotionnelle. »

-Strip-tease:

« L’exhibition publique de beauté suscite le désir, alors que dans notre réalité « réelle » c’est le désir qui suscite la beauté. »

-La Chasse, la pêche (et les chiens):

« Sur la Yellowstone,[…]. La pêche s’est améliorée le 11 septembre, une date que tout le monde connaît. Le souffle court, j’ai fui la maison pour rejoindre la rivière, tandis que dans mon cerveau tourbillonnaient les larmes et les éclaboussures de sang. Au cours des jours suivant, j’ai peu à peu cessé de regarder la télévision, pour me rabattre sur la radio, où la pensée est accessible au langage. La télévision essaie de vous faire croire que parler c’est penser, qu’une logorrhée non préméditée est un précieux cadeau offert au public, avec l’interminable répétition visuelle des avions percutant les gratte-ciel, comme si des enfants psychotiques se trouvaient aux commandes de ce média. Mille faux sages pontifiants vomissaient leurs sempiternelles analyses en temps de crise. »

-Religion Privée:

« Je crois depuis belle lurette que cette idée de faire grand cas de soi constitue l’échec moral majeur de la prière, et c’est particulièrement difficile pour un poète et un romancier qui a consacré toute sa vie à faire un grand cas de sa propre vision du monde. Voilà bientôt deux siècles que nous vivons avec la conception de l’artiste - […] - en tant que héros romantique et isolé, marginal et souvent paria, un chaman sans portefeuille, un individu doté d’un souffle impressionnant, réel ou truqué, qui lui permet de gonfler son ego jusqu’aux dimensions d’un dirigeable afin de se prémunir contre les coups, réels ou imaginaires, que lui assènent ses concitoyens. Ce n’est pas le genre de personne prompte à reconnaître que nous sommes tous « comme des moutons sortis du droit chemin ». »

« Combien de fois avons-nous entendu dire que cinq millions d’enfants se couchent tous les soirs en ayant faim? Sans doute moins souvent que toutes les fois où nous avons lu ou vu des articles où l’on faisait l’éloge de la richesse. »

-Un bref tour de France:

« Où donc suis-je vraiment chez moi, si un tel lieu existe, dans ce pays qui a tellement compté à mes yeux comme une échappée possible, un baume disponible, un immense réservoir de nourriture, d’art et de littérature? […] Comment, où et pourquoi nous sentons-nous chez nous mentalement sinon physiquement? Où pouvons-nous localiser notre géopiété apparemment génétique?
Les réponses nous échappent aisément, car elles sont parfois trop évidentes, si près de notre nez que nous ne les voyons plus, tout comme nous sommes aveugles à nos propres caractéristiques, à nos propres syncrétismes auxquels nous sommes tellement habitués que nous nous étonnons lorsque d’autres les trouvent étranges. »

« Dehors, je me suis assis sur les marches du baptistère dans les premières lueurs du jour et j’ai regardé des douzaines d’hommes et de femmes installer leurs étals de poissons, de légumes, de viandes et de fromages. En attendant, j’avais repéré une splendide jeune femme au moment de son entrée dans l’église, qui gravissait les marches près de moi. Je l’ai bien sûr suivie à l’intérieur et, parce que la messe était terminée, je me suis dit qu’elle allait peut-être allumer un cierge et prier pour rencontrer son prochain petit ami, peut-être un Américain balourd et hébété. Au lieu de quoi elle est montée jusqu’à l’orgue et elle s’est mise à jouer du Bach à un volume qui a bientôt liquéfié ma structure osseuse ainsi que mon cerveau surmené. »

-La Route:

« […], et j’ai enfin compris la leçon économique qui me crevait pourtant les yeux depis longtemps: les boulots de survie dévorent toute la vie. »

« Un problème rarement évoqué et relatif à l’arrivée brutale du succès, c’est que ce dernier submerge aussitôt l’existence tout entière. »

« J’avais également lu les romans très impressionnants des écrivains autochtones américains Linda Hogan et Louis Owens. La beauté d’un paysage a besoin de votre aide pour perdurer dans votre mémoire. Il faut peupler mentalement ce paysage avec une histoire humaine et, plus important encore, le sentiment de la qualité de vie humaine que seule la littérature de premier ordre est capable de vous procurer. »

