Delphine de Vigan

J'ai lu le livre de Delphine De Vigan. Il est effectivement très beau. Elle parle à plusieurs reprises de "l'intranquille" de Garouste qui l'a beaucoup marqué, qui l'a sans doute aidé à mieux comprendre ce qu'a vécu sa mère. J'ai été un peu gênée au début du livre quand Delphine De Vigan raconte l'enfance de Lucile en narratrice omnisciente comme s'il s'agissait d'un personnage de fiction. Plus tard elle adopte définitivement le Je et j'ai trouvé que ça donnait plus de force, de sincérité à son propos.

odrey a écrit:

J'ai lu le livre de Delphine De Vigan. Il est effectivement très beau. Elle parle à plusieurs reprises de "l'intranquille" de Garouste qui l'a beaucoup marqué,

ça n'est pas étonnant. Elle a du être influencée par ce livre remarquable et je vais voir comment elle aborde le sujet elle-même.

J'espère pouvoir lire "Rien ne s’oppose à la nuit" très bientôt. J'y travaille.

Marko a écrit:

Belle unanimité! Et forcément très envie de le lire... Un sujet qui revient souvent ces dernières années, celui de la bipolarité qui est aussi bien décrite par ceux qui en souffrent que par leurs proches. Il faut dire que c'est une pathologie mentale qui exacerbe toutes les émotions humaines, de l'exaltation extrême à la souffrance morale la plus profonde, comme un miroir déformant de chacun d'entre nous. Et une pathologie également si souvent reliée à la créativité du fait de l'hypersensibilité qu'elle génère. Les derniers en date pour moi étaient "Un mensonge sur mon père" de John Burnside et "L'intranquille" de Garrouste, 2 auteurs eux-mêmes bipolaires. Je suis curieux de voir ce que Delphine de Vigan décrit de ce qu'elle a observé chez sa mère.

La femme de l'allemand de Marie Sizun est aussi très intéressant sur ce sujet

Je rejoins vos avis sur Rien ne s'oppose à la nuit, un livre très touchant, très beau. Une histoire de famille dont les membres sont à la fois aimants et destructeurs.

Les Heures souterraines
Le livre de poche

Citation :

Je dois me rendre à l'évidence que sur ce roman je suis bien la seule à m'être copieusement ennuyée.

Et bien non!! Alors, je ne sais pas à quoi c'est dû, au style déjà, très plat et monotone, mais aussi au fait d'avoir voulu alterner deux histoires qui n'ont absolument rien en commun-bref, voilà un roman qui ne m'a pas du tout émue. Et pourtant, il partait pas mal , et il y a quelques notes qui sonnent vrai, dans tout ce qui concerne le harcèlement au travail, la honte qui empêche d'en parler et la dépression. L'autre personnage, je l'ai trouvé absolument inintéressant.

Marie a écrit:

Citation :

Je dois me rendre à l'évidence que sur ce roman je suis bien la seule à m'être copieusement ennuyée.

Et bien non!! Alors, je ne sais pas à quoi c'est dû, au style déjà, très plat et monotone, mais aussi au fait d'avoir voulu alterner deux histoires qui n'ont absolument rien en commun-bref, voilà un roman qui ne m'a pas du tout émue.

Ah la petite phrase en haut doit être de moi (j'ai vérifié) et je suis bien aise de constater qu'on est au moins deux, Marie. Delphine De Vigan est en passe de devenir une icône, c'est à peine si on ose la critiquer (j'ai relu les avis suite à mon post à l'époque et ça m'a bien amusée)

Je viens d'attaquer vaillamment Rien ne s'oppose à la nuit. C'est une lecture partagée sinon j'aurais passé mon tour. Pour l'instant, bien que le sujet me paraisse encore une fois un peu trop complaisant
je reconnais qu'elle touche davantage. Mais je crains la suite...A suivre!

Ce livre est très personnel , ce qui peut être un inconvénient avec un coté "je montre à quel point je suis malheuruese mais courageuse", mais qui là sonne plutot pas mal (sans être génial pour autant àmon avis). Et c'est sans doute une oeuvre à part pour cela - même dans l'oeuvre de De Vigan (dont je n'ai rien lu d'autre avant)

-Rien ne s'oppose à la nuit-

J'ai longtemps rechigné à m'attaquer à ce livre. Et pourtant. Superbe titre (emprunté à la chanson de Bashung, "Osez Josephine" comme elle le précise. Un bon point déjà!) Superbe couverture (j'ai fait comme traversay, je retournais souvent le livre pour voir la photo et tenter de percer le mystère de cette très belle femme) et avis unanimes de part et d'autre. Pour être honnête, je ne peux que vous rejoindre dans l'ensemble de vos commentaires: Humilité, distance, sensibilité et maîtrise font de cet hommage un livre émouvant dénué de trop de pathos. Mais je suis comme Odrey, j'ai commencé à vraiment être touchée lorsque Delphine De Vigan s' implique réellement. Ses rapports avec Lucile et sa recherche d'amour sont effectivements poignants, on ne peut rester insensible. Aucune rancoeur comme vous le notez, elle ne cherche pas à tout expliquer, juste à comprendre, et c'est là son point fort, c'est indéniable.

