Nathanael West

Encore un grand oublié, Nathaniel West.

Né en 19O3 et mort accidentellement en 194O, il a un peu fait tous les métiers comme pas mal d'écrivains américains.
Il a vécu à Paris, a dirigé une revue et a été scénariste à Hollywood.
Et il a compris ce que c'était d'etre juif et américain.

En fait, on peut penser qu'Hollywood lui a servi comme à d'autres (Dashiell Hammett par exemple) de repoussoir dans sa critique de la culture de masse.

Les décors obscènes du monde du cinéma érigent un monde frauduleux face à la misère profonde où s'enfonce l'Amérique de la Dépression.
Et c'est cet univers qu'il dépeindra dans un de ses meilleurs romans : L'incendie de Los Angeles.
Nathaniel West estime que le "reve américain" a été trahi spirituellement et matériellement à cette époque.
En idéaliste déçu, indigné, son oeuvre est une tragi comédie où l'homme n'existe qu'écrasé.
Son réquisitoire est violent et n'épargne rien.

Pourtant, pourtant, derrière l'humour, la dérision et le sarcasme, on voit parfois un malheureux tombé dans le ridicule etre le premier à en rire... Aux larmes. Un peu comme dans les films de Chaplin...
Et aussi et surtout, il y a l'histoire pathétique de ce journaliste qui écrit dans les colonnes d'un journal sous le pseudonyme triste de Miss Lonelyhearts.
Ses efforts pitoyables pour essayer de sauver l'humanité le font tomber
dans une folie étrange, sans qu'il ait meme le courage de se suicider.

Voilà ce Nathaniel West, mort à 37 ans. Oublié, puis réhabilité 2O ans plus tard. Et de nouveau oublié.
Et pourtant tellement original, hors de toutes classifications.

Lisez L'incendie de Los Angeles, vous verrez que je n'ai rien inventé.
Donnez lui donc une autre chance...


Bibliographie

1931 La Vie rêvée de Balso Snell,
1933 Mademoiselle Cœur-Brisé,
1934 Un million tout rond,
1939 L'Incendie de Los Angeles,

je note, en espérant tenté la VO (depuis que je traine ici je lis beaucoup plus de/en français )

si tu t'en ressens de développer un peu sur le rêve américain et sa trahison... ici ou sur le fil de l'amérique ?

Le monde -littéraire- est quand même petit
En faisant des recherches sur cet auteur, je voix que son livre L'incendie de Los Angeles s'appelle en anglais The day of the locust - et c'est un film que j'ai déjà vu plusieures fois - dérangeant.. mais dégageant une atmosphère qui me plait!
(Film -1975- de John Schlesinger avec: Donald Sutherland, Karen Black, Burgess Meredith, William Atherton, Geraldine Page)

Décidement - cet auteur me tente.. et je vais essayer Miss Lonleyhearts (surtout parce qu'il y a dans la version anglaise aussi The day of the locust dans le même livre )

Miss Lonelyhearts

Une part de l'histoire d'un journaliste, qui en réaction à des courriers de lecteurs tente de leur redonner un peu d'espoir au travers d'une colonne plus ou moins personnalisée dans le journal. Ce qui ne devait être un gagne pain permettant un humour distancié se transforme en mission spirituelle pour Miss Lonelyhearts qui refuse de se moquer d'eux et cherche en lui, et en quelque sorte à contrecourant, la compassion nécessaire mais surtout juste. Ce n'est pas facile un peu perdu qu'il est au milieu de ses fréquentations (son patron cynique ou sa petite amie) cherchant chacune à l'emmener dans leur monde ébréché...

ça fonctionne par épisodes avec des titres, Miss Lonelyhearts à la campagne, Le retour de Miss Lonelyhearts... organisation un peu surprenante, écriture franchement incisive qui trouve le moyen d'être à la fois drôle et très noire. Les personnages en prennent plus ou moins tous pour leur grade copieusement mais sans méchanceté. Mais ce que je retiendrai surtout c'est la description de ce Miss Lonelyhearts qui cherche coute que coute, comme une sorte de besoin vital, à être juste avec lui même et les malheureux qui l'entoure, "tout y est", tous les malaises y sont (justification, besoin de se prouver...) dans cette reconquête d'un certain premier degré.

très très bonne lecture. Merci monsieur

On a les lecteurs qu'on mérite, Animal. Je te l'ai déjà dit, tu es un très bon

lecteur. Sur que Nathaniel West est très content de toi !

Et puis, moi aussi j'aime les idéalistes, meme quand ils sont aussi pitoyables

que Miss Lonelyhearts...

je ne lui en demande pas tant, il a fait plus que l'essentiel tout de même

kenavo a écrit:

(surtout parce qu'il y a dans la version anglaise aussi The day of the locust dans le même livre )

c'était un peu la même raison, bien fait pour ma pomme parce que Miss Lonelyhearts comme lecture c'est très largement plus que du bonus, une bonne claque, ou mieux, un coup de poing dans le ventre...

Miss Lonelyhearts

Tout commence déjà avec le titre. Miss Lonelyhearts (Miss cœur solitaire) – on s’imagine une femme qui est seule.. et on retrouve un homme qui s’occupe dans un journal des lettres des gens en quête de réponses à leur petits ou grands problèmes.
Un travail qu’il considère comme de passage, parce qu’en fin de compte, un homme ne devrait pas s’occuper de tels problèmes. Mais même son souhait d’être viré, en donnant le conseil à un de ses personnages de se suicider, n’aboutit pas à un succès – son patron lui conseille seulement de laisser de côté de tels idées nuisibles au chiffre du tirage du journal.
À un moment donné, Miss Lonelyhearts dit, qu’il a l’impression que son cœur va exploser – mais moi, j’avais l’impression que lui-même allait le faire. Il m’a donné l’idée qu’il s’agit ici d’un personnage plus désespéré que tous les personnes qui lui écrivent et qu’il était tout près à se tuer lui-même.