« J’ai besoin d’entendre une serveuse me parler de ses problèmes avec sa Plymouth 1985. J’ai besoin de voir une jeune fille en robe verte remplir elle-même son réservoir d’essence par un après-midi torride du Nebraska. J’ai besoin de rendre visite à des clubs de strip-tease paumés où les femmes sont presque aussi moches que moi. J’ai besoin de l’insécurité des tempêtes de neige ou d’une voiture surchauffée quand il fait trente-neuf degrés à l’ombre dans le Kansas, de l’insécurité du cœur et de l’esprit tâtonnants loin de leur milieu habituel. Il est trop facile d’être sûr de soi, trop facile de savoir à tout instant ce qu’on fait, trop facile d’emprunter sans cesse le même chemin jusqu’à ce qu’il devienne une profonde ornière qui bientôt à son tour une tranchée insondable où vous ne voyez plus rien au-dessus du bord. »

« Enfin, le plaisir que tu prends à rouler sans but revient à accepter ta propre fragilité, le passage du temps, tandis que les kilomètres qui défilent égrènent ton propre compte à rebours. Lors de es déplacements à travers le pays, tu es à chaque instant capable de cartographier ton passé, et tu as une vision de plus en plus claire de ton avenir. Jamais tu n’approcheras d’aussi près l’existence libre et capricieuse d’un oiseau migrateur. »
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyVen 16 Juil 2010 - 13:35

III. Le Restant de la Vie.
- Après la licence:« J’ai souvent pensé que les membres survivants d’une famille accueillent la mort violente de leurs proches avec une répugnance durable. Quarante ans plus tard, cette humeur, cette atmosphère reviennent parfois, comme si l’on jetait un linceul sur moi. Il m’était déjà évident que je ne comprenais pas les processus de la vie, et je comprenais la mort encore moins. Peut-être que personne n’y comprend rien, même si ceux qui ont la foi sont sûrs de leur fait. J’ai parlé avec d’anciens soldats qui m’ont dit que, même sur le champ de bataille, il n’existe aucune préparation émotionnelle. La mort vous laisse sans voix, ou plutôt sans verbe. On devient simplement un primate hurleur, de manière audible ou pas, un primate qui tient entre ses mains son cœur ensanglanté et qui se demande comment il continue de battre. Le mot « amour » acquiert une imprécision mortelle lorsque les objets de l’amour nous sont arrachés et que notre amour s’éloigne dans le vide en tournoyant sur leurs traces invisibles. »

- Boston et Kingsley:

« L’amour ne vainc pas tous les obstacles, mais il en supprime beaucoup. […] Quand, après plus de quarante années de mariage, tu as toujours le cœur qui s’emballe au seul contacte de la main de ton épouse contre tes propres doigts, tu peux sans doute en conclure qu’ensemble vous avez peut-être accompli quelque chose de bien. »

« Retour au chaos, à la confusion, aux limites de notre esprit fragile. Je viens d’apprendre que mon dernier recueil de novellas, intitulé En Route vers l’Ouest, va être publié en Thaïlande. Une demi-heure plus tard, en arrivant à mon bureau du Hard Luck Ranch, en Arizona, j’ai découvert que ma chienne locale préférée venait de s’étouffer en mangeant. Je suis sorti dans la cour et j’ai fondu en larmes, […]. Il est dans la nature de l’esprit humain qu’à l’avenir, dès que je penserai à la Thaïlande, ou quand je verrai mon livre traduit en thaï, ou encore lorsque je mangerai un plat thaï, je me rappellerai Mary de manière poignante. Nous parvenons très rarement à nous extirper de notre vraie nature. »

- Nord-Michigan:« J’intitule ces mémoires En Marge parce qu’il s’agit de la position adéquate et confortable pour un écrivain. Dans les situations où l’on est inévitablement le centre de toutes les attentions, on ressent une désagréable inquiétude, on a même parfois l’impression d’un comportement déplacé. Dès que quelqu’un souhaite « donner un dîner » en mon honneur, je décline aussitôt l’invitation. J’aime les dîners où je me retrouve en marge, c’est-à-dire à ma vraie place. Comment observer les divagations du comportement humain lorsqu’on est la cible de tous les regards? »

