Un musicien, une oeuvre

Helene Grimaud: Préface du disque Bach

Pour Tolstoï, aimer, c'est préférer autrui à soi-même. Cette pensée nous éclaire sur Bach, l'un des coeurs, au sens fort, les plus confiants dans l'amour qui soit. Il a tant aimé de tout son être, de la manière la plus charnelle, la plus incarnée qui fût, qu'il nous donne à jamais à entendre quelque chose qui s'apparente à la révélation de la vie, au travers de l'effacement de son nom, ce qui explique son universalité: comme si sa musique était la conscience de la musique elle-même, son assurance et sa promesse. Nul peut-être- Shakespeare excepté- n'a su transformer comme lui chaque atome de l'univers, chaque éclat du monde en une émotion aussi profonde et aussi intime.

Bach est le compositeur qui unit, dans leur vérité, la tendresse plénière de la prière et l'écho solitaire du divin. Tour à tour, il saisit l'espace et il en fait une courbe infinie, il prend le temps et il en fait une possibilité d'avenir, il s'empare d'une danse et ce sont des fiançailles que l'on célèbre. Nous qui voyons si mal, il nous rend la vision. A croire qu'avec Bach, il n' y a pas de limite, qu'il nous enjoint à le retrouver de plain-pied, dans cette pratique de l'amour qui tient à l'obligation pour les vivants d'agrandir leur vie, de la ramener au foyer du coeur.

Aujourd'hui, l'urgence de l'heure n'est plus aux controverses. On se tromperait à vouloir ne faire de Bach qu'un homme de son temps témoignant pour celui-ci- car Bach est toujours à venir. Dès son vivant, il échappa à ses contemporains qui virent en lui un reliquat du passé, non un prophète pour tous les temps et tous les hommes. Quoi de plus naturel, d'ailleurs, de le retrouver à la source de Liszt, de Busoni ou de Rachmaninov? Bach fut tel une île au milieu du fleuve, libre et inébranlable au milieu des courants et contre-courants, alimenté du côté de l'origine et porté du côté de l'espérance. Entre ces deux bornes un chemin symbolique qui est la signature de toute existence. Bach ne connut aucun écartèlement. Il sut construire des ponts. Il nous montre toujours, en un éclair qui a la clarté de la Transparence, comment réconcilier la douleur des jours et l'éclatement de la lumière.

Marko a écrit:

Helene Grimaud: Préface du disque Bach

Il nous montre toujours, en un éclair qui a la clarté de la Transparence, comment réconcilier la douleur des jours et l'éclatement de la lumière.

...Hélène Grimaud me dit pourquoi j'aime autant écouter la musique de Bach...

coline a écrit:

Marko a écrit:

Helene Grimaud: Préface du disque Bach
Il nous montre toujours, en un éclair qui a la clarté de la Transparence, comment réconcilier la douleur des jours et l'éclatement de la lumière.

...Hélène Grimaud me dit pourquoi j'aime autant écouter la musique de Bach...

Ce disque est à tomber par terre! si si!

Marko a écrit:

Gros coup de coeur pour le nouvel album "Bach" d'Helene Grimaud La transcription pour piano de Busonide la Chaconne (Partita pour violon n°2) est une de mes grosses claques musicales de ces derniers mois! Une plage de 14'31 d'une virtuosité et d'une complexité impressionantes. Helene Grimaud est impériale! C'est vraiment très très beau! Elle dit elle-même que c'est une des oeuvres de Bach les plus intenses.

La Chaconne par Hélène Grimaud (extrait): https://www.youtube.com/watch?v=1JZzAupJap0
Ici par Fazil Say au piano: https://www.youtube.com/watch?v=WP-FCztap74
Et Viktoria Mullova au violon: https://www.youtube.com/watch?v=lnOzyvQyevM

En réponse, juste ce smiley ...

A propos de Viktoria Mullova, je l'ai découverte en concert il y a quelques années à la sortie de son album Shostakovich (1e concerto) /Prokofiev (2e concerto). Ce disque est devenu un des enregistrements de référence pour Shostakovich. Incontournable! Et après, il ne reste plus qu'à trouver tous les disques de cette grande violoniste...

