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| Edgardo Cozarinsky [Argentine] | |
| | Auteur | Message |
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kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Edgardo Cozarinsky [Argentine] Dim 17 Aoû 2008 - 16:45 | |
| Né à Buenos Aires. Petit-fils d'immigrés russes, Edgardo Cozarinsky vit depuis une trentaine d'années à Paris. Cinéaste et écrivain, il a près d'une vingtaine de films à son actif en tant que réalisateur, parmi lesquels 'Dans le rouge du couchant' en 2003 et 'Ronda nocturna' en 2005, films qu'il a également écrits. Il apparaît également en tant qu'acteur dans six films, dont 'La Tortue sur le dos' en 1978, et 'Ville étrangère' en 1988. Il interprète son propre rôle dans 'Cinématon' en 1984, et 'Meykinof' en 1985. Edgardo Cozarinsky publie en 2002 chez Actes sud un recueil de nouvelles : 'La Fiancée d'Odessa'. sourceBibliographie1985 Vaudou urbain, récits, 2001 La Fiancée d'Odessa, récits, 2001 Passage du témoin, essais et chroniques, 2004 Le Rufian moldave, roman, 2005 Musée du potin, essai et récits, 2006 Trois Frontières, récits, 2006 Palais plébéiens, chroniques et un récit, 2007 Manœuvres de nuit, roman, 2009 Loin d'où, roman, 2014 De l’argent pour les fantômes , roman,
Dernière édition par kenavo le Dim 8 Juin 2014 - 9:42, édité 2 fois | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Edgardo Cozarinsky [Argentine] Dim 17 Aoû 2008 - 16:46 | |
| La Fiancée d'Odessa - Citation :
- Présentation de l'éditeur
Juifs pour la plupart, les personnages de ces nouvelles partagent un même secret identitaire. Aucun n'est ce qu'il dit ou croit être. Les soubresauts de l'histoire (pogroms d'Europe centrale, persécutions nazies, guerre civile espagnole...) ou quelque passion obscure, ancrée dans la haine ou dans l'amour, les ont contraints à se forger une nouvelle identité pour composer avec l'absurdité du monde. Leurs descendants ont reçu cette équivoque en héritage. Ainsi de la Fiancée d'Odessa, jeune modiste orthodoxe, qui rencontre par hasard sur les quais de ce port d'Ukraine un juif fuyant les pogroms de Kiev. Deux visas en poche, le candidat au départ vers l'Amérique, terre de tous les possibles, lui propose d'endosser l'identité de sa jeune épouse, qui a refusé l'inconnu. Cent dix ans plus tard, dans un hôpital parisien, le secret est levé et l'arrière-petit-fils de ce couple improbable s'interroge sur sa judaïté. Puisqu'elle se transmet par la mère. Qu’en est-il de sa réelle appartenance au peuple des élus ? Scénario identique pour L Hôtel des émigrants dans le Lisbonne de 1940. Une multitude d'artistes attendent dans la ville blanche le départ vers la liberté. Mais on n'y croise pas uniquement A. Döblin, F. Werfel ou H. Mann. Dans une chambre d'hôtel, trois jeunes gens, qui se sont connus en Espagne dans les Brigades internationales, jouent une insolite variation de jules et Jim. Ils sont allemands, elle est américaine. Elle ne pourra en épouser qu'un qui la suivra en Amérique ; à eux de choisir. Les papiers sont établis au nom de Théo parce qu'il est juif, c'est pourtant Franz qui partira, laissant son ami sur ces quais où brillent les lumières coloniales de Salazar. Soixante ans plus tard, le petit-fils américain se rend au Portugal pour essayer de comprendre comment s'est jouée la partie. Variations en contrepoint sur les identités (nationale et personnelle), nostalgie d'une patrie rêvée ou réelle, fidélité à la cause perdue : Edgardo Cozarinsky trace le portrait de ces déracinés avec une lucidité désenchantée qui les livre aux sentiments les plus contraires. | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Edgardo Cozarinsky [Argentine] Dim 17 Aoû 2008 - 16:47 | |
| On doit ce fil à 'One Shot' - et puisque j'ai vu que Epi a terminé la lecture de ce livre, je suis sûre qu'elle va nous faire un petit commentaire de son moment de lecture | |
| | | Epi Escargote Zen
Messages : 14255 Inscription le : 05/03/2008 Age : 64 Localisation : à l'ouest
| Sujet: Re: Edgardo Cozarinsky [Argentine] Ven 5 Sep 2008 - 17:26 | |
