Coup de coeur et bar de la poésie

bix229 a écrit:

Oui, Supervielle est un poète sensible et mélancolique... à la limite de la mièvrerie mais sans jamais y tomber...

C'est peut-être ça qui est intéressant justement !

colimasson a écrit:

bix229 a écrit:

Oui, Supervielle est un poète sensible et mélancolique... à la limite de la mièvrerie mais sans jamais y tomber...

C'est peut-être ça qui est intéressant justement !

Oui, le ton et le mot justes...

j'avais un peu de retard à lire vos messages, merci pour ces poèmes !

j'aime particulièrement celui-ci "Le Temps"

Je remets ici ces deux poèmes de Delmira Augustini :


Debout sur mon orgueil

Debout sur mon orgueil je veux montrer au soir
L'envers de mon manteau endeuillé de tes charmes,
Son mouchoir infini, son mouchoir noir et noir,
Trait à trait, doucement, boira toutes mes larmes.

Il donne des lys blancs à mes roses de flamme
Et des bandeaux de calme à mon front délirant...
Que le soir sera bon.. Il aura pour moi l'âme
Claire et le corps profond d'un magnifique amant.


Mes amours

Ils sont venus aujourd’hui.
Par tous les sentiers de la nuit, ils sont venus
Pleurer autour de mon lit.
Ils étaient tant, ils sont tant.
Je ne sais ceux qui vivent, je ne sais qui est mort.
Je pleurerai sur mon sort pour mieux les pleurer tous.
La nuit avale les sanglots comme un mouchoir noir.
Il y a des têtes dorées et mûries au soleil.
Il y a des têtes cernées d’ombre.
Des têtes couronnées d’épines,
Des têtes qui s’inclinent au-dessus de l’abîme,
Des têtes qui voudraient reposer sur le ciel.
Certaines ont du mal à respirer,
D’autres percent comme des timides fleurs d’hiver.
Toutes ces têtes me font mal comme des plaies.
Me font mal comme des morts.
Leurs yeux, ils me sont encore plus douloureux,
Ils sont doubles.
Indéfinis, verts, gris, bleus, noirs.
Ils transpercent. Ils caressent.
Constellation de l’enfer.
À leur lumière
Mon âme s’éclaire, mon corps se réveille.
J’ai soif de toutes ces bouches
Qui envahissent mon lit.
De toutes ces bouches où je pourrais aspirer la mort.
Et leurs mains,
Leurs caresses,
Elles se penchent sur mon lit.
Entre toutes les mains c’est ta main que j’ai cherchée
Ta bouche entre toutes les bouches,
Ton corps entre tous les corps ;
Je ne veux que tes yeux entre tous ces regards
Toi, tu es le plus triste, le plus aimé,
Venu de plus loin, tu es arrivé le premier.
Ta tête sombre que je n’ai jamais touchée,
Ton regard si longtemps attendu.
Viens à moi âme à âme.
Viens à moi corps à corps.
Tu me diras ce que tu as fait de mon premier soupir.
Tu me diras ce que tu as fait du désir d’un baiser.
Tu me diras si je t’ai manqué.
Tu me diras si tu n’es plus.
Si tu es mort,
Le chagrin envahira mes draps.
Je serrerai ton ombre contre moi
Jusqu’à ce que mon corps se disloque.

Merci pour cette découverte ...

Je n'ai hélas pas trouvé de traductions des poèmes de Delmira Augustini.
Le film de Christine Laurent " Demain", reflète-t-il fidèlement la courte existence que vécut cette poétesse ?

Malheureusement il semble qu'on ne trouve pas de poèmes en français.

Etant donné que j'ai découvert Delmira Augustini, avec le film, j'aurais du mal à dire à quel point le film est le reflét fidèle de sa vie. Des recherches sur internet ont confirmé un certain nombre de faits relatés dans le film. Le site où j'ai trouvé le plus d'info c'est ici .

Merci pour le lien, Arabella ...

De fait, après lecture des poèmes que tu avais placés, j'étais allée fouiner sur le Net, et je n'avais trouvé que ce lien, hors un autre lien présentant le film, et la genèse de celui-ci.

un peu de baseball, format image pour garder la mise en page, et la désinvolture de Paul Blackburn :

Un poème d'un Chinois du VIIIem siècle, Li Bai :

Fait après avoir cherché en vain un bonze des montagnes

La sente en pierre entre au val vermillon ;
Sa porte en pin de lichen bleu se couvre.
Des pas d’oiseaux marquent l’oisif perron ;
Dans la maison de Chan personne n’ouvre.

Par la fenêtre on voit un plumeau blanc ;
Il pend au mur, plein de poussière et de poudre.
Cela me fait soupirer, vainement ;
Je veux partir, ne peux m’y résoudre.

Les monts, d’encens en nuage, couverts,
Du ciel voici venir des fleurs de pluie.
Si dans le vide existe des concerts,
S’entend plus sûr un gibbon bleu qu crie !

Vraiment je romps les liens de l’univers ;
Combien alors cette terre m’ennuie !

animal a écrit:

un peu de baseball, format image pour garder la mise en page, et la désinvolture de Paul Blackburn :

ah le rêve.. partir en voyage en Amérique et pouvoir assister à un jeu de baseball

Un petit poème pour la nuit ...

L' ALLEE

Ne touchez pas l' épaule

Du cavalier qui passe !

Il se retournerait

Et ce serait la nuit,

Une nuit sans étoile,

Sans courbe ni nuage.

- Que deviendrait alors,

Tout ce qui fait le ciel,

La lune et son passage

Et le bruit du soleil ?

- Il vous faudrait attendre

Qu' un second cavalier

Aussi puissant que l' autre

Consentit à passer.

Jules Supervielle : Anthologie de la poésie française. Op déjà cité