Cristian Mungiu

Je suis en peu en retard car l'ayant raté au ciné , je viens seulement de le visionner en dvd.

J'ai remonté le fil et vous avez dit déja beaucoup sur ce film , donc je me contenterai de dire que ce film a une force incroyabe , ce drame est tellement palpable qu'il m'a littéralement scotché devant mon écran.

Le jeu des 2 actrices est excellent , ces dialogues entre elles qui sont presque des chuchotements donnent encore une dimension plus tragique à cette histoire , pas besoin d'éclats de voix , ou d'esbrouffe de caméra virevoletante , seuls des travellings pour suivre la course effénée dans Bucarest d'une des 2 jeunes femmes qui tente désespérément de sauver la situation.

Un huis clos assez étouffant , pas beaucoup d'espoir dans cette Roumanie des années 80 même si les choses ont évolué , dieu merci.

La dernière scène est admirable , c'est le dénouement ; le drame a pris fin,, elles sont attablées au restaurant ,une des 2 jeunes femmes lit le menu avec concentration (comme si rien ne s'était passé) et son amie la regarde sans trop comprendre ce détachement par rapport à ce qu'elles viennent de vivre (elle vient de se démener corps et âme pour aider son amie) , c'est aussi la force de cette amitié qui est au centre du film , au delà de l'aspect politique ou social , c'est vraiment un film magistral.

coline a écrit:

Marko a écrit:

Le plan du fœtus me semble indispensable. Il nous secoue et nous confronte à des réactions contradictoires nécessaires sur un sujet pareil.

Je l'ai trouvé très long et n'ai pas supporté...

C'est marrant parce que moi, je n'ai pas aimé ce plan, mais pour d'autres raisons...
je n'ai pas trouvé ça réel du tout. Peut-être une distance de ma part de penser que ce n'est pas ainsi. J'aurais préféré ne rien voir, plutôt que d'être rabaissée à des questions très terre à terre (savoir si oui ou non c'est bien fait, calculer dans ma tête l'âge du foetus, tout ça).
Marko tu parles de chantage émotionnel... c'est à double tranchant, si on n'y croit pas, ça casse un peu le film (je ne sais pas si je suis claire). Le reste est très réaliste, et vlan, ça tombe un peu comme un cheveux sur la soupe.
L'avantage, c'est que ça sème le trouble selon la perseption.

Il n'empêche que j'avais été toute chamboulée... certaines scènes sont terriblement oppressantes.

Vera Drake... vu en DVD (et donc pas aimé !). Elle est touchante la dame, mais ça ne prend pas. Une fois encore, trop lent, n'aborde pas vraiment les questions éthiques en se limitant à la version drake qui finalement ne s'exprime pas, et la loi qui dit que c'est un crime. Je m'attendais à quelque chose de plus fin, de plus percutant. On attend beaucoup du procès, et puis rien ne vient.
(oui, je donne les même critiques pour tous les films).

Maryvonne a écrit:

coline a écrit:

Marko a écrit:

Le plan du fœtus me semble indispensable. Il nous secoue et nous confronte à des réactions contradictoires nécessaires sur un sujet pareil.

Je l'ai trouvé très long et n'ai pas supporté...

C'est marrant parce que moi, je n'ai pas aimé ce plan, mais pour d'autres raisons...

Je crois surtout que pendant tout le déroulement de ce film, cette histoire d'avortement demeure presque abstraite. On voit des intentions, des transactions, un rapport de force, une jeune femme effrayante et désarmante d'inconscience et de maladresse et une autre lucide, déterminée dans son implication, magnifique. Et puis, il y a ce plan qu'il nous balance en pleine figure comme un retour brutal du réel (un peu comme le plan final dans Valse avec Bashir). .A chacun en fonction de son expérience, ses croyances, de se situer "moralement" ou "humainement" ou les 2 (ça n'est pas forcément incompatible). Et il nous laisse le temps d'y réfléchir. Tu l'as trouvé toc ce foetus mais j'ai toujours été frappé par le fait qu'un corps mort parait souvent irréel.

C'est marrant pour la valse avec bachir, j'y pensais justement,
et effectivement, cela m'avait déplu (et pourtant, ça faisait réel !)