D’après mon livre, cette histoire est parue 1933. Et je dois dire – il n’y a rien de ‘vieillie’ là dedans.. les aspects de la solitude, du désespoir, de se faire une place dans son monde sont toujours d’actualité et le miroir qu’il tient à notre société montre encore aujourd’hui une image d'actualité..

The Day of the Locust
Dans l’édition anglaise, on a regroupé ces deux romans de Nathanael West – les considérant comme ses œuvres majeures.

Puisque je connais le film qu’on a fait sur la base de The Day of the Locust, je ne pouvais pas être ‘surprise’ – mais – j’ai eu quand même un très bon moment de lecture.
D’abord ici il y a la même remarque à faire – paru en 1939, cet écrit n’a rien perdu de sa ‘jeunesse’.
L’histoire de ce livre se déroule à Hollywood et on a droit à une ‘allumeuse’ la plus surexcitée de la littérature
Le sujet éternel – la femme frivole mais éblouissante dans sa beauté, arrive à faire tourner plusieurs hommes autour d’elle – et elle parvient à les rendre dingue, malade, agressif…
Il y a de l’humour, de l’espièglerie, des vérités éternelles et tout cela présenté avec une écriture qui donne plaisir.. plaisir à suivre…

… ce que je vais faire – tout comme Miss Lonelyhearts & Day of the Locust se trouvent dans un livre, A Cool Million & The Dream Life of Balso Snell font de même – et avec ces deux, j’aurais les 4 romans publiés par Nathanael West. Une vrai découverte.. et un grand merci à Bix pour nous avoir parlé de cet ‘oublié’ de la (bonne) littérature (qui peut aussi parfois venir de l’Amérique )

Je viens de consacrer un petit 'voyage' à Nathanael West

Voyages Virtuels

The day of the locust / L'Incendie de Los Angeles

Comme pour Miss Lonelyhearts ça ne va pas être vraiment facile d'en parler...

un résumé a écrit:

Tod est scénariste, peintre, et très oisif. Dans le Los Angeles des années 30, il vivote, traîne beaucoup, rêve un peu. En particulier de Faye, une jeune femme superficielle qui comme beaucoup veut devenir actrice, mais qui n’a que son corps en argument. Celle-ci repousse toujours gentiment ses avances. Sans justification. La frustration gagne Tod, et progresse encore quand à la mort du père de Faye - un comédien VRP, celle-ci s’installe avec Homer, un balourd timide et sans ambition.

source (du résumé)

je dirai plutôt histoires d'une poignée de paum... gens (comme vous et moi) venus mourir en Californie, à Los Angeles, à Hollywood. Comme si par là non plus on ne trouvait pas ses rêves... Lecture pas facile, très noire, pas sans humour mais le noir l'emporte. C'est une promenade en équilibre précaire entre les apparences derrière on les personnages se cachent et parfois leur incapacité à ne pas vouloir se faire du mal. Beaucoup d'observation et tout ce qui va avec, l'écriture est précise et des phrases simples en disent long. La fin est absolument effrayante : narrateur coincé, broyé dans une foule qui résume un peu le concept de "complètement dingue". Besoin de digérer encore.
Toute une histoire aussi de l'amour pour la femme "qui joue", amour qui se transforme en autre chose mais pas seulement.

J'aurais découvert un auteur qui s'y retrouve pour dire plusieurs choses à la fois et bien.

Désolé, je vais avoir beaucoup de mal à faire plus clair (ou moins obscur).

Vous pouvez ajouter un personnage de cow-boy, un mexicain, un nain... une famille d'eskimos ?

Pas surréaliste même dans les promenades au milieu des décors de cinéma.... en quête de points de repères, dans les moments qui font mal je rapprocherai de mes impressions de Tennessee Williams.

Ce que tu écris, Animal est suggestif, et les questions que tu te poses

sont celles qu'on doit se poser, parcequ'elles s'imposent d'elles-memes,

ou parceque l'auteur se les pose et -ou- ne souhaite rien affirmer...

L’incendie de Los Angeles

Nous suivons une galerie de personnages venus à Los Angeles, ou plutôt à Hollywood, mais un Hollywood qui se dérobe, même si certains y travaillent de façon ponctuel (Faye) ou régulière mais dans un emploi subalterne (Tod). Mais c’est le rêve généré par Hollywood qui d’une façon ou une autre les a amené où ils sont. Personnages hétéroclites, paumés de tout genre, ils se retrouvent agrégés ensemble par l’attirance qu’exerce Faye, une aspirante star, mais dont le seul talent semble être un physique qui magnétise et happe les hommes, qui les attire de manière quasi chimique. Et donc tous ces personnages improbables (peintre, nain, cow-boy…..) font connaissance et passent quelques moments ensemble avant que tout n’explose, comme la ville peut exploser à n’importe quel moment ; la scène de folie collective de la fin du roman est vraiment hallucinante.

Un livre vraiment fort et original, qui fait encore plus regretter la mort si précoce de son auteur.

Ben voilà ! Il faut lire aussi Miss Lonely hearts / La demoiselle des coeurs perdus, tout aussi forte
et peut etre encore plus émouvante...

Arabella a écrit:

Un livre vraiment fort et original, qui fait encore plus regretter la mort si précoce de son auteur.

contente de lire que tu as aimé ce livre..

et si tu croise par hasard le film, ne t'en prive pas.. c'est une sublime adaptation qui vaut le détour