- Hollywood:

« Si je passais une heure ou deux assis sur une bûche au bord de la rivière, les variations du courant dissipaient presque aussitôt tous mes soucis, et voilà peut-être la principale raison pour laquelle les pêchent la truite. Lorsqu’on a consacré beaucoup de temps à l’étude du monde des corbeaux, il devient parfaitement logique d’accepter le fait que la réalité est l’agrégat des perceptions de toutes les créatures, et pas simplement de nous-mêmes. »
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyJeu 19 Aoû 2010 - 17:13

Un bon jour pour mourir est un des romans les plus torrides que j'aie lus.
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyMer 20 Avr 2011 - 9:31

Les jeux de la nuit
Jim Harrison - Page 2 Nuit10

Nouvelle appartenant à un recueil de trois nouvelles, elle donne le titre au livre. Un narrateur, anonyme, nous narre sa jeunesse, dans le sillage d'un père "incapable" qui va d'université en université, de contrat d'assistant à contrat d'assistant non renouvelé, d'échec en échec. La jeunesse du narrateur, ses rencontres, essentiellement féminies et sexuelles, mais aussi les dérèglements engendrés par un accident survenu dans sa douzième année.

Citation :
Je tombe malade
J'avais trop la bougeotte pour habiter longtemps au même endroit. J'étais une pierre trop lourde pour ramasser la poussière sur une étagère, comme disaient les gens de la campagne à propos des individus particulièrement difficiles, et peu importe si mon problème était déjà présent dans mon corps avant d'affecter mon comportement. En tout cas, je n'apprécie pas la posture de victime.
Mes deux parents étaient des universitaires ratés, ma mère diplomée d'un master en lettres classiques et mon père d'un doctorat d'ornithologie, qu'il décrocha enfin à Cornell au début de la quarantaine après une bagarre de vingt ans contre ses collègues et ses supérieurs. Ma mère, de tendance Quaker, grandit dans une petite ferme proche de Fitchburg, Massachussets, et mon père fut élevé par des parents unitariens à Dowagiac, une bourgade du sud du Michigan, à côté de la frontière de l'Indiana. Ils comprirent très vite qu'ils décevraient leurs parents respectifs et eurent donc tendance à s'éloigner de leur famille. Universitaires, mes deux parents pensaient volontiers que la vie consistait en l'effort accompli pour la comprendre. Compte tenu de mes antécédents, il est étrange que je sois devenu chasseur, mais seulement deux nuits par mois, et sans arme...

Son problème, qui l'isole peu à peu du monde peut être perçu comme un prétexte qui permet de suivre la course du personnage à travers les Etats-Unis dans un premier temps, puis à travers l'Europe. Comme souvent, Harrison crée une ambiance dans chaque lieu où il place son personnage, mélant histoire, culture et réflexions du narrateur sur la société et sur l'humanité. Ainsi, le personnage ne peut rester en Espagne, trop oppressante, lisant "les volumes de poésies de Lorca, Machado, Hernandez, dont les os blanchis témoignent des tourments subis par les espagnols."
Harrison, avec humour et émotion, nous fait plonger dans l'univers de ce personnage, qui essaie de se construire sans pouvoir oublier son fardeau. Il est question de lycanthropie, d'appêtit gargantuesque et de frénésie sexuelle. Il est question d'amour de jeunesse déchiré, jamais oublié, de personnalité complexe. Le narrateur brule sa vie, insatiable. Et le lecteur reçoit une dose de plaisir intense, telle l'écriture de Jim Harrison.
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyDim 2 Déc 2012 - 20:44