Hélène Grimaud à propos de la Chaconne dans la transcription de Busoni:

C'est une danse de vie et de mort. On sait que Bach l'a composée après la mort de sa première femme, et bien que sa musique soit beaucoup moins le reflet de sa vie personnelle que ce n'est le cas avec d'autres compositeurs, il est important de savoir ce qu'il vivait à un moment donné. C'est le mouvement le plus puissant qu'il ait jamais écrit, comparable à l'architecture d'une cathédrale, chaque variation éclairant la nef avec la lumière filtrant à travers un vitrail différent. En la jouant, on a le sentiment de danser avec son ombre. La fin est un autre mystère: au lieu de conclure, elle donne à l'interprète toutes les directions possibles.

Je suis allée chercher la définition (que je ne connaissais pas... )...

La chaconne, ou plus rarement chacone (on trouve aussi le nom italien ciaccona) est un genre musical pratiqué aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Initialement, la chaconne est une danse populaire d'origine hispanique ou hispano-américaine et la pièce musicale chantée qui l'accompagne.
Transplantée ensuite dans d'autres pays d'Europe, elle y devient une danse de caractère noble puis est abordée par les instruments, en orchestre ou solistes.
C'est alors une pièce de grandes proportions, en mesure binaire ou ternaire, lente et solennelle, basée sur la répétition et la variation d'un thème comprenant en général 4 ou 8 mesures avec reprise.
L'origine en serait la forme « rondeau » (autre danse) avec refrain et couplets, ces derniers réalisant des variations du refrain, d'où l'impression de répétition.

coline a écrit:

Je suis allée chercher la définition (que je ne connaissais pas... )...

La chaconne C'est alors une pièce de grandes proportions, basée sur la répétition et la variation d'un thème comprenant en général 4 ou 8 mesures avec reprise.

La Chaconne de Bach se referme sur elle-même après diverses variations de la plus sombre à la plus "dansante" mais en ménageant une ouverture finale comme une invitation à poursuivre (des improvisations par exemple).

Le principe des "variations" a souvent été utilisé par les compositeurs, même contemporains, pour citer un thème musical d'un autre musicien en le transformant de manière souvent virtuose. Bach était le roi des variations sur ses propres thèmes!

Ah, la magnifique Hélène Grimaud... Et Rachmaninov!
Pour la Chaconne de la Partita en ré mineur de Bach, il faut s'adresser à un spécialiste, eXPie!
Et écouter ces transcriptions : Brahms, Busoni et Rudolf Lutz.




ici

C'est de saison..
L'Oratorio de Noël de Jean Sébastien Bach
1
2
3
4
5
etc, tout est en ligne.

Marie a écrit:

Ah, la magnifique Hélène Grimaud... Et Rachmaninov!
Pour la Chaconne de la Partita en ré mineur de Bach, il faut s'adresser à un spécialiste, eXPie!
Et écouter ces transcriptions : Brahms, Busoni et Rudolf Lutz.




ici

J'avais cet album mais l'interprétation la Chaconne (version Busoni) manque un peu de relief par rapport à celle d'Hélène grimaud ou de Fazil Say par exemple. Plus modeste? Moins "théâtrale"?

Marie a écrit:

C'est de saison..
L'Oratorio de Noël de Jean Sébastien Bach

Pour ceux qui ont la chaîne Mezzo on peut l'enregistrer ce soir à 20h30 (par Gardiner)

Marie a écrit:

C'est de saison..
L'Oratorio de Noël de Jean Sébastien Bach
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4
5
etc, tout est en ligne.

On ne risque pas de s'en lasser...Merci Marie de ces liens!...

Marko a écrit:

Marie a écrit:

C'est de saison..
L'Oratorio de Noël de Jean Sébastien Bach

Pour ceux qui ont la chaîne Mezzo on peut l'enregistrer ce soir à 20h30 (par Gardiner)

Il faudrait que j'y pense! Merci!
Et merci Marie; cette musique me rappelle beaucoup de souvenirs hivernaux

Pas mis en valeur par ce moyen de partage, mais très grand
Terry Riley - "Persian Surgery Dervishes" (1971)