Le reste, la première partie m'a un peu perdue en fait. J'étais à la fois prise par cette saga invraisemblable (jusqu'à chercher sur you tube des vidéos retraçant l'emission mentionnée de l'inra) autant que dérangée quelque part, comme si ces révélations ne me concernaient pas, après tout. Réflexe de pudeur peut-être, ou excés de malheurs qui nous glacent lorsqu'on les découvre, il y a toujours un moment où on se demande si on n'est pas voyeur, quand un écrivain nous prend ainsi à témoin. Mais De Vigan évite les fautes de goût, et limite les déballages excessifs. On sent derrière tout ceci une quête réelle, un grand besoin d'amour envers cette mère qu'elle a manquée et qui n'a jamais pu se définir vraiment, ne connaissant elle même que des fulgurances de bonheurs. C'est toujours dramatique de constater un tel gâchis. Lorsque cette jeune fille devenue adulte se retrouve chez le psy, assise sur les genoux de sa mêre et éclate en sanglot, on a tous le coeur en miettes.

Des images qui restent, une voix qui touche, cette fois l'auteure a réussi son pari, et il est très probable que cette libération l'amène à plus d'authenticité dans ses prochains écrits. C'est ce que je lui reprochais dans les précédents, on la sentait bridée, manquant (pour moi) la cible. Ici, elle est allée chercher à la source, elle en est forcément plus crédible et combien plus touchante.

Bah voilà, on a le même ressenti. Moi aussi j'ai aimé la façon dont elle raconte sa relation avec sa mère. Et le titre en référence à Bashung, j'aime aussi.

un livre qui pour moi laisse son sillage

Rien ne s'oppose à la nuit

Citation :

« Et puis, comme des dizaines d’auteurs avant moi, j’ai essayé d’écrire ma mère.
Il serait cet élan, de moi vers elle, hésitant et inabouti.
Parfois, je rêve au livre que j’écrirai après, délivrée de celui-ci. »

Un auteur a comparé l’écriture d’un livre à un accouchement douloureux.
Il y a la gestation, longue, parfois difficile à vivre, et puis au bout le « résultat » et celui-ci est rarement ce qu’on avait imaginé.

Ecrire un « avis » sur un livre est aussi un cheminement, ne pas trop en dire, mais donner son ressenti.

Au moment de partager mes impressions sur « Rien ne s’oppose à la nuit », je suis à deux doigts de me taire, de ne rien en dire. Sans doute parce que ce livre m’a interpellée.

Delphine de Vigan a « raconté » sa mère, Lucile.
Elle a « négocié avec elle-même » et accepté l’idée d’écrire ce livre.
L’homme qu’elle aime lui a dit « quel besoin avais tu d’écrire ça ? » Elle a répondu qu’elle ne pouvait rien écrire d’autre…
Il lui fallait faire ce parcours, seule avec elle-même, pour pouvoir continuer sa route. Elle a interrogé la famille, demandé à chacun d’accompagner sa démarche.

Tout au long de son récit, elle parle de sa mère, le plus souvent elle l’appelle Lucile (était-ce une façon de s’en « détacher » pour mieux la raconter ?)
Elle explique la douleur de sa mère qui les a construits, habités, façonnés.
Elle développe son « besoin » d’écriture, sa nécessité de mettre des mots sur la vie de sa mère pour mieux la connaître même si ….

Citation :

« L’écriture ne peut rien, elle interroge la mémoire, permet de poser des questions… »

Je viens de finir ce livre, je suis restée, volontairement, en retrait, de peur que son histoire me "bouffe", me prenne les tripes...
Alors pourquoi l'ai je lue?
Pour comprendre comment elle avait cheminé vers la guérison ....

Jours sans faim

Publié à l’origine sous un pseudonyme, Jours sans faim paraitra ensuite sous la véritable identité de son auteur. Delphine de Vigan se cache derrière Laure, la narratrice, pour expliquer, son combat contre l’anorexie. Ce texte est court ; l’écriture est incisive, presque précipitée. J’ai perçu dans cette façon d’écrire le souffle de vie qu’il manquait à Laure.
Je ne peux m’empêcher de faire le parallèle entre ce premier roman, et le dernier ouvrage de l’auteur. Sa mère y est présente, mais de manière radicalement déférente. Ici Laure va s’attacher à comprendre ce qui l’a amenée à l’anorexie ; sa relation avec sa mère, le passé de sa mère y est pour beaucoup. Dix ans plus tard, c’est un rapport apaisé à la mère. C’est comme un cycle qui s’achève, un niveau départ.
J’ai apprécié l’absence de misérabilisme, la pudeur pour dire les choses, pour faire part de sa souffrance au quotidien, de sa lutte contre son double - Lanor, et, de son envie malgré tout de se sortir de là.
Ce premier ouvrage, contient déjà la sensibilité et la faculté à émouvoir que j’ai appréciée dans Rien ne s’oppose à la nuit.

Je suis en train de le lire (page 150 environ) : cela devient terrifiant, et terrifiant de beauté profonde.
(Rien ne s'oppose à la nuit - mince, mimi a posté à la même minute.)

Eh bien, encore une fois je vais détonner un peu : j'ignorais tout de ce livre, n'avais lu aucune critique ; j'ai beaucoup aimé les 250/300 premières pages, puis lorsque j'ai compris - forcément - que c'était un récit personnel, étrangement je me suis senti moins impliqué que dans ce que j'avais d'abord pris pour une fiction. Comme si l'individuel enlevait de la force, rapprochait le sujet de - le terme est trop fort - "l'anecdotique". J'ai alors ressenti comme une pesanteur dans cette accumulation de noirceur, j'ai tiqué à ce que j'ai à partir de là perçu comme des variations sur un thème unique. C'est juste comme une baisse progressive d'intérêt de ma part. Je suis quand même, n'exagérons pas, allé au bout et comme vous j'ai longuement regardé la photographie de couverture après avoir refermé le livre, qui reste un livre fort. Je tenais néanmoins à vous dire ce bémol.