Clara Dupont-Monod

Au sujet de La passion selon Juette, je dois dire que je ne l'avais pas trop aimé. Je m'attendais au parcours d'une femme exemplaire, pleine de courage...c'est sûr que cette Juette est une vraie personnalité, mais beaucoup trop illuminée à mon goût. Et c'est plus ça que j'ai retenu. Une pauvre fille mariée trop tôt, puisque dès l'adolescence. Ce qui n'est pas rare il me semble à cette époque !
Elle se "rebiffera" à sa façon en abandonnant son enfant pour s'occuper des lépreux. Il y a beaucoup de courage dans cette Juette, de coeur aussi, mais surtout un manque total de responabilités.

Aériale, je n'ai pas voulu mettre de commentaires dans ce livre, surtout après ceux élogieux de Chappy.

albane a écrit:

Aériale, je n'ai pas voulu mettre de commentaires dans ce livre, surtout après ceux élogieux de Chappy.

Mais pourquoi un commentaire??
Ils sont ici nos commentaires Albane !fautt vraiment que je m'habitue ...ceci dit c'est plus court à taper
Le but était d'avoir trois mots de vous, juste une signature ...c'était tout!
Sacrée Albane je reconnais là ton originalité...

Je dois vous avouer quelque chose : j'avais peur d'entamer ma lecture de La passion selon Juette.
J'ai lu tellement de bonnes critiques, j'ai écouté tant d'interviews de l'auteur que j'avais finalement l'impression d'avoir déjà lu ce livre avant de le commencer.

Et bien mes craintes n'étaient pas du tout fondées car j'ai beaucoup apprécié ce roman.
Récit à deux voix alternant celle de Juette et de Hugue de Floreffe, son ami et confident, Clara Dupont-Monod nous trace le parcours de cette jeune femme du 12e siècle qui dit non.
Non à l'église, non à ses parents, non à son mari, non à la maternité, non à la condition féminine de l'époque, non aux hommes, non à l'exclusion. La passion et le jusqu'au boutisme de Juette sont tempérés par la grande générosité et la compassion de son ami Hugue.

Quelques extraits :

Citation :

[p.75]
On ne peut pas être aussi poreux vis-à-vis du monde sans y laisser un peu de soi.

Citation :

[p.111]
Hugues reste un instant immobile. Puis il s'assied doucement face à moi. Il n'a pas regardé mon gros ventre. Il joint ses grandes mains sur la table. Ses mains qui ont recouvert mon visage, de quoi sont-elles capables ? Qu'il porte une robe, qu'il voue sa vie à Dieu : Hugues est un homme. Je suis enfermée dans la maison, loin des regards, avec cette force qui peut me rompre. Il l'ignore peut-être, il ne le souhaite pas sans doute, mais il le peut. Je n'ai aucun moyen de m'échapper.

sentinelle a écrit:

Je dois vous avouer quelque chose : j'avais peur d'entamer ma lecture de La passion selon Juette.
J'ai lu tellement de bonnes critiques, j'ai écouté tant d'interviews de l'auteur que j'avais finalement l'impression d'avoir déjà lu ce livre avant de le commencer.

Et bien mes craintes n'étaient pas du tout fondées car j'ai beaucoup apprécié ce roman.

[/quote]

Je suis contente de lire ce commentaire Sentinelle...

Moi aussi...."La passion selon Juette" est une vraie réussite et un bonheur à lire
Il est vrai qu'il est toujours angoissant d'avoir entre les mains un roman qui fait l'unanimité autour de soi. Peur de ne pas aimer, peur d'être trop encombré par les avis et les enthousiasmes de chacun. C'est une gageure d'ouvrir de tels romans sans craindre une possible déception!!!

Tout à fait Chappy.
C'est la première fois que je lis un roman de Clara Dupont-Monod mais je crois que je ne vais pas en rester là

sentinelle a écrit:

Tout à fait Chappy.
C'est la première fois que je lis un roman de Clara Dupont-Monod mais je crois que je ne vais pas en rester là

C'est aussi ce que je me suis dit, autant à la lire qu'à l'écouter parler.
Elle est l'auteur de trois romans :
- Eova Luciole (1998), un récit parabolique dont l’héroïne se voit pousser de magnifiques ailes dans le dos .
- La Folie du roi Marc (2000) pour lequel elle puise dans la légende de Tristan et Iseut (objet de sa thèse universitaire) .

Je les ai inscrits sur ma LAL depuis quelques temps déjà...