Les Jeux de la nuit
La première nouvelle de ce recueil raconte la jeunesse ou plutôt l'adolescence de la jeune Sarah. Genre de princesse qui joue du piano comme personne avec un répertoire qui passe allègrement des ragtime et boogie-woogie à Mendelssohn, qui est belle comme un cœur, a des notes excellentes alors qu'elle suit ses cours par correspondance mais est abandonnée par sa mère genre de fol-dingue à forte religion et aussi assez portée sur le sexe. Son père est du style taiseux, elle à un vieil ami qui la matte allègrement mais qui est un brave type et qui fini par mourir. N'oublions pas la jument et la chienne qui l'accompagnent dans ses virées. Ah! aussi fine gâchette, la chasse à l'élan ne l"effraie pas...
Et son dilemme c'est de savoir comment butter un type qui à abusé d'elle.
Nouvelle au grand air où il y a toujours une côtelette qui mijote, peu crédible, mais qu'on ne lâche pas avant d'en arriver à la dernière ligne.

A suivre...
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyLun 3 Déc 2012 - 10:08

Dans la seconde nouvelle on retrouve Chien Brun. Normal, il est toujours à droite ou à gauche à faire des petits boulots et est passé dans la périphérie des personnages qui peuplent l'univers d'Harrisson.
Là il est en cavale au Canada. Il a soustrait des autorités américaines la jeune Baie qu'il considère comme sa fille parce qu'un placement avait été décidé et au vu de l'institution choisie: "un foyer de Lansing pour jeunes handicapés mentaux ... affreusement laid et entouré par des arpents de ciment, un matériaux insupportable..." il a préféré prendre la tangente et l'emmener avec lui.
Chien Brun est un peu comme un personnage des BD de Crumb, il adore les grosses fesses et en un clin d’œil se retrouve avec la trique. Ses envies ne sont pas toujours partagées mais c'est un brave type et même s'il est du genre looser, il n'en fait pas un drame. Son amie intime c'est la nature, il la connait bien et sait compter sur elle pour lui donner le coup de pouce au moment où il faut...
Là aussi, il y a toujours un plat qui mijote mais aussi des bières et beaucoup de whisky que se partagent toute une diaspora d'indiens aux noms irrésistibles tels que "Mange Chevaux (Charles)", "Quatre Pieds", "Navet"...
Manque seulement une carte illustrée pour repérer tous ces magnifiques endroits dont il est question.

Pour la troisième et dernière nouvelle de ce livre, Steven en a fait un commentaire parfait (à la page précédente) et pour lequel il n'est pas question de faire une redite.

Pour conclure, un bouquin à l'écriture légère mais qui n'épargne rien de la lourdeur de notre monde.
C'est bref, direct: un très bon Harrison!
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyLun 3 Déc 2012 - 17:53

Et je voudrais aussi rajouter une chose pour ceux ou celles qui comme moi sont un peu réfractaire aux nouvelles qu'il s'agit ici davantage d'histoires courtes plutôt que de nouvelles dans le sens instantanés... sourire
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyLun 3 Déc 2012 - 18:22

La nuance est subtile! rire
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyLun 3 Déc 2012 - 18:25

Une histoire a un début, un milieu et une fin ; une nouvelle, souvent, est un instantané, oui, un moment d'une vie, et laisse les événements en suspension... Parfois même il n'y a théoriquement aucun intérêt à ce fragment de vie... sauf quelque chose d'immatériel qui en donne finalement toute la signification.
Je pense que c'est comme ça qu'Igor l'entend.
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyLun 3 Déc 2012 - 18:36

Je taquinais un peu Igor!
Je cite la définition du Littré (mais juste pour le plaisir de vous embêter car je vois tout a fait ce que vous voulez dire tous les deux) : Sorte de roman très court, récit d'aventures intéressantes ou amusantes.
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyDim 9 Déc 2012 - 19:57

Sur les conseils de ma bibliothécaire j'ai lu
Grand Maître Jim Harrison - Page 2 Jim-harrison-grand-maitre4

4ème de couverture :

