Colum McCann

Coline, j'ai mis Zoli en cerclage. Aériale est première sur la liste, veux-tu être la deuxième ?

Zoli-

Alors, je l'ai lu ce fameux roman dont vous parliez tant et comment dire... je suis partagée! Il a quelque chose d'attachant et de prenant, sans doute en partie parce qu'il s'inspire de la vie réelle de cette poétesse Rom (Papucza) et que Colum Mac Cann sait bien nous retranscrire ce monde méconnu et très souvent rejeté des Tsiganes.

Le ton est sincère, poétique. Il y a comme une petite chanson mélancolique et très particulière qui se dégage de ces pages.
En même temps Mac Cann s'attaque là à un pavé de l'histoire. On suit les pas de Zoli à travers différents pays, de l 'Eupope de l'Est à la France et l'Italie, sur une longue période, chargée en évènements, et selon des voix diverses. Mais certaines choses restent dans le flou ou sont effleurées.(l'holocauste, la part réservée à ces nomades durant la 2ème guerre ) Ce qui fait peut-être dire à Sentinelle qu "'il y manque quelque chose" , et surtout on ne saisit pas toujours la motivation des personnages, ils ne sont décrits que de l'extérieur (surtout Swann ou Enrico mais même Zoli)
Alors on finit par trouver le temps long parfois. Il m'a semblé que l'intrigue s'essouflait au milieu du récit, pour reprendre vers la fin (lorsque Zoli se pose enfin, paradoxalement)

Dommage car l'ensemble m'a plu tout de même...
Cette histoire nous fait réfléchir sur la notion de différence, sur l'exil de certains peuples, et sur la part importante que l'humain projette sur cette notion d'appartenance. Tout comme Zoli qui tiraillée entre entre deux cultures , deux univers opposés , et bannie par les siens ne se sentira finalement jamais bien nulle part. Elle restera la petite fille de Stanislaus et son passé sera son seul point de ralliement, son monde elle le transportera en elle, et il restera unique. Elle sera toujours une exilée.

En conclusion, je vais faire une autre tentative sur l'auteur, car il a une "voix" particulière qui accroche , c'est certain!
Merci pour la découverte Sentinelle

aériale a écrit:

Mais certaines choses restent dans le flou ou sont effleurées.(l'holocauste, la part réservée à ces nomades durant la 2ème guerre ) Ce qui fait peut-être dire à Sentinelle qu "'il y manque quelque chose" , et surtout on ne saisit pas toujours la motivation des personnages, ils ne sont décrits que de l'extérieur (surtout Swann ou Enrico mais même Zoli)
Alors on finit par trouver le temps long parfois. Il m'a semblé que l'intrigue s'essouflait au milieu du récit, pour reprendre vers la fin (lorsque Zoli se pose enfin, paradoxalement)

J'ai retrouvé également ces longueurs au 3/4 du roman... avec une belle reprise vers la fin.
C'est pourquoi Zoli ne m'avait pas autant enthousiasmée que son roman précédent Danseur. Les personnages secondaires manquent d'épaisseurs, c'est dommage.
Mais Zoli est un roman qui m'accompagne encore, il ne se fait donc pas facilement oublié

Zoli

J'abandonne...
J'ai lu presque la moitié et je ne me sens pas du tout accrochée par cette histoire... qui aurait tout pourtant pour être intéressante ...
Ce livre n'est pas pour moi...

Comme vous, j'ai senti mon intérêt fléchir à un moment (celui de la "surmédiatisation" de Zoli et de la fameuse trahison). Mais comme tu le dis, Sentinelle, le roman reprend bien ensuite, avec l'épopée solitaire de Zoli et l'aboutissement de sa route.

Mais dans l'ensemble j'ai aimé ce roman qui est une ode à la liberté perdue.
Liberté ancestrale du peuple tsigane qui ne connaissait pas de frontières et qui sera parqué par le régime communiste slovaque dans les cités de banlieue. Avec ce passage où les roues de leurs roulottes sont arrachées puis brûlées dans d'immenses autodafés, lignes d'une force poétique et symbolique étonnantes.
Et surtout liberté originelle du verbe, de la poésie, qui perdent de leur sens et de leur vie en se retrouvant imprimés, emprisonnés dans des livres et distribués à des milliers d'exemplaires. Constat troublant de la part d'un romancier à succès comme McCann, d'ailleurs.