Je viens de finir "la passion selon Juette"

J'ai abordé le livre avec un à priori car je suis plutôt hermétique à des écrits sur la religion(les Saints etc....) (même dans des romans).
Mais(eh oui) j'ai été emportée par le tempérament de cette Juette. J'ai eu plaisir à lire ce livre magnifiquement écrit.
j'ai beaucoup apprécié l'alternance des récits de Juette et Hugues.
je ne pouvais que la suivre dans cette révolte et l'accompagner jusqu'au portes de la folie.

à tantôt

Bédoulène a écrit:

Je viens de finir "la passion selon Juette"

J'ai abordé le livre avec un à priori car je suis plutôt hermétique à des écrits sur la religion(les Saints etc....) (même dans des romans).
Mais(eh oui) j'ai été emportée par le tempérament de cette Juette. J'ai eu plaisir à lire ce livre magnifiquement écrit.
j'ai beaucoup apprécié l'alternance des récits de Juette et Hugues.
je ne pouvais que la suivre dans cette révolte et l'accompagner jusqu'au portes de la folie.

à tantôt

Je suis contente que tu aies aimé après avoir surmonté tes réticences, d'autant qu'elles étaient infondées...Juette n'est pas une sainte!...
Il est vrai que son ami est un moine et que la religion est omniprésente dans son siècle...

Oui Coline religion omniprésente.

mais je ne regrette pas de m'être bousculée.

à tantôt

J'ai lu, grâce au cerclage et à Aériale, que je remercie, La passion selon Juette.

Juette est donc une sorte de sainte laïque , dont l'histoire racontée par son ami le prêtre Hugues de Floreffe, est parvenue jusqu'à nous car elle a attiré l'attention de Georges Duby.
Clara Dupont-Monod raconte son histoire non en historienne, mais en romancière. Pourtant, le Moyen-Age est bien là, avec sa brutalité et la chape de plomb que l'Eglise fait peser sur plus particulièrement les femmes. Femmes soumises à leurs parents, leurs maris, aux prêtres..
L'histoire, vous l'avez tous très bien racontée. Juette rêve- quelle audace- d'"un monde sans pape et sans mère, sans autre loi que la sienne". C'est d'une liberté insensée à l'époque ou l'hérésie se paye du bûcher.
La voix de Juette rejoint celle de tous ceux, en tous temps et en tous lieux ,qui ont osé mettre leur vie en jeu plutôt que de se soumettre. Celle du panthéon des femmes révoltées. Ce sont des voix qui nous touchent parce qu'éternelles, universelles . C'est le Moyen âge en France, c'est maintenant en Afghanistan.

Euh...allez, je vous le dis, je ne l'ai pas terminé.
Il me restait pourtant peu de pages à lire, une vongtaine mais cela faisait déjà quelque temps que je lisais en diagonale. J'ai quand même parcouru la dernière partie pour savoir ce qui lui arrivait à cette Juette.

Je pense que d'une part, j'ai lu ce roman à un mauvais moment et n'ai pas réussi à entrer dans l'histoire.
D'autre part, je ne suis peut-être pas assez féministe.
Enfin, le Moyen-Age, je le confirme, est loin d'être ma période favorite.

Je n'ai pas tout compris à Juette; qu'elle n'accepte pas le mariage à 13 ans, évidemment, c'est compréhensible, de même qu'être enceinte à 15. Mais rejeter tous les hommes sauf une certaine catégorie me semble bien réducteur. D'autant que ce mari n'est à aucun moment décrit comme un être insensible, rustre ou autre; là j'aurais pris différemment le roman, enfin je pense.

Je ne saurais dire pourquoi, Juette m'a plutôt exaspérée, sans doute que le style de CDM, abrupt, au présent, y est pour quelque chose. Juette sombre dans une sorte de folie qui m'échappe.

Bizarrement, ce ton, cette haine m'ont nettement plus dérangée, limite choquée et mise mal à l'aise que le vocabulaire cru et explicite de Scott Heim (je compare car ce sont 2 livres que j'ai lus à la suite).

J'ai évidemment fait le parallèle avec la conditions de certaines femmes dans le monde, actuellement, et c'est bien cela qui m'a touchée.

C'était LA critique négative de Juette, avec celle de Marie-Laure qui a tout lu, elle!

fini la Juette.

Je ne suis pas aussi tourneboulée que vous. Et sans aller rejoindre complètement l'avis de sophie, je rejoindrais celui de Domreader. Juste parce que cette histoire est racontée simplement, qu'elle se suit avec plaisir. Mais elle ne m'a déclenché des élans passionnels.

