Luchino Visconti

Luchino Visconti est un cinéaste italien né le 2 novembre 1906 à Milan et mort à Rome le 17 mars 1976. Il fut un des grands représentants de ce cinéma italien d'après-guerre qui allait avec, entre autres choses, le néo-réalisme, être le centre européen du cinéma pendant plusieurs décennies

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Filmographie/Index (Cliquez sur les chiffres pour accéder directement aux pages

Longs métrages
1943 : Les Amants diaboliques (Ossessione)
1950 : La terre tremble (La Terra trema)
1951 : Bellissima
1954 : Senso Page 2
1957 : Nuits blanches (Le notti bianche)
1960 : Rocco et ses frères (Rocco e i suoi fratelli) Page 4
1963 : Le Guépard (Il Gattopardo) Pages4, 5
1965 : Sandra (Vaghe stelle dell'Orsa) Pages 1, 4, 5
1967 : L'Étranger (Lo straniero)
1969 : Les Damnés (La Caduta degli Dei) Page 1
1971 : Mort à Venise (Morte a Venezia) Pages 1, 2, 3, 4
1972 : Ludwig ou le Crépuscule des dieux (Ludwig) Page 1
1974 : Violence et Passion (Gruppo di famiglia in un interno)
1976 : L'Innocent (L'Innocente) Page 1
Courts métrages
1951 : Notes sur un fait divers (Appunti su un fatto di cronaca), épisode réalisé pour le magazine cinématographique Documenti mensili, dirigé par Cesare Zavattini
1961 : Boccaccio 70 - segment Il Lavoro (Le Travail)
1966 : Les Sorcières (Le Streghe) - segment La Sorcière brûlée vive (La Strega bruciata viva)
Documentaires
1945 : Giorni di Gloria (Jours de gloire)

Citation :

arrêté le 13/04/2013 à la page 5

La trilogie allemande du Duc de Modrone


Voici quelques éléments qui me semblent essentiels sur une partie de l'oeuvre de Luchino Visconti. Visconti est un paradoxe et incarne toutes les contradictions du siècle à lui seul.Aristocrate et communiste au train de vie somptueux, homosexuel ayant donné à Magnani,Cardinale,Thulin leurs meilleurs rôles,homme du nord de l'Italie mais chantre du Mezzogiorno au temps du Néoréalisme triomphant.Une personnalité riche,complexe,auquel on a reproché tout et son contraire.

Ils étaient cinq(principaux),tous géniaux:Rossellini le professeur,De Sica le bon docteur,Fellini le roi bouffon, Antonioni le cérébral un peu éloigné et Visconti l'aristocrate un peu distant mais si sincère.




Visconti,amateur de culture française et germanique,arrive aux années soixante et signe avec Rocco et ses frères une oeuvre magistrale,l'adieu au Néoréalisme.Puis viendra le Guépard(63) qui sera comme un au revoir à l'Italie.Le Prince Salinas c'est un peu Visconti lui-même évidemment.Souvenez-vous"Nous étions les lions,les guépards.Après nous viendront les hyènes et les vautours.Mais tous nous continuerons à nous prendre pour le sel de la terre.".Terrible aveu du Prince pourtant éclairé,mais perplexe devant les changements de l'Italie.

N'ayant jamais pu mener à bien ses projets sur Proust(La Recherche du temps perdu étant à Visconti ce que Don Quichotte fut à Welles) il réalisera en quelques années ce qu'il est convenu d'appeler faute de mieux la Trilogie allemande. Les Damnés sonne comme une sorte de tragédie shakespearienne mise en scène comme un opéra wagnérien. Inspiré vaguement des Buddenbrook de Thomas Mann, déjà, de Macbeth,de la saga de la famille Krupp et d'une grande production d'épouvante dont le tournage en Allemagne dura presque 15 ans sous la direction d'un peintre raté,Les Damnés brasse,parfois un peu confusément,un peu "trop" les thèmes éternels du pouvoir et de l'ambition.Les Atrides de la Ruhr seront happés comme un simple rouage de la démesure assassine. Cortège funèbre comme dans les deux autres films,avec des éléments personnels ,moins que dans les films suivants.Mais Visconti au moins aura essayé de comprendre comment le pays de Goethe et de Beethoven a pu vivre ainsi.


Mann,écrivain favori de Visconti dont le La mort à Venise était réputé inadaptable,tout en suggestions d'ordre esthétique difficiles à imaginer(au sens propre).Visconti raccourcit son livre déjà bref. Aschenbach,compositeur célèbre mais qui doute et vieillit se repose à Venise.Il l'ignore encore mais il a deux rendez-vous avec la Perfection et avec la Mort.La splendeur androgyne de Tadzio,et sa complice l'épidémie de choléra auront raison de lui.Eternelle contradiction d'Eros et de Thanatos et dévoilement de Visconti lui-même,viellissant et bientôt malade.Aschenbach,arrivé sur la chaise-longue du bateau mourra sur la chaise-longue de la plage.Rien ne semble changer mais tout change.Bogarde dans une scène fabuleuse se mettra à rire au lieu de pleurer.Ce n'en est que plus poignant.Et puis tant de symboles:choléra/Grande Guerre,Aschenbach/La vieille Europe...