| La fiancée d'OdessaLe passé forcément est incomplet quand il n'est pas erroné, c'est ce que nous dit Cozarinsky dans chacune des 9 nouvelles de ce petit livre. Ces nouvelles sont situées dans des lieux différents, à des époques différentes et présentent une grande variété de sujets mais elles ont un dénominateur commun : l'Histoire est ce que l'on en fait, elle peut être trafiquotée, amputée de quelques éléments, embellie souvent, arrangée et arrangeante. Et cette Histoire pas tout à fait conforme, pas tout à fait réelle, mais admise comme telle par ceux concernés finit par devenir vraie sans qu'elle soit remise en cause. Histoires d'exils, de transmission, d'identités usurpées ou cédées, passé dans lequel on ne peut avoir une confiance absolue. L'Histoire est ici (re)mise en cause, mais jamais accusée, l'Histoire, ou la mémoire, dont on questionne la véracité. Une quête de la vérité alors ? Pas tout fait. La vérité, on la découvre parfois par hasard, ou on la recherche mais seulement par curiosité, par intérêt et pas pour dénoncer ou rétablir. Odessa, 1890. Daniel, un jeune juif polonais fuyant les progroms attend le départ de son bâteau pour l'Argentine. Il est jeune marié mais part seul, son épouse n'a pas osé le suivre. Trop loin, trop d'incertitude. Sur les quais, il rencontre une jeune modiste, à qui il se confie. Un siècle plus tard, un jeune homme reçoit une lettre de sa tante lui révélant le secret de famille jusqu'àlors transmis de mère en fille aînée. Il découvre alors toutes les conséquences que le choix de son arrière-grand père aurait pu avoir sur l'identité même de la famille si celui-ci n'avait pas opté pour le mensonge. C'est pour moi la nouvelle la plus forte des neuf que contient ce receuil et la dernière, celle qui m'a le plus intriguée. Une lecture sympathique et agréable (oui, je sais, je suis un peu tiède ) | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| | | | Chatperlipopette Zen littéraire
Messages : 7679 Inscription le : 24/02/2007 Age : 59 Localisation : Bretagne
| Sujet: Re: Edgardo Cozarinsky [Argentine] Mar 4 Nov 2008 - 16:20 | |
| La fiancée d'Odessa Le monde des novellistes est une source inépuisable de belles découvertes....ainsi en est-il allé avec le recueil "La fiancée d'Odessa" d'un auteur argentin, Edgardo Cozarinsky. Je vous vois déjà en train de froncer les sourcils: argentin, cet auteur? Vous m'en direz tant... son patronyme a cependant des consonnances loin d'être hispaniques ou sud-américaines! L'auteur offre un étrange et beau voyage aux lecteurs qui suivent ses différents récits: un voyage au long cours, au gré de ses tranches de vie contées dans la brièveté de la nouvelle. L'histoire de l'éternelle errance pour trouver la Terre Promise, l'histoire d'une inlassable fuite d'une peuple pourchassé, l'histoire de leurs descendances dont les racines enrichissent le terreau de la terre d'accueil. Le lecteur parcourt le temps et l'espace en quelques pages: un jour il est sur le port d'Odessa à la fin du XIXè siècle, puis les années vert-de-gris de la chappe hitlérienne se rappellent au présent d'un pianiste de variété qui choisira de retourner vers l'enfer pour s'évanouir dans les couleurs parfaites d'un copiste fabuleux. L'Amérique du Sud tisse des liens avec l'Ancien Monde, celui de l'Europe ravagée par ses conflits et ses misères, devenue trop petite pour les espérances des plus deshérités. L'auteur, avec patience, s'emploie à mettre au jour l'envers de la tapisserie de l'Histoire: ces fils ténus qui usurpent les identités sans être coupés de ce que l'on croyait être, ces fragiles fils qui lient d'autant plus fortement que les secrets de famille sont lentement dévoilés. La nouvelle "La fiancée d'Odessa" ouvre une parenthèse qui se ferme avec l'ultime récit "Hôtel d'émigrants". Dans la première, une jeune modiste orthodoxe rencontrée par un jeune juif fuyant les pogroms ukrainiens, s'embarque pour une autre vie, acceptant une autre identité qui lui est offerte, abandonnant son appartenance religieuse pour revivre....quand quelques générations plus tard, le voile est levé, l'interrogation des descendants quant à leur judéité