WhiskyL'affiche est sympathique et on est d'abord surpris par l'austérité du film aux rares dialogues. Pourtant, doucement, on se rend compte que ça ne manque pas d'humour, ni d'autres choses.
Jacobo (Jacques dans le sous-titre ?) est le patron d'une petite fabrique de chaussette. Son frère Herman doit venir du Brésil pour quelques jours, à l'occasion de la pose d'une pierre sur la tombe de leur mère. Herman est aussi dans la chaussette mais avec plus de succès. Afin de sauvegarder quelques apparences, Jacobo demande à Marta, une de ses employées, de tenir le rôle de sa femme...
On suit Jacobo sur le chemin du boulot, on suit Marta de retour du boulot, avec son walkman, une séance de cinéma. Lui est taciturne, renfermé, se protège dans une routine discrètement destructrice, Elle on ne sait pas trop mais elle sourit, elle accepte cette proposition avec une certaine tendresse sans doute.
Donc le film est sobre et taciturne, on voit tout se mettre en place de cette fausse vie de couple et de l'opposition, la rivalité entre les deux frères, Herman étant plutôt blagueur, un peu charmeur, et prêt à développer son entreprise. Puis ils partiront pour un petit séjour au bord de la mer, puis...
Mais ne racontons pas tout le film et revenons à ce "peu de mots" qui est parfois l'apanage d'un certain genre de cinéma, "pour festival", on rentre un peu dans cette catégorie mais sans en avoir trop l'air, c'est aussi le sujet du film ce silence. De même que le film suit son tranquille bonhomme de chemin dans des images un peu défaites mais très bien choisies et autour de trois excellents acteurs. Un air ou plutôt un cousinage avec du Kaurismaki, sans imitation aucune (hommage rendu en interview), par exemple. Trois solitudes différentes, pas de jugement, une subtile tendresse parce que ces gens ont de l'histoire, qu'on ne comprend pas trop, qu'on ne connait pas, mais qu'on sent, et qu'on sent aussi un attachement au pays et surtout au cinéma.
Alors c'est beau, et que le bonhomme évite soigneusement de remarquer un passage chez le coiffeur, ou qu'on assiste à une séance de cinéma du trio, c'est beau, triste et marrant en même temps, avec un soupçon de suspens et d'espoir.
J'ai été étonné dans l'interview bonus de voir que les réalisateurs étaient si jeunes (alors qu'ils mettent si bien en scène la génération précédente ?), ils parlent de leurs difficultés d'accès à certains films (Kaurismaki donc par exemple, mais aussi des films de chez eux qu'ils découvrent dans des festivals en amérique latine ou en europe), de bande-dessiné (ils trouvent un côté comic dans le découpage de leur film) ou de leur façon de travailler très préparée pour permettre d'ajuster ce qui doit l'être.
En tout cas c'est une très très belle réussite. Pas gnangnan, pas gratuitement esthétisante, pas placide non plus, leur regard est aussi critique (ce repli destructeur, quelque chose de l'atmosphère qui colle si bien à ce repli, et puis cette femme marquante en décalage ou lutte discrète). Bref, un très chouette film.
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