Sur le point de prendre sa retraite au terme d’une longue carrière dans la police du Michigan, l’inspecteur Sunderson enquête sur une secte hédoniste qui a pris ses quartiers à quelques kilomètres de chez lui. Simple hurluberlu inoffensif au premier abord, le gourou se fait appeler Grand Maître. Au fil de leurs recherches, Sunderson et son improbable acolyte de seize ans, Mona, découvrent un personnage bien plus sinistre qu’il n’y paraît. Lui-même poursuivi par ses propres démons, imbibé d’alcool et obsédé par les femmes, Sunderson traque sa proie des bois du Michigan jusqu’à une petite ville d’Arizona qui fourmille de criminels transfrontaliers, avant d’atterrir dans le Nebraska, où les adeptes du Grand Maître espèrent s’établir pour de bon. Un chef-d’œuvre tragicomique, étincelant d’humour et de désespoir.
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyDim 9 Déc 2012 - 19:58

Il faut toujours regarder les premières pages d’un livre pour ne pas avoir de surprises. En effet, Jim Harrison a pris soin de noter sous le titre : « faux roman policier». Cette précision est très importante car, l’intrigue policière est mince, traitée bizarrement, bref, on je ne m’y suis pas intéressées : A deux doigts de la retraite, il se lance aux trousses d’un gourou accusé de viol sur mineure, une de ses adeptes. Cette recherche n’est qu’un prétexte à ses digressions.

Donc laissons-là de côté et regardons l’inspecteur Sunderson puisque qu’il s’agit de lui.
Sunderson est le policier type : il fume comme un pompier, boit comme un polonais, est voyeur comme celui que vous voudrez, adore trousser les jupons de Janneton ou d’une autre et traîne une dépression, un désenchantement depuis son divorce.
Sa plus grosse angoisse n’est pas métaphysique, mais bêtement matérielle : que va-t-il faire de tout ce temps qui est devant lui ; L’oisiveté, la liberté, il ne connait pas et ça lui fout la trouille. Surtout, il y a la mort au bout du chemin. Il prend prétexte de cette « chasse » au gourou pour quitter son Michigan adoré et aller se perdre dans le désert de l’Arizona. Un petit camping dans le désert lui permet de faire le bilan, de revenir sur son passé.
Sunderson a des principes et mater la raie des fesses de sa jeune voisine à poil dans sa chambre, malgré le désir trouble qu’il ressent, le met mal à l’aise…. Pourtant, Mona y met tout son cœur !!!! Elle a besoin qu’on l’aime cette jeune fille abandonnée dans la maison par sa mère partie « refaire » sa vie et son père aux abonnés absents. Un duo désabusé, sarcastique, touchant, Elle l’appelle soit « chéri », soit « papa ».
J’ai vu une photo de Jim Harrison et il ressemble beaucoup au portrait-robot de Sunderson. De là à ce que les propos qu’il prête à son inspecteur soit les siens, je pense qu’il n’y a pas loin ! D’autant que ce policier est érudit, il aurait pu devenir prof d’université, il adore les livres sur les indiens, mais l’appel de la truite a été plus fort.

Harrison a une écriture aussi crue que poétique. Son humour noir de temps à autre corrosif allume le récit. Tous les personnages, mêmes secondaires, semblent faits de chair. Faire un voyage initiatique à l’âge de la retraite quelle belle gageure. Pourtant on sent, dans ce livre, le poids de la vie de l’expérience et que ça pèse sur ses épaules.

C’est un livre qu’au premier abord j’ai trouvé assez décevant (je lisais en même temps « une autre vie est possible de Jean-Claude Guillebaud, quel grand écart entre les deux du côté de l’espérance !!), puis, comme les ruisseaux de l’Arizona, il a gravé son chemin en moi et j’ai bien envie de découvrir d’autres livres de Jim Harrison antérieur à celui-ci.
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyDim 9 Déc 2012 - 20:13

Je ressent aussi cela chez Harrison, au début les personnages ne me sont en rien attachant puis au fil des pages ils prennent une belle dimension...
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zazy
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MessageSujet: Re: Jim Harrison   Jim Harrison - Page 2 EmptyDim 9 Déc 2012 - 20:26

Igor a écrit:
Je ressent aussi cela chez Harrison, au début les personnages ne me sont en rien attachant puis au fil des pages ils prennent une belle dimension...
Je vais explorer plus avant, déjà commandé un livre à la bibliothèque : Retour en terre
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