est immense (elle se transmet par la mère). Et si ce cas était-il loin d'être isolé? Ont-ils alors leur place parmi leurs correligionnaires? Dans la seconde, un trio (deux hommes unis par une grande amitié, allemands, et une femme, américaine) à la Jules et Jim, après une fuite devant les forces nazies, attend à Lisbonne, avec une patience désespérée, une partance pour les Etats-Unis. Un ami offre son nom à un autre, car la jeune femme ne peut en épouser qu'un pour lui offrir le passeport de la liberté, dont le petit-fils dénouera l'échevau et s'interrogera également sur sa judéité. Variations sur un même thème: celui des identités personnelle et nationale, bribes de nostalgie des patries véritables ou rêvées, portraits où pointe les sentiments souvent contraires des déracinés. L'Histoire ballotte, sans états d'âme, les destins que l'Entre-deux-guerre envoie sur de lointains rivages plus tolérants et porteurs d'avenirs à construire. L'Histoire est parfois un triste rouleau compresseur difficile à arrêter. Ainsi, la vieille comtesse hongroise devant vendre un de ses derniers tableaux de maîtres, un Friedrich, elle qui après avoir survécu aux affres nazis et communistes, se dépouille de ses souvenirs pour tout simplement survivre. Ainsi encore le vieil écrivain autrichien réfugié à Buenos Aires, vivant sa vie amoureuse dans les ombres sales des toilettes pour hommes de la gare. Il y revoit un jeune homme rayonnant de beauté et de vie, Carlito dit Belle Gueule, qui le sauvera d'une rafle du régime militaire, celui qui tait, hypocrite, les attirances de son état-major, tout en menant une répression brutale sur les amours dites contre nature. Belle Gueule, qui grâce à ses charmes et à sa compréhension du système, louvoiera dans les méandres de la dictature et actionnera les engins de torture dans de sombres cachots. Cependant, une lueur éclaire ces êtres au bout du rouleau, presque finis de solitude et d'oubli: celle de la compassion d'un autre qui réchauffera leurs souvenirs. A noter que des références à un cinéma mythique sont présentes: le périple commençant à Odessa, l'ombre d' Eisenstein plane sur le port et on imagine la silhouette du cuirassé parmi les innombrables bâtiments en partance...en effet, près du jeune émigrant passe un landau où pleure un nourrisson "Pour éloigner cette peine qu'il ne savait pas effacer, il suivait des yeux chaque personne qui passait; toutes offraient quelque trait capable de l'interesser: une gouvernante en uniforme soigné poussait sans entrain le landau d'où, dans une profusion de dentelles, émergeait un bébé grognon." (p 10). Il s'achève sur un clin d'oeil à Truffaut et son inoubliable Jules et Jim, une relation amoureuse dans laquelle le coeur d'une jeune femme a bien du mal à choisir. Alors, si vous aimez les récits dignes de l'épopée, si vous aimez les nouvelles, si vous aimez les parfums de l'Amérique du Sud, si vous aimez le cinéma, vous ne pourrez que succomber à ce voyage au coeur de destins ordinaires de personnages sublimes! Une belle découverte d'un auteur de grand talent grâce à Kenavo | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| | | | Chatperlipopette Zen littéraire
Messages : 7679 Inscription le : 24/02/2007 Age : 59 Localisation : Bretagne
| Sujet: Re: Edgardo Cozarinsky [Argentine] Mar 4 Nov 2008 - 21:13 | |
| Sans flagornerie aucune, je suis enchantée d'avoir fait connaissance avec un novelliste de talent....j'en redemande!!! | |
| | | Epi Escargote Zen
Messages : 14255 Inscription le : 05/03/2008 Age : 64 Localisation : à l'ouest
| Sujet: Re: Edgardo Cozarinsky [Argentine] Mer 5 Nov 2008 - 13:27 | |
| Très beau commentaire Chatperlipopette. On voit que tu as vraiment apprécié ces nouvelles | |
| | | Marie Zen littéraire
Messages : 9564 Inscription le : 26/02/2007 Localisation : Moorea
| Sujet: Re: Edgardo Cozarinsky [Argentine] Mer 27 Mai 2009 - 3:01 | |
