Charles Ferdinand Ramuz [Suisse]

animal a écrit:

aaah c'est intéressant ça. pour l'écart de langue je crois que ça ne m'a pas frappé, par contre pour cet écart avec les romans de montagne et la gêne qu'apparemment ça peu provoquer... et "la plus libre expression", et les bords du lac... tu en as lu d'autres "d'en bas" des Ramuz ?

Non, c'est le problème, c'est le premier d'en bas... je ne m'y attendais pas. Il y a l'eau, le lac, oui, mais c'est horizontal. J'espérais le monde vertical dont je raffole. Mais comme toi, je veux continuer ma lecture des oeuvres de Ramuz et tout lire.
 
Ce roman a quand même un titre extraordinaire, plus beau encore que l'illustre "usage du monde" de Nicolas Bouvier!

Cachemire a écrit:

animal a écrit:

J'espérais le monde vertical dont je raffole. Mais comme toi, je veux continuer ma lecture des oeuvres de Ramuz et tout lire.
 
Ce roman a quand même un titre extraordinaire, plus beau encore que l'illustre "usage du monde" de Nicolas Bouvier!

Je comprends tout à fait ce que tu recherches Cachemire car je suis aussi attirée par les cimes .  
Quant au titre , il est effectivement superbe .
Tout cela me rappelle que je veux continuer avec Ramuz !  

Le Passage du poète serait peut-être un intermédiaire ? ou tomber sur La guérison des maladies... (on peut toujours rêver une réédition).

On peut imaginer que ce monde d'en bas est plus proche de son "vrai" monde, la manière de l'aborder en serait forcément plus tumultueuse ? (l'article en lien à la page précédente est pas mal, si pas déjà lu...)

Rien que le début du livre (L'amour du monde) est à la fois fascinant et glaçant.

églantine a écrit:

Je comprends tout à fait ce que tu recherches Cachemire car je suis aussi attirée par les cimes .  
Quant au titre , il est effectivement superbe .
Tout cela me rappelle que je veux continuer avec Ramuz !

Toi, grande chanceuse, tu les as sous la main les cimes, mais moi, il me faut bien, quand je ne suis pas en vacances, essayer de les retrouver aussi dans les livres!

Cachemire a écrit:

églantine a écrit:

Je comprends tout à fait ce que tu recherches Cachemire car je suis aussi attirée par les cimes .  
Quant au titre , il est effectivement superbe .
Tout cela me rappelle que je veux continuer avec Ramuz !

Toi, grande chanceuse, tu les as sous la main les cimes, mais moi, il me faut bien, quand je ne suis pas en vacances, essayer de les retrouver aussi dans les livres!

   
Oui ...et je sais apprécier .... 

animal a écrit:

Le Passage du poète serait peut-être un intermédiaire ? ou tomber sur La guérison des maladies... (on peut toujours rêver une réédition).

On peut imaginer que ce monde d'en bas est plus proche de son "vrai" monde, la manière de l'aborder en serait forcément plus tumultueuse ? (l'article en lien à la page précédente est pas mal, si pas déjà lu...)

Rien que le début du livre (L'amour du monde) est à la fois fascinant et glaçant.

"le passage du poète" est justement le prochain que je veux lire!
Tu as raison pour le monde d'en bas, c'est là son vécu, son univers, donc plus d'affectivité dans sa manière de l'écrire.
Pas seulement le début est fascinant et glacant... la fin aussi.

Cachemire a écrit:

animal a écrit:

Le Passage du poète serait peut-être un intermédiaire ? ou tomber sur La guérison des maladies... (on peut toujours rêver une réédition).

On peut imaginer que ce monde d'en bas est plus proche de son "vrai" monde, la manière de l'aborder en serait forcément plus tumultueuse ? (l'article en lien à la page précédente est pas mal, si pas déjà lu...)

Rien que le début du livre (L'amour du monde) est à la fois fascinant et glaçant.

"le passage du poète" est justement le prochain que je veux lire!
Tu as raison pour le monde d'en bas, c'est là son vécu, son univers, donc plus d'affectivité dans sa manière de l'écrire.
Pas seulement le début est fascinant et glacant... la fin aussi.

Vous vous concertez, décidemment, pour qu'on finisse par relire Ramuz...