En bref un roman un peu inégal : construction qui s'effiloche un peu, mais contenu fort et marquant.

Nezumi a écrit:

Mais dans l'ensemble j'ai aimé ce roman qui est une ode à la liberté perdue.
....
En bref un roman un peu inégal : construction qui s'effiloche un peu, mais contenu fort et marquant.

Oui, tu en parles bien Nezumi. D'accord avec toi aussi !

ZOLI

Zoli est une jeune Tzigane, survivante d'un massacre perpétré par une milice sur les siens. Son grand-père et elle en ont réchappé...ainsi s'annonce ce qui ravagera l'Europe centrale quelques années plus tard.
Zoli a le goût du chant, des poèmes, elle a le talent d'interprétation et de création, elle est vive et intelligente et surtout, elle a un grand-père qui sait lire et écrire et qui l'envoie à l'école. Malgré les brimades, les moqueries qui ne feront qu'aiguiser son caractère, Zoli s'épanouira dans la splendeur de la poésie de son peuple, des sons étranges et séduisants des harpes dans le vent du voyage en roulotte. Zoli fait partie d'un peuple de musiciens et de chanteurs, elle reprend les chansons traditionnelles et peu à peu se lance dans la création littéraire orale, simplement pour le plaisir de la musicalité des mots, de leur liberté et de leur sensualité.
Elle sera repérée par Martin Stransky, poète communiste, qui essaiera d'en faire l'icône des poètes tchèques, elle, Zoli, la Tzigane poétesse. Elle rencontre aussi Stephen Swann, Anglais exilé volontaire, traducteur fasciné par le bouillonnement culturel de cette Europe communiste d'après-guerre. Des bandes et des bandes sont enregistrées, des manifestations culturelles organisées, portant Zoli vers la célébrité et la reconnaissance artistique. Stephen Swann, amoureux éperdu et fou de Zoli, ne pourra la garder dans ses bras: elle est libre comme le vent, comme les vents qui ont porté les pas de son peuple à travers l'Europe. La fougue, l'audace de Zoli marquera son destin au fer rouge du malheur. Zoli est Tzigane et femme: en étant publiée, elle devient hors-la-loi aux yeux des siens. Malgré ses protestations, Swann imprimera ses textes et les conséquences pour Zoli seront terribles: le bannissement, son effacement de la mémoire collective, son errance solitaire, polluée à jamais.
A travers le parcours de Zoli, c'est le destin d'un peuple de nomades qui se déroule sous les yeux du lecteur: de la liberté d'aller où bon leur semble à la mise en place de "La Grande Halte", la fin du primitivisme grâce au socialisme, la fin de l'archaïsme et le début d'une ère de sédentatrisation dans des immeubles que jamais les kumpanias (les familles) ne pourront comprendre ni y vivre sans perdre leur âme.
Zoli part loin à l'Ouest, vers Paris, bravant les barbelés, le froid, la crasse et la faim. Vienne, terre occidentale, dernière station avant les Alpes italiennes...un souffle de liberté qui la portera dans les montagnes jusqu'au jour où le passé ressurgira à un moment inattendu.
Un roman mettant en scène un peuple trop souvent oublié, laissé pour compte: les Tziganes, les nomades qui ne connaissaient pas de frontières ni d'entraves. Un peuple de l'oralité, du verbe, des sons, qui regarde de loin les gadzés qui s'enmêlent et se ficellent avec l'écrit et la sédentarité. le vent de l'Histoire balaie l'épopée nomade au nom d'un progrès qui dévaste plus qu'il ne construit, réduisant presque à néant une culture, celle des routes et des vents. Un roman autour d'une femme moderne, rebelle qui ira jusqu'au bout de sa passion et sa douleur: elle gagnera sa liberté tout en intégrant, au plus profond d'elle-même, la honte d'avoir trahi les siens, prison invisible et ô combien lourde à porter.
Les narrateurs se succèdent tout comme les points de vue, le temps et l'espace, ce qui peut contribuer à rendre confuse la lecture. Est-ce un chef d'oeuvre? Je ne suis pas critique littéraire connu et reconnu mais ce roman m'a fait passer un excellent moment de lecture: j'ai pris le temps de m'imprégner de l'atmosphère fascinante de cette Europe Centrale riche en cultures et romanesque en diable.