Ludwig(Le Crépuscule des dieux) dans sa soif de beauté,d'absolu lui aussi se perdra car "Les dieux tombent en ruines et s'écroulent avec leurs rêves devant un destin plus fort qu'eux".Helmut Berger,qui fut comme le vrai Tadzio de Visconti ,incarne l'Amant du clair de lune dont le romantisme et la quête de pureté ne trouveront leur plénitude que dans la mort,celle qui réussit à éloigner cette médiocrité honnie.Ni le pouvoir des Essenbeck,ni le statut d'artiste vénéré d'Aschenbach,ni le sceptre et la couronne de Louis II de Bavière n'empêcheront la nuit de tomber.

Visconti,c'est tout cela et aussi les pêcheurs affamés de Sicile,les exilés ruraux de Milan,les amants diaboliques d'Ossessione,les gigolos de Senso.Mais le temps de la trilogie un aristocrate plutôt progressiste,une sorte de guépard,a embrassé le destin de l'homme et sa propre perte,et ceci dans le contexte de ce vieux continent qu'il aime tant,mort plusieurs fois à Venise,à Sarajevo,à Berlin

Tu oublies L'Innocent, qui est un film magnifique (Giancarlo Giannini a les plus beaux yeux du monde d'ailleurs dans ce film, et force est de constater qu'il y a aussi la plus belle scène érotique du monde dans ce film, avec une effectivement extrêmement belle Laura Antonelli).

Et bien sûr, Ludwig est génial.

Helmut Berger est un acteur génial.

Visconti est un réalisateur génial. Il est le meilleur directeur d'acteur au monde (il sait révéler le meilleur de Burt Lancaster ou d'Alain Delon, ou encore de Claudia Cardinale, ce qui n'est pas rien, sans compter bien sûr les géniaux Dirk Bogarde et Helmut Berger, déjà cités, etc.), il sait aussi écrire un film et bien s'entourer. Sans compter la photographie extraordinaire de la majorité de ses films (voir le plan d'ouverture de La Mort à Venise, à tout hasard). Bref, je reste intarissable d'éloges sur ce cinéaste trop souvent mis de côté, et assez peu accessible généralement (je veux dire par là que ses films sont très peu diffusés au cinéma dans de bonnes conditions, et les éditions DVD sont rares, voire inexistantes en France, pour certains de ses meilleurs films).

Elise a écrit

Citation :

Tu oublies L'Innocent, qui est un film magnifique

Non Elise je ne mésestime pas L'innocent mais ce billet ne portait que sur les trois films "allemands".Je reviendrai sur Visconti.Merci.Tu as raison en ce qui concerne les DVD.Quant à L'étranger des problèmes de droits insurmontables pourraient bien nous en priver définitivement.

Citation :

et les éditions DVD sont rares, voire inexistantes en France, pour certains de ses meilleurs films).

Je cherche Ludwig, Le crépuscule des dieux en DVD, et ne le trouve pas... C'est un des seuls films de Visconti que je n'ai pas revu, et pourtant celui qui m'avait peut être le plus marquée!

A ma connaissance seuls existent en DVD Le guépard,Mort à Venise,les damnés,Rocco et ses frères,Les amants diaboliques,Boccace 70(sketchs) et peut-être La terre tremble.

Pâles étoiles de la Grande Ourse



Très viscontophile je n'avais jamais vu Sandra(65) et ne m'en portais pas plus mal.Je n'ai guère prisé ce film et trouve que le parti-pris vénéneux qu'instille Visconti ne m'entraîne pas loin dans cette quête d'un passé trouble de Sandra et Gianni,frères et soeur qui ne m'ont inspiré ni osmose,ni même la moindre sympathie.Il y a bien la grande maison de Volterra et un peu deToscane nocturne,pays que j'aime pourtant profondément.Mais il y a surtout le jeu fraternel faussé et aucun personnage à aimer.De Sandra me resteront deux choses qui heureusement se passent très bien de cinéma.Les variations pour piano de César Franck qui couvrent parfois le texte et c'est presque mieux ainsi.Et le magnifique titre original dû au grand poète du romantisme italien,Léopardi.Ni César Franck ni Giacomo Léopardi n'ont besoin de Visconti.Visconti qui reste bien sûr dans mon panthéon pour bien d'autres films.

je n'ai vu que Rocco et ses frères et Mort à Venise...

Mort à Venise reste une énigme pour moi, j'ai du le voir trop jeune peut-être et notre réaction avec mon frère avait été la dérision, souvenir d'un truc un peu malsain... à revoir peut être un jour... pour voir ?