J'ai même limite préféré les passages où le narrateur est le moine. Il a regard vif, entier, complètement vivant sur Juette et sur qui l'entoure. Alors qu'lle, elle plâne un peu, s'enferme. Et l'écriture De DupontMonod est assez... légère... presque aussi distante que Juette je trouve. Quand j'avais entendu l'auteur parler, son enthousiasme, sa passion, j'avais cru le retrouver dans son écriture, mais je ne trouve pas. J'ai l'impression que tout est maîtrisé au fil d'une plume élégante et tranquille.
Mais, plus Juette affronte l'extérieur, plus elle lutte contre les hommes, plus sa passion devient mystique, plus elle prend consistance et l'écriture avec, je trouve. et là, j'étais pas mal scotchée dans les dernières pages.
Je n'ai pas pu m'empêcher de faire un parallèle avec Jeanne D'Arc, et les images du film de Dreyer me revenaient de façon récurrente lors du procès, de ses moments d'extase. Dreyer aurait fait un film magnifique avec Juette. L'expressionnisme aurait fait un film magnifique avec Juette. C'est une écriture d'images, de très belles images. Mais survolées.

Queenie a écrit:

Je ne suis pas aussi tourneboulée que vous. Et sans aller rejoindre complètement l'avis de sophie, je rejoindrais celui de Domreader. Juste parce que cette histoire est racontée simplement, qu'elle se suit avec plaisir. Mais elle ne m'a déclenché des élans passionnels.

Je n'ai pas non plus été tourneboulée! Difficile de suivre cette histoire au point de le devenir d'ailleurs.
Mais j'ai aimé l'écriture à la fois passionnée et lucide de l'auteure, sa façon de nous décrire Juette, de nous la rendre proche dès les premières lignes, pour ensuite garder un regard plus objectif vers la fin.

Quand tu dis Queenie:

Citation :

J'ai même limite préféré les passages où le narrateur est le moine. Il a regard vif, entier, complètement vivant sur Juette et sur qui l'entoure. Alors qu'lle, elle plâne un peu, s'enferme. Et l'écriture De DupontMonod est assez... légère... presque aussi distante que Juette je trouve.

Je crois que la vision de Hugues est salutaire pour ne pas se retrouver enfermés nous aussi dans cet extrémisme qui aliénie Juette. Lui garde la bonne distance, celle du lecteur, et s'il n'y avait pas eu cette légèreté dont parle Queenie, la lecture nous aurait sans doute parue trop étouffante ou pénible.

Car Juette est tout de même une illuminée difficile à saisir totalement. Je peux comprendre Sophie qui note

Citation :

Je ne saurais dire pourquoi, Juette m'a plutôt exaspérée, sans doute que le style de CDM, abrupt, au présent, y est pour quelque chose. Juette sombre dans une sorte de folie qui m'échappe.
Bizarrement, ce ton, cette haine m'ont nettement plus dérangée, limite choquée et mise mal à l'aise

.
Oui, on peut ressentir un malaise. L'héroîne s''enferme dans une instransigeance qui forcément nous éloigne d'elle. Mais en même temps elle reste à nos yeux assez "consistante" pour devenir l'emblême d'une certaine libération de la femme à cette époque et ouvrir quelques brêches face à l'intolérance.

Alors pour moi un roman réussi qui se situe juste à la bonne distance entre le portrait presque intime et l'histoire avec un grand H!

Ce que j'ai lu dans l'histoire de Juette c'est comment s'épanouit la folie lorsqu'elle est latente et peut se nourrir de drames.
Juette, enfant, est déjà très rebelle...
Or, enfant elle est mariée...Enfant elle doit enfanter!...
Sa folie à elle se traduira par un fanatisme religieux qui nous dérange...
Mais nous ne pouvons porter de jugement sur le résultat qu'ont produit ses souffrances...
Hugues de Floreffe n'en porte pas .
Clara Dupont-Monod non plus. Ni admiration ni détestation.
C'est son histoire, elle n'est pas à ré-inventer, Clara Dupont-Monod nous donne à la connaître...
Et son livre est un magnifique portrait de femme qui nous inspire des sentiments très divers.

NB: Queenie a pensé à Jeanne d'Arc...
Et moi j'ai fait un autre parallèle: même si leurs histoires et leurs folies sont différentes, j'ai pensé que Juette avait quelque chose de proche avec Camille Claudel.