D'après ce que j'ai pu lire jusqu'à présent, son univers a en effet l'air de se concentrer plutôt sur les rives du lac, et les gens auxquels il semble vouer le plus d'intérêt et de respect, bien plus qu'aux montagnards, paysans, pêcheurs et citadins, ce sont les vignerons qui exploitent les coteaux surplombant ce lac. Cela m'a frappée dans Le passage du poète et aussi dans Salutation paysanne, sur lequel je ferai un commentaire.

Bon j'ai fini il y a peu "Les circonstances de la vie". J'arrive pas à en parler sans balancer l'histoire... :/



Mais comme j'ai trouvé le livre très bien et qu'il y a peut-être des amateurs de Ramuz qui ne l'ont pas encore lu ici et qu'en plus il est plus volumineux que Aline... Ben j'vais pas dire grand chose. Ramuz laisse le ton poétique d'Aline pour aller vers quelque chose de très ancré dans la géographie du bord de lac et sa "réalité", une première partie dans une petite ville au nom fictif d'Arsens mais qui est selon les notes de l'éditeur la réplique d'Aubonne,  et la seconde partie se passe dans la "grande ville" de Lausanne. Deux parties qui se font face, par le lieu et par les  femmes que côtoie le personnage principal, Emile, qu'on découvre dans le premier chapitre jeune notaire prêt à se marier à Hélène, jeune femme issue d'une famille bourgeoise d'Arsens (dont il ne reste que la mère), pas vraiment aguichante et pas trop marrante non plus, mais Émile est un peu mou du genou alors il aurait bien passé sa vie avec, même si parfois il s'avoue à lui-même qu'Hélène, elle est peut être pas pour lui. Le mariage se fera et se passera bien. Et puis y'a Frieda, sorte de jeune fille au pair, belle femme, sûre d'elle, provocante et qui va retourner [...]

Et voilà ça recommence !! je raconte (un peu) l'histoire. Alors j'arrête. Enfin voilà, pauvre Émile tout de même...

Si les personnages féminins sont caricaturaux et peut-être révélateurs d'une certaine misogynie de l'auteur (puis ça sert le roman quelque part), Le personnage D’Émile est vraiment bien construit je trouve. Un peu sans pitié avec Hélène, mais qui se fait mener par le bout du nez par Frieda. J'ai vraiment aimé la façon dont s'achève le roman.

Et puis au delà de cette description des relations de couple déséquilibrées, une réflexion sur le passé (Arsens) et l'avenir (Lausane où Émile investira dans une petite société d'entrepreneur) d'une Suisse qui mute, qui se modernise, sans tomber dans la facilité rassurante du "c'était mieux avant", mais plutôt comme les forces d'une société (ou pour reprendre le titre, des circonstances de la vie) contre lesquelles on ne peut pas vraiment lutter.

Bref pas mal de choses abordées dans ce roman, de beaux chapitres avec des descriptions précises (notamment lors d'une scène de Fanfare militaire avec Écusson, drapeaux et tout le tintouin), où encore la description d'un voyage en train.

Puis parfois, on retrouve le ton d'Aline sur quelques paragraphes, le regard sensible du poète sur la nature, le lac, les couleurs et ça... c'est tant mieux !

ah un commentaire qui donne envie ! d'autant plus qu'après La claire fontaine de Bosc (que je recommande plus que chaleureusement) et Prochain épisode d'Hubert Aquin, la Suisse semble me poursuivre... je note donc ce titre de Ramuz.

moi aussi je note ! un autre à lire, et ce commentaire m'intrigue.  

Armor-Argoat a écrit:

En regardant les auteurs qu'il te reste à découvrir, j'ai déniché un certain Ramuz. Voilà qui ne va pas échapper à certains parfumés, qui vont se faire un malin plaisir de te convertir.

Me voilà  

Tout d'abord, vous m'excuserez de n'avoir pas lu les 24 pages.

Eh bien donc, je ne le cache pas, c'est grâce à Céline que j'ai pour la première fois entendu parler de Ramuz. Il le citait régulièrement comme une de ses trois influences majeures (les deux autres étant Henri Barbusse et Paul Morand). Apparemment, d'après Céline, Ramuz est un des tout premiers à avoir tenté de faire passer l'oralité dans le langage écrit, et donc, si l'on l'en croit, à avoir confectionné un début de "style émotif". Je ne sais pas ce qu'il en est au juste ?