Tiens, on reparle de Christian Mingiu (a-t-il fait autre chose depuis?).
"-une fiction radicale, mais émouvante parce c'est un film qui ne triche jamais (...)"
J'ai éprouvé le même sentiment que Coline : la longueur et l'insistance sur l'image du fœtus est insupportable, mais d'une part -attention- c'est sans doute pour cette raison que le ministre de l'éducation de l'époque souhaitait interdire la réalisation du DVD pour les jeunes (Prix de l'Education nationale) et d'autre part, les gens de ma génération en témoigneront peut-être, c'est la 1ère fois que l'image du fœtus avorté est ainsi donnée, claire, insistante, sans équivoque, représentant ni plus ni moins ce qu'il est à 4 mois, 3 semaines et 2 jours... Il semblerait que le réalisateur ne soit pas spécialement défenseur de l'avortement mais qu'il ai réalisé son film dans la perspective de montrer les tabous et interdits de l'Est à cette période, ce qu'ils généraient de désarroi chez les jeunes. Je pense que voir ces images "radicales", ça peut conduire des ados à utiliser la contraception ou consulter en planning, en tout cas ça a le mérite de ne pas laisser indifférent
- En passant, et ds un autre registre, beau film aussi : Les Bureaux de dieu de Claire Denis. Parce que la parole est libérée chez les filles en consultation (elle ne l'est pas toujours encore aujourd'hui à la maison en France), ou bien oublier une pilule ça peut être aussi le signe d'autre chose qu'un simple oubli... (Nicole Garcia incarnant la psy provoque des questions et des réponses inattendues chez ces jeunes. Bel hommage rendu au Planning.

Babelle a écrit:

Tiens, on reparle de Christian Mingiu (a-t-il fait autre chose depuis?).

CONTES DE L’ÂGE D’OR

Date de sortie : 30 décembre 2009

A voir absolument !

Le film du réalisateur roumain Cristian Mungiu et de ses collègues Hanno Höfer, Rãzvan Mãrculescu, Constantin Popescu et Ioana Uricaru a été présenté dans la catégorie Un certain regard lors du festival de Cannes 2009.

Il s’agit de plusieurs moyens-métrages désopilants ou émouvants qui évoquent l’époque de Ceausescu que la propagande officielle avait nommée "L'âge d'or".
Ces « contes », à l’atmosphère souvent surréaliste, se complètent pour témoigner chacun à leur manière, et par l’humour, de la logique absurde et perverse de la dictature.


extrait1

extrait 2

extrait 3

On va bientôt croire que ce film (4 mois , 3 semaines et 2 jours)se résume à cette scène du foetus ....heureusement ce n'est pas du tout ce que je garde en mémoire , je dois même dire que je l'ai complètemant occulté.

darkanny a écrit:

On va bientôt croire que ce film (4 mois , 3 semaines et 2 jours)se résume à cette scène du fœtus ....heureusement ce n'est pas du tout ce que je garde en mémoire , je dois même dire que je l'ai complètement occulté.

T'as bien raison darkanny.
Le problème c'est que c'est un peu une scènes choc du film.
Mais il est tellement plein d'autres choses.
Me souviens que j'avais trouvé très très justes plein de passages (en chambre Universitaire et les dialogues étouffants avec Monsieur bébé, et la scène finale au resto, assez horrible dans mon souvenir), par contre, me souviens pas tellement d'autres choses...
J'ai relu mon avis, il était pas si emballé que ça, alors que j'aurais tendance à le conseiller... mmm.... Faut que je le revois un de ces 4.

coline a écrit:

Babelle a écrit:

Tiens, on reparle de Christian Mingiu (a-t-il fait autre chose depuis?).

CONTES DE L’ÂGE D’OR

Date de sortie : 30 décembre 2009

A voir absolument !

Le film du réalisateur roumain Cristian Mungiu et de ses collègues Hanno Höfer, Rãzvan Mãrculescu, Constantin Popescu et Ioana Uricaru a été présenté dans la catégorie Un certain regard lors du festival de Cannes 2009.

Il s’agit de plusieurs moyens-métrages désopilants ou émouvants qui évoquent l’époque de Ceausescu que la propagande officielle avait nommée "L'âge d'or".
Ces « contes », à l’atmosphère souvent surréaliste, se complètent pour témoigner chacun à leur manière, et par l’humour, de la logique absurde et perverse de la dictature.


extrait1

extrait 2

extrait 3

J'essaierai d'aller voir ça.

Queenie a écrit:

darkanny a écrit:

On va bientôt croire que ce film (4 mois , 3 semaines et 2 jours)se résume à cette scène du fœtus ....heureusement ce n'est pas du tout ce que je garde en mémoire , je dois même dire que je l'ai complètement occulté.

T'as bien raison darkanny.
Le problème c'est que c'est un peu une scènes choc du film.
Mais il est tellement plein d'autres choses.
Me souviens que j'avais trouvé très très justes plein de passages (en chambre Universitaire et les dialogues étouffants avec Monsieur bébé, et la scène finale au resto, assez horrible dans mon souvenir), par contre, me souviens pas tellement d'autres choses...
J'ai relu mon avis, il était pas si emballé que ça, alors que j'aurais tendance à le conseiller... mmm.... Faut que je le revois un de ces 4.