| Le Ruffian moldave traduit de l'espagnol ( Argentine) par Jean Marie Saint-Lu Actes Sud Cela m'est toujours très difficile de dire pourquoi un roman ( dont les thèmes abordés avaient pourtant tout pour me séduire) ne m'a pas enthousiasmée.. Je vais donc m'appuyer sur la belle postface d'Alberto Manguel, que j'ai lue avec un certain soulagement, je dois bien l'avouer! Et comme il s'agit d'un roman très court qui dit beaucoup de choses, je vais faire très long pour dire pas grand chose. Non mais! Tout déplacement, toute armée qui s’avance, toute caravane apporte avec soi un contingent de bataillons de moindre importance qui, tels des rémoras s’attachent au convoi en marche et le suivent jusqu’à son port. Camelots, religieux, malfrats de tous poils, violoneux ou joueurs de flûte accompagnent ce flot humain, ainsi que d’entreprenants voyous flanqués de leurs femmes, conférant à la nouvelle société qui s’installe en terre inconnue une certaine familiarité, une base commune qui atténue un peu de la nouveauté, par un effet comparable à celui que produit dans une pièce étrangère l’apparition de personnages familiers- personnages avec lesquels le public peut, sinon s’identifier, du moins établir une relation conventionnelle.. En 1891, le gouvernement argentin vendit au baron Maurice de Hirsch mille trois cent lieues carrées de terres dans les provinces de la Pampa, Entre Rios, Santa Fe et Santiago del Estero, au prix de deux cent livres sterling la lieue, afin de lui permettre de créer des colonies à l’intention des Juifs persécutés en Europe, principalement en Russie. Pendant plusieurs décennies, des dizaines de milliers de juifs arrivèrent en Argentine pour s’installer dans les colonies du barreau de Hirsch, que nombre d’entre eux finirent par abandonner en faveur de la capitale Buenos Aires. En même temps que les paysans, artisans et ouvriers arrivèrent les autres, les artistes et les prostituées, et la nouvelle Sion put bientôt se targuer de posséder l’un des meilleurs théâtre yiddish du monde et l’une des chaînes de bordels les plus actives. Une organisation tristement célèbre, Zwi Migdal, mit au point un système extrêmement efficace d’esclaves blanches et juives, lequel, sous la protection d’une force de police argentine corrompue, introduisit dans le pays et puis exploita des milliers de femmesLa chronique de l’immigration juive en Argentine et les histoires qui s’y rattachent constituent la toile de fond du Ruffian moldave, une chronique sur laquelle Edgardo Cozarinsky promène un œil sombre, plein d’humour et de curiosité. Au centre, l’histoire européenne des juifs d’Argentine remonte loin dans le souvenir des shtelt et des pogroms, d’actions héroïques mineures et de gestes intimes de résistance; autour d’elle traînent des rumeurs de trahisons infâmes, d’entreprises guidées par la cupidité et de confessions personnelles sns gloire. Le modèle littéraire de Cozarinsky n’est ni le roman documentaire, ni le larmoyant mémoire familial, mais la tradition dramatique yiddish des mythes ancestraux et des comédies musicales qui, transférés des pampas russes aux steppes argentines, ont acquis sur les scènes du nouveau pays les costumes de la couleur locale et les rythmes des tangos et des milongas. Les données sur lesquelles Cozarinsky fonde sa fiction sont vastes et chaotiques, et pourtant Le Ruffian moldave évite la pompe et la rhétorique des longues sagas afin de mieux se concentrer sur ce qui pour nous est l’essentiel, le cœur complexe et mystérieux du récit. Il ne nous donne rien de superflu, rien qui pourrait ressembler à une complaisance littéraire. En quelques pages, l’histoire entière de l’immigration juive en Argentine est distillée, réduite à une poignée d’évènements précis qui, bien compris, doivent suffire au lecteur intelligent.Voilà sans doute le problème..je n'y ai pas compris grand chose, je dois bien l'avouer! Et pourtant, j'aime assez les romans qui n'ont rien de linéaire ni dans les lieux ni dans le temps, mais il me faut quand même un minimum de matière pour au moins comprendre qui sont les personnages, et le goût de l'ellipse d'Edgardo Cozarinsky incitant à constamment revenir en arrière avec dans la tête " ciel, mais c'est qui, celui-là??" m'a vite fatiguée. Dans son ouvrage aujourd’hui classique sur Jose Luis Borges et le cinéma, Cozarinsky rappelle que Borges se méfiait de « l’échelle qu’exige le roman », une position littéraire hardie qui « détruit jusqu’à la possibilité de jamais approcher un genre qui, afin de développer les caractères de ses personnages et les proportion de ses épisodes, a besoin d’une orchestration nécessairement lente, de circonstances spécifiques et d’informations triviales ». Cette impossibilité ,c’est exactement ce que Cozarinsky a réussi dans ces pages. Ah!!! Et bien voilà!! Oui, alors là, c'est une réussite, c'est vrai. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il ne se noie pas dans les détails, cet écrivain. Mais moi, j'aime bien les détails. Et qu'on m'explique. Et qu'on me raconte... Ce ne sont pas les voies directes ni les récits définitifs dont le dénouement est visible dès le début qui intéressent Cozarinsky, ce sont des carrefours, ces espaces doubles ou triples, où des histoires différentes se rencontrent et, en même temps, semblent se séparer. Appareillements incongrus, rencontres étranges, coïncidences malaisées, répétitions surprenantes, découvertes inattendues et liens secrets structurent la fiction de Cozarinsky et leur révélation n'a jamais pour résultat un simple récital d'évènements, jamais le coup de théâtre apparemment implicite, mais l'exposition des endroits où les faits se heurtent et se dissolvent les uns dans les autres.Voui.. et pour se dissoudre, ça se dissout..tellement qu'à un moment du texte, il ne subsistait dans ma tête qu'un magma confus, voire même lynchien, je parle doucement, c'est un crime de lèse-markoC'est comme si Cozarinsky nous racontait des énigmes policières en commençant par la fin ( technique qui n'est pas étrangère à l'un de ses maîtres, Joseph Roth), en montrant d'abord le coupable et en nous entraînant ensuite dans un labyrinthe d'indices nécessaires et révélateurs. Cozarinsky n'égare pas le lecteur.Ah, moi si, Vtre Honneur, moi si!! J'étais même complètement paumée..oups, continuez, pardon! Il se borne à présenter l'histoire comme une succession de dévoilements dans laquelle chaque scène nouvelle, chaque nouveau personnage ou chaque confession apparaît non seulement à sa propre lumière mais aussi à celle des confessions, personnages et scènes antérieurs, devenant un moment indépendant de l'histoire tout en faisant aussi inextricablement partie de l'ensemble. Le style révèle le contenu. Dans les dernières pages du Ruffian moldave, nous nous rendns compte que l'Histoire ( au- delà des allégories, il s'avère que l'Histoire est le vrai sujet du roman) procède de cette façon ,elle-aussi, comme un strip-tease dont chaque segment suggère une vérité finale. Sauf que, juste avant la fin, les lumières s'éteignent.Et là.. Oui, moi, si on m'explique les choses simplement et de si belle façon, je commence à être vraiment d'accord! Merci Mr Manguel de si bien savoir lire- et comprendre .La fin qui parle des pierres tombales juives emportées dans les exils, est très belle. Mais pourquoi n'avez vous pas écrit cela en préface plutôt qu'à la fin, cela m'aurait bien aidée.. PS Il va sans dire que mon état de fatigue - et ma manie de lire plusieurs livres à la fois- ont grandement contribué à mon manque de compréhension. Edgardo Cozarinsky ne saurait en être tenu pour responsable ( quoique... ). Je ne voudrais en aucun cas décourager d'autres lecteurs! | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| | | | Charlie Agilité postale
Messages : 970 Inscription le : 12/01/2010
| Sujet: Loin d'où Lun 9 Jan 2012 - 15:27 | |
| Ce qu’écrit très bien Epi pour son recueil de nouvelles (La fiancée d’Odessa) peut tout à fait s’appliquer à son dernier roman, Loin d'où. - Epi a écrit:
Histoires d'exils, de transmission, d'identités usurpées ou cédées, passé dans lequel on ne peut avoir une confiance absolue. L'Histoire est ici (re)mise en cause, mais jamais accusée, l'Histoire, ou la mémoire, dont on questionne la véracité. Une quête de la vérité alors ? Pas tout fait. La vérité, on la découvre parfois par hasard, ou on la recherche mais seulement par curiosité, par intérêt et pas pour dénoncer ou rétablir.