Rocco et ses frères vu plus tardivement m'a par contre laissé une impression plus forte , je me souviens de quelques images à défaut de détails de l'histoire et c'est le souvenir d'un vrai bon film. Je reverrai bien aussi.

ce n'est pas non plus un réalisateur qui me titille vraiment a priori.


(il parait qu'il y a Terence Hill dans Le Guépard ! )

La dérision dans Mort à Venise,c'est vrai qu'il y a dans la fin d'Aschenbach une ambivalence entre grandiose et dérisoire,souvent si proches.Mais je pourrai gloser sur Visconti bien longtemps tant son cinéma m'a marqué.

Visconti est inégal. Ou plutot c'est moi qui l'apprécie inégalement.

Deux exemples : Mort à Venise est un des films les plus ennuyeux que j'ai jamais vus.
Je n'aimais pas cette atmosphère de décomposition funèbre. Je n'aimais
pas la musique de Malher, et Dirk Bogarde était mauvais comme un cochon, dégoulinant comme une serpillère.
Meme le gamin qui était censé alimenter sa libido était d'une fadeur invraisemblable.
Par contre j'ai énormémént aimé Le guépard. Il y a comme une osmose entre Visconti, vieille famille aristocrate italienne et adhérent du PCI et
l'auteur du livre, Lampedusa, autre aristocrate libéral et lucide.
L'adaptation du livre est tout à fait fidèle, mais ce n'est pas qu'une simple
illustration. La mise en scène est superbe de bout en bout, les dialogues remarquables, et Burt Lancaster stupéfiant dans le role du prince Salina.

Bellonzo a écrit:

Elise a écrit

Citation :

Tu oublies L'Innocent, qui est un film magnifique

Non Elise je ne mésestime pas L'innocent mais ce billet ne portait que sur les trois films "allemands".Je reviendrai sur Visconti.Merci.Tu as raison en ce qui concerne les DVD.Quant à L'étranger des problèmes de droits insurmontables pourraient bien nous en priver définitivement.

Oups, héhé, je me suis emportée.

Quel est le problème de droits avec L'étranger ? J'ai su récemment qu'il avait fait cette adaptation. Que sais-tu là-dessus ? Ca m'intéresse beaucoup !

Arg bix229 je suis absolument pas d'accord avec toi sur La Mort à Venise. La modération de rigueur m'empêche d'être trop virulente, donc j'en reste à ce simple constat.

Elise a écrit

Citation :

Quel est le problème de droits avec L'étranger ? J'ai su récemment qu'il avait fait cette adaptation. Que sais-tu là-dessus ? Ca m'intéresse beaucoup

Très rapidement il y a eu un litige avec les ayant droit d'Albert Camus et je n'ai aucun souvenir d'avoir vu ce film programmé quelque part au cinéma ou à la télé.

Bix 229 a écrit

Citation :

Deux exemples : Mort à Venise est un des films les plus ennuyeux que j'ai jamais vus.
Je n'aimais pas cette atmosphère de décomposition funèbre. Je n'aimais
pas la musique de Malher, et Dirk Bogarde était mauvais comme un cochon, dégoulinant comme une serpillère.
Meme le gamin qui était censé alimenter sa libido était d'une fadeur invraisemblable.

Là je crois que c'est vraiment excessif mais la modération étant de rigueur je me contenterai de préciser que Bogarde dégoulinant me paraît conforme à l'idée maîtresse de Mann et de Visconti de mêler le grotesque et sublime.Evidemment si tu n'aimes pas la Ve de Malher...Mort à Venise est l'un des films les plus enthousiasmants que j'ai vus.Et crois moi je n'ai aucune tendance à glorifier la décadence ou les attitudes suicidaires.Mais je suis touché par Aschenbach qui sans le savoir dans cette Venise cholérique a rendez-vous avec la perfection(de son point de vue) et la mort.

Ma réaction est certainement excessive, mais ma déception était à la mesure de la
critique dithyrambique du film.

Par contre, on peut s'étonner que je n'aime pas Malher, ou le jeu de Bogarde, ou l'interprète de
l'adolescent, je l'assume.
Ce qu'on ressent face à un film est d'abord essentiellement subjectif, à moins d'etre influencé par la critique au point de ne jamais s'en démarquer.

bix229 a écrit:

Ce qu'on ressent face à un film est d'abord essentiellement subjectif, à moins d'etre influencé par la critique au point de ne jamais s'en démarquer.

J'espère que ce n'est pas là une attaque faussement impersonnelle.

Non Elise.

Et puis je trouve qu'il faudrait éviter de prendre tout jugement négatif pour une attaque personnelle.
De toute façon, j'ai toujours pensé qu'il valait mieux éviter tout jugement critique sur un film ou un livre que les gens aiment.
La preuve est faite s'il en était besoin. Visconti était la seule entorse que
je m'étais permise.
Je m'abstiens désormais...