Pour moi, le repas de famille surtout...; comme dans mes rêves !

Le spectateur plonge dans ce film d’une manière abrupte. Il pourrait être le troisième colocataire d’Ottila et Gabita, colocataire invisible qui ne parle pas, qu’on ne voit pas, mais qui assiste, impuissant et troublé, aux évènements. Il est rare que la sensation d’immersion soit aussi grande. Dommage que l’expérience en partage dans ce film soit si peu réjouissante. Il n’empêche, ça secoue sévèrement.

L’histoire ne commençait pourtant pas trop mal. D’accord, Gabita est enceinte et, dans la Roumanie de 1987, l’avortement est interdit. Néanmoins, de nombreux réseaux permettent de recourir à l’avortement. Gabita est confiante. Elle court certains risques, mais elle connaît des personnes prêtes à l’aider. Son soutien majeur, c’est Ottila, sa colocataire à Polytech. Mais les premières embûches ne tardent pas à survenir : la chambre d’hôtel réservée est soudainement indisponible, il faut en trouver une autre de toute urgence ; Gabita envoie Ottila au rendez-vous qu’elle avait fixé avec Monsieur Bébé, le faiseur d’anges, au grand mécontentement de ce dernier ; Gabita a oublié de prendre une nappe, instrument indispensable à la réalisation propre d’un avortement ; et enfin, Monsieur Bébé ne se satisfait pas de la rémunération que Gabita et Ottila s’apprêtaient à lui verser.
On ne remarque même pas que la tension monte progressivement. L’ambiance du film, dès le départ, nous plonge dans un climat de malaise incertain. Peut-être est-ce dû à la voix fluette et aux mouvements incertains de Gabita, à la solitude d’Ottila ? Et puis, tout semble s’opposer aux démarches qu’Ottila mène généreusement pour son amie. Généreusement ? Il y a bien sûr une envie d’aider sa camarade, mais aussi la détermination à lutter contre une loi absurde, et la projection sur soi-même de l’acte d’avortement. La tension est telle qu’elle fait craindre sans cesse des drames qui, finalement, n’arrivent pas, mais n’amoindrissent jamais la cruauté des sévices physiques et moraux infligés aux jeunes filles.
Certaines scènes sont éblouissantes, telle celle, surréaliste, du dîner organisé en l’honneur de l’anniversaire de la mère du petit ami d’Ottila.
La révélation du fœtus dans la salle de bains peut être sujette à controverse. Elle est le seul indice qui nous porte à croire que Mungiu désapprouve l’avortement tardif de Gabita car cette scène tranche avec le reste du film, peu subtile dans sa suggestion. Sans elle, il aurait été difficile de trouver le moindre élément d’implication morale du réalisateur. Il ne condamne jamais l’acte de l’avortement en lui-même, ne revient pas sur les conditions qui ont abouti à la situation de Gabita, ni sur la manière dont elle a pris sa décision et sur l’influence de ses proches. En revanche, il condamne l’absurdité d’une législation, la cruauté des méthodes employées et, peut-être, l’insouciance et la peur d’une jeune fille délaissée.

Après 24 heures éprouvantes, pas sûre qu’Ottila et Gabita réussissent à avaler une assiette dans laquelle se superposent des abats de bœuf et de mouton. Il leur faudra du temps pour digérer ce qu’elles viennent de vivre. Le spectateur, quant à lui, se retire sur la pointe des pieds…

Bravo !

Tu me donnes envie de le revoir. J'avais trouvé la mise en scène très réussie sur un sujet passionnant et difficile.

Marko a écrit:

Tu me donnes envie de le revoir. J'avais trouvé la mise en scène très réussie sur un sujet passionnant et difficile.

Oui, la mise en scène est époustouflante au point qu'elle arrive à se faire totalement oublier. Rien ne sonne jamais faux. On en oublie que c'est du cinéma. L'illusion marche à merveille et donne vraiment l'impression d'avoir vu un morceau de vie.

Merci, colimasson, pour ces impressions si justes, dans lesquelles je me retrouve. Ta "conclusion":

colimasson a écrit:

Il leur faudra du temps pour digérer ce qu’elles viennent de vivre. Le spectateur, quant à lui, se retire sur la pointe des pieds…

...me rappelle mon propre "desarroi" après le film. Il me semblerait presque mal venu de l'"utiliser" soit pour l'une, soit pour l'autre cause. Mais que tout le monde qui en parle avec tellement de légèreté, pour certains, ou tellement de certitude et jugements pour d'autres, sachent quelle souffrance, quel drame se jouent...