Coup de coeur et bar de la poésie

bix229 a écrit:

La Folle (Edmond-Henri Crisinel / 1897~1948)

Elle a les cheveux blancs, très blancs. Elle est jolie

Encore, dans sa ro

le a les cheveux blancs, très blancs. Elle est jolie

Encore, dans sa robe aux chiffons de couleur.

 

Elle emporte, en passant, des branches qu’elle oublie :

Les jardins sont absents et morte est la douleur.

 

Elle a des yeux d’enfant qui reflètent les jours,

Eau transparente où passe et repasse une fuite.

 

Sa sagesse est donnée avec des mots sans suite,

Des mots divins qui vont mourir dans le vent lourd.

 

(Le veilleur, éditions des Trois collines, 1939)

 

Edmond-Henri  Crisinel est un grand poèle. L' un des meilleurs de son époque. Homosexuel
à une époque et un pays où c' était très mal vécu, il a très peu écrit et s' est suicidé à 50 ans.
maudits.unblog.fr

Bien souvent, l'herbe n'est pas plus verte ailleurs, Bix.

Edmond Henri Crisinel : ICI

Très beau choix, bix. J´ai aussi " Mi sombra" mais seulement en espagnol:

MI SOMBRA:
Ya estoy fastidiado de arrastrarla,

desde que nací, en la punta de mis pies.

Ya es hora de que vivamos en el mundo,

ella su vida

y yo la mía.
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et puis celle sur la liberté:

« Cap sur la Liberté » :


« Mais qu’est-ce que tu attends ?

Jette-toi à la mer.

Tu vas manquer à quelqu’un ? Peu importe.

Ne vois-tu pas la liberté de tous côtés ?

Sois voile, sois rame, sois gouvernail, sois poisson, sois eau,

Va jusqu’où tu pourras. »

Swallow, Nazim Hikmet est un grand poète. Mais il a fait de l' ombre à d' autres poètes turcs. Et
notamment à Orhan Veli.

A noter que les poètes turcs semblent bien s' accommoder de la traduction. Peut etre parce qu' ils
sont plus proches d' une langue populaire...

De l´ombre? mais tu dois vouloir dire pour des raisons politiques Bix. Donc circonstanciel.
Sinon, dans d´autres domaines, on remarque partout cette ombre, ce maintien en retrait d´un auteur au détriment d´un autre.
Le domaine pictural étant celui qui m´interesse le plus, imagine "le tort" que causent les Impressionnistes ( queue dans les expos, donc recettes assurées de billeterie, publications, ouvrages, reproductions,etc), avec cet engouement actuel pour cette catégorie de peinture. Ils ont le monopole actuellement.

Je veux dire en effet que Hikmet a été connu tot pour son engagement politique d' abord, ses séjours en prison et ses multiples liaisons amoureuses.
Et dans ses années-là, les auteurs turcs étaient peu -ou pas- connus. Les poètes encore moins...

Deux poèmes sur la thématique du 11 septembre, l'un de Louise Dupré et l'autre de Gaston Tremblay :

Citation :

«La langue dernière»

La fin du monde arrive
le matin parfois
à l'heure où tu cherches

une phrase
capable de soulager
la terreur des mourants

Il doit bien y avoir
une façon d'approcher
la langue dernière

sans qu'elle se fracasse
sous le choc

telle une destinée
trop lourde
pour une seule femme

Tu n'imagines l'avenir
que figé dans ses rites
de messe noire

et ses coulées d'encre
sur les drapeaux

Et tu te vois tourner
tourner en rond
dans la pauvreté de ta bouche

Louise Dupré

Citation :

«La main de Dieu»

Ce soir
À Montréal
Tout est tranquille
Pas un seul aéronef ne traverse le ciel
Pas un seul navire sur le fleuve
Pas une seule locomotive en triage
Le silence est lourd
Et
À New York
Les décombres fument...

Aujourd'hui
Allah est plus fort
Que le très saint Sacré-Coeur de Jésus
Yahvé de Yahvé
Allah Bouddha Allah
Et
Chris de Câlice de Tabarnak

Quand allons-nous apprendre
À mettre Dieu à sa place?

Gaston Tremblay

Encore une fois, je propose quelque chose comme extrait de poésie. Il s'agit d'un poème qui porte sur une méditation de Montréal et qui est tout à fait québécois dans sa conception :

Franz Benjamin et Rodney Saint-Éloi [dir.], Montréal vu par ses poètes, 2006, Montréal : Mémoire d'encrier, p. 50-51. a écrit:

«La ville-neige»

J'ai beau dire
beau faire
je n'en peux mais du faux-semblant
les images se déroulent dans une foire
où nul ne se souvient

Ni d'ici
ni d'ailleurs

Et je répète
que les jeux sont faits
et que l'écart demeure

Mort en moi le passé

Je contemple des ombres
et j'essaie quelques liens
qui toujours se dissolvent

J'essaie
j'essaie
mais rien n'y fait
la vie est là pourtant
plus belle que dans l'île morte
ou dans la ville lointaine

Ici tout m'est plus simple
mais le manque est un non-dit qu'on ne pourra défaire

Peut-être après tout que le point n'existe pas
où trouver l'équilibre

Ni d'ici
ni d'ailleurs

Jamais je n'entrerai dans le grand jeu des masques

J'écris
pour dire le creux
le poids de l'être dans la ville-neige

Seule m'importe aujourd'hui la musique de la phrase
dans la cacophonie du monde

Gary Klang

Ah, la main de Dieu, Jack, prends garde à ses croyants trop zélés !

on peut aussi envisager de parler ouvertement de poésie sur le fil non ?

J'ai comme l'intuition de commencer à comprendre la spécificité de la structure québécoise...

:) Effectivement, il y a tout un univers caché derrière l'arbre qu'on croit voir de la littérature québécoise. La forêt est vaste, même si nous n'avons pas une capitale littéraire de l'ampleur de Paris...

Heuah... Je végète un peu en matière de poésie depuis que j'ai lu la première page de poésie écrite par Denise Desautels dans Un livre de Kafka à la main :

Extrait, p. 29. a écrit:

La main tourne, dessine le contour
des lèvres, puis s'immobilise (elle
se déplace à l'extérieur, et on la
porte à sa bouche, comme une orange,
on se rapproche de son corps; la main
s'attarde entre les lèvres, là où
la mer ou la voix pourrait jaillir et
se répandre infiniment).

Suspendue par distraction ou par
abandon, retenue, oubliée à quelques pas
de l'intuition et du souvenir.

Ce n'était pas la première page, non, mais Denise Desautels commence bien ses sections en force :

Extrait, p. 13. a écrit:

Mon cri traverse l'ombre; et le désordre
atteint la surface où quelqu'un pose
l'oreille, indiscrètement entend le
soulèvement de la vague : fragments de
gestes, de rumeurs, et ma voix enfouie,
affolée, sous les ruines. Après, je ne sais
pas. Ne sais rien. J'imagine une histoire
archéologique qui retrace le désir détourné,
épuisé; qui en provoque l'éclat. Il y aurait
des larmes qu'on y gagnerait en
intensité et en vertige.

On y évoquerait la passion comme
une excuse normale.

Voilà!