John Irving

Queenie a écrit:

C'est vrai que son sens de l'ironie est très particulier. Il arrive à être ironique tout en étant très tendre.

Oui je crois que c'est ce contraste qui était si jubilatoire. L'humour dévastateur d'un doux.

A moi seul bien des personnages

Citation :

Adolescent, Bill est troublé par ses béguins contre nature pour son beau-père, ses camarades de classe, et pour des femmes adultes aux petits seins juvéniles. Plus tard, il assumera son statut de suspect sexuel, et sa vie entière sera marquée par des amours inassouvies pour les hommes, les femmes et ceux ou celles qu?on appellera bientôt transgenres

Passé 70 ans, les écrivains américains deviennent-ils tous des obsédés textuels, euh, sexuels ? La question ne se pose pas pour un Philip Roth ou un Tom Wolfe qui n'ont pas attendu un âge canonique pour s'intéresser à la chose. Le cas de John Irving est différent. Dans A moi seul bien des personnages, l'auteur se lâche totalement et balance un pavé très cru à la face de l'Amérique puritaine. Billy, narrateur et personnage principal, est à la recherche de son identité sexuelle, assumant difficilement son désir pour les femmes, les hommes et les transsexuels. Irving dépeint sa quête, certains diraient son errance, pendant près d'un demi-siècle, au sein d'un roman foisonnant au souffle certain qui ne tire que rarement à la ligne, mais ça lui arrive quand même. Une multitude de personnages, tous ambigus, objets le plus souvent de son désir, croisent la route d'un Billy qui se débat avec les affres de sa conscience dans l'environnement d'une petite ville du Vermont guère habituée aux frasques en tous genres, surtout dans les années 70. Si le livre est teinté d'humour dans sa plus grande partie, il change de ton lorsqu'il s'agit d'évoquer la décennie suivante pendant laquelle le sida fauche les vies en une moisson sanglante. Toutefois, il ne faut pas prendre le dernier livre d'Irving comme un roman d'aventures liées uniquement au sexe. L'amour de la littérature (Flaubert, Goethe, Dickens, Ibsen) y est omniprésent et celui du théâtre permet au romancier de citer abondamment Shakespeare dont il relie superbement l'oeuvre, avec son lyrisme et son inclination pour la tolérance et l'indépendance, au parcours chaotique de son héros. Pulsions, émotions, sensations, frustrations, A moi seul bien des personnages nous emporte dans l'ouragan d'une vie. Il faut bien attacher sa ceinture et garder les yeux ouverts, quitte à être déboussolé et (un peu) scandalisé, le voyage, l'odyssée serait-on tenté de dire, avec ses mille et un détours n'est pas de tout repos. Mais quel paysage, sur sa route !

traversay a écrit:

A moi seul bien des personnages
Toutefois, il ne faut pas prendre le dernier livre d'Irving comme un roman d'aventures liées uniquement au sexe. L'amour de la littérature (Flaubert, Goethe, Dickens, Ibsen) y est omniprésent et celui du théâtre permet au romancier de citer abondamment Shakespeare dont il relie superbement l'oeuvre, avec son lyrisme et son inclination pour la tolérance et l'indépendance, au parcours chaotique de son héros. Pulsions, émotions, sensations, frustrations, A moi seul bien des personnages nous emporte dans l'ouragan d'une vie. Il faut bien attacher sa ceinture et garder les yeux ouverts, quitte à être déboussolé et (un peu) scandalisé, le voyage, l'odyssée serait-on tenté de dire, avec ses mille et un détours n'est pas de tout repos. Mais quel paysage, sur sa route !

Ce roman me tente...
Il a été aussi très soutenu dans l'émission Le Cercle sur Canal Plus.

C'est souvent très, très cru, coline. Si ça ne te fait pas peur ...

traversay a écrit:

C'est souvent très, très cru, coline. Si ça ne te fait pas peur ...

Ahhhh????

topocl a écrit:

traversay a écrit:

C'est souvent très, très cru, coline. Si ça ne te fait pas peur ...

Ahhhh????

Ben c'est intriguant du coup

traversay a écrit:

A moi seul bien des personnages

Citation :

Adolescent, Bill est troublé par ses béguins contre nature pour son beau-père, ses camarades de classe, et pour des femmes adultes aux petits seins juvéniles. Plus tard, il assumera son statut de suspect sexuel, et sa vie entière sera marquée par des amours inassouvies pour les hommes, les femmes et ceux ou celles qu?on appellera bientôt transgenres

Passé 70 ans, les écrivains américains deviennent-ils tous des obsédés textuels, euh, sexuels ? La question ne se pose pas pour un Philip Roth ou un Tom Wolfe qui n'ont pas attendu un âge canonique pour s'intéresser à la chose. Le cas de John Irving est différent. Dans A moi seul bien des personnages, l'auteur se lâche totalement et balance un pavé très cru à la face de l'Amérique puritaine.

Le sexe, dans les livres de Irving, a toujours eu une place importante, et il n'a jamais tant hésité que ça à décrire des scènes "crues". Cela dit, peut-être que là, il va plus loin. Mais à le lire depuis le début, on ne peut pas dire que cette "obsession" soit venue avec l'âge.


