Charles Bukowski

Ce n'est pas uniquement de la poésie, Animal, et ce n'est pas la matière principale. Bukowski raconte ses pérégrinations en Europe, en France et en Allemagne. Là réside l'intérêt du livre d'autant plus qu'il est accompagné d'un choix de photos. Les poèmes sont rassemblés à la fin de l'ouvrage (p. 191-243).

ok. il faudrait que j'essaye un jour ce genre de lecture.  

Shakespeare n'a jamais fait ça :

Je reviens sur cette lecture encore récente à ma mémoire. Je trouve le tout assez intéressant si nous avons lu la correspondance de Bukowski publiée par Grasset en plus de Buk et les Beats de Jean-François Duval et un peu de poésie au passage. Bukowski ne connaît qu'une façon d'écrire et de raconter, c'est bien la sienne... tant en prose qu'à travers sa poésie, Buk est tranchant. Quand nous ajoutons la composante photo, Buk devient à peu de chose près imbattable. Il y avait bien sûr eu Céline et Miller avant lui, mais Buk ajoute un côté surréaliste et givré à l'image qu'il projette. Nous devons rajouter la référence Hemingway et nous obtenons cette mixture de Buk.

Dans l'ensemble, je crois qu'il est possible de dire que Bukowski est un excellent nouvelliste et poète. Dans les romans, il n'est pas aussi transcendant à mon sens. Il excelle en outre dans les formes du journal et des mémoires. Son oeuvre est en majorité autobiographique et c'est son créneau.

Voici un extrait :

Charles Bukowski, Shakespeare n'a jamais fait ça, 2012, Paris : 13e note, p. 98-99. a écrit:

J'ai envoyé le premier poème tandis qu'en face de moi le jeune Allemand fluet s'époumonait toujours. Rapidement tiré en arrière par plusieurs personnes, il a continué de hurler mais désormais d'un peu plus loin. J'avais intérêt à traiter mes détracteurs avec tendresse. Une fois, faisant une lecture dans une boîte de nuit, j'avais lancé en réponse à une attaque verbale : «Foutez-moi ce type à la porte!» J'avais juste voulu déconner avant d'enchaîner sur le poème suivant, mais plus tard j'appris que trois appariteurs musclés, après avoir arraché l'intéressé à son siège, l'avaient fait sortir par la porte du fond et flanqué dans une poubelle.

Je lisais, parlais au public entre les poèmes et buvais beaucoup de vin parce que c'était gratuit. Être payé pour boire, c'était encore plus miraculeux qu'être payé pour baiser. J'ai continué à lire et à boire.

Ma première lecture de Bukowski fut Factotum, à ce jour ça reste ce que je préfère de lui, peut-être justement à cause de la découverte, de l'effet de surprise. C' est un auteur qui a changé mon rapport à la lecture, et à l'écriture. Il a un liberté de ton totale, et en même temps c'est souvent drôle (même si je ne partage pas son attrait pour les beuveries ). C'est aussi un auteur qui fait réfléchir, car il appuie là où ça fait mal, pointe du doigt les incohérences de la société. C'est aussi un auteur qui je pense, en a inspiré plus d'un et en inspire encore.

Je suis en train de lire Un carnet taché de vin, un recueil de nouvelles et chroniques inédites, et c'est jouissif de le retrouver.

Citation :

Los Angeles regorge de hors-la-norme, tous plus bizarroïdes les uns que les autres, croyez-moi sur parole. Ils sont plus nombreux qu’on ne le pense ceux qui, nullement pressés de pointer au chagrin, ne seront jamais coincés sur les périphériques dès 7 heures du matin, ou ceux qui, dépourvus d’un emploi régulier, sont résolus à n’en chercher aucun. Entre imiter le commun des mortels et crever la bouche ouverte, ils ont choisi. Et devinez quoi.
Qu’ils le soupçonnent ou non, ce sont tous des génies engagés dans une guerre d’usure contre les fausses évidences, des génies ne connaissant qu’un seul type de nage, celle que l’on pratique à contre-courant, des génies préférant à une vie bien rangée l’herbe, le vin, le whisky, l’art, le suicide. Et je fais corps avec eux.
Nous ne sommes pas prêts à rejoindre le troupeau ou à jeter l’éponge.
Lors de votre prochain passage à l’Hôtel de Ville, ne laissez pas la mélancolie vous envahir à la vue de ces gonzes endimanchés et maniérés. Dites-vous qu’il existe un monde parallèle peuplé de délirants, d’affamés, d’ivrognes, de pitres miraculeux. J’en ai rencontré beaucoup. Et ce n’est pas fini. Je le répète, je suis l’un d’eux. Cette ville n’est pas encore tombée aux mains de nos ennemis, ces morts répugnants qui nous apportent la mort.
Les hors-la-norme résistent, la guerre se poursuit.
Merci.

Dans ses romans il me reste à lire Pulp, Hollywood et Le postier. Les nouvelles, contes, et journaux, j'ai presque tout lu, quant à la poésie faudra que je me procure un recueil en anglais.

Souvenirs d'un pas grand-chose:

Du très bon Bukowski, une très bonne clé d'entrée pour comprendre la genèse de l'homme, son évolution depuis l'enfance, jusqu'à l'entrée dans l'âge adulte. Brut, cru, violent, comme toujours, âpre mais aussi une tendresse sous-jacente, un désespoir lucide.

Et de l'humour aussi, une lecture agréable dans son style habituel, simple et direct. Un portrait de l'Amérique de l'entre deux Guerres au vitriol. Chinaski/Bukowski se joue de tout, ne trouve aucun intérêt au monde qui l'entoure, il n'aspire qu'à ne rien foutre, se terrer dans un coin, boire, et écrire.

merci Arturo, je regarderai ce dont dispose ma médiathèque, je n'ai lu que "Journal d'un vieux déguelasse"

Pulp:

Louis-Ferdinand Céline n'est pas mort en 1961. On l'a aperçu à Los Angeles. Et une pulpeuse créature qui n'est autre que la Mort charge un «privé» minable, Nick Belane, de le retrouver : «Je veux m'offrir, dit-elle, le plus grand écrivain français.» Ainsi commence l'ultime roman du génial et intenable auteur des Contes de la folie ordinaire et d' Au sud de nulle part. Une enquête échevelée, jalonnée de saouleries et de cadavres, d'autant plus compliquée que le malheureux Belane doit aussi retrouver le Moineau écarlate et pister une nommée Cindy qui roule en Mercedes rouge...

Dernier roman de Bukowski, anticipait-il la mort s'approchant? Sans doute.
C'est différent de ses précédentes oeuvres, moins ouvertement sombre.
Il a pris le pari de l'humour déjanté, pour tourner en dérision le polar et la littérature de gare, et la mort. Rien que le nom du personnage est ridicule, et pourrait être sorti d'une série B: Nick Belane!

Pour moi le pari est presque réussi, difficile en effet de tenir tout un récit, même court, avec des loufoqueries sans lasser. Mais c'était très agréable, et parfois franchement désopilant.