Coup de coeur et bar de la poésie

The Road Not Taken

Two roads diverged in a yellow wood,
And sorry I could not travel both
And be one traveler, long I stood
And looked down one as far as I could
To where it bent in the undergrowth;

Then took the other, as just as fair,
And having perhaps the better claim
Because it was grassy and wanted wear,
Though as for that the passing there
Had worn them really about the same,

And both that morning equally lay
In leaves no step had trodden black.
Oh, I marked the first for another day!
Yet knowing how way leads on to way
I doubted if I should ever come back.

I shall be telling this with a sigh
Somewhere ages and ages hence:
Two roads diverged in a wood, and I,
I took the one less traveled by,
And that has made all the difference.

Robert Frost


Pour ce grand poète américain : "Poetry is what gets lost in translation", mais en voici une:

La Route Non Prise

Deux routes divergeaient dans un bois jaune
Et, désolé de ne pas pouvoir prendre les deux
Et n’être qu’un seul voyageur, je suis resté longtemps
À regarder l’une des deux aussi loin que je ne le pouvais
Jusqu’au point où son virage se perdait dans les broussailles ;

Alors j’ai pris l’autre, tout aussi séduisante
Et peut-être encore plus justifiée
Parce que herbeuse et manquant quelque peu d’usure
Bien que, franchement, les passages
Les aient usées à peu près de façon identique

Et toutes les deux se reposaient, ce matin-là
Sous des feuilles qu’aucun pied n’avait noircies.
Ah, j’ai gardé l’autre pour un autre jour !
Sachant, pourtant, comment un chemin nous mène à l’autre,
Je doutais que jamais je n’y revienne de nouveau.

Un jour je me trouverai à raconter en soupirant
Quelque part dans un lointain avenir que
Deux routes divergeaient dans un bois, et moi,
J’ai pris celle par laquelle on voyage le moins souvent,
Et que c’est cela qui a tout changé.

(traduction de Roger Asselineau)

Merci, Nezumi, celle-là c´est bien l´une de mes préférées. Sans doûte ma manière de voir la vie, aussi.

Ce n'est pas loin d'être la mienne aussi.

Nezumi: Est-ce pareil pour toi: à force d´être attirée par les sentiers abandonnés ou qui ne mènent officiellement nulle part, dans la campagne , ou dans la ville je me retrouve souvent dans les décharges publiques, terrains vagues et autres lieux innommables.
Mais là aussi il peut y avoir de la poésie.
"Les escaliers de Chambord" reposent d´ailleurs sur cette petite barrette d´enfant bleue, trouvée dans un dépotoir au milieu d´autres détritus.
Continuons!

Oui, continuons!
Je suis férue de marche, et j'adore surtout me balader au hasard et découvrir des endroits inexplorés, en ville ou en campagne. c'est pour cela que le poème de Frost, entre autres, m'a toujours parlé.
Quand je vois un sentier/ruelle/venelle qui part sur le côté, je ressens une attraction irrésistible...Et oui, bien souvent ça mène à des endroits sauvages ou délabrés, qui filent parfois les chocottes ...mais comme tu le dis si bien, la poésie de l'insolite est souvent là. A Nantes j'aime surtout les endroits où le vieux patrimoine industriel à moitié abandonné se mêle aux avancées de la campagne, Julien Gracq décrit ces no-man lands dans La forme d'une ville.

Tiens! Un écho du disque de Rautavaara qui s'inspire de ses poèmes... J'ai eu du mal à trouver des recueils de ses textes et j'ai du me rabattre sur une traduction anglaise. Tu as un exemplaire de ses poèmes?

Je l' ai copié sur Internet pour moi et sans noter où...

Je crois me souvenir que c' était une révoltée et que malgré sa courte vie elle est très estimée
en Finlande, mais qu' elle est très peu traduite en français...
Je vais rechercher...

D'après Wikipedia on doit au moins pouvoir trouver: Le Pays qui n'est pas. Traduction de Carl Gustaf Bjurström et Lucie Albertini. Paris?: La Différence, 1992. C'est celui dont j'avais mis la couverture sur le fil piano bar récemment.

A deux heures du matin : clair de lune, le train s' immobilise
au milieu de la plaine. Au loin, les points de lumière d' une ville
qui scintillent froidement aux confins du regard.

C' est comme quand un homme va si loin dans le reve
qu' il n'arrive à se souvenir qu' il y a demeuré
lorque' il retourne dans sa chambre.

Et comme quelqu' un qui va si loin dans sa maladie
que l' essence des jours se mue en étincelles, essaim
insignifiant et froid aux confins du regard.

Le train est parfaitement immobile.
Deux heures : un clair de lune intense.
Et de rares étoiles.

Tomas Transtromer, Baltiques

Transtromer est un poète suédois né en 1931

Bientot en exclusivité sur ce forum :

Prose du Transibérien et de la petite Jeanne de France de Blaise Cendrars !