Par contre, même après ton commentaire, je ne sais toujours pas si ce livre pourrait être bien ou non...

Queenie a écrit:

Le sexe, dans les livres de Irving, a toujours eu une place importante, et il n'a jamais tant hésité que ça à décrire des scènes "crues". Cela dit, peut-être que là, il va plus loin. Mais à le lire depuis le début, on ne peut pas dire que cette "obsession" soit venue avec l'âge

ayant lu pas mal de livres de lui, mais ne me considérant pas comme 'experte', je ne voulais rien dire, mais tu confirme... j'ai aussi le souvenir d'Irving comme auteur qui n'hésitais jamais à mettre du sexe dans ses livres... et surtout c'était plus 'déjanté' que chez Updike ou Roth
p.ex. la conception de Garp... ou cette obsession avec une photo de "l'amant" d'une femme, qui était un cheval dans (si je me rappelle bien) L'oeuvre de Dieu, la part du diable ou encore cette castration dans Un mariage poids moyen
depuis ses débuts ce sujet faisait partie de ses livres...

Je n'ai encore jamais lu cet auteur mais j'avais repéré le livre à la gare à cause de la couverture affichée en 1 mètre sur 1 mètre. J'ai trouvé que c'était un choix de couv' singulier. Elle annonce déjà un petit côté érotique, une femme qui dégrafe son soutien-gorge, que de perspectives d'avenir.

Kannskia a écrit:

Je n'ai encore jamais lu cet auteur mais j'avais repéré le livre à la gare à cause de la couverture affichée en 1 mètre sur 1 mètre. J'ai trouvé que c'était un choix de couv' singulier. Elle annonce déjà un petit côté érotique, une femme qui dégrafe son soutien-gorge, que de perspectives d'avenir.

Excellent, et on peut continuer à effeuiller en enlevant le bandeau "John Irving".
Ça serait amusant, comme concept : on pourrait multiplier les bandeaux à enlever (et on peut faire confiance aux éditeurs, ils adorent en mettre : "John Irving", "Enfin", "Phénoménal"...).
Tout le monde en parlerait, ça ferait de la publicité gratuite, en plus.

traversay a écrit:

C'est souvent très, très cru, coline. Si ça ne te fait pas peur ...

Même pas peur...

Dernière nuit à Twisted River

Je partage l'impression de Queenie sur une page précédente. Ce n'est pas désagréable et le récit se suit sans ennui, mais il reste toujours un arrière-goût de déjà vu et Irving semble radoter. On retrouve des situations, des traumatismes familiers sans que le style ne se détache de l'auto-citation (comme la plupart de ses romans récents).
Les coupures temporelles ne sont pas toujours bien conduites et laissent la vision d'un puzzle que le lecteur doit maladroitement reconstituer. L'écart entre chaque génération précipite alors une transmission alourdie par le constat d'une perte : les évènements sont liés mais leur résonance émeut trop rarement tant leur effet apparait calculé. Dernière nuit à Twisted River, à l'image de sa construction en forme de roman en gestation, fait transparaitre un manque frustrant d'inspiration même si la lecture demeure plaisante.

Heyoka a écrit:

une femme qui dégrafe son soutien-gorge, que de perspectives d'avenir.

Le visage est caché, et ce n'est pas par hasard. Nombreux sont ceux qui passent des soutien-gorges dans le roman,
et pas que des femmes cisgenre ! La couverture prend tout son sens et son ambiguïté quand on lit le roman.

J'ai presque fini ce roman, idéal pour l'été. Terriblement d'actualité. Très personnel.
Bourré de référence littéraires. Toujours aussi drôle et grave à la fois.
J'ai hâte de me retrouver dans le train pour finir.
Miam.

ça sera certainement ma meilleure lecture de l'été.
Me voici réconciliée avec Irving qui a su me faire rire, m'indigner, m'émouvoir, me révolter, bref tout un panel de ressentiments qui est le signe d'un très bon livre pour moi.

Bill, Billy, William Abott sera un personnage bien déterminé, malgré les obstacles, à vivre sa sexualité si différente de la norme à l'époque, nous sommes dans les deux tiers du livre au milieu des année 70 en Amérique profonde dans une petite ville du Vermont. Tout est à faire et à construire pour un adolescent qui découvre sa bisexualité.

Des obstacles il y en aura mais j'ai envie de retenir une belle galerie de personnages qui l'aideront, qui l'accompagneront toute une vie, qu'Irving fait tellement bien "vivre" dans ce livre que Miss Frost, moi je n'ai aucun mal à l'imaginer là devant moi.

Roman initiatique et militant, oui quand même, bien illustré par les événements qui traversent ces années charnière, Irving n'hésite pas à promener son lecteur et à le déboussoler pour son plus grand plaisir, dans de multiples lieux et situations tour à tour cocasses, embarassantes, tragiques même.

Du théâtre à la lutte, il n'y a qu'un pas, belles métaphores de ce combat que mènera Billy tout au long de sa vie jusqu'à la dernière page, rien ne sera acquis, et les débats actuels sont là pour prouver qu'Irving tombe à point et se révèle presque indispensable.

Noté! J'avais un peu renoncé à Irving, mais il semble que vous l'aimiez toutes deux ?