Je me suis bien sûr renseigné depuis. J'ai pu voir que sa bibliographie était assez importante (ses œuvres complètes en je ne sais combien de volumes). Et puis aussi, je n'ai à ce jour lu que des commentaires positifs. Je ne sais pas, j'ai comme l'impression qu'il fait partie de ces auteurs qu'il est impossible de ne pas aimer, qui a depuis toujours fait l'unanimité auprès d'un public même "confidentiel".

Je n'ai cependant lu que des impressions générales et ne sais pas au juste de quoi parlent ses livres. Comme ça, en deux mots, ça me laisse à penser qu'il y a chez lui un amour du sol. Je vois Ramuz comme une sorte de barde de la nature possédant un certain don lyrique... mais pas bavard, plutôt la nostalgie d'un paysage fantasmé évoqué doucement... par touches... (sans doute son rapport à la terre est-il différent de celui de Giono première période, mais peut-être y a-t-il des passerelles entre les deux ?) avec une plume un brin émotive, pleine de coloris, un peu fiévreuse (mais pas trop) et un petit quelque chose en sus "d'émotif" qui a dû tant plaire à Céline. Je vois dans ses récits des histoires d'amours tendres de petites gens, pourquoi pas aériennes et contemplatives, et quelques âmes tourmentées aussi (pardi pas des grands délires dostoïevskiens, plutôt des moments de solitude d'âmes meurtries résignées), le tout dans un univers intime ayant pour cadre un décor de rêve...

Mais peut-être que je dis n’importe quoi.
Je me fais des films, je crois.
En tout cas, s'il y a du Maria Chapdelaine chez lui, franchement ça me va.

Sinon certains titres me paraissent vraiment un peu étranges... d'autres magnifiques.
Je pense commencer avec celui qui visiblement revient le plus souvent : La grande peur dans la montagne. Est-ce le bon choix ?
L'amour du monde et La beauté sur la terre m'intriguent beaucoup aussi.

Bon donc en gros, je fantasme à mort sur cet écrivain énigmatique ; tellement que j'ai peur de déchanter... Je croise les doigts.
Voilà voilà. Je crois avoir tout dit.
Si vous avez des conseils, pistes, etc. je suis bien sûr preneur.

Il doit bien y avoir moyen d'être critique avec Ramuz, avec certains tics ou d'autres choses. cependant c'est vrai qu'en plus de sa phénoménale puissance d'évocation tellurique ou terrienne il y a un drôle de monde. Très pictural et dynamique, ses paysages se découvrent, s'imposent ou se transforment, et par là il est encore très moderne (ça va de pair avec son usage particulier de la langue, autant oralisante que rythmique), il n'a pourtant de cesse de revenir à l'infime simplicité une sorte de drame sans âge.

... et bien ancré, et confronté, à son temps. Son acte d'écriture, minutieux, n'est pas gratuit et appelle volontiers de parfois très sombre transcendances. La lumière venant de l'acte de dire la beauté (de façon schématique).

J'aurais du mal à conseiller La grande peur dans la montagne comme première lecture mais pourquoi pas, je dois toujours le relire, il incarne probablement assez justement quelques unes des particularités de cet univers, non des moindres la grisante impression d'hallucination collective. 

Le rapport au pays (pas tout à fait le sien) également, la volonté de démarcation sans doute.

Bonne découverte en tout cas !


Maria Chapdelaine ? Jack-Hubert ???

Merci pour ton mot !

animal a écrit:

J'aurais du mal à conseiller La grande peur dans la montagne comme première lecture mais pourquoi pas, je dois toujours le relire, il incarne probablement assez justement quelques unes des particularités de cet univers, non des moindres la grisante impression d'hallucination collective.

Voilà qui me met l'eau à la bouche... 

animal a écrit:

Maria Chapdelaine ? Jack-Hubert ???

Mais encore ?

ça devient une sorte de réflexe d'associer Québec et Jack-Hubert ("notre" Jack-Hubert Bukowski) à force.   

pour achever la parenthèse il faut reconnaitre qu'on a rarement l'occasion de lire des auteurs de cette partie du monde, pourtant après le Prochain épisode de Hubert Aquin ça a un gout de reviens-y. Prochain épisode avec références à Ramuz d'ailleurs...