On retrouve les thèmes de prédilection de l’auteur dans ce roman-ci, thèmes qui sont liés à sa propre histoire familiale, à sa recherche d’identité. En janvier 1945, redoutant l’arrivée de l’Armée Rouge, une femme fuit le camp d’Auschwitz où elle travaille comme employée. Elle transporte sur elle 20 kilos de dents en or... Après un court séjour en Italie, elle s’installe à Buenos Aires mais reste hantée par son passé. Son fils Federico, né en Argentine, va en vain l’interroger sur son passé pour se construire sa propre identité…. Le dénouement de l’histoire est tout à fait surprenant et inattendu ! Il s’agit d’un court roman, qui s’apparente plus à une longue nouvelle, avec des parties qui m’ont semblé parfois un peu inégales, notamment la toute dernière. C’est un peu dommage car on reste sur sa faim mais ça reste pour moi un bon roman, je l'ai trouvé très riche, ces thèmes m'ont passionné et ces personnages touché ! Historiquement, on y parle de la seconde guerre mondiale, de la fuite des nazis vers l'Argentine, mais aussi de la dictature militaire en Argentine et de ses opposants. J’ai trouvé vraiment intéressant d’inclure l’histoire d’un personnage tout à fait réel, le photographe juif ukrainien Evgueni Khaldeï, qui revient régulièrement comme un fils rouge à travers les 50 ans d’histoire couverte par un roman. Le travail de ce photographe, qui a été à la fois le chantre mais aussi une victime du régime soviétique, montre comment se construit l’imagerie de l’Histoire, comment les photos peuvent être manipulées, truquées pour desservir des fins politiques. Un petit extrait : - Citation :
- Il avait discerné, chez ceux qu’il appelait encore ses camarades, que la jouissance de tuer avec la bénédiction d’une cause sans appel pouvait être plus forte que toute vision édénique d’un futur « juste et souverain », soumis par les « impératifs historiques du moment « à l’autorité purement imaginaire d’un leader moribond et de son épouse déjà morte. Obéir et faire obéir, telle était la jouissance militaire qui enflammait ces hommes jeunes et moins jeunes : pour lutter contre les forces armées qui usurpaient le pouvoir, ils imitaient leurs grades, respectaient leur soumission verticale, prenaient goût à la notion de patriotisme, aussi incontestable à leurs yeux que l’idée de la Révolution, idole qu’on ne mentionnait qu’avec une majuscule
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| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Edgardo Cozarinsky [Argentine] Dim 8 Juin 2014 - 9:47 | |
| De l’argent pour les fantômes - Citation :
- Présentation de l’éditeur
Andrés Oribe est un artiste blasé qui a décidé de se retirer du monde. Il a cependant laissé, dans un café, six cahiers à l’attention d’un jeune étudiant à l’Ecole de Cinéma, comme un semblant de testament : l’histoire de Céleste – une fille des bidonvilles de Buenos Aires – qui deviendra, à Berlin, la maitresse d’un magnat russe. Avec Elisa, sa camarade et future fiancée, l’étudiant part à la recherche d’Oribe et décide d’en faire la trame de leur premier film. Un jour, leurs passés se croiseront... Peut-être revivront-ils alors dans le monde d’Oribe et s’approprieront-ils les histoires d’un homme qui, coûte que coûte, a eu besoin de laisser une trace de son passage sur terre ? Que faire d’une histoire dont on a hérité et faut-il, pour la sauver de la pesanteur du passé, lui insuffler une passion nouvelle, en donner une version différente ? Ou devrait-on plutôt suivre les conseils d’Oribe : vivre l’instant présent, fuir le passé, et ne jamais revenir là où on a été heureux, ne jamais revoir ceux que l’on a aimés autrefois. J’ai déjà fait plusieurs voyages avec cet auteur. Des très bons… et ceux qui étaient un peu moins réussis. Ce livre-ci va figurer parmi mes préférés de cet auteur. On change de ville et d’hémisphère, mais l’univers qu’on retrouve dans ce roman frôle celui d’un Patrick Modiano. Des personnes dont on ne va pas tout savoir, des fils d’histoires qui ne vont pas tous aboutir à une fin, une atmosphère un peu mystérieuse, bref, tous les ingrédients qui ne peuvent que me séduire ! À côté d' Alan Pauls et Sergio Bizio, mon auteur argentin préféré. ExtraitJe me demande aussi, et souvent, quelle obscure pulsion nous pousse à conserver ce que nous savons destiné à disparaître, lueurs de souvenirs, bribes d’expériences, chutes de films, photos jaunies, annotations que nous ne relirons pas… Serait-ce que ce faisant, nous essayons, aveuglément, sans le comprendre, de nous assurer de la survie de nos propres affects, de prolonger mesquinement les jours qui nous restent ? | |
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