Merci encore sentinelle pour cette très agréable découverte

Bonjour Chatperlipopette,
Depuis que j’ai lu La Vierge et le Gitan, livre final de D. H. Lawrence, je cherche un bon roman sur le peuple tzigane… Grâce à toi, je crois l’avoir trouvé! Ton jolie commentaire a pincé ma curiosité.

contente d'avoir titillé ta curiosité! J'espère que tu le liras bientôt.

A mon tour, je viens de terminer ZOLI, et j'ai vraiment apprécié ce roman, surtout les passages, les plus nombreux, où l'on entend la voix de Zoli qui raconte son passé de tzigane à sa fille, les persécutions, la vie âpre en communauté et en plein air, appréhendée par les cinq sens, l'émergence de son talent de chanteuse et de poétesse, sa fuite vers l'Ouest et sa vision des "gadze", enfermés dans leur confort et leurs préjugés : "A condition d'y mettre le sucre et les larmes, on leur ferait avaler n'importe quoi. Ils s'en pourlèchent et, dans leur bouche, le sucre et les larmes font une pâte qu'ils appellent compassion."

J'ai moins apprécié les autres passages, notamment ceux où sont évoqués, avec le régime communiste, les personnages de Stransky, un écrivain communiste et de Stephen Swann, le journaliste irlandais épris de Zoli : ils inspirent manifestement moins l'auteur que son héroïne, le style devient plus convenu, plus ...pesant.

Restent les passages parfois lyriques d'une vie libre, les refus à la fois matériels et symboliques de tout enfermement et de tout mensonge, le désir éperdu de vivre selon sa nature, un style souvent poétique et d'une grande sensualité :"(...) elle se rend compte en lisant les panneaux que la frontière hongroise est derrière elle. Elle s'était attendue à de grands tortillons de barbelés, (...) mais peut-être n'était-ce qu'une haie (...). Ou encore un ruisseau, traversé à gué dans la forêt enneigée, sous les noires révérences des arbres. (...) Elle sait que la prochaine démarcation, entre Est et Ouest, se présentera dans quelques jours à peine, il lui vient à l'esprit en marchant que, si l'on accorde autant d'importance aux frontières, comme à la haine, c'est précisément parce qu'elles disparaîtraient si on ne le faisait pas."

Que dire sur Zoli.

J'ai beaucoup apprécié mais étrangement je n'ai ressenti aucune hâte à avancer dans ma lecture (qui s'est étalée sur passablement de temps). Un peu long donc peut-être mais l'intérêt fut presque toujours là. Ce texte nous pousse à réfléchir sur la simple humanité, les rapports entre les êtres.
Une lecture enrichissante de connaissances sur les Roms et peut-être aussi d'un peu plus de coeur.
Je vais passer à un livre qui attend son tour mais entamerai , je pense, juste après Danseur, car pour moi cet auteur a des choses à dire.

monilet a écrit:

Je vais passer à un livre qui attend son tour mais entamerai , je pense, juste après Danseur, car pour moi cet auteur a des choses à dire.

tu vas te retrouver avec tout à fait autre chose - mais tellement plus beau (à mon avis) et j'espère que tu vas avoir un bon moment de lecture

J'ai lu plus d'un tiers de Danseur. Jusque là je ne le trouve pas supérieur à "Zoli".

monilet a écrit:

J'ai lu plus d'un tiers de Danseur. Jusque là je ne le trouve pas supérieur à "Zoli".

et bien.. différents lecteurs.. différents avis

Danseur page 240/360 : j'abandonne. M'emballe pas.